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La vie de Sakine Cansiz : «Réaliser des utopies ici et maintenant»

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« Notre approche du socialisme n’a jamais été très utopique. Pour nous, il n’a jamais été quelque chose de très lointain. Au contraire, nous avons essayé de voir comment nous pouvons concrètement réaliser le socialisme, la liberté et l’égalité. Comment pourrions-nous au moins commencer par nous-mêmes à réaliser ces principes dans notre propre vie ? Nous avons toujours eu des espoirs et des utopies, que nous ne voulions pas projeter sur les générations futures. Au lieu de cela, nous avons commencé à réaliser nos utopies et nos espoirs, ici et maintenant. »
 
Sakine Cansız
Le matin du 10 Janvier e 2013, des millions de Kurdes se réveillèrent par les nouvelles horribles du meurtre de Sakine Cansiz (Sara), Leyla Şaylemez (Ronahi) et Fidan Doğan (Rojbîn) dans le Centre d’information du Kurdistan sis 147 Rue La Fayette, au centre de Paris. Immédiatement, des dizaines de milliers de personnes de toute l’Europe, des Kurdes et leurs amis, ont pris d’assaut le lieu du crime pour exprimer leur colère. Trois jours plus tard, des centaines de milliers de personnes de cultures et de nationalités différentes envahissaient les rues de Paris pour protester contre cet acte lâche de meurtre politique.
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Sakine Cansız était l’une des fondateurs du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et figure de proue du mouvement des femmes kurdes. Elle était l’un des rares révolutionnaires à avoir été une légende de leur vie, notamment en raison de son rôle historique dans la résistance de la prison de Diyarbakir dans les premières années du PKK. Fidan Doğan était une représentante du Congrès national du Kurdistan (KNK) en France. Elle a porté la cause politique du peuple kurde aux réunions et institutions internationales telles que le Parlement européen. Leyla Şaylemez était une jeune militante du mouvement de la jeunesse kurde et du mouvement des femmes kurdes. L’assassinat a eu lieu à un moment rempli de promesses de paix et de liberté, quelques jours à peine après qu’une délégation politique se soit rendue sur l’île pénitentiaire d’Imrali pour rencontrer Abdullah Öcalan, le dirigeant du PKK.
 
Ce que les meurtriers de sang-froid n’ont pas compris, c’est que les graines semées par l’esprit de Sakine Cansız et de ses camarades devaient devenir des fleurs, des arbres et des forêts dans les années suivantes – lors de la révolution du Rojava, dans la solidarité des femmes en lutte du Moyen-Orient, dans la libération de la femme dans le monde entier…
 
Sakine Cansız était une Kurde alevie, née en 1958 dans un village du Dersim, au nord du Kurdistan. Le peuple de Dersim a été victime d’un génocide en 1938 à la suite d’un soulèvement dirigé par Seyit Riza. Environ 70 000 personnes ont été tuées dans les bombardements commandés par Mustafa Kemal Atatürk, tandis que des dizaines de milliers de personnes ont été déportées par l’État turc. Le nom Dersim a été effacé des cartes et remplacé par Tunceli, «poing de fer» pour imposer l’assimilation et le silence à la région. L’âge de Seyit Riza – il avait plus de 70 ans – a été abaissé dans les registres de l’État pour légaliser son exécution.
 
Avant de mourir, il aurait déclaré: « Je n’ai pas pu pas rivaliser avec vos tours et vos mensonges. Cela fut ma souffrance. Mais je ne me suis pas mis à genou devant vous. Puisse cela être votre souffrance. »
 
Sakine Cansız était donc un enfant des montagnes rebelles du Dersim, baignées dans les eaux de la rivière Munzur. Cependant, au moment de sa naissance, le silence et la peur régnaient dans sa communauté. Semblable à beaucoup de jeunes de l’époque, élevés dans l’idéologie officielle de l’État turc, elle a grandi sans connaître son identité kurde. Cela a changé lorsque Sakine Cansız a rencontré les jeunes étudiants kurdes et turcs de la classe ouvrière intéressants autour d’Abdullah Öcalan, qui s’appelaient alors le «révolutionnaires du Kurdistan».
 
Avant de rejoindre les révolutionnaires du Kurdistan, Cansız était profondément influencée par les grandes figures révolutionnaires turques exécutées par l’État, tels que Deniz Gezmiş et Mahir Çayan.
 
Sakîne a expliqué sa première expérience de la vie révolutionnaire de la manière suivante : « L’idée de lutte politique et révolutionnaire m’a conduite sur le chemin qui a complètement changé ma vie. J’ai rencontré des jeunes vivant à proximité. Leur mode de vie, leurs débats et leurs approches des valeurs et des concepts moraux m’ont profondément touché. J’ai réalisé qu’ils portaient le flambeau de la liberté entre leurs mains. »
 
Sakine Cansız, de nature rebelle et émotive, s’est sentie attirée par les révolutionnaires du Kurdistan, non seulement en raison de sa théorie révolutionnaire, mais aussi parce qu’elle se sentait attirée par la façon dont le nouveau groupe est sorti de sa capacité à «ressentir la douleur de la population». Son premier contact avec ses futurs camarades a eu lieu pendant son adolescence, quand elle a envoyé de la nourriture et d’autres objets utiles aux étudiants pauvres dans la maison misérable du quartier. Selon ses propres mots, les révolutionnaires du Kurdistan constituaient une alternative claire et autonome aux deux options dominantes offertes aux personnes comme elle à l’époque: le chauvinisme social de la gauche turque, qui niait les conditions spécifiques du Kurdistan, ou le nationalisme conservateur kurde, qui avait peu à offrir en termes de changement social et de lutte de classe. Très tôt dans sa jeunesse, elle a identifié la principale contradiction qu’elle a vécue dans sa vie privée : la condition difficile de la femme au Kurdistan.
 
Dans les années 1970, après avoir quitté sa maison pour refuser une vie traditionnelle qu’elle ne souhaitait pas, elle a commencé à travailler dans des usines pour organiser les femmes ouvrières. Au cours de ses actions, elle a été emprisonnée à plusieurs reprises. Dans les prisons de différentes régions de la Turquie, elle a été témoin d’une géographie de personnes oubliées mais rebelles : des ouvriers d’usine misérables, des femmes roms fières, des prostituées volontaires et des survivants traumatisés du génocide. Dans ses mémoires, elle rend hommage à ces vies fascinantes et affirme sa conviction qu’elle est capable de toutes les transformer en militants de la révolution. Sa décision de devenir une révolutionnaire professionnelle a coïncidé avec la décision de ses camarades de former un parti.
 
À la fin des années 1970, des «apoistes» [les jeunes réunis autour d’Abdullah Ocalan] ont organisé des comités dans de nombreuses régions du nord du Kurdistan. Les dirigeants ont chargé Sakine Cansız de créer le mouvement des femmes, un devoir qui lui tenait à cœur. À elle seule, elle a réussi à rassembler de grands groupes de jeunes femmes, souvent des étudiantes, pour des discussions et une éducation. Le 27 novembre 1978, à l’âge de 20 ans seulement, Sakine Cansız est devenue l’une des deux femmes fondatrices du Parti des travailleurs du Kurdistan, lorsqu’elle a participé au congrès fondateur de ce parti.
 
À l’époque, le fameux coup d’État du 12 septembre 1980 était déjà préfiguré par de sinistres développements visant les groupes révolutionnaires dans le pays, et en particulier au Kurdistan. Peu de temps après la formation du parti, Sakine Cansız et plusieurs de ses camarades, dont des membres du comité central du PKK, ont été arrêtés lors d’un raid en 1979 à Elazig. Au moment du coup d’État, elle a été transportée dans la nouvelle prison de Diyarbakir, une prison basée sur le système pénitentiaire américain et où la loi martiale a porté atteinte à la dignité humaine. Jusqu’à ce jour, la grande majorité des violations atroces des droits de l’homme et des actes de torture systématiques perpétrés à l’intérieur des murs de la prison de Diyarbakir n’ont toujours pas été documentés. Ils incluent le viol et les violences sexuelles, les décharges électriques, le choc des prisonniers avec les eaux usées et leur faire manger les excréments de chiens. L’Etat turc voulait briser la volonté des prisonniers pour qu’ils abandonnent leur identité de Kurdes et de socialistes. Même si la Turquie n’a toujours pas été tenue pour responsable de ces crimes impensables, les événements qui se sont déroulés à l’intérieur des prisons ont été profondément gravés dans la mémoire du peuple kurde. Au cours de ces années, le PKK, à l’instar d’autres groupes révolutionnaires, est confronté à un anéantissement total de ses structures organisationnelles du fait du régime du coup d’État.
 
