TURQUIE – La police a bloqué le rassemblement des mères du samedi en barricadant complètement l’avenue Istiklal à Istanbul et arrêté 32 personnes, malgré un arrêt de la Cour constitutionnelle contre de telles interdictions.
Les Mères du samedi (Cumartesi Anneleri), qui organisent un sit-in sur la place Galatasaray depuis 1995 pour s’enquérir du sort de leurs proches disparus en détention et exiger que les auteurs soient jugés, ont été de nouveau bloquées et détenues par la police lors du 961ème rassemblement hebdomadaire.
Lors de leur 962e manifestation hebdomadaire, le groupe a tenté de marcher vers la place Galatasaray, mais la police a invoqué la décision d’interdiction du gouvernorat de Beyoğlu et n’a pas autorisé le cortège, érigeant des barricades aux deux entrées de l’avenue Istiklal, l’une des rues piétonnes les plus animées d’Istanbul. routes, provoquant un arrêt et bloquant toute circulation piétonnière.
Des témoins présents sur les lieux ont fait état de mesures policières agressives. Beaucoup ont déclaré que la police avait tenté d’obstruer les objectifs des caméras de presse. Cette action répressive a abouti à l’arrestation d’au moins 32 manifestants, comme l’a révélé un communiqué des Mères du samedi.
Malgré une décision de la Cour constitutionnelle turque (AYM) en 2019 qui a déclaré l’interdiction par le gouvernement des manifestations sur la place Galatasaray de violation de la liberté de réunion, la police a continué d’imposer un blocus autour de la zone, empêchant les Mères du samedi d’organiser leur veillée hebdomadaire. .
Depuis la première semaine d’avril, les Mères du samedi tentent de reprendre leurs rassemblements hebdomadaires sur la place Galatasaray tous les samedis, mais la police, qui ne reconnaît pas le jugement de l’AYM sur la violation des droits, est intervenue et les a arrêtées chaque semaine.
Depuis 28 ans, les mères du samedi s’arment d’œillets contre la police turque
Il y a 28 ans, les Mères du Samedi (en turc: Cumartesi Anneleri) descendaient pour la première fois sur la place Galatasaray, à Istanbul, pour exiger la fin des disparitions forcées et demander qu’on leur rende leurs proches portés disparus.
Les « mères du samedi » reproche l’État turc de ne pas avoir enquêté sérieusement pour établir la vérité sur ceux qui ont disparu après leur mise en détention par les autorités turques.
Selon l’Association des droits de l’Homme (IHD), entre 1992 et 1996, 792 disparitions forcés et meurtres (de journalistes, syndicalistes, médecins, enseignants, enfants ou simples paysans) par l’État ont été signalés dans les régions kurdes de Turquie.
Le 25 août 2018, les autorités turques ont annoncé que le gouvernement avait interdit la réunion. Suite à cette annonce, lors de leur 700ème manifestation pacifique, les mères de samedi ont subi des violences policières et plusieurs des participants ont été arrêtés, dont Emine Ocak, une mère de plus de 80 ans. Par la suite, la cour constitutionnelle turque a déclaré que la police avait violé le droit de manifester des Mères du Samedi, en les arrêtant, mais manifestement la police d’Erdogan refuse de se conformer aux lois de son propre pays.
Le 5 mai dernier, la commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe dénonçait les violations des droits en Turquie, en attirant l’attention sur les violences subies par les Mères du Samedi : « Les autorités ne respectent toujours pas le droit à la liberté de réunion pacifique des « Mères du samedi » et des autres personnes qui manifestent ce jour-là pour demander que la lumière soit faite sur la disparition de leurs proches, alors que la Cour constitutionnelle turque a déjà conclu deux fois à la violation de leur droit de manifester. Les membres de ce groupe font même l’objet d’une procédure pénale, engagée tout récemment, pour avoir exercé ce droit. La manière dont sont traitées les « Mères du samedi » est une illustration supplémentaire des risques inhérents à un contexte dans lequel les droits humains ne sont pas protégés de manière effective. »