Accueil Blog Page 288

TURQUIE. Journalistes mobilisées pour une collègue kurde emprisonnée

TURQUIE / KURDISTAN – Six syndicats et associations ont appelé les groupes de journalistes internationaux à exprimer leur soutien à leur collègue Dicle Müftüoğlu avant sa prochaine audition le 29 février.

Six organisations professionnelles de journalistes en Turquie ont publié une déclaration appelant à une campagne internationale pour la libération du journaliste kurde emprisonné Dicle Müftüoğlu.

L’Association des journalistes contemporains (ÇGD), l’Association des journalistes Dicle Fırat (DFG), l’Association des médias et des études de droit (MLSA), l’Association des femmes journalistes de Mésopotamie (MKG), le Syndicat des travailleurs de l’impression et de l’édition de presse (DİSK Basın-İş) et l’Union des journalistes de Turquie (TGS) a envoyé sa déclaration aux organisations de presse internationales et aux institutions travaillant dans le domaine des droits de l’homme.

Avant la troisième audience du 29 février, ils ont demandé la libération de Müftüoğlu et déclaré :

 

« La journaliste kurde primée Dicle Müftüoğlu, connue pour son travail précieux dans le domaine du journalisme en tant que coprésidente de l’Association des journalistes Dicle Fırat (DFG) et rédactrice en chef de l’Agence Mésopotamie (MA), a été arrêtée le 3 mai 2023, lors de la Journée internationale de la liberté de la presse, et envoyée en prison.

Dicle Müftüoğlu a été arrêtée à Diyarbakır le 29 avril 2023, dans le cadre de l’enquête menée par le parquet général d’Ankara. Détenue dans la prison fermée pour femmes de Sincan pendant près de 10 mois, un acte d’accusation a été préparé contre Müftüoğlu pour « appartenance à une organisation illégale [PKK] » et « formation et gestion d’une organisation illégale ». Cependant, après examen de l’acte d’accusation de 43 pages, il n’y a pas une seule accusation contre Müftüoğlu en 41 pages.

Lors des audiences du 14 décembre 2023 et du 18 janvier 2024, il est apparu que Müftüoğlu n’avait eu aucune action ou activité dans le cadre du dossier autre que ses activités journalistiques. L’opinion publique est bien consciente de la pression exercée sur les journalistes kurdes en Turquie. Müftüoğlu fait partie de ces journalistes qui ont été arrêtés et jugés à plusieurs reprises sous cette pression. On constate cependant qu’elle est soumise à une peine incertaine en raison d’une détention prolongée. Malgré le manque de preuves suffisantes pour qu’elle reste en prison, le juge ne l’a pas libérée lors des deux audiences.

Müftüoğlu comparaîtra devant le juge pour la troisième fois le 29 février. Tout en exerçant sa profession, Müftüoğlu a toujours soutenu et défendu les principes et les règles éthiques du journalisme. Malgré les défis et les difficultés du journalisme, elle a poursuivi avec diligence son devoir d’informer le public. Grâce à ses efforts, elle a reçu le prix du « Journaliste le plus résilient » décerné par Free Press Unlimited, basé aux Pays-Bas.

L’arrestation de Müftüoğlu en raison de sa profession de journaliste constitue non seulement une agression contre elle, mais aussi une grave atteinte à la liberté de la presse et aux valeurs fondamentales de la démocratie. Dans ce contexte, nous appelons au soutien international pour lancer une campagne pour la libération de Müftüoğlu avant son procès le 29 février.

Nous voulons que l’on sache que le journalisme fait partie intégrante de la démocratie et que protéger les journalistes signifie protéger la liberté d’expression et la démocratie. Nous demandons que des mesures soient prises, en tenant compte du cas de Dicle Müftüoğlu et des cas similaires d’autres journalistes ayant besoin de protection.

TURQUIE. Le parlement turc fait taire le kurde pendant la Journée internationale de la langue maternelle

0

TURQUIE – Lorsque la députée du Parti de l’égalité des peuples et de la démocratie (DEM), Beritan Güneş Altın, a tenté de prononcer un discours en kurde au parlement turc, à l’occasion de la Journée internationale de la langue maternelle, son microphone a été coupé, déclenchant un débat sur les droits linguistiques et l’unité nationale.

Alors que les débats sur les droits linguistiques continuent de se dérouler en Turquie à l’occasion de la Journée internationale de la langue maternelle, une députée du parti pour l’égalité des peuples et la démocratie (DEM) a été réduite aux  silence alors qu’elle tentait de s’exprimer en kurde lors d’une session du parlement turc.

