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SYRIE. « Il n’y a pas de réelle représentation des femmes au sein des autorités de Damas »

SYRIE / ROJAVA – Des femmes activistes des régions autonomes arabo-kurdes du Nord et d’Est de la Syrie rappellent que les femmes n’ont aucune représentation réelle au sein des autorités de Damas et soulignent que la solution réside dans l’établissement d’un projet féminin libérateur et indépendant qui restaure le rôle actif des femmes dans le processus de changement politique et social en Syrie.

Des activistes et des politiciens du nord et de l’est de la Syrie ont souligné dans leur conversation avec l’agence ANHA les politiques menées par les autorités de Damas à l’égard des femmes, considérant qu’elles visent systématiquement à occulter leur véritable rôle en les excluant des postes d’influence et des centres de décision.

Dans ce contexte, la secrétaire générale du Mouvement du Futur du Kurdistan, Narin Metini, a déclaré que les autorités de Damas cherchaient à tromper l’opinion publique en promouvant une image illusoire de l’autonomisation des femmes, en nommant des femmes à des postes de direction sans qu’elles soient réellement porteuses des enjeux ou des luttes des femmes.

Elle a ajouté que certaines de ces femmes étaient influencées par l’idéologie du régime en raison d’un endoctrinement continu ou d’intérêts particuliers, tandis que d’autres se retrouvaient à ces postes sous la pression des conditions économiques ou sécuritaires, sans posséder de volonté indépendante ni de vision libératrice.

Narin Metini a expliqué que les régimes autoritaires recouraient souvent à ces méthodes formelles pour contenir les mouvements de femmes et embellir leur image auprès de la société, conscients qu’une femme consciente représentait une réelle menace pour la structure patriarcale dominante.

Elle a conclu en disant : « Pour faire face à cela, il appartient aux femmes politiques, aux militantes des conseils de femmes, aux organisations de femmes et aux militantes indépendantes de dénoncer la fausseté de ce discours et de construire un projet de femmes libératrices qui restaure le rôle des femmes dans un véritable changement. »


Pour sa part, Arifa Bakr, administratrice du Conseil des femmes syriennes et membre du Parti de l’Union démocratique, a déclaré : « Malgré la chute du régime Baas, la mentalité imposée aux femmes n’a pas changé ; au contraire, les souffrances ont doublé. »

Elle a ajouté : « La Syrie est une mosaïque, elle ne peut être réduite à une seule couleur, langue ou identité, mais le gouvernement actuel représente une extension du régime Baas et n’a pas modifié ses pratiques. »

Elle a critiqué la représentation des femmes au sein de l’autorité de Damas, soulignant que la seule femme qui apparaît au premier plan agit selon la mentalité de l’État et ne représente pas la véritable voix des femmes.

Parallèlement, dans le nord et l’est de la Syrie, Arifa a confirmé que les femmes se sont organisées au sein de la révolution et ont démontré leur présence dans divers domaines, notamment dans la lutte contre Daech, ainsi que dans la diplomatie, l’économie, l’organisation, la politique et la société.

Elle a souligné que les femmes du nord et de l’est de la Syrie n’acceptent pas le gouvernement sous sa forme actuelle et proposent des alternatives depuis de nombreuses années. « Elles refusent de revivre la tragédie de l’ère baasiste et réclament au contraire un gouvernement démocratique décentralisé, reflétant les aspirations du peuple. » Elle a souligné : « Nous continuerons à lutter jusqu’à obtenir nos droits et à œuvrer à la construction d’une Syrie démocratique, décentralisée et pluraliste, où les droits des femmes et de la communauté dans toutes ses composantes seront préservés, et où l’égalité et la justice seront instaurées. »

SYRIE. SZK fait revivre la langue kurde et la protège de l’extinction

SYRIE / ROJAVA – L’Institut de langue kurde d’Alep supervise la formation d’environ 150 apprenants tous les quatre mois, à la fois en son centre du quartier Sheikh Maqsoud et à l’extérieur au sein des conseils et des institutions, dans le but d’établir la langue maternelle comme un pilier fondamental pour préserver l’identité culturelle et contrer les politiques de dissolution et d’effacement culturel.

L’Institut de langue kurde (Saziya Zimanê Kurdî, SZK) basé dans la partie orientale du quartier Sheikh Maqsoud à Alep continue ses efforts pour raviver la langue maternelle et améliorer l’identité culturelle, accueillant actuellement environ 150 étudiants de divers groupes d’âge pour leur enseigner la langue kurde grâce à un programme éducatif intensif de 4 mois.

Le lancement de ce projet éducatif remonte à 2012, coïncidant avec la révolution du 19 juillet, qui a marqué un tournant majeur dans le paysage culturel et social des zones où le système d’administration autonome est en place, notamment dans les quartiers de Cheikh Maqsoud et d’Achrafieh. Depuis, l’institution n’a cessé de proposer des cours, malgré les changements de lieux et de conditions de travail, consacrant ses efforts à la préservation de la langue kurde et à sa transmission aux nouvelles générations.

De l’alphabet à la grammaire : trois niveaux d’enseignement

Selon les organisateurs de l’établissement, l’éducation est organisée en trois niveaux principaux, chacun de quatre mois, des petits groupes se formant de 15 à 20 étudiants, préparés en moins d’un mois. Les cours comprennent des individus de divers horizons, des étudiants universitaires aux mères.

