TURQUIE – La police turque a bloqué la rue Istiklal menant à la place Galatasaray, où les Mères du samedi se réunissaient tous les samedis depuis près de 30 ans pour exiger le sort de leurs proches disparus en détention, et arrêté au moins 25 personnes.
Les Mères du samedi (Cumartesi Anneleri), qui organisent un sit-in sur la place Galatasaray depuis 1995 pour s’enquérir du sort de leurs proches disparus en détention et exiger que les auteurs soient jugés, ont été de nouveau bloquées et détenues par la police lors du 961ème rassemblement hebdomadaire.
La décision de la Cour constitutionnelle sur la violation des droits n’a pas non plus été reconnue cette semaine. Bloquant la rue Istiklal, la police a fait une annonce avant l’arrestation et a déclaré que l’action avait été interdite par le bureau du gouverneur du district de Beyoğlu.
La police, qui a bloqué les Mères du samedi dans la rue Istiklal, a également empêché les journalistes de couvrir l’événement. Les Mères du samedi ont été arrêtées lors du rassemblement de la 961e semaine, en violation de la Cour constitutionnelle turque. Parmi les personnes détenues, il y avait Hanife Yıldız, Eren Keskin, Gülseren Yoleri, Mikail Kırbayır, Besna Tosun, İkbal Eren, Hüseyin Ocak, Hasan Karakoç, Ali Ocak, Oya Ersoy, Ümit Efe, Leman Yurtsever et Hünkar Yurtsever.
Depuis 28 ans, les mères du samedi s’arment d’œillets contre la police turque
Il y a 28 ans, les Mères du Samedi (en turc: Cumartesi Anneleri) descendaient pour la première fois sur la place Galatasaray, à Istanbul, pour exiger la fin des disparitions forcées et demander qu’on leur rende leurs proches portés disparus.
Les « mères du samedi » reproche l’État turc de ne pas avoir enquêté sérieusement pour établir la vérité sur ceux qui ont disparu après leur mise en détention par les autorités turques.
Selon l’Association des droits de l’Homme (IHD), entre 1992 et 1996, 792 disparitions forcés et meurtres (de journalistes, syndicalistes, médecins, enseignants, enfants ou simples paysans) par l’État ont été signalés dans les régions kurdes de Turquie.
Le 25 août 2018, les autorités turques ont annoncé que le gouvernement avait interdit la réunion. Suite à cette annonce, lors de leur 700ème manifestation pacifique, les mères de samedi ont subi des violences policières et plusieurs des participants ont été arrêtés, dont Emine Ocak, une mère de plus de 80 ans. Par la suite, la cour constitutionnelle turque a déclaré que la police avait violé le droit de manifester des Mères du Samedi, en les arrêtant, mais manifestement la police d’Erdogan refuse de se conformer aux lois de son propre pays.
Le 5 mai dernier, la commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe dénonçait les violations des droits en Turquie, en attirant l’attention sur les violences subies par les Mères du Samedi : « Les autorités ne respectent toujours pas le droit à la liberté de réunion pacifique des « Mères du samedi » et des autres personnes qui manifestent ce jour-là pour demander que la lumière soit faite sur la disparition de leurs proches, alors que la Cour constitutionnelle turque a déjà conclu deux fois à la violation de leur droit de manifester. Les membres de ce groupe font même l’objet d’une procédure pénale, engagée tout récemment, pour avoir exercé ce droit. La manière dont sont traitées les « Mères du samedi » est une illustration supplémentaire des risques inhérents à un contexte dans lequel les droits humains ne sont pas protégés de manière effective. »