La députée DEM de Mardin (Mêrdîn) Beritan Güneş Altın avait commencé à s’adresser à l’assemblée en kurde mercredi lorsque son micro a été éteint par le président de la séance, Celal Adan, du Parti du mouvement nationaliste (MHP) d’extrême droite, citant « l’indivisibilité de l’État et la nation turques », comme le stipule l’article 3 de la Constitution.

En réponse à l’interruption, Güneş Altın a remis en question ce qu’elle considérait comme deux poids, deux mesures, en se demandant si la célébration de la Journée mondiale de la langue maternelle était considérée comme de la propagande de la part des dirigeants parlementaires. Elle a souligné l’hypocrisie d’être empêché de parler kurde alors que les candidats du Parti de la justice et du développement (AKP) au pouvoir étaient autorisés à utiliser le kurde dans leurs campagnes dans des régions à majorité kurde telles que Mardin, Diyarbakır (Amed) et Şanlıurfa (Riha).

Güneş Altın a expliqué qu’elle souhaitait célébrer les langues des peuples du monde en kurde. Elle a fait une seconde tentative, mais son micro a été éteint une seconde fois, soulignant le traitement réservé à la langue kurde dans la sphère politique en Turquie.

L’incident a rapidement déclenché un débat plus large sur le droit à l’expression linguistique au sein des institutions politiques turques et sur la lutte en cours pour les droits linguistiques kurdes. Les remarques ultérieures faites en turc devant l’Assemblée par le président du groupe du parti DEM, Sezai Temelli, reflétaient des questions profondément enracinées sur l’identité nationale, l’unité et la place des langues minoritaires en Turquie.

TURQUIE. Le parti DEM alerte l’UNESCO contre la violation des droits linguistiques en Turquie

TURQUIE / KURDISTAN – Le parti politique DEM demande à l’UNESCO d’agir pour lever les réserves que la Turquie a émises sur les articles 17, 29 et 30 de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, afin de répondre aux exigences de la convention.

A cause d’interdiction de la langue kurde dans plusieurs régions du Kurdistan (en Turquie et en Iran notamment), le kurde et ses dialectes (kurmanjî, soranî, zazakî, goranî…) se trouvent sur la liste des langues en danger de l’UNESCO, allant de « vulnérables » à « critiques » pour certains d’entre eux.

Le DEM parti s’adresse à l’UNESCO pour sauver les langues maternelles en Turquie

Les coprésidents du parti DEM (Parti pour l’égalité des peuples et la démocratie), Tülay Hatimoğulları et Tuncer Bakırhan, ont écrit une lettre à l’UNESCO à l’occasion de la Journée internationale de la langue maternelle.

Célébrant le 21 février la Journée internationale de la langue maternelle, la lettre rédigée par les coprésidents du parti DEM se lit comme suit :

« Le droit à l’éducation dans la langue maternelle est l’un des droits humains les plus fondamentaux et a été reconnu par les Nations Unies. La mise en œuvre de ce droit est exigée de tous les États membres de l’ONU. Cependant, ce droit a été refusé aux peuples kurde, arabe, arménien, assyrien, circassien et laz de Turquie. Dans ce pays, toutes les langues autres que le turc sont systématiquement interdites et leurs locuteurs assimilés au système turc. En raison des politiques d’assimilation, de nombreuses langues turques sont en danger d’extinction. Selon l’Atlas des langues mondiales en danger de l’UNESCO, dix-huit langues ont disparu ou sont en danger d’extinction en Turquie. L’une de ces langues est le dialecte kurde Kirmancki.

L’assimilation des langues et les politiques de destruction culturelle sont considérées comme des crimes contre l’humanité. Cependant, la Turquie ne respecte pas les résolutions internationales protégeant les langues et continue de violer ces droits.