Les tortures infligées par l’État allaient si loin que certains membres éminents se sont bel et bien transformés en informateurs de l’État. D’autres, qui luttaient contre la tentation de devenir des collabos face à une torture insupportable, ont été sauvés de l’abîme de la trahison – précisément grâce à l’atmosphère d’amitié et de solidarité créée par des personnes comme Sakine Cansız. C’est essentiellement grâce à son esprit qu’aucune des prisonnières du quartier des femmes n’est devenue un agent de l’État turc.
 
Parmi les prisonniers figuraient des membres fondateurs du PKK, tels que Mazlum Doğan, Kemal Pir et Hayri Durmuş. En créant une atmosphère de rébellion constante par le biais d’activités culturelles et de cérémonies politiques, leurs stratégies visant à annuler le projet de l’État turc comprenaient des défenses idéologiques devant les tribunaux qui thématisaient le colonialisme, le travail éducatif et politique dans les cellules, l’autodéfense physique, les jeûnes de mort et les immolations.
 
Le jour de Newroz (la fête du nouvel-an kurde] 1982, Mazlum Doğan a lancé la résistance en prison en allumant trois allumettes, en les plaçant sur la table dans sa cellule et en s’immolant avec le message « La reddition est une traîtrise, la résistance mène à la victoire ».
 
Sakine Cansız a écrit sur l’action de Mazlum Doğan : « Nous avons essayé de saisir l’objectif de l’action de Mazlum. Finalement, nous avons compris que cela avait un rapport avec Newroz. Son message était clair, il proclamait : La résistance, c’est la vie ! »
 
À la suite de l’action de Mazlum Doğan, quatre détenus, Ferhat Kurtay, Eşref Anyık, Necmi Önen et Mahmut Zengin, se sont immolés en signe de protestation. C’est avec les dirigeants des membres centraux du PKK, Kemal Pir, Hayri Durmuş, Akif Yılmaz et Ali Çiçek, que le 14 juillet 1982, le début d’un jeûne mortel a été annoncé pour protester contre les conditions de la prison de Diyarbakır. Tous les quatre sont morts dans la grève de la faim. La résistance de la prison de Diyarbakir a toutefois suscité le soutien de la population et a incité le PKK à prendre définitivement la décision de lancer une guerre de guérilla contre l’État turc le 15 août 1984.
 
Les femmes en particulier étaient ciblées par les autorités pénitentiaires, qui souhaitaient utiliser les notions traditionnelles de l’honneur pour supprimer l’identité révolutionnaire des femmes et évoquer le sentiment patriarcal féodal parmi les hommes. Le directeur le plus notoire de la prison, Esat Oktay, était connu comme un sadique, qui jouissait des cris de douleur de ses victimes sous la torture. Un homme sans aucun respect pour la dignité humaine et l’honneur, Oktay a ensuite été tué dans la rue par quelqu’un qui lui a apporté les salutations de Kemal Pir, mort en prison. Oktay était obsédé par l’idée de stériliser les prisonnières par des infections des trompes de Fallope et des lésions de leurs organes sexuels. Il a explicitement déclaré qu’il souhaitait la disparition de la «race» kurde. Sakine Cansız a écrit dans ses mémoires : « En tant que sadique, il a montré son amour pour les femmes en nous frappant avec une massue entre les jambes jusqu’à ce que nous saignions, en menaçant de «remonter une massue» et en utilisant ses doigts pour nous tirer les lèvres jusqu’à ce qu’elles se déchirent. » La position sans peur de Sakine face au bourreau pervers se répandit comme une traînée de poudre. Tous les sympathisants du PKK connaissent l’histoire de la façon dont elle a craché au visage d’Esat Oktay lors de la torture. Les prisonniers de sexe masculin du PKK de l’époque ont décrit comment le combat de Sakine Cansız en prison les avait encouragés à résister malgré le désespoir.
 
La résistance de Sakine Cansız à la prison de Diyarbakir a conduit à une nouvelle approche à l’égard des femmes dans la société kurde. Il encourageait les femmes à rejoindre les structures révolutionnaires dans les villes et les poussait à la politisation dans les villages. À partir de sa résistance en prison, l’activisme des femmes kurdes a gagné en respect et en soutien parmi les masses populaires.
 
Au moment de sa libération en 1991, elle avait passé 12 ans dans les prisons d’Elazig, Diyarbakir, Bursa, Canakkale et Malatya. Tout de suite après avoir respiré l’air de la liberté, elle a poursuivi sa lutte active dans les rangs du PKK. Ainsi, elle s’est rendue à l’Académie Mahsum Korkmaz du PKK, dans la vallée de la Bekaa au Liban, où elle a rejoint les formations idéologiques conduites par Abdullah Öcalan. Des aspects de sa volonté, de sa lutte et de sa vie ont souvent été cités en exemple dans les discours d’Öcalan. C’est Öcalan qui l’a encouragée à écrire sa vie. Ses mémoires ont été écrits en 1996 et mis à la disposition du public après sa mort en trois volumes. Dans les années 1990, elle a assumé d’importantes tâches dans l’organisation du mouvement kurde en Palestine, en Syrie et au Rojava.
 
Elle a estimé qu’il serait possible aux femmes du Kurdistan de se recréer et de reconstituer leur histoire en rejoignant la lutte militante du PKK. Elle a décrit la lutte pour la liberté de la manière suivante :
 
« Ce mouvement aborde l’essence de l’être humain. Dans tous nos débats, nos éducations et nos discours, notre humanité et nos valeurs humaines constituent le point de départ. Nous discutons du développement de l’homme et de la société, des étapes historiques et des valeurs de l’humanité. Les femmes, qui voulaient comprendre ces problèmes, se sont identifiées au mouvement de la liberté. Au tout début de la lutte pour le Kurdistan et de la lutte politique, l’implication des femmes dans ce processus révolutionnaire était très difficile. Pourtant, nous avons réussi et nous avons acquis le pouvoir de façonner notre mouvement. »
 
Selon ses propres termes, le temps qu’elle a passé comme combattante dans les montagnes du Kurdistan a été le plus beau et le plus significatif de sa vie. L’engagement de Sakine Cansız dans la lutte pour la libération du Kurdistan s’inscrit dans la chronologie du mouvement des femmes kurdes organisées. Elle a joué un rôle crucial dans la formation de l’armée autonome féminine (aujourd’hui YJA Star) et du parti des femmes (aujourd’hui PAJK). Ce n’était pas une personne qui attendait les ordres. Au lieu de cela, elle prenait des initiatives, même dans les moments les plus difficiles. En raison de son fort caractère, elle était connue comme une camarade qui n’accepterait jamais la domination masculine ou d’autres formes de comportement antirévolutionnaire. Elle luttait contre le retard social et l’injustice, et pourtant, elle était attentive aux réalités et aux conditions sociales de son peuple. Elle avait une personnalité collective et communale qui établissait une solidarité avec tous ceux qui l’entouraient, mais elle était aussi têtue et intrépide lorsqu’il s’agissait d’exprimer ses critiques et ses désaccords. Tout au long de sa vie, elle a toujours encouragé ses camarades à progresser, à être forts et persistants. Comme l’a décrit l’une de ses premières camarades féminines et amies de toujours : « Sara était toujours prête à partir, mais elle travaillait comme si elle allait rester pour toujours. »
 
En 1998, Abdullah Öcalan lui a confié la mission d’assumer les tâches et responsabilités du mouvement de libération kurde en Europe. Entre autres tâches, elle a organisé et formé des cadres du mouvement dans plusieurs pays européens, ainsi que la communauté des migrants kurdes. De même, elle a noué des liens avec différents mouvements progressistes hors du Kurdistan, respectant les différences et insistant sur l’importance de lutter pour des valeurs humaines communes comme mouvements alternatifs, féministes, de gauche et démocratiques afin de mettre en place des structures d’autonomie démocratique et une société démocratique, libre et libérée du genre. Elle a donc joué un rôle important dans la création d’une solidarité pour la cause kurde. Elle recrutait, organisait et éduquait toujours son peuple, en particulier les jeunes femmes, jusqu’à son dernier souffle.
 
À ses yeux, la lutte était le facteur déterminant de la liberté : « Dans mon utopie, vous devez lutter pour la liberté toute votre vie. Dans un Kurdistan libéré, la lutte doit être glorieuse. »
 
À la lumière de cette vie légendaire remarquable, personne ne s’attendait à ce que cette héroïne soit tuée de sang-froid lors d’un assassinat insidieux au cœur de Paris. Dès le premier jour, le mouvement des femmes kurdes a souligné le caractère barbare du meurtre en tant que tentative de frapper le cœur de la révolution du Kurdistan : la femme libérée. Bien que le meurtrier, Ömer Güney, ait été identifié très tôt, il est notoire que les services de renseignements de l’Etat turc ont ordonné l’assassinat de saboter le processus de paix. Les autorités françaises n’ont pas dévoilé le caractère politique de ce crime. Le meurtrier est mort dans des circonstances mystérieuses en prison, quelques semaines à peine avant le début du procès. Chaque année, le mouvement kurde organise une manifestation de masse à Paris avec d’autres mouvements de femmes pour réclamer «Justice et vérité !».
 
