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« Il est crucial de reconstruire le processus politique syrien et de définir le rôle du Conseil Démocratique Syrien »

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SYRIE / ROJAVA – « Pour orienter le processus politique vers une voie plus inclusive et représentative, il est essentiel de prendre en compte les changements sociaux et démographiques survenus ces dernières années. Une véritable ouverture politique, incluant tous les acteurs, est nécessaire », écrit Riadh Darrar dans l’article suivant.

La reconstruction du processus politique en Syrie après la chute du régime d’Assad sera une tâche extrêmement complexe. Cela est dû aux défis internes, régionaux et internationaux qui entourent la situation. Cependant, ce n’est pas impossible. Le processus devient réalisable si une feuille de route réaliste et globale est élaborée. Cette feuille de route doit être fondée sur les principes de justice, de représentation et d’équilibre. Elle doit également bénéficier d’un soutien national et international.
 
Durant la phase de transition, un gouvernement de transition diversifié devrait être formé. Ce gouvernement doit inclure des représentants de l’opposition politique, de la société civile et des personnalités indépendantes possédant une compétence administrative avérée. L’ensemble du processus devrait être mené sous l’égide des Nations Unies, ce qui contribuerait à garantir la neutralité et la transparence.
Parallèlement, un cessez-le-feu global doit être déclaré et surveillé par des mécanismes internationaux efficaces. Cette étape est essentielle pour créer un environnement sûr pour les citoyens. Elle contribue également à établir les conditions politiques et sécuritaires nécessaires au lancement du processus constitutionnel.
Une nouvelle constitution devrait être adoptée par une assemblée constituante ou un comité agréé. Elle doit garantir les libertés publiques et les droits des citoyens, assurer la séparation des pouvoirs et faire respecter l’État de droit. La constitution devrait ensuite être soumise à un référendum populaire sous supervision internationale afin d’en garantir l’intégrité.
 
La réforme des institutions sécuritaires et militaires est une condition fondamentale du succès de toute transition démocratique. L’armée doit être restructurée pour devenir une institution nationale, non confessionnelle, indépendante de tout parti ou groupe, fonctionnant de manière professionnelle et conservant sa neutralité politique. Les factions modérées peuvent être intégrées aux institutions de l’État de manière à renforcer la paix civile.
 
La phase de justice transitionnelle ne peut être négligée. Elle doit reposer sur le principe de responsabilité sans vengeance et s’appuyer sur des mécanismes juridiques indépendants pour traduire en justice les responsables de crimes contre l’humanité. Elle doit s’accompagner de comités de réconciliation et d’actions d’indemnisation des victimes afin de prévenir la répétition des violations et de promouvoir une culture de tolérance et de justice.
 
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Des élections libres et équitables constituent l’un des piliers essentiels de toute transition démocratique. Les élections législatives et présidentielles doivent être organisées sous supervision internationale, conformément à la nouvelle constitution. Ces élections doivent garantir la liberté de la presse et d’expression et encourager une large participation politique de toutes les composantes de la société.
 
La reconstruction et le développement d’après-guerre constituent également un défi majeur. Pour y répondre, il est nécessaire d’adopter un plan international global financé par les pays donateurs. Ce plan doit s’appuyer sur une vision économique transparente, exempte de corruption et de favoritisme, et garantir une répartition équitable des ressources et un développement inclusif.
 
Le processus politique doit bénéficier de garanties internationales claires qui empêchent toute ingérence étrangère, respectent la souveraineté de la Syrie et soutiennent les nouvelles institutions du pays. Il est essentiel de s’appuyer sur la résolution 2254 du Conseil de sécurité de l’ONU qui, malgré l’impasse actuelle, demeure le seul cadre politique approuvé par la communauté internationale. Elle est soutenue par la Russie, les États-Unis, l’Union européenne et plusieurs puissances régionales. Cette résolution prévoit un cessez-le-feu, un gouvernement de transition, une nouvelle constitution et des élections sous la supervision de l’ONU.
 
Cependant, de sérieux obstacles entravent la mise en œuvre de la résolution 2254. Le principal d’entre eux est la volonté du régime actuel de créer un État confessionnel ancré dans une référence religieuse sunnite, ce qui porte atteinte aux principes de pluralisme et de citoyenneté. L’opposition politique souffre également d’une faiblesse structurelle, manque de légitimité populaire et ne dispose pas d’outils de pression efficaces pour promouvoir un programme national global. De plus, l’attention internationale portée à la question syrienne a diminué au profit d’autres priorités, telles que la guerre en Ukraine et la concurrence économique avec la Chine.
 
Malgré ces obstacles, la résolution 2254 peut être réactivée si de nouvelles conditions sont réunies. Ces conditions incluent un changement de l’équilibre des forces sur le terrain et l’unification de l’opposition autour d’une vision politique claire et sérieuse. De plus, tout processus de reconstruction doit être lié à une avancée tangible sur la voie politique. La récente conférence de Djeddah a réaffirmé son engagement envers la résolution 2254. Cependant, une nouvelle approche est nécessaire, capable de convaincre les acteurs clés de s’engager dans un processus politique concret et réalisable. Cette approche doit abandonner les voies unilatérales suivies par le régime, telles que l’initiative de dialogue national, rejetée par l’ensemble du pays, et la déclaration constitutionnelle qui pose les bases d’un régime autoritaire à connotation religieuse.
 
Pour orienter le processus politique vers une voie plus inclusive et représentative, il est essentiel de prendre en compte les changements sociaux et démographiques survenus ces dernières années. Un changement politique significatif exige de dépasser les héritages autoritaires. Il est nécessaire d’instaurer une véritable ouverture politique qui associe toutes les composantes de la société à la construction de l’avenir du pays. Ce changement doit être porté par une volonté sincère de développer des solutions démocratiques durables.
 
Dans ce contexte, il est urgent de convoquer une conférence nationale globale. Cette conférence doit rassembler tous les segments de la société syrienne : Arabes, Kurdes, Syriaques, Assyriens, Turkmènes, Alaouites, Druzes, Ismaéliens et Chrétiens. Il est tout aussi important d’assurer la participation de tous les acteurs exerçant une réelle influence sur le terrain. Ce processus doit rejeter fermement l’exclusion. Il doit également empêcher la domination d’un parti unique sur le processus politique. Il doit au contraire promouvoir un dialogue inclusif reflétant la diversité du tissu social du pays. Une nouvelle vision syrienne doit être formulée. Cette vision doit s’appuyer sur un contrat social reconnaissant le pluralisme ethnique, religieux et politique. Elle doit également garantir l’égalité de citoyenneté et de droits pour tous.
 
