Le confinement forcé dû au coronavirus fait vivre les « joies » d’être mère H24 à des milliards de femmes dans le monde depuis des jours. Kurdistan au féminin n’échappe pas à cette « règle » et des anecdotes vécus avec nos enfants deviennent des passeurs de souvenirs lointains, comme celui de la pomme-serpent.
Hier, c’était la grosse journée de cuisine avec les enfants pour préparer des plats dont ils raffolent : Koullor, tarte-tatin et d’autres délices pour enfants…
Alors qu’on était en train d’éplucher des pommes (bio), mon fils m’a demandé d’en éplucher une sans casser la pelure et en faisant un long « serpent » qu’il allait mangeait en suite. Je me suis aussitôt exécutée et lui ai raconté que, quand j’étais petite, j’avais entendu des filles dire que si on mettait sous son oreiller la pelure d’une pomme en entier, en faisant un long serpent, on rêverait de son amoureux pendant la nuit. Mon fils m’a répondu: « Mais ça va salir l’oreiller. »
Mon gamin avait eu le même raisonnement que moi, quand, petite, j’avais entendu pour la première fois cette histoire racontée par d’autres filles plus âgées que moi. Je m’étais dit « Ça tient pas debout ce qu’elles racontent. Si on met la peau de la pomme sous l’oreiller, ça s’écrasera avec le poids de l’oreiller et notre tête. Et puis, ça salira le lit. »
Dès années après, le COVID-19 m’a « permis » de revivre cette scène avec mes propres enfants qui prennent tout au premier degré. J’ai dit à mon gamin que ce n’était pas tant ce que les filles avaient raconté à propos de la pomme-serpent qui était important, mais ce que cela montrait de l’imagination des êtres humains. Une fille avait imaginé cela dans un monde où il n’y avait pas de téléphone, pas de réseaux sociaux, ni même de lettre, car elle était secrètement amoureuse d’un garçon qu’elle ne pouvait voir. Alors, elle s’était imaginée cette scène de la pomme-serpent en espérant voir son amoureux en rêve…
A tous ces êtres à l’imagination débordante qui nous permettent de voir plus loin que la réalité morose qu’on veut nous faire accepter. Osons raconter à nos enfants des histoires qui leur donnent des ailes pour avoir une vie digne de leur innocence.
Keça Bênav (Bênav signifie « sans nom » et Keç « fille » en kurde)
Grand merci de ce témoignage touchant.
A part cette référence à la Genèse, j’ajoute, d’expérience : mais oui, bien sûr que la pomme-serpent montrera à la jeune fille le visage de son futur amour ! De nombreuses versions de cette façon de connaître l’à-venir existent, dans toutes les traditions des Contes du monde. L’objet que l’on glisse sous l’oreiller diffère, certes, mais non l’intention… ni l’efficacité !
Merci de laisser entrer un peu de merveille dans nos vies !
Sylvie