En tant que Parti de l’égalité des peuples et de la démocratie (Parti DEM), nous profitons une fois de plus de l’occasion du 21 février, Journée internationale de la langue maternelle, pour appeler votre institution et toutes les institutions internationales à assumer leurs responsabilités. Nous exigeons que vous envoyiez une délégation en Turquie et que vous ouvriez une enquête sur la violation des droits à la langue maternelle. En Turquie, le statut du kurde (les dialectes Kurmancî et Kirmanckî ou zazakî), de l’arabe, de l’arménien, du syriaque, du circassien, du laz, du romani, du bosniaque et de toutes les autres langues doit être reconnu. Nous exigeons que la Turquie se conforme aux décisions internationales sur les droits fondamentaux et remplisse les exigences des accords internationaux. Et nous demandons à votre institution de prendre les mesures nécessaires pour lever les réserves que la Turquie a émises sur les articles 17, 29 et 30 de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, afin de répondre aux exigences de la convention. »

ROJAVA. La journée internationale de la langue maternelle célébrée à l’école

SYRIE / ROJAVA – Interdite sous le régime baasiste, la langue kurde renait de ses cendres grâce à l’instauration d’une région autonome dans le nord de la Syrie où les enfants kurdes reçoivent un enseignement dans leur langue maternelle. Aujourd’hui, ils ont célébré la journée internationale de la langue maternelle en scandant le slogan « Bê Ziman Jiyan Nabe (sans la langue, il n’y a pas de vie) » et en chantant l’hymne national kurde « Ey Reqip ».

A cause d’interdiction de la langue kurde dans plusieurs régions du Kurdistan (en Turquie et en Iran notamment), le kurde et ses dialectes (kurmanjî, soranî, zazakî, goranî…) se trouvent sur la liste des langues en danger de l’UNESCO, allant de « vulnérables » à « critiques » pour certains d’entre eux.

TURQUIE. 15 personnalités politiques kurdes condamnées à la prison

0

TURQUIE / KURDISTAN – L’audience finale du procès du KCK contre 15 personnalités politiques kurdes à Mardin en 2014 s’est tenue hier. Elles sont condamnées à des peines de prison pour « appartenance à une organisation (terroriste) ».

L’audience finale du procès du KCK contre 15 personnalités politiques kurdes à Mardin s’est tenue hier par la 2e Haute Cour pénale de Mardin.

Les noms de 15 politiciens kurdes sont : Nazım Kök, Davut Bozan, İpek Güneş, Ayşe Bozan, Ziver Gümüş, İsa Durç, Lokman Ekenek, Abdulkadir Aktaş, Erdal Irmak, Davut Şahin, Musa Alkan, Sedat Dağ, Mesut Amak, Genco Akman et Gülser Yıldırım, ancien député du Parti démocratique des peuples (HDP).

Quinze hommes politiques kurdes n’ont pas assisté à l’audience alors que leurs avocats étaient présents.

Donnant son avis lors de l’audience, le parquet a requis des peines de prison contre les politiciens kurdes pour « appartenance à une organisation (terroriste) ».

Le tribunal a condamné Lokman Ekenek, Davut Şahin, Nazım Kök, Ziver Gümüş, Davut Bozan, İpek Güneş et Ayşe Bozan à sept ans et six mois de prison chacun. Musa Alkan et Isa Durç ont été condamnés à six ans, 10 mois et 15 jours de prison. Genco Akman, Sedat Dağ, Gülser Yıldırım, Mesut Amak, Abdulkadir Aktaş et Erdal Irmak ont ​​été condamnés à six ans et trois mois de prison.

KURDISTAN. La Turquie tue deux peshmergas à Akrê

0

IRAK / KURDISTAN – Hier soir, un drône turc a bombardé le village de Kafiya à Dînartê, dans la province d’Akre*, district de Duhok. Deux peshmergas kurdes auraient été tués dans l’attaque bien que d’autres sources parlaient de civils.

Les peshmergas tués sont Arif Taha (61 ans) et Beşir Ömer Ali (68 ans).

Le PDK n’a fait aucune déclaration et le gouvernement régional du Kurdistan est également resté silencieux.

Les Peshmergas auraient été bombardés alors qu’ils travaillaient dans leurs vignes et leurs jardins au pied du mont Sîyarê.

Au moins 152 civils ont été tués et 228 civils ont été blessés lors des attaques menées par l’État turc contre le territoire du Kurdistan du Sud depuis 2015.

*Le mont d’Akrê est surnommé le mont du Newroz à cause des défilés aux flambeaux réalisés sur le mont d’Akrê pendant le nouvel-an kurde Newroz.

Non à l’interdiction de la langue kurde

A l’occasion de la journée internationale de la langue maternelle célébrée le 21 février, nous republions cet article concernant la langue kurde daté de 2020 mais qui reste d’actualité tant que le Kurdistan restera colonisé et la langue kurde interdite, notamment en Turquie.