La structure du nouvel État doit également être clairement définie. L’un des aspects les plus importants est la relation entre le gouvernement central et les autorités locales. Cette relation doit reposer sur un équilibre pratique : suffisamment solide pour préserver l’unité nationale grâce à la centralisation, mais suffisamment souple pour permettre la gouvernance locale grâce à la décentralisation. Un tel équilibre est essentiel pour prévenir le retour d’un régime autoritaire et éviter le risque de fragmentation nationale.
Les nouvelles forces influentes doivent être associées à ce processus, notamment l’Administration autonome du Nord et de l’Est de la Syrie (AANES), les conseils locaux et les factions armées modérées. Leur inclusion garantira une représentation authentique de la diversité du paysage politique et social du pays.
 
La société civile, les jeunes et les femmes doivent être pleinement associés au processus politique. Leur participation doit refléter le rôle essentiel qu’ils ont joué et les sacrifices qu’ils ont consentis tout au long du conflit. Un organisme indépendant doit également être créé pour préserver la mémoire nationale du pays. Cette institution doit œuvrer pour la justice, sans tomber dans le piège de la vengeance ou des règlements de comptes politiques.
 
Pour que le processus politique réussisse, il doit soigneusement équilibrer les facteurs nationaux et les influences internationales. Il doit également rejeter toute tentative d’un parti unique de monopoliser la prise de décision nationale. Plus important encore, le processus doit garantir la participation des réfugiés et des déplacés syriens. Leurs voix doivent être entendues à chaque étape.
 
Également : La vision de la Voie démocratique syrienne pour une Syrie unie
 
Concernant le rôle du Conseil démocratique syrien [en kurde : Meclîsa Sûriya Demokratîk, en arabe : مجلس سوريا الديمقراطية, l’aile politique des Forces démocratiques syriennes de l’administration autonome du Nord-Est de la Syrie], il a présenté une vision équilibrée et progressiste tout au long des années de conflit. Il a également joué un rôle central dans la création de l’AANES, qui a réussi à protéger le nord-est de la Syrie des ravages de la guerre après la défaite de l’État islamique (EI). Depuis sa création en 2015, le CDS s’est employé à unifier les forces de l’opposition démocratique et a participé à diverses conférences et alliances nationales. Malgré les difficultés persistantes, il poursuit l’objectif d’un projet national démocratique.
 
L’un des défis majeurs réside dans le rejet persistant du CDS par la Turquie. Ce rejet exige une approche politique réaliste pour aborder la question du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Il est également nécessaire de réactiver l’initiative d’Öcalan en faveur d’une transition vers l’engagement politique et la cessation des violences en Turquie.
Il est également crucial de favoriser la communication avec les pays arabes. Cela contribuera à soutenir le processus politique, à renforcer les composantes nationales et à nouer des relations avec tous les secteurs de l’opposition politique syrienne.
 
Le CDS s’efforce d’accroître son rôle dans la recherche de solutions politiques. Elle cherche à engager un dialogue intra-syrien et à renforcer les liens avec les conseils locaux et les factions modérées. Elle vise également à accroître la participation arabe au sein des institutions de l’AANES, notamment à Deir ez-Zor et Raqqa. Par ailleurs, le CDS s’attache à renforcer sa présence dans les forums internationaux. Elle utilise des plateformes représentatives telles que « Tamasok » et « Al-Masar » pour souligner sans cesse que la décentralisation ne signifie pas sécession. Au contraire, la décentralisation représente un modèle de gouvernance locale conforme aux aspirations démocratiques et favorisant le développement et l’autonomie administrative.
 
Suite à l’accord conclu entre le commandant des FDS Mazloum Abdi et le président Ahmed Al-Sharaa le 10 mars, il est essentiel de mettre fin à la politique d’exclusion à l’encontre du CDS et des composantes du nord-est de la Syrie. Un véritable dialogue interne doit être engagé avec les autres puissances nationales. Cela permettra de construire des alliances internes flexibles et contribuera positivement à la fondation d’une Syrie unie et démocratique, capable de se renouveler.

KURDISTAN. Le ministre français des Affaires étrangères rencontre deux cardes du Rojava

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KURDISTAN – Hier, le commandant général des Forces démocratiques syriennes (FDS), Mazloum Abdi, et la coprésidente du département des relations extérieures de l’administration autonome du Rojava / Syrie du N-E, Elham Ahmed, ont rencontré le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot dans la capitale kurde d’Hawler, pour discuter de la stabilité du nord et de l’est de la Syrie, de la promotion du dialogue et du rôle de la France dans le processus de règlement politique.

La réunion a eu lieu à Erbil (Hewler) et s’est concentrée sur les moyens de soutenir la stabilité politique et sécuritaire dans la région, de renforcer le dialogue entre les parties syriennes et de discuter du rôle de la France dans le soutien aux efforts de règlement politique.

Cette réunion s’inscrit dans le cadre des initiatives diplomatiques en cours de l’Administration autonome du Nord et de l’Est de la Syrie, visant à recueillir le soutien international au projet d’Administration autonome démocratique et à renforcer son implication dans le processus politique syrien.

La France avait précédemment exprimé son soutien à un accord politique entre les Forces démocratiques syriennes et le gouvernement de Damas, le considérant comme une étape positive vers une résolution pacifique qui garantisse l’unité de la Syrie et les droits de toutes ses composantes, y compris les Kurdes. (ANHA)

Les génocides arménien et assyro-chaldéen : mémoire de la douleur et les leçons apprises

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SYRIE / ROJAVA – Chaque année, le souvenir du génocide arménien et des massacres des Grecs pontiques et des Assyro-chaldéens commis dans l’Empire ottoman revient comme un rappel amer des pages sanglantes de l’histoire des nations chrétiennes du Moyen-Orient. Mais aujourd’hui, ce n’est pas seulement un jour de commémoration des victimes, c’est aussi un nouveau signal d’alarme pour rappeler que la présence et la dignité des peuples ne peuvent être préservées que par l’auto-organisation, la défense et la mise en place de mécanismes démocratiques garantissant le pluralisme et la justice. C’est ce que les Syriens du Nord et de l’Est tentent de mettre en place sur le terrain, face à des menaces et des dangers renouvelés d’extermination physique et culturelle, écrit l’agence kurde ANHA dans l’article suivant.