Zozan Dahr, membre fondatrice de l’institution de la langue kurde, a expliqué que les programmes éducatifs ne font pas de distinction d’âge, mais se concentrent plutôt sur la compréhension et la satisfaction des besoins linguistiques de chaque apprenant. Elle a ajouté : « Nous avons confiance dans la capacité d’apprentissage de chacun, malgré les difficultés parfois rencontrées dans la langue, d’autant plus que la majorité d’entre eux en ont été privés très tôt. Notre mission aujourd’hui est de préserver notre langue de l’extinction. »

Et elle souligne que les programmes commencent par les bases de la lecture et de l’écriture, progressant progressivement vers des compétences avancées en matière de grammaire et de langue, dans un délai flexible allant de une à deux heures par jour, selon les capacités de l’élève et s’étendant à quatre heures dans des cas spéciaux.

Les apprenants voient cette étape comme une rare occasion de compenser ce dont ils ont été privés auparavant. Mohamed Bakr, un jeune homme de 21 ans actuellement inscrit au cours de premier niveau, décrit cette expérience comme « une opportunité irremplaçable », affirmant : « Notre langue représente notre culture, et ceux qui la négligent sont perdus. Nous, et surtout les jeunes, devons donner la priorité à l’apprentissage de notre langue maternelle. »

Dans le contexte des discussions sur l’importance de la langue comme pilier de l’identité, certains citent ce qui est mentionné dans l’ouvrage du leader Abdullah Öcalan intitulé « La question kurde et la solution de la nation démocratique », où il affirme : « La langue est l’identité et l’existence morale de la société, et elle en est le moteur culturel, éthique et émotionnel » et « A mesure que la société progresse grâce à sa langue, sa vie progresse. »

Les cours de langues représentent une résistance culturelle.

L’Institution de la langue kurde cherche, par ce biais, à ancrer la langue kurde dans la vie quotidienne et à lutter contre les mentalités d’exclusion qui ont privé de leurs droits les Kurdes et d’autres composantes de la diversité syrienne pendant des décennies. Dans les quartiers de Cheikh Maqsoud et d’Achrafieh, les petites salles de classe apparaissent comme un acte de résistance culturelle par excellence, sous le slogan : « Notre langue ne disparaitra pas. »

ANHA

ROJAVA. Un attentat de DAESH fait 3 morts parmi les forces de sécurité intérieure

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SYRIE / ROJAVA – Trois membres des forces de sécurité intérieure ont été tués et un autre blessé dans un attentat à la bombe perpétré par des cellules de l’EI sur la route Hasakah-Raqqa, rapporte l’agence kurde ANHA.

Le commandement général des forces de sécurité intérieure (en kurde: Hêzên Ewlekariya Hundirîn) du nord et de l’est de la Syrie a publié un communiqué au sujet de l’attentat à la bombe perpétré par des cellules de l’EI contre le point de contrôle de Sabah Al-Khair, sur la route reliant Raqqa à Hasakké.

TURQUIE. Un romancier kurde et sa maison d’éditions poursuivis pour « terrorisme »

TURQUIE / KURDISTAN – Le romancier kurde Mehmet Dicle ainsi que sa maison d’éditions ZIZ sont poursuivis par les autorités judiciaires turques pour « terrorisme » à cause du roman « Berfa Sor » (Neige rouge). Le PEN International a exhorté les autorités turques à « cesser de lancer des poursuites absurdes pour propagande terroriste fondées sur des écrits littéraires fictifs. »
 
Mehmet Dicle
 
« Une fois de plus, les autorités turques s’en prennent à un écrivain et à un éditeur simplement parce qu’ils ont osé rédiger et publier un roman. Cette affaire est aussi dangereuse qu’absurde. Nous soutenons Mehmet Dicle, membre kurde du PEN, et la maison d’édition ZİZ, et exhortons les autorités à cesser de lancer des poursuites absurdes pour propagande terroriste fondées sur des écrits littéraires fictifs », a déclaré Burhan Sonmez, président du PEN International.
 
Les autorités turques ne devraient pas accuser le membre kurde du PEN Mehmet Dicle et la maison d’édition ZİZ de propagande terroriste, a déclaré PEN International le 30 mai dernier, alors qu’une enquête a été ouverte sur le roman de Dicle Berfa Sor (Neige rouge).
 
En avril 2025, l’avocat de Mehmet Dicle l’a informé qu’une enquête avait été ouverte contre lui et les éditions ZİZ concernant le livre de Dicle, Berfa Sor. Publié en 2023, Berfa Sor se déroule dans la ville fictive d’Asûs et évoque l’angoisse et le désir des parents d’un guérillero. Dicle et son éditeur sont accusés de « propagande terroriste » pour le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), une accusation passible d’une lourde peine de prison.
 
Selon le dossier d’enquête, en janvier 2025, les autorités pénitentiaires de Yozgat, en Turquie centrale, ont saisi une série de livres auprès de détenus, dont Berfa Sor. Des extraits du livre ont été traduits du kurde au turc par des traducteurs non officiels, le parquet concluant qu’il s’agissait de propagande terroriste. Le dossier d’enquête a ensuite été transmis au parquet de Diyarbakır, où Dicle est basé.
 
Comme l’a documenté à maintes reprises PEN International – notamment dans « Identité à l’épreuve : persécution et résistance », son dossier 2025 – l’enquête sur Dicle et son éditeur intervient dans un contexte de répression croissante des publications et du secteur éditorial en Turquie. Ces dernières années, de nombreux auteurs ont vu leurs livres vendus avec des restrictions, voire carrément interdits.
 
Les autorités turques devraient cesser de censurer et de persécuter les écrivains pour l’exercice légitime de leur droit à la liberté d’expression – y compris par le biais de lois antiterroristes trop larges – en commençant par abandonner de toute urgence leur enquête sur Mehmet Dicle et la maison d’édition ZIZ.
 