« Qui peut dire que dérober sa langue à un peuple est moins violent que la guerre ? »  Ray Gwyn Smith

De nos jours, la probabilité d’entendre un Kurde vous dire « Je suis kurde mais je ne parle pas le kurde. » est très élevé. En effet, depuis la division du Kurdistan au début du XXe siècle, les États occupants du Kurdistan ont voulu mettre fin à l’existence du peuple kurde en mettant en place des politiques de génocide linguistique car il était très difficile d’exterminer physiquement des millions d’individus, malgré les nombreux massacres perpétrés, comme à Dersim, Zilan, Halabja… Alors, ces Etats (Turquie, Iran, Irak*, Syrie) ont interdit sévèrement la pratique du kurde dès la deuxième moitiés du XXe siècle.

Les Kurdes ne peuvent recevoir un enseignement en langue kurde, ne peuvent faire leur défense devant la justice, etc. ni même prétendre qu’ils ont une langue qui s’appelle le kurde car la Turquie nie l’existence de cette langue millénaire et la fait passer dans ses registres comme « langue X » (X pour dire « inconnue ») ! Retour sur un génocide linguistique à travers le regard d’une rescapée.

Ma famille vivait dans une ferme isolée dans la montagne, au Kurdistan du Nord (Bakur) sous occupation turque. Pendant l’hiver, le seul lien qu’on avait avec le monde extérieur était le poste de radio que mon père s’était achetée et de rares invités qui venaient des villages alentour quand il n’y avait pas trop de neige qui bloquait les sentiers menant à la montagne. Un jour, alors que j’étais encore bébé, mon père a déclaré à ma mère que dorénavant tous les enfants devaient parler que le turc, car l’État turc avait interdit formellement notre langue, sous peine d’amande et ou de la prison etc.

Cette interdiction de parler notre langue maternelle allait causer des traumatismes insoupçonnés chez les nouvelles générations. Il m’a fallu des années pour que je m’en rende compte de sa gravité. De nombreux flash-backs me rappelle cette lente destruction d’un peuple à travers sa langue bannie.

Notre village, où il y avait une école primaire récente, était à plusieurs km de notre ferme et les mois d’hiver enneigés empêchaient mes frères et sœurs de s’y rendre. Alors, mon père a dû les envoyer dans un internat.

Pour « couper » la langue kurde à la racine, dès les années 1980, l’État turc avait décidé de créer des internats** pour les enfants kurdes. Dès l’âge de 7 ans, les Kurdes passaient leur année scolaire en internat à la merci des enseignants et des surveillants dont la mission était d’inculquer la langue turque à des enfants qui n’en connaissaient pas un mot et de les turquifier en les coupant de leur familles, leur culture, leur langue. Je ne veux même pas m’attarder sur les sévisses psychiques, physiques et sexuels dont étaient victimes de nombreux enfants kurdes dans ces internats de l’horreur…

Quelques années après, on a dû abandonner notre ferme et nous nous sommes rapprochés de la petite ville où mes frères et sœurs étaient internés. Ainsi, ils ont pu quitter l’internat et revenus à la maison. Mais, on parlait tous le turc entre nous et notre père. Le kurde était réservé à notre mère qui parlait très mal le turc.

 

Le fait que les enseignants nous disent à langueur de jour qu’il n’y avaient pas de Kurdes en « Turquie » (car pour la Turquie il n’y avait ni Kurdes, ni Kurdistan), moi, petite fille, je me sentais coupable. Coupable d’exister alors qu’en toute logique, je le devais pas puisque c’est ce que nos enseignants disaient. Coupable aussi de parler, en cachette, une langue qui n’existait pas. Alors, un jour que notre maître a demandé s’il y avait des enfants qui ne savaient pas parler le kurde et qu’il fallait qu’ils lèvent le doigt, je me suis exécutée aussitôt. J’étais la seule et j’étais pas trop fière de moi…

Avec l’école, la télé et la radio turques, on n’avait plus besoin de faire d’effort pour oublier cette langue clandestine. L’État turc avait tout prévu pour nous. On n’avait qu’à se laisser faire. Notre vocabulaire du kurde diminuait de jour en jour, remplacé par le turc, jusque dans nos rêves, et ceci sans « aucun » regret. De toute façon, on n’aimait pas cette langue illégale. Qui aime l’illégalité, surtout quand vous êtes un enfant qui veut tout bien faire ?