Chaque année, le 24 avril, les Arméniens, les Syriaques-Assyriens et les Chaldéens commémorent le génocide des chrétiens perpétré par l’Empire ottoman sur ses terres pendant la Première Guerre mondiale. Ce génocide a entraîné le déplacement et le massacre de plus d’un million et demi d’Arméniens et de centaines de milliers de Syriaques, d’Assyriens et de Chaldéens, ainsi que leur transformation en minorités dispersées dans le monde entier.

Le 24 avril a été choisi spécifiquement car c’était le jour où, le 24 avril 1915, environ 250 intellectuels arméniens de premier plan ont été arrêtés et tués à Istanbul, marquant le début d’une stratégie de génocide de ce peuple par des massacres systématiques aidés par le pillage, l’incendie criminel, le déplacement et le viol.

Des massacres hamidiens au grand génocide : la chronologie des atrocités ottomanes

Le génocide commis par le gouvernement ottoman contre les Arméniens, les Syriaques, les Assyriens et les Chaldéens n’était ni un acte arbitraire ni une conséquence de la guerre, mais un processus organisé mené sous l’égide de l’État ottoman, avec la complicité et le silence internationaux de l’époque. Ses épisodes catastrophiques ont été documentés avec des chiffres et des témoignages accablants de témoins oculaires, de diplomates et d’historiens.

Le début des massacres : les années sombres

La première phase des massacres d’Arméniens débuta à la fin du XIXe siècle, entre 1894 et 1896, lorsque ceux-ci réclamèrent des réformes politiques et des droits constitutionnels. Le sultan Abdul Hamid II sultan Abdülhamid II [connu en Europe sous le nom de « Sultan Rouge » ou encore de « Grand Saigneur »] déchaîna son armée pour perpétrer ce qui allait devenir les « massacres hamidiens ».

Selon les données compilées par le missionnaire allemand Johann Lepsius, au cours de ces années, environ 88 243 Arméniens ont été tués et 546 000 ont été blessés. 2 493 villages ont été pillés et 456 villages ont été contraints de se convertir à l’islam. 649 églises et monastères ont été détruits, dont 328 sont devenus des mosquées.

L’un des massacres les plus terribles eut lieu à Riha (Urfa), où 2 500 femmes arméniennes furent brûlées vives dans une seule cathédrale. On estima plus tard que plus de 300 000 Arméniens périrent.

Génocide systématique pendant la Première Guerre mondiale

L’horreur a culminé en 1915, lorsque l’administration ottomane a commencé à mettre en œuvre son plan visant à éliminer les chrétiens d’Arménie, de Syrie, d’Assyrie et de Chaldée de l’Est.

Après avoir déclaré la guerre à la Première Guerre mondiale, la Turquie fut engagée sur plusieurs fronts contre l’Allemagne. Sur les fronts russe et iranien, les Ottomans ont commis d’atrocités gigantesques contre les Arméniens. Jusqu’en avril 1915, 5 000 villages arméniens furent pillés et 27 000 Arméniens ainsi qu’un grand nombre de chrétiens assyriens, syriaques et chaldéens furent massacrés.

Sur le front de l’Est, Enver Pacha, l’un des dirigeants d’Union et Progrès, perdit une bataille désastreuse face aux Russes lors de la bataille de Sarikamish en janvier 1915. À l’époque, Enver Pacha informa le journal « Tannin » et le vice-président du Parlement turc que la défaite résultait d’une trahison arménienne et que le moment était venu de déporter les Arméniens de la zone orientale. À cette époque, les Ottomans commencèrent à désarmer 100 000 soldats arméniens et à dépouiller les civils arméniens des armes qu’ils avaient été autorisés à porter en 1908. Une fois les Arméniens désarmés, les soldats furent égorgés ou enterrés vivants.

L’ambassadeur américain en Turquie de l’époque, Henry Morgenthau, qualifia le désarmement des Arméniens d’invitation à la permissivité et à l’extermination. Lors d’une rencontre entre Talat Pacha, ministre turc des Affaires étrangères, et l’ambassadeur américain, Henry Morgenthau, Talat Pacha prononça les mots suivants : « Nous avons réussi à nous débarrasser des trois quarts du peuple arménien. Il n’y a plus trace d’eux à Bitlis, Van et Erzurum. Les Arméniens doivent être anéantis. Si nous ne le faisons pas, ils se vengeront certainement de nous. »

La caravane de la déportation. Les caravanes de la mort

Après les massacres, les femmes, les enfants et les personnes âgées arméniens et syriaques qui ont survécu ont été contraints de marcher en longues caravanes à travers le désert. Privés de nourriture et d’eau, ils étaient vulnérables aux attaques des Bédouins ou, s’ils ne pouvaient poursuivre leur marche, tués.

Des exécutions massives d’hommes arméniens initialement raflés ont été signalées. Des femmes survivantes ont confirmé que des enfants étaient laissés à déshydrater, tandis que des femmes étaient violées et tuées devant leurs familles.

Les massacres de Sayfo : une plaie ouverte dans la mémoire syriaque, assyrienne et chaldéenne

Les Arméniens furent non seulement massacrés, mais les Syriaques assyriens et chaldéens furent également pris pour cible par l’Empire ottoman. Les massacres de Sayfo, ou le génocide des Assyro-Chaldéens, sont considérés comme l’un des crimes les plus odieux commis contre les chrétiens au Moyen-Orient. On estime qu’entre 250 000 et 500 000 Syriaques, Assyriens et Chaldéens furent tués durant ces périodes.

La férocité des massacres incluait le massacre de civils, le viol, le pillage des biens et le déplacement forcé de la population vers le désert, où des milliers de personnes moururent de faim, de soif et de guerres de gangs. Des récits atroces ont été faits de tels actes commis par les forces ottomanes, allant jusqu’à éventrer les femmes enceintes pour sortir les fœtus de leurs ventres.