Informations Complémentaires
 
Mehmet Dicle, né en 1977, est un écrivain, éditeur et traducteur kurde, cofondateur et directeur de la Maison littéraire LiteraKurd à Diyarbakır, dans le sud-est de la Turquie. Il est membre du PEN kurde. Dicle a publié trois recueils de nouvelles en kurde : Asûs (2005), Nara (2010) et Ta (2014). Il travaille également comme traducteur et a notamment édité Kürt Dili ve Edebiyati (Langue et littérature kurdes, 2010), un manuel scolaire en turc. Depuis 2020, Dicle est rédacteur en chef du magazine de nouvelles Kurdeçîro k. En 2025, avec un groupe d’autres écrivains, Dicle a cofondé la Maison littéraire LiteraKurd à Diyarbakır, où il travaille notamment comme directeur et coordonne de nombreuses activités littéraires, notamment des séminaires, des panels, des événements de littérature pour enfants, des ateliers d’écriture et de traduction et des cours de langues.
 
La maison d’édition ZİZ a été fondée en 2023 à Diyarbakır (Amed) et est spécialisée dans les œuvres littéraires kurdes, notamment la poésie, les romans, les nouvelles et les livres traduits.

TURQUIE. Le gouvernement empêche les commémorations du parc Gezi

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TURQUIE – Hier soir, la police turque a empêché les commémorations du soulèvement Gézi et arrêté plusieurs dizaines de manifestants qui voulaient célébrer les 12 ans du mouvement de contestation anti-gouvernementale Gezi qui avait débuté le 28 mai à Istanbul par un sit-in d’une dans le parc de Gezi à Taksim (Istanbul) est qui s’est rapidement propagé dans tout le pays. 12 ans après le soulèvement Gezi, le gouvernement turc n’a toujours pas digéré cet affront populaire de grand ampleur qui a fait de nombreuses victimes civiles, dont l’adolescent kurde Berkin Elvan devenu une des figure de la résistance Gezi, tandis que les partis kurdes DBP et le DEM ont publié des communiqués célébrant les 12 ans de Gezi. 
 
 
Les coprésidents du DBP et du DEM Parti ont publié des déclarations marquant le 12e anniversaire de la résistance de Gezi.
 
Les coprésidents du Parti des régions démocratiques (DBP), Çiğdem Kılıçgün Uçar et Keskin Bayındır, ainsi que les coprésidents du Parti de l’égalité et de la démocratie des peuples (Parti DEM), Tülay Hatimoğulları et Tuncer Bakırhan, ont partagé des publications sur leurs comptes de médias sociaux pour marquer le 12e anniversaire de la résistance de Gezi.
 
Les coprésidents du DBP et du parti DEM ont écrit ce qui suit :
 
Çiğdem Kılıçgün Uçar : « La lumière allumée par des millions de résistants il y a douze ans dans le parc Gezi contre les politiques lucratives du gouvernement continue d’illuminer notre chemin. Cette résistance unique, qui incluait tous les segments de la société face à l’agression politique, a laissé des traces profondes dans notre mémoire collective. Ceux qui ont défendu leurs espaces de vie ont non seulement défendu un parc et des arbres, mais ont également donné un exemple marquant de désobéissance civile pour la démocratie, la paix et la liberté. Nous n’oublierons jamais le rôle moteur de notre camarade Sırrı Süreyya Önder dans la Résistance de Gezi, qui s’est imposée comme une réponse légitime, démocratique et juste à un esprit répressif et autoritaire. Nous prendrons la Résistance de Gezi, qui a renforcé les liens d’égalité et de solidarité entre les peuples, comme guide et poursuivrons cette lutte, épaule contre épaule. Une fois de plus, je commémore avec révérence les vies que nous avons perdues dans cette résistance et m’incline avec respect devant leur mémoire. »
 
Keskin Bayındır : « Je salue la Résistance de Gezi, source d’inspiration pour la démocratie, la paix et la lutte collective, et je me souviens encore une fois avec nostalgie de ceux qui ont perdu la vie durant cette résistance. La Résistance de Gezi était sans aucun doute la volonté commune de millions de personnes qui ont élevé la voix pour la liberté, la justice et la vie écologique contre le pillage, la marchandisation de la nature et un ordre oppressif. À l’occasion de l’anniversaire de cette résistance, qui représente la conscience commune de la société, nous réaffirmons une fois de plus notre détermination à reconstruire une société démocratique où les peuples et les croyances peuvent vivre ensemble, librement et dans l’égalité. Ce terrain, où la lutte du peuple kurde pour la liberté rencontre la quête de démocratie des peuples de Turquie, nous montre qu’un avenir commun est bel et bien possible. La transformation démocratique qui ouvrira la voie à la construction de cet avenir ne peut se réaliser que par un contrat social fondé sur la participation égale des peuples, le pluralisme et la démocratie. »
 
Tülay Hatimoğulları : « Notre fière résistance, Gezi, fête ses 12 ans ! Gezi était la volonté de millions de personnes. Gezi était la voix unie de la conscience de ce pays. Gezi, c’était nous, Gezi, c’était nous tous. »
 
Tuncer Bakırhan : « À l’occasion de l’anniversaire de la Résistance de Gezi, nous nous engageons une fois de plus pour la paix, la justice et la société démocratique. Gezi était l’appel à la liberté et à la justice qui s’élevait de tous les coins de ce pays. C’était l’expression la plus concrète de la fraternité entre les différentes identités, croyances et modes de vie. Nous continuerons à défendre la paix sociale et la vie démocratique, à avancer vers un avenir sans conflit, dans le langage de la paix, pour une véritable démocratie fondée sur la volonté du peuple. » (ANF)
 

TURQUIE. DEM Parti: Le 10e paquet judiciaire ne répond pas aux attentes

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TURQUIE – Récemment, le gouvernement turc a fait voter un projet de loi modifiant la loi sur l’exécution des peines et des mesures de sécurité. Malheureusement, comme on pouvait le craindre, des dizaines de milliers de prisonniers politiques kurdes, y compris ceux gravement malades, sont exclus des aménagements proposés par ce projet de loi, également connu sous le nom de « 10e paquet judiciaire » qualifié d’« anticonstitutionnel » par le DEM Parti.