Moi, la petite fille « sage » et « intelligente », j’étais la chouchoute de mes enseignants et j’avais même eu droit au surnom « la Turque » dans le voisinage pour avoir commencé à parler le turc avant le kurde tandis que les autres enfants avaient plus de difficultés à devenir de parfaits petits Turcs du jour au lendemain. Et que dire de la honte que je ressentais devant ma mère qui ne maîtrisait pas le turc ? Honte d’appartenir à un peuple qui ne devait pas exister, un peuple « arriéré », selon la définition de l’État colonialiste qui voulait en finir avec nous en nous turquisant bien comme il faut.

Une fois adulte et devenue exilée dans un pays occidental (France), dont je ne connaissais pas la langue, j’ai tout de suite voulu apprendre le français pour me défaire du turc car cet exil physique a été le déclic pour un retour mental à mes origines. Soudain, j’ai commencé à avoir les fameux flash-backs qui me rappelaient toutes les humiliations qu’on avait subi en tant que Kurdes et enfants et l’interdiction de parler notre langue sur notre propre terre.

Je passais mes journées à écouter des cassettes d’apprentissage du français, je lisais, je discutais avec des non-kurdes pour apprendre vite le français. La nuit, j’avais le dictionnaire « Le Petit Robert » dans mon lit (je dis toujours que Petit Robert fut mon premier amant français !)  En quelques mois, j’ai réussi a me débrouiller bien et au bout de quelques années, le français est devenue ma première langue. Mais je ne parlais toujours pas correctement ma langue maternelle et mon entourage m’avait surnommée cette fois-ci « la Française » !

Il y a quelques mois, je discutais avec un ami kurde qui m’avait demandé si j’étais née en France car mon français était « très bien ». Je lui ai dit que non, que j’étais venue à l’âge adulte, sans passer par la case école. Il me croyait à peine ! Je lui ai parlé de mes deux surnoms liés aux langues, avant d’ajouter que j’avais réussi à être turque et française et que maintenant, il était temps que je (re)devienne kurde et qu’on m’appelle enfin « Kurdê » (la Kurde) !

Aujourd’hui, je lis et écris le kurde, avec difficulté, sauf quand ce sont des poèmes orphelins qui viennent frapper à ma porte pour m’emmener au pays. Mais, je ne désespère pas, je vais réussir à devenir une « vraie Kurde » qui parle sa langue, même si ça va être difficile, qu’il me faudra trébucher sur les mots, tomber à terre, après tant d’années passées dans une paralysie linguistique imposée et vive la revanche des « vaincus » ! (Keça Bênav)

*Dans les autres parties du Kurdistan, en Irak, Iran et Syrie, on avait à peu près les mêmes interdictions. Aujourd’hui, au Kurdistan autonome d’Irak et au Rojava, on enseigne en langue kurde tandis qu’en Iran, le kurde continue à être criminalisé… C’est pourquoi, aujourd’hui beaucoup de Kurdes, ceux en Turquie essentiellement, ne parlent plus leur langue mais ils sont nombreux à lutter pour avoir le droit de la réapprendre et de la parler; de s’approprier de nouveau leur musique, leurs us et coutumes, pillés et interdits par leurs colonisateurs. Le prix à payer pour les Kurdes, afin d’obtenir ce qu’ils veulent, reste très élevé. Cela coûte souvent des vies mais ils restent déterminés.

 

** Cette décision mise en oeuvre a plutôt réussi, avec des effets dévastateurs qu’on peut facilement deviner sur le plan psychique et/ou socio-culturel chez les enfants kurdes et les adultes qu’ils sont devenus.

Pour finir avec les droits ou interdits concernant les langues, voici une histoire écrite par un écrivain kurde qui relate l’interdiction du kurde et ce qui nous attendait si on la bravait.

« Un pain en turc » ou comment interdire aux Kurdes de parler leur langue maternelle

Nous sommes dans les années 1980, dans une région kurde sous occupation turque. Un paysan court à la boulangerie de son village au retour de son champ et voudrait acheter un pain avant le coucher du soleil qui est proche, car dans cette région kurde, l’Etat turc a décrété un état d’urgence avec couvre-feu au couché du soleil. Le paysan lance à la hâte « ka nanakî, bi tirkî.** » en kurde, qu’on pourrait traduire en « un pain, en turc. » Ce pauvre paysan ne sait pas parler le turc mais il faut bien qu’il achète son pain d’une façon ou d’une autre.