Le résultat : des populations tuées et dispersées

Plus de 1,5 million d’Arméniens avaient été massacrés à la fin de 1923, selon les estimations des historiens et des agences internationales. Les Arméniens, ainsi que les minorités syriaque, assyrienne et chaldéenne, furent réduits au statut de réfugiés minoritaires, qu’ils considéraient auparavant comme un élément fondamental de la démographie anatolienne. Des centaines de milliers d’entre eux émigrèrent au Liban, en Syrie, en Irak et en France, tandis que les autres s’installèrent aux Amériques. Des villages et des villes entiers furent détruits, et des monuments culturels, religieux et historiques furent anéantis.

Reconnaissance internationale et déni turc

Malgré des preuves accablantes, la Turquie refuse encore aujourd’hui de reconnaître le génocide. Sa reconnaissance est punie par l’article 305 du Code pénal, tandis que 20 pays, dont la France, la Russie, le Canada, le Liban et la Grèce, le reconnaissent officiellement. Il est également reconnu par 43 États américains et conseils municipaux d’Australie, d’Espagne et du Canada, ainsi que par le Parlement européen, les Nations unies, le Conseil œcuménique des Églises et d’autres organismes internationaux.

La Syrie aujourd’hui. Une tragédie récurrente

Alors que les Arméniens se souviennent du génocide, les Syriens vivent une catastrophe similaire depuis plus de dix ans. La guerre actuelle dans le pays, l’occupation turque de certains territoires du nord de la Syrie, l’évolution démographique, ainsi que les meurtres et les déplacements systématiques dans les régions à majorité kurde et chrétienne, évoquent les mêmes spectres menaçants que ceux auxquels les Arméniens et les Syriaques étaient confrontés il y a un siècle.

Le déplacement des populations autochtones, l’installation d’étrangers à leurs dépens et la volonté d’atteinte à l’identité culturelle et religieuse ne sont rien d’autre que la continuité de la même politique de turquification à Afrin, Serekaniye et Gire Spi/Tal Abyad.

L’autodéfense : une soupape de sécurité contre le génocide

L’expérience du passé des Arméniens, des Syriaques, des Assyriens et des Chaldéens met en lumière une réalité douloureuse : Les peuples qui manquent de moyens d’autodéfense sont plus vulnérables face aux génocides et aux persécutions.

Les habitants du nord et de l’est de la Syrie le savent. L’administration autonome a réussi à créer un modèle d’État démocratique, qui préserve la diversité des peuples et des cultures et garantit leurs droits et leurs identités. L’un des fondements de ce modèle est l’autodéfense.

Sans la capacité de se défendre, les communautés sont à la merci des forces de contrôle et d’extermination. Se défendre ne signifie pas toujours porter les armes ; cela implique aussi d’être politiquement conscient, de s’organiser en communautés, de défendre sa culture et de suivre une éducation indépendante.

Un appel du passé au présent : non aux catastrophes récurrentes

Le génocide arménien et les massacres de Sayfo ne sont pas seulement des crimes contre les pays chrétiens, mais aussi contre l’humanité. Ils nous rappellent cruellement que le silence sur les crimes et le renoncement à la légitime défense encouragent la répétition de tragédies..

Ainsi, la célébration de cet anniversaire ne vise pas seulement à commémorer les victimes, mais aussi à avertir à nouveau : la dignité des peuples et des cultures ne sera préservée et défendue que s’ils s’organisent, résistent et construisent des institutions démocratiques justes qui préservent leur diversité, comme les populations du nord et de l’est de la Syrie tentent de le faire aujourd’hui. (ANHA)

 

« La vie au bout de la robe de ma mère » est une ode à la résistance en toute circonstance

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Roni n’a que dix ans quand il perd toute sa famille lors du massacre de la vallée de Zîlan* commis par l’État turc en 1930. Il traverse le temps et l’espace pour se retrouver à Paris presque 100 ans plus tard dans la peau d’un jeune homme pour apprendre que les Kurdes continuent d’être victimes de génocides, qu’ils sont chassés de leurs terres, assimilés de force, leur pays colonisé mais que malgré tout le peuple kurde lutte pour sa liberté…
 
 
Bien que soufrant de lourds traumatismes, Roni reste combattif et va de l’avant. Il n’a pas le temps pour penser / panser ses plaies. Il a l’âme combative et il est est comme pressé par le temps afin de demander des comptes pour les millions de Kurdes qui ont comme lui subi l’horreur. « La vie au bout de la robe de ma mère » de l’écrivain et journaliste kurde Maxime Azadî est une ode à la résistance en toute circonstance.
 
Le roman « La vie au bout de la robe de ma mère » est disponible sur Amazon
 
Maxime Azadî a publié plusieurs ouvrages sur les Kurdes
 
 

*Le 3 juillet 1930, sur ordre du Premier ministre turc, İsmet İnönü, et son gouvernement, 44 villages kurdes ont été brûlés et des milliers de civils massacrés (d’autres chassés de leurs terres) dans la vallée de Zilan, dans le district Erciş de Van.

ROJAVA. Commémorations du génocide arménien

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SYRIE / ROJAVA – Les Arméniens de la ville de Tal Tamr ont commémoré le 110e anniversaire du génocide arménien, déclarant que l’actuel État occupant turc est la continuation historique de l’Empire ottoman, qui a perpétré des massacres contre les Arméniens, Grecs, Kurdes / Yézidis (Êzdis) de la région. Ils ont souligné la lutte continue contre les politiques de génocide et de négationnisme.

La communauté arménienne de Tal Tamr, située dans le canton de Jazira, a célébré le 110e anniversaire du génocide arménien commis par l’Empire ottoman entre 1915 et 1917. La commémoration a été organisée par le bataillon arménien du martyr Nubar Ozanyan dans la salle du Conseil des familles des martyrs de la ville.

 

Lors de l’événement, des banderoles ont été déployées dénonçant les politiques génocidaires et affirmant la poursuite de la résistance. Parmi elles figuraient des slogans tels que : « Nous protégerons notre révolution contre l’occupation et les attaques génocidaires », « Par notre lutte, nous brandissons l’étendard de la liberté » et « Non à un nouveau génocide contre les Arméniens ». Des photos de martyrs arméniens tombés lors des massacres étaient également accrochées aux murs de la salle.

La cérémonie, à laquelle ont assisté des dizaines d’habitants, a débuté par une minute de silence en hommage aux martyrs. Elle a été suivie de discours affirmant que l’État turc actuel représente la continuation historique et politique de l’Empire ottoman, qui a perpétré un génocide systématique contre les Arméniens, les Syriaques assyro-chaldéens, les Kurdes et tous les peuples de la région, dans le cadre d’une politique « une couleur et une culture ».