Quand à la coprésidente de l’Association des droits de l’homme (IHD), Eren Keskin, « Il n’y a rien dans ce projet de loi qui puisse susciter des espoirs de paix. (…) La Turquie a accepté ces accords au-delà de sa propre constitution. La liberté d’expression et d’association, ainsi que les droits individuels, sont garantis. Cependant, n’étant pas un État de droit, la Turquie viole ces accords. (…) Elle n’applique pas les décisions de la Cour constitutionnelle (AYM) ni celles de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). » 

Dilan Kunt Ayan, députée du Parti DEM Parti, a déclaré : « Ce paquet contient des dispositions contraires à la Constitution, manquant de prévisibilité juridique et étant arbitraires et discriminatoires. »

Les membres de la Commission parlementaire de la justice du Parti de l’égalité des peuples et de la démocratie (DEM Parti) ont tenu une conférence de presse au Parlement concernant le 10e paquet judiciaire. Y ont participé les députés Zülküf Uçar, Ali Bozan, Nevroz Uysal Aslan et Dilan Kunt Ayan.

Dilan Kunt Ayan a déclaré que le paquet n’était pas conforme à l’esprit du processus en cours pour la résolution de la question kurde et que leurs revendications et propositions n’y étaient pas reflétées. Elle a poursuivi : « Le paquet a été élaboré avec une approche qui ignore les appels du peuple, la loi et les groupes victimes. L’« Appel à la paix et à une société démocratique » lancé par M. Öcalan le 27 février a ouvert la voie à un nouveau processus historique, politique et social. La déclaration du 12 mai qui a suivi (la décision du PKK de se dissoudre et de désarmer) est une étape historique qui a renforcé l’espoir d’un avenir commun entre les peuples turc et kurde. Toute mesure juridique prise dans un tel contexte devrait viser à contribuer à une paix et une coexistence honorables. 

Les modifications apportées aux règles d’exécution [des peines] ont notamment suscité une profonde déception chez des dizaines de milliers de détenus et leurs familles. Les améliorations nécessaires pour les prisonniers politiques, les détenus malades et ceux victimes de discrimination systématique en prison ne sont pas prévues. Les inégalités existantes se creusent encore davantage. Ce projet de loi contient des dispositions contraires à la Constitution, manquant de prévisibilité juridique et étant arbitraires et discriminatoires. Les griefs découlant des précédentes modifications de la loi sur l’exécution des peines n’ont pas été pris en compte. Le sens de la justice a une fois de plus été sacrifié à des visées politiques. Ce projet de loi a tourné le dos à l’exigence de justice de la société et n’a pas pris en compte les possibilités de solutions démocratiques, de paix sociale et d’égalité juridique.

Les réformes attendues avec impatience par la population depuis des années ont une fois de plus été exclues du champ d’application de la législation, blessant une fois de plus la conscience publique. La population attendait de ce paquet qu’il garantisse une libération conditionnelle et des conditions de traitement équitables pour les détenus malades, et qu’il remédie aux inégalités juridiques causées par la loi Covid du 31 juillet 2023. Elle espérait la levée des interdictions de libération conditionnelle pour les récidivistes et les récidivistes secondaires, sans distinction de nature criminelle, et l’égalité pour les prisonniers politiques exclus de la loi discriminatoire de 2020 sur l’exécution des peines. Elle exigeait des réglementations contribuant à un système d’exécution légal, prévisible et équitable pour tous, exempt de pratiques d’exécution arbitraires et discriminatoires. Ces attentes ne sont pas le fruit du peuple lui-même ; elles sont le fruit des promesses et des engagements pris par le ministre de la Justice, Yılmaz Tunç, envers la population.

Nous soumettrons une proposition visant à supprimer l’exception relative aux peines de réclusion à perpétuité aggravées du projet d’amendement à l’article 110, paragraphe 3, de la loi sur l’exécution des peines. Nous demanderons également la suppression de la condition vague et arbitraire selon laquelle les détenus gravement malades ne doivent pas représenter une menace sérieuse et concrète pour la sécurité publique. Nous soumettrons notre proposition à la commission visant à supprimer les dispositions discriminatoires qui empêchent les prisonniers politiques de bénéficier de procédures d’exécution spéciales destinées aux femmes, aux enfants et aux personnes âgées. De plus, nous soumettrons des propositions pour l’introduction de nouveaux articles.

Nous déposerons une motion proposant que la loi Covid du 31 juillet soit modifiée de manière équitable et conforme à la loi, et intégrée au paquet comme nouvelle disposition spéciale. Nous proposerons que l’expression « danger imminent pour la vie » soit supprimée de l’article 16 de la loi sur l’exécution des peines en ce qui concerne les détenus atteints de maladies graves et remplacée par « maladie grave existante ». La Commission et les représentants du gouvernement doivent tenir compte des demandes d’égalité et de justice de la population. Il n’est pas trop tard pour examiner nos propositions de manière pluraliste, axée sur les solutions et démocratique, et pour modifier le paquet en conséquence. Comme vous le savez, ces modifications peuvent être apportées aussi bien par la Commission que par l’Assemblée générale du Parlement.