Maintenant, imaginons un instant que cette scène ait lieu en France, pendant l’occupation nazi : Un paysan corrézien de retour de son champ, court à la boulangerie de son village. Le soleil va bientôt se coucher, or, il y a le couvre-feu à la tombée de nuit. Les Nazis ont interdit de parler le français et ont imposé la langue allemande dans tout le pays mais notre paysans corrézien ne parle pas un mot d’allemand. Alors, il dirait, vraisemblablement : « Un pain, en allemand. »

En effet, l’État turc avait interdit le kurde dans tout le pays, y compris dans les régions kurdes et ce, depuis la création de la Turquie en 1923. Même au sein de leurs foyers, les Kurdes ne pouvaient parler leur langue sous peine d’être arrêtés et/ou torturés, en plus de payer une amende. (L’Ėtat turc avait dépêché des fonctionnaires à cet effet dans tout le Kurdistan.)

Encore aujourd’hui, en Turquie, la langue kurde reste interdite, même si dans le cadre de la vie privée on peut la parler…

** « Ka nanakî bi tirkî / Bana türkçe bir ekmek ver » est le nom d’une nouvelle de Cezmi Ersöz, écrivain et journaliste kurde.

 

 

KURDISTAN. Un drone turc tue deux civils à Akrê

0

IRAK / KURDISTAN – Ce soir, un drone turc a bombardé le village de Kafia dans la région d’Akre. Deux civils kurdes ont été tués lors de l’attaque.

Ce soir, un drone turc a bombardé la montagne Sire dans le village de Kafia du sous-district de Dinarte, à Akrê. Deux civils, Arif Taha, 61 ans, et Bashir Omer, 68 ans, ont été tués lors de cette frappe.

On signale que l’armée irakienne envoie des renforts à Akrê mais on doute qu’elle s’engage dans un conflit armé avec la Turquie alors que les Turcs ont envahi une grande partie du Nord d’Irak depuis des années.

*Le mont d’Akrê est surnommé le mont du Newroz à cause des défilés aux flambeaux réalisés sur le mont d’Akrê pendant le nouvel-an kurde Newroz.

TURQUIE. Le DEM parti célèbre la journée de la langue maternelle

0

TURQUIE – Le Parti pour l’égalité des peuples et la démocratie (DEM), pro-kurde, a célébré la Journée internationale de la langue maternelle au sein de la Grande Assemblée nationale turque en organisant mardi sa réunion de groupe hebdomadaire en plusieurs langues: les dialectes kurdes, dont le kurmancî et le zazakî, ainsi que l’arménien, l’arabe, le géorgien, le laz et le syriaque.

Tuncer Bakırhan, coprésident du parti DEM, a prononcé une déclaration en kurde, soulignant la perte mondiale des langues due aux États racistes et aux politiques d’assimilation. Le discours de Bakırhan a souligné la valeur intrinsèque de la langue en tant que reflet de l’émotion, de la pensée, de l’identité et de la culture humaines, soulignant que la langue n’est pas simplement un moyen de communication mais l’essence de l’être humain.

L’appel à l’action de Bakırhan souligne la nécessité des droits linguistiques et de la préservation de toutes les langues, en particulier face à l’oppression persistante en Turquie. L’événement a vu la participation de divers représentants, dont le député de Mardin George Aslan parlant en syriaque, Saliha Aydeniz en zazaki et d’autres politiciens contribuant en arabe, en géorgien, en laz et en arménien, démontrant un front uni pour la diversité linguistique et les droits.

Pendant ce temps, des partis politiques et des organisations de la société civile dans l’est de Van (Wan) à majorité kurde, y compris l’association Arsisa pour la langue, la culture et les recherches, ont été empêchés par la police de distribuer des tracts dans le centre-ville appelant à la reconnaissance du kurde comme langue officielle et éducative.

Rassemblé devant le bureau du district d’Ipekyolu (Rêya Armûşê) du parti DEM à l’occasion de la Journée internationale de la langue maternelle, le groupe a procédé à une marche malgré l’obstruction, scandant des slogans tels que « Il n’y a pas de vie sans langue » et « Notre langue est notre honneur ».