Sakine Cansız a toujours voulu revenir à Dersim en tant que guérilla. Et effectivement, elle est retournée dans son pays natal en tant que héroïne. Sa tombe est devenue un sanctuaire, un lieu de pèlerinage pour les opprimés, les jeunes, les ouvriers, les femmes. Des millions de personnes lui ont fait ses adieux en portant son cercueil de Paris à Amed, puis à Dersim.
 
Lors de la révolution du Rojava, les efforts de libération des femmes rendent hommage à Sakine Cansız et à ses camarades. La lutte engagée par un petit groupe de jeunes a maintenant atteint un stade où sa philosophie et sa pratique sont discutées par les révolutionnaires du Brésil jusqu’à à l’Inde. Les femmes, qui ont libéré le monde des fascistes violeurs de l’Etat islamique, l’ont fait en adoptant des noms de guerre tels que Sara, Rojbîn, Ronahî. Aujourd’hui, les nouvelles générations de filles et de garçons kurdes sont élevées dans le même esprit que Sara.
 
Comme le dit souvent le mouvement des femmes : « Ils peuvent couper nos fleurs, mais ils ne peuvent pas empêcher l’arrivée du printemps ! »
 
Jamais oublier, jamais pardonner !
 
Vous pouvez commander le premier volume de «SARA – Toute ma vie était un combat» en anglais auprès de Pluto Press. Les traductions allemande et italienne des trois volumes ont été publiées par Mezopotamien Verlag. Le premier volume est également disponible en espagnol chez Descontrol.
 
Publié par le Komun Academy

Les grévistes de la faim de Strasbourg seront à la manifestation du 12 janvier à Paris

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STRASBOURG – Les Kurdes en la grève de la faim de Strasbourg qui se joindront à la marche du 12 janvier à Paris ont déclaré : « Le mouvement de libération s’est renforcé grâce à la lutte de femmes kurdes comme la camarade Sara. » Les grévistes ont appelé tout le monde à se joindre aux manifestations.
 
La grève de la faim lancée à Strasbourg le 17 décembre est à son 24e jour. Les grévistes kurdes ont publié un communiqué à l’occasion du 6e anniversaire du l’assassinat de trois femmes kurdes à Paris et ont annoncé qu’ils se joindraient à la marche organisée le 12 janvier à Paris.
 
S’exprimant au nom des grévistes de la faim, Dilek Ocalan a appelé les Kurdes d’Europe à se joindre aux actions.
 
Dilek Ocalan a déclaré qu’il était clair que l’Etat turc et son service de renseignement, le MIT, était derrière le massacre et a poursuivi : « L’attitude de l’Etat français qui ne fait pas la lumière sur le triple meurtre équivaut à une complicité dans la politique de génocide de la Turquie. Avec ce massacre, ils ont essayé de tester notre volonté et notre engagement. Ils ont essayé de nous éloigner de l’amour de Sakine Cansiz pour la lutte, de l’insistance de Rojbin sur la lutte et de l’espoir de Leyla pour l’avenir. Ils voulaient rendre le mouvement de libération des femmes kurdes sans identité. »
 
Le communiqué a souligné que, malgré le but du massacre, la lutte des femmes kurdes avait des échos parmi les femmes du monde entier. « Les camarades de Sara, Rojbin et Leyla ont renforcé la lutte. Leurs amis et partisans ont rendu caduque les frontières. Comme un boomerang, le massacre est revenu et a frappé les auteurs », a-t-il ajouté.
 
Dilek Ocalan a souligné la mentalité génocidaire de l’Etat fasciste turc et a poursuivi :
 
« Ils ont rasé nos villes, ils ont brûlé notre jeunesse dans les sous-sols, ils ont mutilé les corps de nos combattantes femmes, ils ont détruit nos cimetières, ils ont bombardé nos guérilleros avec des tonnes d’explosifs, ils ont transformé le pays en une grande prison et a essayé de semer les graines de la peur dans le cœur des gens. Et maintenant, ils prévoient de supprimer la demande la plus humaine et la plus démocratique de notre peuple par le biais de l’oppression. Pourtant, ils ne réussiront pas. Parce qu’au sein de ce mouvement, il y a des camarades comme Sakine Cansiz qui ont craché au visage du bourreau, il y a l’esprit de Hayri Durmuş qui a dit « Je suis redevable à mon peuple » alors même que son corps fondait sous la mort, il y a l’esprit de Kemal Pir qui a déclaré : « Nous aimons la vie à en mourir ». Des dizaines de milliers de combattants hommes et femmes ont transformé les montagnes du Kurdistan en une forteresse de la résistance. Il y a la détermination de notre peuple et des martyrs qui se sont tenus côte à côte en toutes circonstances.
 
Ils ne réussiront pas, car des dizaines de milliers de militants et de patriotes qui ont foi en le leader Apo [Abdullah Ocalan, dirigeant incarcéré du PKK] ont sauvé le peuple kurde des griffes du génocide. Il y a des Arabes, des Syriaques, des Assyriens, des Arméniens et des Turkmènes qui croient en ses idées. Il y a des peuples du monde entier qui croient que seul le paradigme d’Apo pourrait vaincre la modernité capitaliste. Il y a des femmes kurdes qui propagent la lutte des camarades Sara, Leyla et Rojbin.
 
En effet, cette oppression prendra fin, leur autorité et leurs palais s’écrouleront un jour. Nos grévistes de la faim résilients seront accueillis par notre peuple ce jour-là.
 
Ceux qui se sont inclinés devant la tyrannie, ceux qui sont des otages à craindre, prendront place dans les pages perdues de l’histoire. Pourtant, nous sommes de ceux qui veulent résister et accueillir ce jour de liberté. Nous sommes donc déterminés à poursuivre notre campagne jusqu’à l’obtention de résultats. Le 12 janvier, en rejoignant la marche à Paris, nous répéterons notre promesse avec notre peuple. Nous montrerons l’étincelle de la résistance à Strasbourg aux côtés d’autres citoyens du Kurdistan dans le domaine de nos activités. »
 
À la fin, le communiqué rappelait que Leyla Guven de la prison d’Amed en était à son 63e jour de grève de la faim. Nasir Yagiz à Hewler (Erbil) au 50e jour, 156 prisonniers politiques au 25e jour, l’Imam Shish à Galler et des grévistes à Strasbourg au 24ème jour de leur grève de la faim.
 

SYRIE : Les pays du Golfe voient la Turquie comme une menace

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Après les remarques de Bolton, Erdogan doit décider entre attaquer les Kurdes et risquer une confrontation avec les troupes américaines ou attendre leur départ.
 
Erdogan écarté alors que Poutine aide Assad à se réintégrer dans le monde arabe
 
Qui décide de la politique américaine en Syrie? Il y a trois semaines, le président américain Trump a annoncé au monde entier qu’il avait décidé de retirer les troupes américaines stationnées dans le nord de la Syrie. Mais il s’avère que la décision précipitée prise par Trump lors d’un appel téléphonique avec son homologue turc, Erdogan, est en train de s’effondrer. La joie d’Ergodan, qui assuma immédiatement le rôle de remplaçant des Américains en Syrie, dura relativement peu de temps. Cette semaine, le conseiller américain à la Sécurité nationale, John Bolton, a annoncé que les États-Unis ne se retireraient de la Syrie qu’après que l’État islamique aurait été complètement déraciné et surtout après que la protection des forces kurdes en Syrie aurait été assurée.
 
Cette déclaration a-t-elle été coordonnée avec Trump ? A-t-il été formulé en consultation avec le Premier ministre Netanyahu, qui s’oppose au retrait américain? On peut supposer que Bolton aime toujours son travail, car s’il avait fait une telle déclaration sans demander à son patron, il serait probablement immédiatement renvoyé sur Twitter. Bolton a également déclaré que les Etats-Unis ne pensaient pas que la Turquie allait entreprendre une action militaire qui ne soit pas entièrement coordonnée et acceptée par Washington – à tout le moins pour éviter de mettre en danger les troupes américaines.
 
Erdogan, en tout cas, a été pris au dépourvu et est devenu furieux . « Ce n’est pas possible pour moi d’avaler ça », a déclaré Erdogan à propos des remarques de Bolton mardi. Le président turc a annulé une réunion à venir avec Bolton, qui a dû se contenter d’une conversation de deux heures avec le conseiller principal d’Erdogan, Ibrahim Kalin, qui s’est terminée sans un accord prévoyant que la Turquie s’abstiendrait d’attaquer les Kurdes. En outre, l’administration turque, qui s’est arrêtée dans l’attaque du nord de la Syrie jusqu’à ce qu’un message de Bolton soit envoyé, a clairement indiqué qu’un assaut contre la région était imminent.
 
