Réfugiée en France depuis 2004, Maha Hassan possède également la nationalité française. Écrivaine d’expression arabe ayant publié plus d’une dizaine de romans, Maha a entrepris le défit d’écrire son dernier roman Femmes d’Alep en français, même si elle a eu besoin d’aide pour cela. Le résultat est un roman de plus de 450 pages qui met en scène la vie de dizaines de femmes, majoritairement des femmes de la famille de Maha: des grand-mères, tantes, cousines, sœurs, nièces, sa propre mère, Maha elle-même et sa fille qui n’est jamais née… Des femmes victimes de crimes d’honneur, des femmes persécutées au nom de l’Islam, des femmes exilées, des femmes rescapées de génocide, des femmes victimes de guerre, des femmes à la sexualité réprimée, des femmes victimes de violences conjugales, des femmes privées de faire des études, des femmes qui luttent pour échapper à l’univers patriarcal et misogyne moyen-oriental, des femmes qui n’ont que Maha pour faire entendre toute l’horreur qu’on leur a infligée depuis leur plus tendre enfance car nées femmes…
Certains chapitres de Femmes d’Alep nous font penser au roman “La laveuse de mort” de Sara Omar, une écrivaine kurdo-danoise vivant sous la protection de la police pour avoir dénoncé les crimes d’honneur et les violences masculines au sein de la société conservatrice kurde. En effet, même si le roman de Maha englobe un champ plus large des violences faites aux femmes (quelles soient étatiques, religieuses, culturelles, ethniques, sexistes, racistes…) leur brutalité et l’effet destructeur qu’elles entrainent sont similaires dans les deux romans.
Maha Hassan dit qu’elle se sent être missionnée par les femmes qu’elle a croisées dans sa vie pour être leur voix qu’on a étouffée.
Femmes d’Alep est un roman qui nous fait voyager à travers l’histoire depuis l’empire ottoman et le génocide arménien jusqu’à la guerre en Syrie qui a déversé des millions de femmes et d’hommes sur les chemins de l’exil. C’est également un roman qui nous emmène à Afrin, autrefois un havre de paix au milieu de la guerre syrienne aujourd’hui devenu un « Islamistan » avec des mercenaires jihadistes à la solde de la Turquie qui ont commis des crimes de guerre. C’est aussi un roman dans lequel Maha questionne sa place dans la société française qui lui colle souvent l’étiquette de femme arabe musulmane à cause de son accent et sa couleur de peau. A lire pour découvrir un monde féminin riche et insoupçonné…