Ce 15 mai est la journée de la langue kurde alors que la majorité des Kurdes ne la parlent plus à cause des politiques criminalisant la langue kurde et l’assimilation forcée imposée par les États occupant le Kurdistan.
Riche de ses nombreux dialectes millénaires, aujourd’hui la langue kurde est menacée de disparition car plusieurs dizaines de millions de Kurdes ne peuvent parler, apprendre, ou enseigner leur langue mais sont obligés d’apprendre la langue des colonisateurs. Aujourd’hui, parler en kurde est devenu un acte de survie pour le peuple kurde.
15 mai, journée de la langue kurde
Les Kurdes célèbrent le 15 mai la journée de la langue kurde. Une date associée à la première parution de la revue Hawar publié en 1932 par des intellectuels kurdes en exil. La particularité de la revue Hawar (le cri) est qu’elle est publiée en alphabet latin utilisé pour la première fois alors qu’on utilisait l’alphabet arabe jusqu’alors.
Le 15 mai 1932, paraît à Damas, le premier numéro de la revue kurde Hawar, sous la direction de Celadet Elî Bedirxan (Celadet Bedir Khan) et de ses amis, exilés en Syrie après la fondation de la République de Turquie en 1923. Revue à caractère littéraire, mais aussi politique, Hawar joue un rôle extrêmement important dans la renaissance et le développement de la langue kurde qui est menacée par les nouveaux États-nations occupant le Kurdistan.
Écrite essentiellement en kurmancî, principal dialecte kurde, mais aussi en soranî et zazakî, en plus de quelques publications en français, la revue bimensuelle contribue à la formation de grands noms de la littérature et de la langue kurde, comme le poète Cegerxwîn, et connaît un grand succès, avec ces 57 numéros publiés entre 1932 et 1943.
Outre son intérêt littéraire et linguistique, Hawar a pour particularité d’introduire l’alphabet latin dans l’écriture du kurde qui était jusqu’alors transcrit en alphabet arabe.
Fêtée depuis 2006, la journée de la langue kurde est l’occasion d’élever la revendication de l’enseignement dans la langue maternelle et de dénoncer les politiques répressives des Etats à l’encontre du kurde.
Des quatre Etats qui occupent le Kurdistan (Turquie, Iran, Irak, Syrie), c’est la Turquie qui a déployé les plus grands efforts visant à l’assimilation et la disparition de la langue kurde.
Alors que le kurde a toujours été interdit dans le sphère publique sous la République fondée par Atatürk, l’AKP, le parti du président Erdogan, avait montré une « tolérance » certaine aux travaux et réalisation autours de la langue kurde dans les années 2000. Avec la première défaite du parti AKP lors élections de 2015, ce dernier s’est attaqué au parti HDP, tenu responsable de cette défaite. Et comme le HDP était un projet kurde pour les peuples de la Turquie, le pouvoir truc a mené une répression sans précédent à partir de 2016 : avec la déchéance et l’arrestation des maires kurdes du Parti démocratique des Peuples (HDP) et leur remplacement par des administrateurs désignés par le gouvernement turc, toutes les structures kurdes – écoles, centres de formation, centres pour la protection des femmes, institut de recherche et de langue, maison d’édition, chaînes de radio et de télévision- destinées à la préservation, la diffusion et le développement de la langue kurde ont été interdites.
Malgré les tentatives centenaires menaçant le kurde d’un génocide linguistique, cette langue reste bien vivante, que ce soit au Rojhilat, Rojava, Bashur et Bakur ou dans la diaspora. Au Rojava (Kurdistan syrien) en particulier, elle connaît un grand essor, avec l’institution par l’administration autonome d’un enseignement généralisé dans la langue maternelle, c’est-à-dire le kurde, mais aussi l’arabe, l’assyrien et l’arménien.
La préservation de la langue kurde occupe par ailleurs une place de premier ordre dans les activités des organisations de la diaspora kurde qui déploient de grands efforts pour développer son enseignement et le transmettre aux nouvelles générations.
Cejna zimanê kurdî pîroz be! (Bonne fête de la langue kurde!)