Erdogan pensait apparemment que l’article qu’il avait publié dans le New York Times, dans lequel il présentait la Turquie comme « le seul pays doté du pouvoir et de l’engagement nécessaires pour le faire », c’est-à-dire le remplacement des États-Unis en Syrie et la lutte contre le terrorisme, exprime les accords conclus avec Atout. Il a même expliqué comment il voyait le contrôle continu de la Turquie sur le nord de la Syrie. Erdogan a expliqué qu’il avait l’intention d’instituer des conseils locaux pour « aider la population kurde » à gérer ses affaires civiles et de provoquer des élections en Syrie auxquelles ne participeraient que des personnes n’ayant aucun lien avec le terrorisme, c’est-à-dire sans les unités de défense du peuple (YPG) qu’il considère comme des groupes terroristes. Il prétend également « établir une force militaire composée de tous les composantes syriennes (sans les forces kurdes) et anéantir l’État islamique. »
 
Un tel article n’aurait pu être écrit que si Trump avait accepté le plan d’Erdogan, jusqu’à ce qu’il se rende compte qu’il était lui aussi tombé dans le piège (…). Mais Erdogan avait raison sur au moins une chose : « La leçon à tirer de la naissance de ce groupe terroriste en Irak est que les déclarations de victoire prématurées et les actes téméraires qu’ils ont tendance à susciter créent plus de problèmes qu’ils n’en résolvent. » C’est-à-dire que Trump a commis une erreur en déclarant à la hâte que l’État islamique avait été vaincu. Sinon, pourquoi la Turquie a-t-elle eu besoin d’intervenir pour terminer le travail ? Mais Erdogan n’a pas caché sa satisfaction devant le retrait américain de la Syrie, une action qui, selon lui, lui donnait les mains libres pour attaquer les forces kurdes. Il a maintenant un grave dilemme : faut-il attaquer comme il l’avait prévu ? et risquer ses forces dans une confrontation avec les Américains toujours en Syrie, ou attendre jusqu’à ce qu’ils partent, incapables de savoir à ce moment-là exactement, si cela se produit.
 
Mais à ce stade, la décision turque doit également prendre en compte les actions d’autres pays de la région, notamment l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l’Égypte et Israël, d’une part, et la Russie et l’Iran, d’autre. Selon un rapport exclusif de David Hearst, rédacteur en chef du site Middle East Eye, les chefs des services de renseignement saoudiens, égyptiens et émiriens, et le chef du Mossad, Yossi Cohen, se sont réunis dans l’une des capitales des États du Golfe pour discuter des l’influence de l’Iran et de la Turquie en Syrie et dans l’ensemble de la région. Hearst cite une source qui aurait déclaré à Cohen que « le pouvoir iranien est fragile. La véritable menace vient de la Turquie ». Selon la source, les autres participants ont accepté et proposé un plan comportant quatre phases parallèles.
 
– Le premier consiste à aider Trump à retirer environ 14 000 soldats américains d’Afghanistan, proposition qui s’est accompagnée d’une réunion diplomatique entre responsables américains et représentants des talibans à Abou Dhabi.
 
– Deuxièmement, le grand bloc sunnite qui a remporté les élections législatives en Irak pour y neutraliser l’influence turque a pris une part active.
 
– Le troisième concerne le rétablissement des liens entre les États du Golfe et le président syrien Bashar Assad et le renvoi de la Syrie dans le championnat arabe, ce qui donnerait à Assad un moyen de se libérer de sa dépendance à l’égard de l’Iran et de l’éloigner de la Turquie. Cette décision a également été accompagnée d’une action diplomatique au cours de laquelle le président soudanais – avec l’accord de l’Arabie saoudite et de la Russie – a effectué sa première visite en Syrie. Le chef des services de renseignement syriens, Ali Mamlouk, s’est rendu en Égypte et les Émirats arabes unis ont rouvert son ambassade à Damas.
 
– Enfin, la quatrième phase consiste à aider les Kurdes à combattre la Turquie et à renforcer leurs liens diplomatiques et économiques avec la région kurde d’Irak. Si ce rapport est fiable, il indique non seulement les mesures envisagées par les États du Golfe, l’Égypte et Israël contre la Turquie, mais également les nouvelles priorités stratégiques dans lesquelles la Turquie – et non l’Iran – est l’objectif.
 
Erdogan n’a pas besoin d’un rapport de journaliste pour savoir qu’il se trouve sur une île dangereuse où le trafic, lourd et hostile, arabe, israélien et américain, circule sauvagement autour de lui. Il ne peut pas non plus entièrement dépendre de son partenaire stratégique russe, qui s’efforce de ramener la Syrie sur le terrain arabe afin de lui donner une légitimité internationale. Cette route est fermée à Erdogan car la Turquie n’est pas membre de la Ligue arabe et se trouve dans une profonde division avec l’Egypte et récemment avec l’Arabie saoudite à propos de l’ affaire Jamal Khashoggi. Lorsqu’il se met en conflit avec les États-Unis au sujet de la sécurité et de l’avenir des Kurdes et que les Syriens considèrent la Turquie comme une puissance occupante étrangère, Erdogan n’a pas beaucoup d’options.
 

Zvi Bar’el, Via Haarezt

Photo via Rudaw 

TURQUIE: Confessions d’un policier qui a participé aux massacres des Kurdes entre 2015- 2017

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Les confessions d’Ahmet Gün, un policier turc des opérations spéciales qui a combattu la résistance kurde lors des combats urbains de Cizre, Sur, Lice, Nusaybin et Derik entre 2015- 2017. (Il a passé 9 ans dans les régions kurdes en tant que policier.)
 
Réfugié avec ses trois enfants en Suisse, Gun déclare qu’il a été expulsé de son poste en étant accusé d’être un guleniste (adepte du mouvement de Fettullah Gulen) pour ne pas avoir obéi aux ordres barbares données lors des massacres dans les localités kurdes de Turquie entre 2015 et 2017. (Vous pouvez lire la première partie de ses confessions ici)
 
Deuxième partie de ses confessions :
 
« Pendant le couvre-feu, si par hasard les civils sont restés dans leurs maisons dans une rue où on nous a ordonné d’entrer, j’ai été témoin tellement de fois que ces gens ont été brutalement battus. Surtout à Nusaybin. Les gens battus essayaient de s’expliquer, mais ça n’aidait pas. S’il y a eu une victime de notre côté récemment, frapper les gens était comme un devoir religieux. J’en ai été témoin au moins 20 fois.
 
Un de ces jours, nous étions assis dans un véhicule blindé. Il n’y a pas eu d’affrontements intenses. Un de nos amis avait besoin d’aller aux toilettes car nous étions dans le véhicule depuis 10 heures. Nous nous sommes garés près de la mosquée.
 
Il est descendu, peu après qu’on ait entendu un coup de feu. Il est remonté dans le véhicule et on a bougé. Il a dit qu’il y avait 2 ou 3 enfants. Il y avait un couvre-feu. Il leur avait tiré dessus quand il avait entendu un bruit. « Je les ai vus courir », dit-il. On ne sait pas ce qui leur est arrivé.
 
À l’intérieur du véhicule blindé, il y a des canons contrôlés à distance. Un ami assis dans le véhicule a commencé à filmer. Il m’a dit de vérifier maintenant, d’appuyer sur la gâchette et de faire sauter la climatisation d’une maison. Une fumée blanche est sortie du moteur de la climatisation. Il a fait un câlin.
 
J’ai demandé ce qu’il y avait de drôle là-dedans. « Pauvres gens, une climatisation, c’est 3000 lires turques. Quel plaisir en as-tu tiré ? » Il a dit que s’ils ne payaient pas la climatisation, cet argent irait au PKK. J’ai eu une grosse dispute avec lui. C’était un petit incident, il y en a eu d’autres où des vies ont été perdues.
 
Ils [les forces de sécurité turques] creusaient dans les chambres des maisons vides, prenaient des photos. Outre des vies humaines, de nombreux biens ont été endommagés. Par exemple, des réservoirs d’eau ont été détruits exprès. C’est ce dont les gens ont le plus besoin avec une température de 40°C. Des maisons ont été explosées sans raison.
 
Ceux qui ont signé « les forces d’Esadullah » sur les murs ont soudainement commencé à se multiplier. La mentalité salafiste, qui a mené le djihad pour Allah contre son propre peuple, est sortie de nulle part.
 
Photo : Graffitis des forces turques « Notre sang est à al-Aqsa, la victoire appartient à l’Islam »
 
Quand j’ai commencé en 2008, je jure que les groupes [salafistes] n’existaient pas. Ils écrivaient des graffitis laids sur les murs, prenaient des photos avec des sous-vêtements féminins dans les chambres. Quel genre de guerre est-ce, quelle religion, je ne sais pas. Ce qui a été fait n’était pas conforme aux normes éthiques, religieuses ou judiciaires.
 