Nous nous opposerons à ces lacunes et à ces inégalités de la plus grande force possible, tant à la commission qu’à l’Assemblée générale, et partout où nous serons présents. Nous continuerons à défendre la paix sociale, l’État de droit, la justice et l’égalité ». (ANF)

SYRIE. Réunion tripartite au sommet du Rojava

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SYRIE / ROJAVA – Des responsables des Forces démocratiques syriennes (FDS), de l’Administration autonome et du Conseil démocratique syrien ont tenu une réunion tripartite pour discuter de la mise en œuvre des dispositions de l’accord signé entre les autorités kurdes et le régime central de Damas le 10 mars dernier.

Hier, des représentants des Forces démocratiques syriennes (FDS), de l’Administration autonome et du Conseil démocratique syrien ont tenu une réunion tripartite pour discuter de la mise en œuvre des dispositions de l’accord signé avec Damas le 10 mars, ainsi que de la coopération dans la lutte contre Daech. Les préparatifs d’une conférence nationale ont également été abordés lors de la réunion.

La réunion a été suivie par le commandant général des FDS Mazloum Abdi, Rohilat Efrîn du commandement général des unités de protection des femmes (YPJ), les coprésidents et les dirigeants du Conseil exécutif de l’administration autonome du nord et de l’est de la Syrie (AANES), et la coprésidence du Conseil démocratique syrien (en kurde: Meclisa Sûriya Demokratîk, MSD).

La réunion a porté sur la mise en œuvre des dispositions de l’accord signé le 10 mars entre le commandant général des FDS, Mazloum Abdi, et le président syrien par intérim, Ahmed al-Sharaa. Les discussions ont également porté sur les conditions d’ouverture des négociations pour la mise en œuvre de cet accord, qui a coïncidé avec le départ de la délégation de l’Administration autonome pour Damas afin d’entamer le premier cycle de dialogue.

Les moyens de coopérer avec le ministère syrien de la Défense dans la lutte contre l’EI ont également été discutés, ainsi que la situation dans les camps et les prisons où sont détenus des dizaines de milliers de membres de l’EI.

La réunion a salué la décision des États-Unis et de l’Union européenne de lever les sanctions contre la Syrie, soulignant l’importance de cette décision pour la reconstruction et le développement du pays. Il a été noté que la levée des sanctions pourrait contribuer à renforcer la sécurité et la stabilité en Syrie et faciliter le retour des personnes déplacées et des réfugiés dans leurs villes et villages.

Il a également été décidé lors de la réunion de commencer les préparatifs d’une conférence nationale globale impliquant les composantes du nord et de l’est de la Syrie pour discuter de la manière de mettre en œuvre l’accord du 10 mars. (ANF)

SYRIE. Une délégation du Rojava se rend à Damas

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SYRIE / ROJAVA – Aujourd’hui, une délégation de l’Administration arabo-kurde du Rojava s’est rendue à Damas pour rencontrer le pouvoir central afin de discuter de la mise en œuvre d’un accord signé le 10 mars dernier.

Dans le cadre des efforts en cours pour mettre en œuvre les dispositions de l’accord du 10 mars signé entre les dirigeants des Forces démocratiques syriennes (FDS) et les autorités de Damas, une délégation de l’administration autonome s’est rendue à Damas cet après-midi pour rencontrer les responsables de la mise en œuvre des dispositions de l’autre côté.

Selon le correspondant d’ANHA, la délégation est composée des membres du comité formé le 12 avril, à savoir : Fawza Youssef, Abd al-Hamid al-Mahbash, Ahmad Youssef, Sanhreb Barsoum et Sozdar Haji. Mariam Ibrahim et Yasser Suleiman sont les porte-parole du comité.

Cette visite fait suite à trois réunions de coordination qui ont eu lieu dans le nord-est de la Syrie, la première le 19 mars, la deuxième le 12 avril et la dernière la semaine dernière, alors que les parties cherchent à promouvoir le dialogue et à parvenir à la stabilité dans la région en mettant en œuvre les dispositions de l’accord du 10 mars.

La délégation de l’Administration autonome du Nord et d’Est de la Syrie (AANES) devrait rencontrer les autorités de Damas ce soir. (ANHA)

ROJAVA. Les Kurdes démentent les rumeurs d’une rencontre turco-kurde

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SYRIE / ROJAVA – Le vendredi 30 mai, la journaliste Amberin Zaman affirmait dans un article publié par Al Monitor qu’il y avait une rencontre prévue entre le ministre turc des Affaires étrangères Hakan Fidan ou du directeur des renseignements turcs (MIT) Ibrahim Kalin avec le commandant en chef des FDS Mazlum Abdi. Les parties kurde et turque ont toutes deux démenti aujourd’hui les propos d’Amberin Zaman.
 
 
Le centre des médias des Forces démocratiques syriennes publient un démenti
 
Le centre des médias des Forces démocratiques syriennes (FDS) a publié aujourd’hui le communiqué suivant déclarant que des affirmations formulées dans un article publié par Al-Monitor affirmant qu’il a eu une proposition turque pour une rencontre avec le commandant général Mazlum Abdi, sont fausses.
 
« Un récent rapport d’Al-Monitor citait des « sources régionales » affirmant que le ministre turc des Affaires étrangères ou le chef des services de renseignement turcs avaient proposé de rencontrer notre commandant en chef. Nous confirmons catégoriquement que cette information est inexacte. Ni le commandement de nos forces ni aucune délégation représentant les régions du nord et de l’est de la Syrie lors des réunions avec Damas n’ont reçu une telle proposition, que ce soit de la part de la Turquie ou de toute autre partie. »
 
Des sources diplomatiques turques ont également publié un démenti concernant les allégations d’Al-Monitor.