Dans son discours, Manuel Denier Gian, commandant du bataillon Nubar Ozanyan, a déclaré : « Aujourd’hui, nous nous réunissons pour commémorer un souvenir douloureux de l’histoire de notre peuple arménien, au cours duquel il a subi les pires massacres, déplacements et nettoyages ethniques aux mains des Ottomans. L’actuel État occupant turc n’est rien d’autre que la continuation de ces politiques de génocide et de négation. »

Il a souligné que Tal Tamr, qui a résisté aux attaques des mercenaires de l’EI et des militants soutenus par Ankara, se présente comme un modèle vivant de coexistence et de résistance grâce à l’unité et aux sacrifices de ses diverses composantes.

Pour sa part, Kevorkis, dirigeant du Conseil de la Garde Assyrienne de Khabour, a souligné que le 24 avril de chaque année est un « jour historique et douloureux pour les Arméniens, les Syriaques assyro-chaldéens et tous les peuples de la région ». C’est un jour de commémoration des massacres qui ont visé des vies et des sites sacrés, notamment la destruction d’églises et de monastères, et le remplacement des noms géographiques chrétiens par des noms turcs.

Kevorkis, s’exprimant au nom des forces de garde de Khabour, des familles des martyrs assyriens et du Parti démocratique assyrien, a appelé la communauté internationale à reconnaître pleinement le génocide arménien et à tenir l’État occupant turc responsable de ses crimes historiques et actuels contre les composantes autochtones de la région.

La cérémonie s’est conclue par la projection d’un film documentaire (« Sanfizyon ») relatant les événements du génocide arménien et les tragédies endurées par les Arméniens aux mains de l’Empire ottoman.

Cet événement coïncide avec la commémoration annuelle, le 24 avril, par les Arméniens du monde entier du génocide perpétré par l’Empire ottoman contre les Arméniens et les Syriaques assyro-chaldéens pendant la Première Guerre mondiale. Il intervient également à un moment où la crainte de voir des modèles génocidaires similaires se reproduire contre d’autres communautés se fait de plus en plus sentir, dans un contexte de négationnisme persistant et d’absence de justice internationale concernant les crimes commis contre divers peuples. Cela renforce l’engagement du peuple arménien et des autres communautés à résister et à s’organiser pour garantir qu’une telle tragédie ne se reproduise plus jamais. (ANHA)

TURQUIE. Un détenu forcé à payer la traduction d’une lettre écrite en kurde

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TURQUIE – L’administration d’une prison turque a exigé des frais de traduction du prisonnier politique İhsan Balkaş pour une lettre qu’il a écrite en kurde. Chose qu’elle n’aurait pas demandé à un détenu qui aurait écrit une lettre en anglais, arabe ou n’importe quelle autre langue autre que le kurde qui continue à donner des boutons aux fascistes turcs.

La prison de type F de Bolu, fréquemment mise en lumière pour ses violations des droits des détenus, est à nouveau sous le feu des projecteurs. Il est apparu que le droit à la communication du prisonnier politique Ihsan Balkaş avait été arbitrairement restreint. L’administration pénitentiaire n’a pas envoyé les lettres écrites par Balkaş dans sa langue maternelle, le kurde, au motif qu’elles n’étaient pas comprises. De plus, l’administration a exigé qu’il finance la traduction de ces lettres.

Les prisonniers sont priés de payer pour la traduction des lettres

Berivan Barın, avocate et membre de l’Association des avocats pour la liberté (ÖHD) qui a rencontré Ihsan Balkaş, a déclaré que cette situation constitue une violation du droit à la communication et du principe d’égalité, et a souligné qu’elle s’est transformée en un mécanisme de censure.

Barın a souligné que cette pratique constitue une violation des droits, déclarant :

« Cela rend impossible pour les détenus de communiquer en kurde. Ceux qui n’ont pas les moyens de payer le coût de l’enseignement sont privés de tout droit à la communication. »

Elle a également ajouté que l’autorité de l’État à surveiller les communications s’est transformée en un mécanisme de censure.

Le tribunal a rejeté les objections en les qualifiant de « pouvoir discrétionnaire administratif »

Barın a déclaré qu’empêcher un prisonnier d’écrire dans sa langue maternelle est un traitement dégradant qui porte atteinte à son identité et à sa dignité, et a souligné que non seulement le droit à la communication, mais la dignité humaine elle-même, doivent être protégés.

Elle a continué :

« Le droit à la communication n’est pas un privilège ; c’est un droit fondamental. L’imposition par l’administration d’une « obligation de traduction » pour les fax ou les lettres en kurde constitue une violation du droit à la vie privée et à la confidentialité des communications, garanti par l’article 20 de la Constitution. Cette pratique s’inscrit dans un système de discrimination systématique à l’encontre des prisonniers kurdes, motivé par des motivations politiques. »

Balkaş, dont les lettres n’ont pas été remises, a interjeté appel auprès du deuxième juge d’exécution de Bolu concernant les violations des droits. Cependant, la première Haute Cour pénale de Bolu, après avoir examiné les objections, a rejeté toutes les demandes relatives aux violations, jugeant les pratiques arbitraires « à la discrétion de l’administration ».

Suite à cette décision, les avocats ont déclaré qu’une requête individuelle avait été déposée auprès de la Cour constitutionnelle. (ANF)

TURQUIE. Istanbul secouée par plusieurs séismes

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TURQUIE – Un nouveau tremblement de terre a secoué Istanbul après un précédent séisme de magnitude 6,1 qui a frappé la ville il y a quelques heures, rapportent les médias turcs. Au total, plus de 50 secousses ont secoué Istanbul où la population paniquée fuit les habitations.

Un séisme de magnitude 6,2 vient de frapper le nord d’Istanbul. La précédente secousse forte (6,2) avait eu lieu vers 13 heures.

Selon les informations publiées sur le site Internet de la Présidence de la gestion des catastrophes et des urgences (AFAD), de nombreux tremblements de terre se sont produits avec leurs épicentres dans la mer de Marmara. Le plus grand tremblement de terre a mesuré 6,2. Au total, 51 tremblements de terre ont été enregistrés entre le 12.13 et le 15.17 (heure locale).

Est-ce un signe du tremblement de terre tant attendu d’Istanbul ?