C’était l’époque où le Président [Erdogan] disait « s’ils veulent du caviar, envoyez-leur du caviar ». À Nusaybin, nous mettions des gaufrettes dans le pain pour la nourriture. Dieu m’en est témoin. Le processus a été traîné exprès.
 
Il y avait un camp de réfugiés yézidi à proximité. Nous n’avions que des clôtures entre nous. Nous étions tous des forces spéciales. A l’un de nos amis arabophones, un Yézidi a demandé « de quel pays venez-vous ». Ils pensaient que nous étions des réfugiés vu notre apparence.
 
Les opérations n’avaient aucun fondement militaire ou judiciaire. C’étaient des opérations entièrement politiques. »
 
A propos de Nusaybin, n’oubliez jamais que les forces turques ont rasé au sol une ville kurde puis ont fièrement posé avec le drapeau turc accroché sur ses décombres.
 
 

Rojava : entre le marteau et l’enclume

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SYRIE / ROJAVA – La décision brutale de retirer les troupes étatsuniennes de Syrie, annoncée par Donald Trump, a secoué l’establishment politico-militaire aux USA, et provoqué la démission du secrétaire d’État à la Défense, Jim Mattis, et celle du chef d’état-major du Pentagone, Kevin Sweeney.

La raison avancée est officiellement l’outrage face à l’abandon des FDS (Forces démocratiques syriennes) et des YPG/YPJ, qui assument depuis des années la bataille contre l’OEI (Organisation de l’État islamique), ainsi que le feu vert donné au président turc Erdogan « pour qu’il en finisse avec les terroristes de l’OEI » en envahissant le nord de la Syrie.

Bien entendu, personne n’est dupe au sujet des motivations réelles du président turc Racep Tayyip Erdogan, qui rêve d’écraser le projet du Rojava. Mais ce lâchage en règle des Kurdes, alliés des USA sur le terrain, ne doit pas cacher une autre inquiétude, celle de l’abandon de la région à la Russie, ce qui déplaisait fort aux démissionnaires, mais aussi à l’Iran, ouvrant de fait la voie au fameux « croissant chiite » de Téhéran à Beyrouth en passant par Bagdad.

Depuis, Trump et son administration ont un peu reculé, repoussant le départ des troupes de quelques mois, mais le danger reste imminent.

Le précédent d’Afrin

Le gouvernement turc, de son côté, doit composer avec un intense lobbying du côté étatsunien, avec des déclarations comme celle de l’influent sénateur républicain Lindsey Gram qui s’indigne du fait que « les Kurdes vont être massacrés ».

Ce danger bien réel n’est pas un coup de tonnerre inattendu du côté de la Fédération démocratique du nord de la Syrie. Les menaces d’Erdogan, les pourparlers et autres sommets à Istanbul ou Moscou, où la Turquie était invitée mais jamais les Kurdes, avaient poussé ces derniers à chercher une reprise du dialogue avec le régime. Les négociations avaient bien sûr tourné court sur la question de l’autonomie des régions, un concept inacceptable pour le régime d’Assad et pour l’idéologie nationaliste arabe en général, mais un accord a pu être trouvé sur la protection du territoire, l’armée syrienne prenant position autour de Membij, première cible désignée par Erdogan.

En janvier 2018, la Turquie avait envahi Afrin, canton de la Fédération démocratique du nord de la Syrie, situé au nord-ouest du pays et séparé des autres cantons par une région contrôlée par les brigades djihadistes et même par l’armée turque, qui a colonisé plusieurs localités frontalières comme Jarablous. Confrontés aux bombardements intensifs des F16 turcs et sans armement permettant de leur résister, les FDS avaient appelé à l’aide le régime. Celui-ci avait conditionné son aide au désarmement préalable des FDS, ce qu’elles avaient refusé. Assad a donc livré Afrin à l’occupation turque, provoquant un exode massif de la population majoritairement kurde. Ankara y a installé de nombreux djihadistes évacués d’autres régions de la Syrie, qui depuis font régner la terreur dans la population qui n’a pas pu ou voulu fuir.

Invasion turque programmée

Le même scénario se serait reproduit à Mambij, une ville emblématique du « vivre ensemble », à majorité arabe, où Kurdes, Arabes, Turkmènes et autres ethnies vivent en bonne entente.

Mais cette fois-ci, l’armée syrienne a pris position à la périphérie de la ville, laissant son contrôle militaire aux FDS dont elle n’a pas exigé le désarmement.

La présence militaire de quelques centaines de forces spéciales états­uniennes, et aussi françaises, est également un frein à l’invasion turque programmée. Tant que cette présence est effective, Erdogan ne pourra pas donner l’ordre ­d’attaquer la ville et sa région.

De son côté, Trump est passé d’un ordre de « retrait immédiat » à une position beaucoup plus nuancée, parlant d’un retrait « quand la ­région sera sécurisée ». Lors de sa dernière visite aux troupes stationnées en Irak, il est même revenu sur ses propos précédents, affirmant qu’il n’avait jamais dit que l’OEI était définitivement vaincue. Difficile donc de prévoir quoi que ce soit, étant donné les sautes d’humeur et les revirements ­imprévisibles du personnage.

La seule certitude reste que le Rojava, un projet unique dans la région et bien au-delà, multi­culturel, féministe et profondément démocratique, risque d’être écrasé sous les bombes turques à plus ou moins court terme.

Mireille Court, publié sur le site d’NPA

TURQUIE :  Le HDP présente ses candidats aux élections locales du 31 mars

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TURQUIE – Saruhan Oluç, porte-parole du Parti démocratique des peuples (HDP), a annoncé les noms des candidat-e-s au poste de maire pour 41 villes et communes.

Des élections locales auront lieu en Turquie le 31 mars

Le 11 septembre 2016, le Ministère turc de l’Intérieur a nommé des administrateurs aux 28 municipalités des régions kurdes.

La plupart des municipalités avaient été remportées par le DBP (Parti des régions démocratiques, le parti kurde régional) lors des élections précédentes.

Pourtant, le gouvernement de l’AKP a décidé de frapper la volonté du peuple et son droit de choisir ses propres maires et conseillers. Les représentants légalement élus ont été démis de leurs fonctions et ont été accusés d’avoir apporté leur soutien à la guérilla kurde et au mouvement de Fethullah Gulen (FETÖ), accusés d’avoir organisé la tentative de coup d’Etat ratée du 15 juillet 2015.

Les maires -un homme et une femme co-maires – élus de 28 municipalités kurdes ont été suspendus de leurs fonctions dans le cadre d’un décret-loi pris en vertu de l’état d’urgence.

24 des 28 co-maires démis de leurs fonctions et emprisonnés 

Les maires des municipalités de Silvan et Sur (Diyarbakır), quatre municipalités de Mardin, Van et Batman, et deux municipalités de Şırnak ont été remplacés par des administrateurs nommés par le pouvoir turc.

A l’époque, le HDP avait publié une déclaration à la suite de la décision, la qualifiant d’inacceptable.

« Un tel règlement illégal qui ne tient pas compte de la volonté des électeurs et démet de leur fonction les administrateurs et conseils locaux élus est nul et non avenu pour nous », avait déclaré le HDP, ajoutant que les nominations des administrateurs violaient les conventions et lois internationales.

Le HDP a également souligné qu’il n’y avait pas de différence entre la mentalité de la tentative de coup d’Etat du 15 juillet et les nominations récentes.