TURQUIE. 30e anniversaire des Mères du samedi

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TURQUIE – Ce 31 mai qui marque le 30e anniversaire de leur action, les Mères du samedi ont déclaré : « Nous voulons la paix et nos disparus. Nous voulons la paix et la vérité. Nous voulons la paix et la justice. Nous voulons la paix et la démocratie. »  

Les Mères du samedi se sont rassemblés sur la place Galatasaray lors de la 1053ème semaine de leurs actions pour demander le sort de ceux qui ont disparu et ont été assassinés en détention et pour exiger que les auteurs soient poursuivis. Réunies sur la place Galatasaray avec des œillets et des photos de leurs proches disparus en détention, les Mères du samedi se sont enquises du sort de Mehmet Sait Zengin, un civil kurde porté disparu en détention à Mardin/ Midyat le 6 mai 1995, au cours de cette semaine de leurs actions.

İkbal Eren, l’un des proches des disparus qui a lu le communiqué de presse, a déclaré qu’ils élevaient la voix sur la place Galatasaray depuis le 27 mai 1995, afin de ne pas laisser tomber dans l’oubli ceux qu’ils ont perdus en détention. İkbal Eren, qui a déclaré que depuis 30 ans, ils criaient depuis cette place : « Cela fait 30 ans que nous luttons pour rendre visibles les cas de disparitions en détention, que l’État a occultés par sa politique de déni et d’impunité, et pour obtenir justice. Nous crions depuis 30 ans : « Cessez le déni, clarifiez le sort de nos disparus. » Nous savons que justice ne peut être obtenue sans mettre fin à l’impunité. On ne peut parler de paix sans justice. » 

Histoire de Mehmet Zengin

« Nous voulons la paix, et nos disparus. Nous voulons la paix et la vérité. Nous voulons la paix et la justice. Nous voulons la paix et la démocratie », a déclaré İkbal Eren, ajoutant qu’ils se sont rassemblés pour porter la voix de la famille Zengin lors de l’action de cette semaine.
« Mehmet Sait Zengin, 36 ans, était commerçant à Midyat. Il était membre du parti HADEP. Menacé par les forces de sécurité, il était constamment suivi, détenu et torturé. En avril 1995, il a été arrêté par des policiers venus à son magasin. Il a été torturé pendant 14 jours, puis relâché. Cependant, peu après sa libération, le 6 mai 1995, il a été arrêté à son domicile par deux policiers en civil qui, selon eux, venaient de Mardin et emmenés à bord d’une Toros blanche [Renault 12*] », a déclaré İkbal Eren.

 

La famille de Mehmet Sait Zengin, inquiète pour sa sécurité, s’est adressée au commissariat de police de Midyat. İkbal Eren a déclaré : « Les autorités ont répondu : ‘Nous ne l’avons pas, mais il a peut-être été emmené à Mardin.’ La famille s’est alors rendue à Mardin. Son frère, qui s’était adressé au commissariat, a été menacé : ‘Si vous le cherchez, vous connaitrez le même sort.’ Les démarches de la famille ont été rejetées. Nous sommes restés sans nouvelles de Mehmet Sait Zengin, père de quatre enfants. 

Depuis 30 ans, sa famille se demande : « Qu’est-il arrivé à Mehmet Sait Zengin ? » Le dossier, relancé grâce aux efforts de la section de Mardin de l’Association des droits de l’homme, est resté en suspens au parquet de Midyat. Peu importe le temps qui passe, nous ne renoncerons jamais à exiger justice pour Mehmet Sait Zengin, malgré toutes nos pertes ; et à rappeler que l’État est tenu d’agir conformément aux normes juridiques universelles. »

 

Salutation d’Emine Ocak

Après cette déclaration, Hanife Yıldız, l’une des Mères du samedi, a transmis le message envoyé par Emine Ocak, la mère de Hasan Ocak, assassiné en détention. Hanife Yıldız a déclaré : « Je suis allée voir notre Mère Emine. Celle qui a fait entendre nos voix il y a 30 ans, a adressé ses salutations à tous ici présents. 30 ans n’ont pas été faciles. Les mères n’ont pas appris le sort de leurs enfants et n’ont pas obtenu justice. Elles sont toutes reparties le cœur brisé. »
L’action a pris fin après que des œillets ont été déposés sur la place Galatasaray.

 

Marquant 30 ans de leur résistance sur la place Galatasaray le 27 mai, les Mères du samedi sont connues pour exiger justice pour leurs proches disparus de force dans les années 1980 et 1990.

Un artiste de rue anonyme a rendu visibles les Mères du Samedi et leur lutte à travers une fresque murale sur le mur de la place Galatasaray.

30 ans de luttes pour obtenir justice pour leurs proches disparus de force

Le samedi 27 mai 1995, les mères du samedi se réunissaient pour la première fois sur la place Galatasaray, à Istanbul, pour dénoncer les disparitions forcées des civils en détention. Après des années de luttes, de nombreuses mères de l’initiation ont quitté ce monde, sans avoir obtenu justice, ni le corps de leurs enfants disparus en détention. Pire encore, certaines ont été détenues / torturées pour avoir demandé justice pour leurs disparus !

Le samedi 27 mai 1995, les Mères du Samedi (en kurde: Dayikên Şemiyê, en turc: Cumartesi Anneleri) descendaient pour la première fois sur la place Galatasaray, à Istanbul, pour exiger la fin des disparitions forcées* et demander qu’on leur rende leurs proches portés disparus.
 
Les « mères du samedi » reprochent à l’État turc de ne pas avoir enquêté sérieusement pour établir la vérité sur ceux qui ont disparu après leur mise en détention par les autorités turques.
Les décisions de la Cour constitutionnelle ne sont toujours pas appliquées

Depuis août 2018, la place Galatasaray est entourée de barricades métalliques et la police armée y maintient une présence permanente. Deux arrêts de la Cour constitutionnelle, rendus en 2022 et 2023, ont conclu à une violation du droit des requérants à la liberté de réunion pacifique et ont ordonné à l’État de prévenir toute nouvelle violation. Cependant, ces arrêts restent inappliqués.