Un séisme de magnitude 7,0 ou plus est attendu à tout moment au large d’Istanbul, métropole de 15 millions d’habitants. Le dernier séisme majeur survenu le long de cette même faille nord-anatolienne avait frappé Kocaeli en 1999, tuant plus de 18 000 personnes.

Selon les projections de la municipalité métropolitaine d’Istanbul à l’échelle du district, un séisme de magnitude 7,5 pourrait faire au moins 14 000 morts dans la ville. Cependant, certains experts préviennent que le nombre réel pourrait être bien plus élevé, atteignant peut-être des dizaines de milliers.

En février 2023, deux tremblements de terre jumeaux centrés dans la province de Maraş, au sud-est du pays, ont fait plus de 50 000 morts dans 10 provinces et déplacé des millions de personnes, marquant le tremblement de terre le plus meurtrier de l’histoire du pays.

Le professeur Hasan Sözbilir, directeur du Centre de recherche et d’application sur les tremblements de terre de l’Université Dokuz Eylül (DEU), a déclaré que le tremblement de terre s’est produit le long de la faille nord-anatolienne, près du segment ouest de la ligne de faille associée au tremblement de terre prévu à Istanbul. 

« Si le séisme s’est déroulé de cette manière, nous pouvons dire que nous avons échappé à une catastrophe », a-t-il déclaré, cité par l’Agence Anadolu (AA). « Bien sûr, le séisme s’est propagé sur une vaste zone. Çanakkale, Balıkesir et İzmir ont été touchés. C’est également normal. Un séisme de magnitude 6 est ressenti dans toutes les provinces dans un rayon de 250 à 300 kilomètres. » 

Image via l’agence kurde Mezopotamya

Crise au sommet : un scandale « chypriote » menace l’État turc

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La Turquie est à nouveau secouée par un scandale impliquant les sphères de l’État, de la politique et de la mafia. Le pouvoir tente de colmater les brèches d’un navire prenant l’eau de toutes parts. Mais jusqu’où ira ce conflit interne ? Un changement de régime est-il possible ? Les conditions sont-elles réunies ? Et la question cruciale : Chypre du Nord, occupée par la Turquie, est-elle la prochaine cible de cette tourmente ?

45 cassettes qui effraient le régime d’Erdoğan

Au cœur du scandale se trouve Halil Falyalı, parrain de la mafia connu pour ses activités dans les casinos et les paris illégaux à Chypre du Nord, sous occupation turque depuis les années 1970. Falyalı a été assassiné par balles à Kyrenia le 8 février 2022. Avant sa mort, il aurait été en possession de 45 à 50 enregistrements vidéo utilisés à des fins de chantage contre des politiciens, des bureaucrates et de hauts responsables. Certains enregistrements seraient à caractère sexuel, d’autres documenteraient des actes de corruption, de blanchiment d’argent, de trafic de drogue et de pots-de-vin.

Erdoğan à la recherche des 5 cassettes manquantes

Le journal Bugün Kıbrıs a révélé en détail ces accusations. Selon ses informations, 40 de ces cassettes auraient été récupérées par les services secrets turcs (MIT), mais 5 d’entre elles sont toujours introuvables. Ces dernières contiendraient des images impliquant des personnalités influentes en Turquie, notamment le fils de l’ancien Premier ministre Binali Yıldırım et celui de l’ancien chef du MIT, aujourd’hui ministre des Affaires étrangères, Hakan Fidan.

Le leader de l’opposition CHP, Özgür Özel, a publiquement évoqué le scandale, estimant que ces vidéos pourraient révéler un vaste réseau de corruption et qu’un procureur courageux est nécessaire pour enquêter.

Certains observateurs estiment que l’arrestation récente du maire d’Istanbul, Ekrem İmamoğlu, pourrait s’inscrire dans cette guerre de pouvoir.

Mafia, politique et pouvoir étatique

Ce scandale s’inscrit dans la continuité des révélations faites en 2021 par le chef mafieux Sedat Peker, qui avait mis en lumière les liens entre Halil Falyalı, le trafic de drogue, le blanchiment d’argent et certains responsables politiques et administratifs turcs.

Peker avait notamment accusé l’ancien ministre de l’Intérieur Mehmet Ağar ainsi qu’Erkam Yıldırım, le fils de Binali Yıldırım, d’être impliqués dans ce réseau. Il affirmait aussi que Falyalı utilisait les vidéos compromettantes pour faire pression sur les responsables et accroître son influence.

À Chypre, l’ombre de la mafia sur la politique

La partie nord de Chypre est considérée comme le théâtre principal de cette affaire. Déjà en 2021, une vidéo compromettante attribuée à Ersan Saner, alors chef du Parti de l’unité nationale (UBP), avait suscité un tollé. Depuis, Saner s’est retiré de la vie politique. Les milieux politiques chypriotes dénoncent l’emprise croissante de barons du jeu, de trafiquants de drogue et de réseaux de traite humaine, mettant en garde contre une « mafiocratie ».

Vers un changement de régime ?

Ce scandale révèle un réseau profond de corruption et de criminalité tant en Turquie qu’à Chypre du Nord. Bien que le contenu exact des vidéos reste inconnu, leur existence suggère des liens compromettants.

Les déclarations récentes d’Özgür Özel ont ravivé le débat : si ces vidéos étaient rendues publiques, elles pourraient déclencher un véritable séisme politique. Mais dans un pays comme la Turquie, où l’armée, la police, les médias et la justice sont étroitement contrôlés par le pouvoir, l’issue d’un tel scandale reste incertaine. Par le passé, des affaires similaires ont été brutalement étouffées.

La société turque conserve encore un profond réflexe de sacralisation de l’État et des tendances nationalistes très fortes, ce qui limite l’émergence d’un contre-pouvoir populaire. Néanmoins, l’aggravation des luttes internes au sein du pouvoir pourrait conduire à un changement du régime. Certains analystes évoquent même, ces dernières semaines, l’hypothèse d’un nouveau coup d’État.

Une recomposition régionale : la Turquie en ligne de mire ?

Ce scandale centré sur Chypre coïncide avec un moment clé dans la recomposition du Moyen-Orient, que le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) décrit comme une « troisième guerre mondiale ». Selon certains analystes, tout changement majeur en Turquie pourrait commencer par une intervention sur la question chypriote.