Voici la liste des candidats  du HDP aux élections locales du 31 mars

VAN – Municipalité métropolitaine de Van 

Bedia Özgökçe Ertan – Mustafa Avcı

İpekyolu Azim Yacan- Şehzade Kurt

Edremit : Gülcan Kaçmaz Sağyiğit – Seyfettin İtha

Özalp : Dilan Öğrenci – Yakup Almaç – Çaldıran Leyla Adsak – Faruk Demir

Başkale Şengül Polat – Erkan Acar – Gürpınar Rojbin Akdağ – Kemal Güler

Gevaş Melek Arapoğlu- Veysi Şeker

 

MARDİN – Municipalité métropolitaine de Mardin 

Ahmet Türk – Figen Altındağ

Nusaybin : Semire Nergiz -Ferhat Kut – Kızıltepe Nülifer Elik Yılmaz- Salih Kuday

Derik : Mülkiye Esmez -Mehmet Şerif Kıran Kıran

 

KARS – Kars Centre

Ayhan Bilgen – Hatice Orhankazi

 

MUŞ – Muş Centre 

Sibel Genç – Sırrı Sakık Sakık – Bulanık Eylem Suruca – Adnan Topçu

Malazgirt : Gülay Çelik – Erdal Çakar

Varto : Ülkü Baytaş – Gıyasettin Aydemir

 

BATMAN – Batman Centre

Songül Korkmaz – Sabri Özdemir

 

BİTLİS – Bitlis Centre

Zekiye İlbasan – Faruk İşler İşler

Tatvan : Serap Çakmak – Habip Yeşiltepe

 

HAKKARİ

Yüksekova : Remziye Yaşar – İrfan Sarı Sarı

Çukurça : Hevidar Ertunç- Ebubekir Kanat – Şemdinli Felem Aker – Sami Beşer

Büyükçiftlik : Gülcan Ceylan – Emin Bulgan

 

AĞRI

Doğubayazıt Yıldız Acar – Cesim Çakçı

Diyadin : Hazal Aras – İhsan Yenigün

 

MALATYA

Arvguvan : Seda Gültüten- İlhan Yıldız Yıldız,

 

ŞIRNAK

Cizre : Mehmet Ziriğ – Berivan Kutlu

Silopi : Adalet Fidan – Sülayman Şavluk – İdil Songül Erdem – Niyazi Çevrim

Fındık : Ahmet İmre – Sevim İmre – Sevim İmre

Uludere : Selahattin Ürün – Feride Yaman

 

DİYARBAKIR

Sur : Filiz Buluttekin -Cemal Özdemir – Bağlar Zübeyda Zümrüt – Zeyat Ceylan

Yenişehir Belgin Diken -İbrahim Çiçek

Des poux : Salime Zingil – Tarık Mercan

Silvan : Naşide Toprak- Abbas Hilmi Azizoğlu

Bismil : Gülşen Özer – Orhan Ayaz – Eğil Gülistan Ensarioğlu – Mustafa Akkul

 

BİNGÖL

Karlıova : Evin Özen -Özkan Bingöl

 

ERZİNCAN

Çağlayan Özlem Demir – Veli Pınar Pınar Çağlayan

https://anfenglishmobile.com/news/hdp-announced-candidates-for-41-cities-and-towns-32006

 

L’assassinat politique de Paris : Correspondance secrete entre la Turquie & l’Allemagne

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Une correspondance confidentielle a fait surface entre les administrations de Berlin et d’Ankara concernant Omer Guney, le meurtrier qui a tué trois femmes kurdes révolutionnaires à Paris. La Turquie demande «Guney a-t-il reçu un entraînement aux armes en Allemagne ?» L’Allemagne a répondu par la négative.

Sakine Cansiz, fondatrice du PKK, la représentant de KNK à Paris, Fidan Dogan, et la membre du mouvement de la jeunesse kurde, Leyla Saylemez, ont été assassinées à Paris le 9 janvier 2013. Le seul suspect arrêté pour le triple assassinat, Omer Guney est mort le 17 décembre 2016 en prison.

Le passé de Omer Guney en Allemagne était resté dans le noir. Guney a vécu en Bavière de 2003 à 2011 et il est soupçonné d’être entré dans des groupes racistes turcs. Il est maintenant évident que l’État turc a tenté d’accéder à son dossier en Allemagne.

L’ALLEMAGNE DIT «ON NE SAIS RIEN»

ANF ​​a obtenu une correspondance confidentielle entre les administrations de Berlin et d’Ankara quelques mois après le massacre de Paris. Le 5 mars 2013, le ministère turc de la Justice a demandé une «aide judiciaire» à l’État allemand par l’intermédiaire du ministère des Affaires étrangères, en posant les questions suivantes:

-Omer Guney a-t-il la citoyenneté allemande ?

-Est-ce que Guney a des liens avec le PKK / KCK ?

-Est-ce que Guney a reçu un entraînement aux armes en Allemagne ?

Le Bureau fédéral de la justice à Bonn, sous l’autorité du ministère allemand de la Justice, a répondu aux questions sur Omer Guney le 26 avril 2013. La réponse transmise à l’État turc par l’intermédiaire de l’ambassade de Turquie à Berlin montreque les autorités allemandes « ne savent rien » concernant les trois questions.

L’ambassade de Turquie a traduit la réponse de l’Allemagne en turc le 2 mai 2013 et l’a envoyée au ministère turc de la Justice avec la note suivante: «À propos de la demande d’aide judiciaire concernant Omer Ziya Guney dans la correspondance correspondante, la réponse du Bureau fédéral de la justice indique qu’il y a aucune information sur le statut de citoyen allemand d’Omer Ziya Guney, qu’il n’y avait pas de lien détecté entre lui et le PKK / KCK lors de son séjour en Allemagne et qu’il n’existait aucune information indiquant s’il avait ou non suivi un entraînement aux armes en Allemagne. »

Pourquoi l’Allemagne a évité de répondre aux questions de la Turquie ?

Dans leur correspondance, les autorités judiciaires allemandes ont répondu de manière significative à toutes les questions concernant Omer Guney en indiquant qu’elles « n’avaient aucune information » et ne donnaient aucune information sur son casier judiciaire en Allemagne. C’est avec curiosité que l’Etat turc a demandé si Guney avait suivi un entraînement aux armes en Allemagne.

En dépit de la réponse de l’Etat allemand aux questions, Guney avait un casier judiciaire étendu en Allemagne, qui n’a pas été fourni à Ankara par les autorités allemandes. Le gouvernement allemand a répondu à une enquête de Die Linke (parti de gauche allemande) sur Guney à la suite du massacre de Paris et a déclaré qu’Omer Guney avait été arrêté avec une arme non enregistrée dans sa voiture. Le gouvernement fédéral allemand a déclaré ce qui suit sur le casier judiciaire de Guney dans sa réponse à l’enquête de Die Linke :

– Une arme à feu (…) a été trouvée dans la voiture de Omer Guney le 17 novembre 2005 à Bad Tolz, une ville de Bavière, en Allemagne. Une enquête ultérieure a révélé que l’arme n’était pas enregistrée. Guney a été jugé pour « violation du code de la route ».

-Omer Guney a été pris avec un spray au poivre et un couteau dans sa voiture lors d’une vérification de la circulation le 4 février 2011.

Un ancien collègue d’Omer Guney s’était entretenu avec l’ANF à ce moment-là et avait déclaré : « Ses amis intimes étaient des nationalistes turcs. Il traînait avec eux, il a avait toujours des couteaux de poche, petits mais coûteux, et il s’intéressait profondément aux armes à feu. Un jour, il a emmené sa voiture dans les bois et l’a criblée de balles. Au moins c’est ce qu’il nous a dit alors. L’assurance ne couvrirait pas ses dommages (…), alors il est allé faire réparer sa voiture illégalement. »

ANF

« En Turquie, il y a des milliers de Demirtas en prison »

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Maître Esra Erin s’est adressée aux députés de la Gauche Unitaire européenne (GUE-NGL) lors de la réunion du groupe politique au Parlement européen le 5 décembre 2018.

Me Esra Erin : « Je ne suis que l’une des avocats de Selahattin Demirtas parmi d’autres. Nous avons constitué une véritable armée de 1500 avocats volontaires pour le défendre.

Je suis en outre chargée des relations publiques et des affaires médiatiques de Demirtas.

Après avoir résumé la situation juridique et donné les dernières précisions relatives à sa situation, j’expliquerai qu’en Turquie, il y a en réalité des milliers de Demirtas en prison.

Comme on le sait, Selahattin Demirtas a été arrêté à son domicile dans la nuit du 4 novembre 2016 et placé en garde à vue.

Il a ensuite été mis en détention, accusé d’avoir prononcé des discours durant son mandat garantissant pourtant l’irresponsabilité parlementaire. Il a ensuite été envoyé en exil intérieur vers la prison de haute sécurité d’Edirne située à 1500 km de sa famille.

Dans la pratique de l’application de la peine en Turquie, nous sommes souvent confrontés à une procédure d’éloignement qui condamne le détenu à vivre loin de sa famille. Cette mesure est un mécanisme appliqué sans exception dans les affaires politiques et vise essentiellement à user moralement le prisonnier.

Comme vous le savez, il y a une double violation, d’abord concernant la détention de Selahattin Demirtas, celle de l’article 5 alinéa 3 de la CEDH (arrêt du 20 novembre 2018) garantissant la liberté et la sécurité de la personne et deuxièmement, concernant son rôle de député et de co-président d’un parti d’opposition, celle de l’article 3 du Protocole additionnel n°1 relatif au droit à des élections libres. Mais cette double violation ne se limite pas à ses deux sujets. Elle vise aussi les électeurs qu’il a représentés lors du référendum constitutionnel et du scrutin présidentiel. Sa privation de liberté l’a empêché de participer aux activités de la Grande Assemblée Nationale de Turquie (TBMM).