Entre avril et novembre 2023, les tentatives des Mères du samedi de se rassembler sur la place, conformément à ces décisions contraignantes, ont été réprimées par de violentes interventions policières et des membres du groupe ont été interpellés. Bien que les interventions policières et les interpellations aient cessé depuis novembre 2023, les autorités ont arbitrairement limité à dix personnes la participation aux manifestations hebdomadaires du groupe devant les barricades métalliques.

 

 

*Version locale de la Renault 12, qui autrefois symbolisaient les escadrons de la mort des forces paramilitaires turques (JITEM) et ces disparitions forcées non élucidées

**Selon l’Association des droits de l’Homme (IHD), entre 1992 et 1996, 792 disparitions forcés et meurtres (de journalistes, syndicalistes, médecins, enseignants, enfants ou simples paysans) par l’État ont été signalés dans les régions kurdes (Kurdistan du Nord) de Turquie.

 

ALLEMAGNE. Le 15e Festival de Dersim en Europe commence par un appel à la résistance

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ALLEMAGNE – 15e Festival de Dersim en Europe a débuté par un appel à résister à l’assimilation et à protéger le patrimoine culturel de la province kurde de Dersim.
 
Le 15e Festival de Dersim en Europe, organisé par la Fédération démocratique alévie (FEDA), la Fédération européenne des associations démocratiques du Dersim (ADEF) et le Congrès de reconstruction du Dersim (DIK), a lieu à Francfort (Rebstockpark), malgré des averses.
 
Le 15e Festival européen de la culture du Dersim a débuté à Francfort, au Rebstockpark, sous le slogan « Nous ne sommes pas du Khorasan, nous ne sommes pas de Tunceli, nous sommes du Dersim ! » (Ma ne Xorasan, ma ne Tunceli ! Ma Dersim me !)
 
Cette année, le festival a été organisé dans le but de résister à l’assimilation, de préserver les valeurs culturelles, de maintenir vivante la mémoire historique et de renforcer la solidarité sociale.
 
L’événement culturel vise à préserver l’existence culturelle et sociale de la province kurde de Dersim face à l’assimilation, au déni et à la destruction écologique par l’État turc.
 
Le festival s’est ouvert par une table ronde intitulée « La destruction de la langue, de la culture et des croyances : le Moyen-Orient, les Kurdes et les Alévis (Alaouites) ». La table ronde était animée par Hülya Yer et réunissait Gülistan Kılıç Koçyiğit, vice-présidente du groupe parlementaire du DEM Parti ; Hüseyin Şimşek, membre du Comité exécutif central de la Fédération des assemblées socialistes (SMF) ; et le chercheur et auteur Selim Temo.
 

Des photos de Seyit Rıza et de deux figures fondatrices du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), Ali Haydar Kaytan et Rıza Altun, ont été exposées sur le lieu du panel.

Gülistan Kılıç Koçyiğit : Dersim ne se tait plus

Gülistan Kılıç Koçyiğit a commencé son discours en déclarant : « C’est un honneur pour moi d’être ici aujourd’hui. » Elle a commémoré le massacre de Dersim de 1938 et a rappelé que pendant de nombreuses années, cette douleur était restée muette. « Aujourd’hui, notre peuple affronte sa vérité », a-t-elle déclaré. « Ce n’est pas un processus facile, mais c’est un processus honorable. »

Kılıç a également évoqué les transformations en cours au Moyen-Orient, soulignant le rôle essentiel du peuple kurde dans cette période de changement. Évoquant le processus de paix mené en Turquie, elle a déclaré : « Un climat de confiance est essentiel à la paix. Nous pensons que cette confiance doit être instaurée progressivement. »

Şimşek: L’alévisme du Dersim est unique

Hüseyin Şimşek a souligné que l’identité du Dersim ne peut pas être définie par des liens avec le Khorasan ou Tunceli, et que l’alévisme du Dersim a une structure distincte du chiisme en Iran et de l’alaouisme arabe.

Il a souligné les pressions exercées depuis la période ottomane jusqu’à l’ère républicaine et a déclaré que le massacre de 1938 avait été perpétré conjointement par toutes les structures politiques. Selon Şimşek, si la population a réussi à préserver sa culture après le massacre, elle a conservé une relation délibérément distante avec l’État.

Temo : Les Kurdes du Khorasan ont toujours vécu dans la mémoire du peuple

Le chercheur et auteur Selim Temo a expliqué que son travail sur les Kurdes du Khorasan ne constitue pas la révélation d’un fait nouveau, mais plutôt la documentation académique d’une vérité connue depuis longtemps par le peuple lui-même. Il a rappelé que Mem û Zîn, écrit par Ehmede Khani il y a près de 330 ans, contient des références à la structure des tribus et de la société kurdes, y compris des mentions des tribus kurdes du Khorasan. Lors de la table ronde, Temo a lu des extraits pertinents de cet ouvrage. Il a déclaré que les documents historiques, la poésie et diverses sources fournissent des preuves significatives de la présence kurde au Khorasan, et que ce savoir a été préservé à la fois dans la mémoire collective du peuple et dans les documents écrits au fil du temps.

Culture, musique et solidarité se rencontrent

Après la table ronde, l’artiste Kivrem Erdal Timurlenk est monté sur scène. Le site du festival offrait une ambiance conviviale avec des stands d’écrivains, des stands de cuisine traditionnelle, des expositions culturelles et des expositions d’artisanat.