Après la marche vers le bâtiment de l’organisation provinciale du parti DEM, Heval Dilbihar, co-porte-parole de la Commission de la langue et de la culture du parti DEM, a condamné l’interdiction de la distribution de tracts prévue :

« Aujourd’hui, nous n’avions pas le droit de distribuer des tracts appelant à faire du kurde une langue officielle. Cette honte appartient au gouvernement. Nous dénonçons et condamnons cette interdiction. Parlons, apprenons et enseignons dans notre propre langue dans les rues, les foyers et les quartiers. Nous exigeons que le kurde soit une langue officielle et éducative. »

La célébration du parti DEM au Parlement turc et divers événements dans toute la Turquie surviennent à un moment où les droits linguistiques sont de plus en plus menacés, le parti DEM restant ferme dans son engagement en faveur du multilinguisme et de la préservation de la culture, remettant en question les politiques d’assimilation et plaidant pour la reconnaissance officielle du kurde. et d’autres langues minoritaires en Turquie.

Les Kurdes demandent la reconnaissance officielle de la langue kurde en Turquie et sur la scène internationale

0

TURQUIE / KURDISTAN – Ce 21 février, c’est la Journée internationale de la langue maternelle. Le 19 février, 24 membres d’institutions kurdes se sont rassemblées à Van et ont exigé que la langue kurde ait un statut officiel en Turquie et sur la scène internationale.

Le bureau de Van du Parti DEM et 24 institutions de la société civile de la ville ont organisé lundi une déclaration à la presse dans le cadre des activités du 21 février, Journée internationale de la langue maternelle. Les membres des organisations civiles et politiques de Van ont défilé jusqu’au bâtiment du DEM parti au Centre de recherche linguistique, culturelle et artistique (ARSİSA) où a eu lieu la conférence de presse.

« La plus ancienne langue de l’humanité »

Le co-porte-parole de la Commission Langue et Culture du Parti DEM, Hemid Dilbihar, a rappelé que de nombreuses langues, dont le kurde, sont actuellement menacées de disparition. Dilbihar a déclaré : « La Journée mondiale de la langue maternelle célèbre l’égalité de toutes les langues. Mais malheureusement, le statut et l’avenir de nombreuses langues sont encore aujourd’hui incertains. Elles sont menacées d’assimilation et d’extinction. Aujourd’hui, il existe des langues comme le syriaque, le laz, le bosniaque, hemsin, circassien, arménien, roumain et arabe en Anatolie. L’une des langues menacées est la langue kurde, parlée par des dizaines de millions de Kurdes. La langue kurde est la langue la plus ancienne et la plus riche de l’humanité. »

Dilbihar a déclaré : « La langue kurde est l’âme, l’esprit et le corps des Kurdes. La langue kurde est l’épine dorsale de l’unité de la nation kurde. Sans langue, il n’y a pas de Kurdes ni de Kurdistan. Les Kurdes et le Kurdistan ne font qu’un et ne peuvent être séparés. L’un ne peut exister sans l’autre. La liberté de la langue kurde est aussi la liberté des Kurdes et du Kurdistan. Les Kurdes continuent leur lutte pour protéger, revitaliser et développer leur langue. La langue kurde a les mêmes droits fondamentaux que l’anglais, l’allemand, Français, arabe, persan, turc et toutes les autres langues. Des millions de Kurdes et tous les mouvements, partis, institutions, organisations et cercles kurdes doivent s’unir pour la liberté de leur langue. »

Demandes

Déclarant qu’ils poursuivront leur lutte jusqu’à ce que le kurde soit accepté comme langue officielle, Dilbihar a énuméré leurs revendications suivantes :

« Nous voulons la langue kurde dans tous les domaines et nous nous battons pour elle. Cette lutte va continuer.

Nos revendications et objectifs pour la langue kurde sont très clairs et concrets :

-La langue kurde doit avoir un statut officiel et international ;

-Doit être officiellement accepté par les lois constitutionnelles et internationales ;

-Le kurde devrait être la langue de l’éducation ;

-Le kurde devrait être utilisé dans des lieux tels que le parlement, les gouvernorats, les municipalités, les tribunaux et les hôpitaux :

-L’Institut de la langue kurde devrait être officiellement reconnu et géré par des représentants du peuple kurde.

– S’il y a des opportunités pour le turc, il devrait y avoir aussi des opportunités pour le kurde. »

Visitez le Kurdistan sans visa

0

IRAK / KURDISTAN – Les ressortissants de 53 pays peuvent visiter la région autonome kurde d’Irak sans visa, à condition de présenter un passeport ayant une validité de six mois aux portes d’entrée où ils peuvent obtenir un visa électronique.