Enfin, tenant compte de la situation politique générale qui prévaut en Turquie, la Cour (européenne des droits de l’homme, NDT) a établi que la détention de Demirtas et la restriction de ses droits a pour raison première la volonté du pouvoir d’étouffer le pluralisme et réduire les libertés relatives au débat politique et que par conséquent, les menaces ne visent pas uniquement les droits et libertés de Demirtas mais tout le système démocratique. Elle a conclu à une violation de l’article 18 de la Convention européenne des droits de l’homme et a ordonné la libération immédiate de Demirtas.

Malgré cette décision, le président de ce pays a déclaré : «Les décisions de la CEDH ne nous contraignent aucunement. Nous ferons tout ce qu’il faut pour la prospérité de ce pays.»

Et nous avons malheureusement appris hier qu’une instance supérieure du tribunal qui traitait l’affaire des propos tenus par Selahattin Demirtas alors couvert par l’irresponsabilité parlementaire s’est prononcée de manière expéditive de sorte que sa détention provisoire soit commuée en condamnation définitive.

Sa peine de prison de 4 ans et 8 mois a ainsi été confirmée. Douze autres dossiers sont en suspens pour lesquels un total de près de 150 ans de prison sont requis.

L’arrêt de la CEDH prévoyait la libération immédiate (de Selahattin Demirtas) endéans les 15 jours mais le dossier en appel a été traité de manière prioritaire alors que celui-ci n’était pas encore au programme du calendrier judiciaire.

La confirmation en appel d’une telle condamnation illustre de manière cinglante le mépris du président de la République envers l’arrêt de la CEDH exprimée à travers la phrase « nous ferons le nécessaire ». Pour une juriste comme moi, cette décision me fait honte.

Telle est la situation de Selahattin Demirtas. Mais nous constatons comme je l’ai précisé plus haut, dans l’application de l’état d’urgence décrété au lendemain de la tentative de coup d’état du 15 juillet que le gouvernement tente de venir à bout de l’opposition avec des méthodes judiciaires et mène des opérations violentes contre la démocratie en Turquie créant ainsi un véritable « régime d’emprisonnement » (ou l’emprisonnement est la norme NDT).
D’après les chiffres qui nous sont parvenus, entre le 16 juillet 2016 et le 20 mars 2018, le nombre de personnes placées en détention est de 228.137. »
 

Esra Erin a été invitée par Marie-Christine Vergiat à s’exprimer devant les députés de la GUE/NGL le 5 décembre dernier.

Via eurocitoyenne.fr

Turquie: l’une des plus grandes menaces à la paix au Moyen-Orient. Plus tôt les USA s’en rendront compte, mieux ce sera

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Texte écrit par Giran Ozcan, le représentant du Parti démocratique des peuples (HDP) aux États-Unis :
 
Tant que la Turquie sera en guerre avec le PKK, cette guerre ne sera pas confinée aux frontières de la Turquie. C’est une situation qui menace la stabilité et la sécurité des partenaires et alliés américains en Syrie et en Irak.
 
Cette semaine, le conseiller américain à la Sécurité nationale, John Bolton, a déclaré que les militaires américains ne quitteraient pas la Syrie tant qu’un accord n’aurait pas été conclu en Turquie pour protéger les Kurdes syriens. À un moment où la politique américaine dans cette région change de jour en jour, la véracité de sa déclaration est incertaine – mais le président turc Erdogan l’a considérée comme une déclaration de guerre, refusant de rencontrer Bolton et menaçant que les forces turques puissent pénétrer dans la Syrie « dès la fin de la réunion. »
 
Qu’une simple offre de protection pour les forces qui ont formé les alliés les plus efficaces des États-Unis contre l’Etat islamique suscite une telle réponse montre à quel point les deux pays ont divergé, même si les responsables turcs considèrent le retrait promis comme une étape positive. Cela met également en lumière une réalité qui dérange: Erdogan n’intervient en Syrie que pour attaquer le gouvernement autonome kurde et consolider le soutien interne [en Turquie].
 
Erdogan affirme que son combat en Syrie ne concerne pas le peuple kurde, mais le «terrorisme» – une affirmation que les Kurdes en Turquie connaissent trop bien. La guerre contre le terrorisme menée par le gouvernement AKP a toujours été une guerre contre la participation politique kurde démocratique, laissant des dizaines d’élus emprisonnés, des milliers d’électeurs privés de leurs droits et des millions d’hommes, de femmes et d’enfants ayant peur de parler publiquement leur langue maternelle par peur des violences. Entre-temps, ce même gouvernement a fermé les yeux sur les groupes terroristes qui menacent la Turquie, la Syrie et le monde.
 
Mon parti, le HDP, a été confronté à ce double standard. Dix de nos députés élus, dont l’ancien co-président du HDP, Selahattin Demirtaş, sont actuellement incarcérés pour des accusations fabriquées, accusés de terrorisme pour des déclarations soutenant les négociations de paix entre la Turquie et le PKK qui ont eu lieu entre 2013 et 2015. L’attaque la plus dévastatrice de l’Etat islamique dans l’histoire turque, a ciblé un rassemblement de la paix de 2015 auquel nous avons participé. Cette tragédie a eu lieu un an avant l’intervention officielle des forces turques contre l’Etat islamique à Al-Bab et à Jarablus, lorsque les combattants islamistes utilisaient toujours le pays [Turquie] comme «base arrière» pour leurs opérations contre le régime syrien.
 
La menace d’intervention d’Erdogan dans le nord-est de la Syrie serait une répétition de ce schéma: des attaques contre les institutions pluralistes et démocratiques de la région, aux dépens de la lutte mondiale contre les groupes terroristes qui nous menacent tous. Un tel résultat sera désastreux pour la Syrie, la Turquie ou la communauté internationale dans son ensemble.
 
Traiter la paix en Turquie et la paix en Syrie comme des initiatives séparées, comme cela a été la politique américaine, condamnera les deux processus à l’échec. Tant que la Turquie sera en guerre avec le PKK, cette guerre ne sera pas confinée à ses frontières – une situation qui menace la stabilité et la sécurité des partenaires et des alliés des États-Unis en Syrie et en Irak. La dernière série de négociations de paix a été soutenue par 81% de la population turque et a abouti à un cessez-le-feu de deux ans – au cours duquel les troupes turques ont même pu mener à bien une opération conjointe avec le même YPG qu’Erdogan cherche maintenant à éradiquer.
 
Les États-Unis ont des options pour empêcher la menace d’intervention d’Erdogan – et pour œuvrer en faveur d’un modèle plus durable des relations américano-turques. Pour ce faire, ils doivent cesser de formuler leurs politiques par des déclarations et définir une stratégie claire pour la Turquie et pour la Syrie, qui protège la démocratie et soutient les initiatives de paix prises localement. Cette stratégie doit reconnaître que les deux conflits – le combat des Turcs contre les Kurdes en Turquie et en Syrie – sont liés et que l’un ne peut être résolu sans l’autre. Ils doivent également reconnaître les forces démocratiques en Turquie qui se sont opposées à la politique étrangère déstabilisante d’Erdogan et ont appelé à la paix à grands frais.
 
Malgré les avantages manifestes du cessez-le-feu de deux ans entre le PKK et le gouvernement turc – pour les Turcs comme pour les Kurdes – ce processus a échoué en partie car aucune tierce partie n’a investi dans son succès. Les responsables américains ont toujours un poids considérable sur leurs alliés turcs et les dirigeants du PKK ont lancé plusieurs appels à la médiation américaine. Aucun autre pays n’est aussi bien placé que les États-Unis pour investir dans la paix – et les gains pour la stabilité régionale et la crédibilité internationale bénéficieraient aux États-Unis.
 
Pour ce faire, les États-Unis doivent soutenir les citoyens turcs qui ont toujours revendiqué cette exigence, malgré une répression importante les visant. La pression américaine a déjà libéré des prisonniers politiques du monde entier. Son soutien aux élus, démis de leurs fonctions et incarcérés pour avoir servi leurs électeurs pourrait largement aider le gouvernement de l’AKP à montrer que le monde est déterminé à soutenir la paix et à s’opposer à la répression. Un gouvernement turc plus pluraliste et démocratique est un meilleur voisin et un meilleur allié, ce que les pouvoirs régionaux et internationaux pourraient facilement soutenir.
 

À l’heure actuelle, les États-Unis ont le choix entre prolonger deux guerres ou y mettre fin. Dans l’intérêt de la démocratie et de la paix, le Moyen-Orient et le monde leur conseillent de choisir judicieusement.

Traduit de l’anglais par Kurdistan au féminin

Photo : Dilbirin Remo

Le pillage des olives d’Afrin à l’ordre du jour du Parlement suisse

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GENÈVE – Le député suisse Bernhard Guhl a porté à l’ordre du jour du parlement suisse le pillage des olives d’Afrin par la Turquie pour les vendre à l’Espagne. Guhl a souligné que l’Etat turc continue de violer le droit international devant les yeux du monde entier.
 