Pour le PKK, l’ordre établi à la suite de la Première Guerre mondiale s’effondre au Moyen-Orient. Le processus amorcé avec la guerre de Gaza le 7 octobre 2023 frappe désormais à la porte d’Ankara. Dans ce contexte, l’État turc pourrait soit négocier avec les Kurdes et ouvrir la voie à une démocratisation, soit s’enfermer dans une logique de guerre.

Une confrontation entre Israël et la Turquie n’est pas à exclure. Un tel scénario serait désastreux pour Ankara, et le premier coup pourrait être porté par la fin de l’occupation turque à Chypre.

Soucieux du danger qui s’annonce, l’État turc cherche depuis quelque temps à initier une nouvelle phase de dialogue avec le leader du PKK, Abdullah Öcalan, détenu en isolement sur l’île d’Imralı depuis 1999. Cependant, certains observateurs estiment qu’un clan au sein même du pouvoir chercherait à saboter toute perspective de processus de paix. Le scandale des cassettes aurait justement éclaté dans ce climat de tensions internes.

En résumé, le Moyen-Orient entre dans une phase de transformation profonde, marquée par l’effondrement progressif des structures héritées des anciens découpages artificiels. Ces bouleversements continueront de s’intensifier et n’épargneront personne.

Par Maxime Azadi, journaliste franco-kurde

Que se cache derrière la fête des enfants turcs du 23 avril ?

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TURQUIE – Aujourd’hui 23 avril, l’État turc célèbre la « fête des enfants » à travers tout le pays, y compris au Kurdistan du Nord (Bakûr) et dans le nord de Chypre depuis l’occupation de l’île par la Turquie en 1974, ce même État qui tue des enfants kurdes depuis un siècle à cause de leurs origines ethniques, sans parler de la date du 23 avril qui précède le 24 avril, la journée de commémoration du génocide arménien commis par l’Empire ottoman en 1915 et nié farouchement par les Turcs.
 
Rien que ces 21 dernières années, des centaines d’enfants kurdes ont été tués par les forces armées turques et des mercenaires sous commandement turc au Kurdistan du Nord mais aussi au Rojava, au Kurdistan irakien et dans la région yézidîe (êzdîe) de Shengal.
 
Photo: Uğur Kaymaz, Ceylan Önkol et Berkin Elvan ne sont que 3 de ces enfants tués pour ne pas avoir été de « bons Trucs ». Cette « fête d’enfants » (en turc: 23 Nisan Ulusal Egemenlik ve Çocuk Bayramı. En français: la Journée de la souveraineté nationale et des enfants) est un mensonge célébré sur des cadavres d’enfants kurdes, arméniens, grecs pontiques, syriaques, yézidîs ou arabes tués par l’empire ottoman hier, l’État turc aujourd’hui…
 

TURQUIE. Accident mortel dans la province de Van

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TURQUIE / KURDISTAN – Aujourd’hui, un accident mortel s’est produit entre les localités kurdes Gürpınar et de Başkale, à Van. On dénombre 8 morts et 11 blessés, dont certains dans un état grave.
 
Aujourd’hui, lors d’un accident impliquant un minibus et une camionnette est survenu sur une route de la province de Van, au moins huit personnes ont perdu la vie et 11 ont été blessées.

Création du Collectif des journalistes du Kurdistan en Europe

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BELGIQUE – Plus de 70 journalistes kurdes vivant en exil ont créé le Collectif des journalistes du Kurdistan en Europe après deux jours de discussions qui ont eu lieu les 19 et 20 avril à Alost, en Belgique. Le Comité exécutif constitué de onze membres mènera ses activités conformément aux décisions et aux discussions de la Conférence d’Alost jusqu’à la Conférence constitutive qui devrait se tenir au plus tard à l’automne 2025.

 

La réunion des journalistes kurdes qui a duré deux jours portait sur la situation des médias kurdes, le processus politique actuel et le rôle des médias kurdes. Il a notamment été recommandé que les médias kurdes s’organisent en fonction des nouvelles conditions de l’ère des médias numériques, et il a été souligné qu’il est nécessaire d’avoir des organisations médiatiques plus fortes. Il a été affirmé lors de la réunion que le rôle des médias n’est pas seulement de dénoncer, mais aussi de transformer et de construire au fil du temps. La réunion a mis en lumière les expériences et les institutionnalisations acquises par les femmes dans le domaine des médias kurdes.

 

Au cours des discussions, la journaliste Gulistan Ike a proposé la création d’une académie des médias en ligne pour diffuser les expériences kurdes. Gulistan İke a également souligné l’importance de transcrire les expériences de la presse kurde afin de les préserver. Elle a déclaré : « Nous devons cesser de nous répéter. Les médias se sont éloignés de la société, ce qui constitue un grave problème. La sensibilité aux problèmes sociaux s’est affaiblie. Les médias, en les révélant, doivent jouer leur rôle dans la construction sociale et l’évolution des mentalités. »

(…)

Collectif des médias du Kurdistan en Europe

Le dernier jour de la réunion, des idées et des suggestions ont été recueillies sur la manière dont une organisation devrait être construite. Lors des discussions du deuxième jour, auxquelles ont participé plus de 40 professionnels des médias, des formes d’organisation telles que « Communauté », « Réseau », « Fédération », « Collectif », « Unité » et « Initiative » ont été évaluées et discutées, indépendamment de l’endroit où le centre devrait être situé. Il a été souligné que la structure à créer devrait développer ses relations avec les organisations de presse internationales. Il fut décidé de l’avis général que ce bâtiment aurait le statut d’association et que son siège serait à Bruxelles. Parmi les noms proposés, celui de « Kolektifa Medyakarên Kurdistan li Ewropayê » (Collectif des travailleurs des médias du Kurdistan en Europe) a été accepté à la majorité des voix. Le nom du groupe a été enregistré en kurde.

Afin de réaliser un travail collectif dans le cadre des statuts de l’association, un comité composé de 11 personnes a été proposé et approuvé à l’issue du vote. Toutefois, les 9 personnes, composées de 4 femmes et 5 hommes, qui ont été nommées au comité ont été chargées par la suite d’inclure 2 autres personnes au sein du comité. Le comité qui a été formé a été chargé d’organiser une grande conférence pour établir le groupe et l’annoncer.