Le gouvernement régional du Kurdistan irakien exempte de visa les ressortissants de 52 pays (essentiellement les pays européens, les États-Unis et certains pays du Moyen-Orient). Les visiteurs de ces pays pourront obtenir un visa électronique à la frontière avec un passeport valide pendant au moins six mois. Cependant, le visa ne sera pas valable pour le reste de l’Irak.

Selon la déclaration du gouvernement régional du Kurdistan irakien (GRK), le nombre de pays dont les citoyens peuvent voyager dans la région sans visa est passé à 53. Dans le communiqué, il est indiqué que les citoyens de ces pays peuvent entrer dans le GRK avec un visa électronique obtenue aux portes d’entrée en présentant simplement leur passeport.

Les ressortissants des pays suivants peuvent visiter la région du Kurdistan sans visa:

États-Unis, Chine, Royaume-Uni, Russie, Australie, Nouvelle-Zélande, Japon, Corée du Sud, Canada, Émirats arabes unis, Koweït, Qatar, Turquie, Iran, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Norvège, Pologne, Portugal, Roumanie, Slovaquie, Slovénie, Espagne, Suède, Suisse, Autriche, Belgique, Brésil, Bulgarie, Croatie, Chypre, Grèce, République tchèque, Danemark, Estonie, Finlande, France, Allemagne, Hongrie, Albanie, Irlande, Islande, Italie, Liban, Cité du Vatican, Liechtenstein, Arabie saoudite, Oman, Bahreïn et Jordanie.

Pétition: La France ne doit pas expulser le militant kurde Serhat Gültekin vers la Turquie

0

PARIS – Dans une pétition lancée en ligne, le Conseil démocratique kurde en France (CDK-F) exhorte les autorités françaises à abroger la décision d’expulsion prise à l’encontre de Serhat GULTEKIN, demandeur d’asile kurde menacé d’expulsion vers la Turquie où il risque la prison et la torture.

Voici la pétition à signer sur Change org:

Monsieur Serhat GULTEKIN, âgé de 27 ans, de nationalité turque et d’origine kurde, a sollicité la protection de la France, invoquant des persécutions subies en Turquie pour ses engagements politiques en faveur de la démocratie et des droits des minorités, notamment kurdes. Débouté initialement de sa demande d’asile, il a introduit une nouvelle demande auprès de la préfecture du Val de Marne, qui lui a délivré une attestation de demandeur d’asile le 27 novembre 2023.

Cependant, une décision d’obligation de quitter le territoire français (OQTF) a été prononcée par la préfète du Val de Marne le 27 décembre 2023, au motif que M. Gultekin n’aurait pas demandé de titre de séjour. Cette décision est contraire aux principes fondamentaux du droit d’asile stipulés dans la loi sur l’asile et l’immigration. Elle ignore notamment le principe de non-refoulement qui interdit l’expulsion d’un demandeur d’asile vers un pays où il risque des traitements contraires à l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) prohibant la torture et les traitements inhumains ou dégradants.

Il est important de souligner que M. Gultekin a été lourdement persécuté durant ses études en Turquie. Outre les placements en garde à vue, il a été enlevé et torturé à plusieurs reprises par les autorités turques. Condamné à près de 15 ans de prison pour ses opinions politiques, il n’a pas bénéficié d’un procès équitable, en violation flagrante de l’article 6 de la CEDH. De plus, la confidentialité, pierre angulaire du droit d’asile selon la Convention de Genève, n’a pas été respectée par les autorités françaises. Le contact pris avec les autorités consulaires turques dans le cadre de l’OQTF constitue une infraction grave à cette convention.

Enfin, M. Gultekin souffre du syndrome de Marfan, une affection génétique rare nécessitant des soins médicaux constants. Il a eu deux pneumothorax et souffre de graves problèmes d’estomac.

L’éloignement de la France représenterait non seulement un risque pour sa santé mais aussi une violation de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui garantit le droit à la santé et à la vie.

Nous exhortons donc les autorités françaises à abroger la décision d’expulsion prise à l’encontre de M. GULTEKIN, qui ne peut être renvoyé en Turquie au risque d’atteintes graves aux principes humanitaires et juridiques qui forment le socle de la République française et de son engagement envers les droits de l’homme.

Conseil démocratique kurde en France – CDK-F

Le lien de la pétition est ici: Le militant kurde Serhat Gültekin ne doit pas être expulsé vers la Turquie