Les manifestations se poursuivent contre l’Etat turc et ses gangs alliés envahissant Afrin et pillant les oliveraies de la population pour réaliser d’énormes profits.
 
Le député du Parti BDP, Bernhard Guhl a présenté une motion à ce sujet au parlement national et au Conseil fédéral suisse.
 
« L’Etat turc pille les olives »
 
Le député Guhl a soumis une motion intitulée «Où ira l’argent des olives volées à Afrin ?», Dans laquelle il est précisé: « Dans Afrin occupée par les Turcs, les oliveraies sont pillées à la fois par les forces turques et les milices qu’elles soutiennent. Les olives qu’ils volent ont été vendues à l’Espagne et la vente se poursuivra. »
 
Guhl a posé les questions suivantes dans sa motion au Conseil fédéral et au Parlement national :
 
– Comment le vol et le pillage des olives à Afrin seraient-ils considérés au regard du droit international ?
 
– Le Conseil fédéral a-t-il pris des mesures contre ce vol ?
 
– Que fait le Conseil fédéral pour s’assurer que les dizaines de millions d’euros de revenus générés par ces olives volées vont aux propriétaires légitimes ?
 
«Le ministère des Affaires étrangères suit l’affaire de près»
 
Le Conseil fédéral a répondu oralement à la motion du député Guhl et a déclaré que le ministère suisse des Affaires étrangères suivait l’affaire de près.
 
Des questions graves qui attendent des réponses
 
Le député Bernhard Guhl a présenté une autre motion au Parlement national à la suite de cette réponse et, mentionnant l’affirmation du Conseil fédéral selon laquelle l’affaire était suivie de près, a déclaré que le Conseil fédéral avait le devoir de répondre aux questions suivantes :
 
– Combien de tonnes d’olives ont été récoltées à Afrin en 2018 ?
 
– Où ces olives ont-elles été prises après la récolte et où ont-elles été transformées ?
 
– Dans quels pays ces olives ou leurs dérivés ont-ils été exportés ?
 
– Combien de revenus les olives ont-ils généré et qui en a bénéficié ?
 
– Selon des articles de presse, les forces d’invasion turques ont abattu de nombreux oliviers à Afrin. Combien d’arbres ont été abattus et cette pratique continue-t-elle encore ?
 
– La Turquie a envahi Afrin le 20 janvier 2018 et occupe toujours la ville. Pourquoi la Suisse ne pousse-t-elle pas la Turquie à mettre fin à cette occupation ?
 
– La Turquie crée une infrastructure à Afrin pour annexer la ville. Que fait la Suisse pour mettre fin à l’annexion d’Afrin sur le territoire turc ?
 
– Erdogan a déclaré qu’il se préparait à une nouvelle attaque contre les Kurdes syriens. Pourquoi la Suisse ne met-elle pas Erdogan en garde contre cela de manière sérieuse ?
 
Des dizaines de motions concernant les Kurdes soumises au Parlement suisse
 
Par le passé, le député au Parlement national du Parti démocratique conservateur (BDP), Bernhard Guhl, a soumis au Parlement suisse des dizaines de motions appelant à attirer l’attention sur les attaques de l’État turc contre des Kurdes. À une époque où les députés du Parlement suisse aux origines kurdes et les députés des partis de gauche que les Kurdes ont soutenus lors des élections restent silencieux, le député Guhl se distingue par son insistance pour que les attaques contre les Kurdes fassent partie des priorités publiques de la Suisse.
 
Via ANF

Aidons une petite fillette à retrouver sa maman vivant en France

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FRANCE – Une campagne d’aide financière a été lancée en solidarité avec Z.G, une jeune femme originaire de Turquie vivant en France séparée de sa fillette handicapée restée en Turquie. Elle a besoin de 1 100 euros pour les démarches nécessaires afin de ramener sa fille en France (Lisez son témoignage suivant).
 
Vous pouvez faire un don, même de quelques euros, en allant cliquant ici
 
Voici l’histoire et l’appel à l’aide Z.G :
 
« Bonjour à toutes et à tous,
 
Je suis Z.G Je fais appel à votre solidarité.
 
Pour ce faire, je vais partager avec vous les carrefours importants de ma vie, sans entrer dans les détails de mon histoire personnelle.
 
Chacune des pages de nos vies est une autre lutte. Chaque personne se doit de mener le combat pour une vie libre. S’il s’agit d’une femme, il y a un double combat à mener. Une femme trans, bisexuelle, lesbienne mène des combats multiples.
 
A toutes les étapes de ma vie, j’ai été contrainte de lutter ainsi.
 
Je suis une femme lesbienne. En 2008 ma famille m’a mariée très jeune, par la force, et m’a envoyée en France. Avant de venir en France j’ai été violée. En France, je fus séquestrée à la maison pendant un an, et j’ai subi des violences physiques et psychologiques.
 
Dans un pays que je ne connaissais pas, dont je ne parlais pas la langue, enfermée à la maison, sous l’oppression d’un homme, au bout d’un an, je faisais 160 kg… Ces années furent comme la fin de ma vie.
 
En 2013 j’ai trouvé enfin un moyen pour quitter l’homme qui a détruit ma vie, et j’ai fui de la France vers la Turquie.
 
C’est à Istanbul, que j’ai vécu une autre étape de ma vie, de mes combats. Je suis tombée enceinte après une relation sexuelle dont je ne voulais pas, d’un homme que je ne souhaitais pas.
 
Le 1er septembre 2015, j’ai accouché. J’ai aujourd’hui, une fille de 3 ans. Physiquement handicapée, n’ayant aucune sécurité ni aide sociale ou médicale, je dois vivre en France. Mais je suis alors séparée de ma fille. Je voudrais prendre ma fille avec moi en France. J’ai entamé des procédures, mais ces démarches sont suspendues pour des raisons économiques.
 
Pour que je puisse faire venir mon enfant, une procédure juridique doit être finalisée. Il s’agit d’un procès, pour lequel je dois fournir des analyses de sang, pour moi, pour ma fille, et pour l’homme enregistré comme le père de ma fille, mais qui n’est pas son père biologique. Pour chacune des analyses, je dois verser 99€, donc un total de 297€. Il y a aussi des frais d’un administrateur (tuteur), pour un montant de 600€, et des frais de dossier à hauteur de 200€.
 
Le budget nécessaire minimum atteint donc les 1100€.
Actuellement en France, je perçois une aide sociale mensuelle de 713€. Avec cette aide, j’essaye de payer la garde de ma fille en Turquie, et de survivre ici. Toute seule, je ne peux malheureusement payer ces frais pour poursuivre cette procédure.
Le 24 décembre, le procès fut suspendu du fait de ne pas avoir pu régler les frais de l’administrateur. Il y a toujours une possibilité de réactiver le dossier, à condition de payer l’administrateur , jusqu’en février. Si je ne peux faire aboutir cette procédure, ma fille ne pourra pas venir en France avant ses 18 ans et moi et ma fille serons obligées de vivre séparées, dans des pays différents. Si je réussis à récolter les sommes nécessaires, je vais pouvoir payer les frais de l’administrateur, fournir les analyses de sang des trois personnes, et le procès se terminera en un an.
Je voudrais commencer l’année 2020 avec ma fille.
 

Je fais appel à votre solidarité pour traverser ces étapes en 2019. »

https://www.lepotcommun.fr/pot/dvivyyk5?fbclid=IwAR3zn30Nm-zS-QvCBnbSYJ4xUgiiWSdaqA5DnynA1qTBh5qTQ7i5zaFoSPc

TURQUIE : Pas de paix pour les journalistes

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TURQUIE – Cette semaine, comme toutes les autres semaines, de nombreux journalistes, ou de simples citoyens sont présentés à la « (in)-justice » turque pour avoir osé exprimer des opinions qui ne plaisent pas au pouvoir turc.

Parmi les personnes « jugées » cette semaine, il y a l’artiste kurde Ferhat Tunç, les journalistes Mesale Tolu et Halil Ibrahim Erbil.

Erbil fait l’objet de poursuites en raison de ses publications sur les réseaux sociaux qui auraient « menacé » la maire de GaziAntep, Fatma Şahin. Erbil est également accusé faire de la propagande au nom d’une organisation terroriste sur les réseaux sociaux.

Au cours de la dernière audience tenue le 21 juin à la 2. Cour pénale de Gaziantep, le tribunal a ajourné l’audience jusqu’au 10 janvier 2019, ordonnant l’exécution du mandat d’arrêt d’Erbil. Erbil est actuellement réfugié en France, son avocat a déclaré qu’il ne pouvait actuellement pas retourner en Turquie à cause du mandat d’arrêt.

Le calendrier des persécutions déguisées en « procès » est ici