Annonce de la réunion

Le communiqué de la réunion résultant des discussions et des propositions est le suivant :

« Les Kurdes luttent pour leur liberté depuis des années. Les médias kurdes ont indéniablement joué un rôle majeur dans cette lutte. Ils ont payé un lourd tribut et obtenu de grandes victoires dans leur lutte et leur travail médiatique pour créer le journal du Kurdistan. Aujourd’hui, il existe des dizaines de chaînes de télévision kurdes, des centaines de journaux et de magazines dans le monde entier. Parallèlement, conformément à notre époque, les Kurdes et les Kurdes ont pris leur place dans les réseaux de médias numériques. Malgré ces développements, certains de nos médias poursuivent leur action dans les quatre régions du Kurdistan. À cet égard, des efforts ont été déployés ces dernières années pour s’organiser à l’étranger, notamment en Europe. Malheureusement, cette lacune en Europe n’a pas été comblée à ce jour.

Des représentants d’organisations et d’institutions médiatiques kurdes se sont réunis dans la ville belge d’Alost les 19 et 20 avril pour discuter à la fois de questions organisationnelles et de problèmes spécifiques auxquels sont confrontés les travailleurs des médias kurdes.

Lors de cette conférence, la situation actuelle des Kurdes et la géographie du Kurdistan, ainsi que les médias et le journalisme kurdes, ont été discutés en détail. De nombreuses critiques et suggestions importantes ont été formulées. En conséquence, tous les participants ont décidé avec une vision commune que les journalistes du Kurdistan devraient se rassembler dans le cadre d’une organisation libre et que cette organisation devrait remplir ses rôles et responsabilités.

Dans ce contexte, les décisions et propositions suivantes ont été prises lors de la réunion des 19 et 20 avril :

 Il a été décidé de créer une association juridique pour l’organisation ; Le siège de l’association sera à Bruxelles et les membres seront acceptés de tous les pays européens.

– Le nom du groupe a été choisi à la majorité des voix comme étant le « Collectif des travailleurs des médias kurdes en Europe ».

– Il a été décidé de former un comité composé de 11 personnes pour gérer les affaires de l’association.

-Ces personnes ont été élues à la direction du comité ; Amed Dicle, Gulistan Çiya İke, Hîdayet İbrahim, Diyar Ezîz Şerîf, Ronî Eylem, Niyaz Abdullah, Rojda Delal, Mahîr Uzmez, Maxime Demiralp.

-Le comité élu a l’initiative et peut inclure 2 autres personnes au conseil d’administration.

-Le Comité de pilotage a l’initiative de mener les travaux conformément aux discussions et décisions de la Conférence d’Alost jusqu’à la conférence fondatrice, qui se tiendra au plus tard à l’automne 2025. »

Xwebun

IRAN. Menaces contre la famille d’un prisonnier kurde exécuté

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IRAN / ROJHILAT – La famille du prisonnier politique kurde Hamid Hosseinnezhad Heidaranlou exécuté qui exige le corps est menacée par le régime iranien, a rapporté le Réseau des droits de l’homme du Kurdistan (KHRN).

 

Le prisonnier politique kurde Hamid Hoseinnezhad Heidaranlou, condamné à mort avec des accusations fabriquées de toutes pièces, a été exécuté secrètement dans la prison centrale d’Urmia le dimanche 20 avril.

 

Les autorités iraniennes ont refusé de remettre le corps du prisonnier politique kurde Hamid Hosseinnezhad Heidaranlou après son exécution secrète, a rapporté le Réseau des droits de l’homme du Kurdistan (KHRN).

Le soir du 21 avril, sa famille a été convoquée par des autorités judiciaires à Orumiyeh, dans la province d’Azerbaïdjan occidental, informée de l’exécution secrète et mise en garde contre la tenue d’une commémoration publique.

Behzad Sarkhanlou, le procureur adjoint d’Orumiyeh, a déclaré à la famille qu’elle ne recevrait pas le corps et qu’il lui était interdit d’organiser une commémoration publique.

Les autorités judiciaires ont également déclaré à la famille d’Hosseinnezhad Heidaranlou que l’exécution avait eu lieu en secret à Téhéran, tandis que les médias d’État iraniens ont annoncé le soir même qu’il avait été exécuté dans un lieu inconnu.

Parallèlement, les enquêtes menées par le Réseau kurde des droits humains suggèrent que l’exécution a eu lieu plusieurs jours plus tôt à Orumiyeh, ce qui contredit la version officielle. Selon ces conclusions, le corps aurait été enterré dans un lieu tenu secret.

La famille, qui avait manifesté devant la prison centrale d’Orumiyeh pendant cinq nuits, est rentrée dans sa ville natale de Chaldoran, dans la province d’Azerbaïdjan occidental, après avoir appris l’exécution. Des funérailles privées ont lieu actuellement à leur domicile.

KHRN a également appris que ce matin, le ministère du Renseignement de Chaldoran a empêché un religieux sunnite d’assister à la cérémonie et a convoqué l’un des membres de la famille de Hosseinnezhad Heidaranlou, les menaçant ainsi que d’autres membres de la famille d’arrestation.

Les autorités ont ordonné à tous les proches qui ont parlé aux médias étrangers – y compris la fille du prisonnier politique exécuté, Ronahi Hosseinnezhad Heidaranlou – de se présenter au ministère du Renseignement.

L’exécution secrète du prisonnier politique a eu lieu malgré le dépôt, ces derniers jours, d’une demande de révision de procès auprès de la Cour suprême et d’un recours en grâce auprès de la Commission d’amnistie et de grâce. Malgré cela, sous la pression du ministère du Renseignement, l’exécution a eu lieu.

Hosseinnezhad Heidaranlou a été placé en isolement en prévision de son exécution le 16 avril, et son avocat a reçu une notification officielle fixant la date prévue au 18 avril.

Suite au tollé international et aux protestations de sa famille, il les a appelés brièvement ce jour-là pour leur dire qu’il était vivant et les a exhortés à poursuivre leurs efforts.

Le même jour, le directeur de la prison centrale d’Orumiyeh, Peyman Khanzadeh, a informé la famille que l’exécution avait été suspendue sur ordre du procureur et que l’affaire était en cours de réexamen.

Ces derniers jours, sa famille a poursuivi son sit-in devant le Tribunal révolutionnaire islamique et la prison centrale d’Orumiyeh, exigeant des informations sur son sort. Cependant, le procureur et le directeur de la prison ont déclaré que le prisonnier politique était détenu par les services de sécurité.