Deuxième jour du festival

La deuxième journée du festival a débuté à 11 heures. Un panel intitulé « Destruction fondée sur le genre et la foi dans le contexte des questions féminines » a accueilli Elif Kaya, Zeynep Hayır et Nuray Atmaca. Le panel fut modéré par Songül Morsümbül.

À 13 heures, le programme scénique a débuté par un rituel gulbang animé par Pir Zeynel Kete. Tout au long de la journée, les visiteurs ont pu profiter de spectacles musicaux, d’expositions, d’ateliers pour enfants et de jeux traditionnels.

Les artistes invité-e-s : Çar Newa, Grup Munzur, Beser Şahin, Cemil Koçgiri, Zarokên Tenburxane, Zaza Woman, Diyar 23, Hazaran (groupe de musique arménienne), Delil Hıdır et DAKME.

En outre, des députés, des co-maires et des représentants de Dersim venus d’Europe ont également assisté au festival. (ANF)

Sustam : La culture kurde doit rompre avec les liens coloniaux – IV

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PARIS – Le Maître de conférences à l’université Paris 8, Engin Sustam souligne que les politiques d’assimilation visent à effacer la langue kurde, dans une longue interview accordée à l’agence Firat News (ANF).

Le sociologue Engin Sustam a déclaré que la question kurde, ancrée dans la question du colonialisme, est fondamentalement une question de classe. Il a souligné que l’assimilation a eu l’impact le plus destructeur sur le peuple kurde.

Engin Sustam

Nous publions la quatrième et dernière partie de cette longue interview.

La première partie peut être lue ici, la deuxième et la troisième par ici.

Les politiques d’assimilation se sont poursuivies depuis la fondation de la République [turque]. Si l’on examine les périodes précédentes, il apparaît clairement que l’époque actuelle est la plus efficace en matière d’assimilation. Quelle politique culturelle faut-il mener ?

Le meilleur antidote à l’assimilation est de soutenir la langue kurde dans tous les domaines, de revendiquer et de mettre en œuvre sans relâche des initiatives contribuant à sa transformation en langue d’enseignement, de commerce, de la vie quotidienne et d’institutions. Prenons l’exemple des livres en kurde. Leur publication ne pose aucun problème, mais trouver des lecteurs reste problématique. Bien sûr, l’organisation d’une foire du livre à Diyarbakır (Amed) est une avancée positive ; cependant, elle pourrait paradoxalement refléter le traumatisme d’une langue dont le lectorat est limité, en dehors de l’intelligentsia.

C’est pourquoi les centres culturels et les municipalités doivent proposer systématiquement des cours de langue écrite et orale et veiller à ce que ces initiatives soient confiées à des experts du domaine. Tout le soutien possible doit être apporté pour leur créer un espace. Dans le cas contraire, des activités comme le cinéma, les livres, l’art et la musique kurdes peineront à contrer l’assimilation, à moins de s’inscrire dans une politique linguistique sociétale plus large.

Tout le monde écoute de la musique en kurde, donne un prénom kurde à ses enfants ou donne à son immeuble un nom comme « Welat » [mot kurde signifiant « patrie »] pour trouver un réconfort psychologique, mais ces actions n’opèrent pas véritablement au niveau subconscient au sens lacanien. Freud, parlant d’instinct, faisait référence à des tendances héréditaires et fixes. Lorsqu’il évoquait les pulsions, il décrivait une impulsion motrice qui pousse l’organisme vers un but. Comme l’a noté Deleuze, une pulsion n’est pas une émotion, c’est une impression au sens le plus fort, et non une représentation. Ce que nous entendons ici par pulsion renvoie aux actions institutionnelles et aux impressions sociales.

Alors, comment parler des enfants victimes de racisme, étiquetés d’insultes anti-kurdes comme « Kıro » ou « Hanzo », et dont la vie a été perturbée dès l’enfance ? Comment remédier à cela ? Au lieu d’ouvrir des « Instituts des langues en danger » ou des centres d’études kurdes dans chaque université, la création d’universités proposant un enseignement en kurde et l’épanouissement d’acteurs formés aux pédagogies alternatives contribueraient davantage au processus en Turquie. Cela nous aiderait également à mieux appréhender certains aspects de l’histoire.

Le kurde est une langue sous pression, elle doit être libre dans l’espace public

Créer des universités où le kurde est la langue d’enseignement, plutôt que de simplement ouvrir des départements d’études kurdes ou des « instituts de langues en voie de disparition », constitue clairement une mesure plus efficace. Cela doit se produire en Turquie, et pas seulement en Allemagne, et s’appuyer sur des pédagogies alternatives. Bien entendu, toutes les universités doivent être des institutions libres, libres de toute pression autoritaire, sans recteurs nommés ni professeurs imposés. Tout au long du processus d’assimilation, trois moments clés peuvent être identifiés : un retour aux sources, une stimulation interne causée par la pression coloniale et la suppression de la langue maternelle. La personne assimilée est intégrée à la langue et à la culture dominantes par des instruments de gratification. Il ne s’agit pas d’assimilation volontaire. Le kurde est une langue opprimée. Par l’assimilation forcée orchestrée par des pouvoirs coercitifs, les Kurdes sont dépouillés de leur langue. Le kurde, comme le turc, doit pouvoir exister librement dans l’espace public.

Les musiciens kurdes sont constamment soumis à la censure. Les festivals de cinéma kurdes ont généralement lieu dans la diaspora, principalement en Occident. Pourquoi les Kurdes ne pourraient-ils pas le faire librement dans leurs propres régions ? Une université kurde est en cours de création en Allemagne. C’est logique, puisque la diaspora est composée de Kurdes des quatre régions du Kurdistan. Mais pourquoi n’y a-t-il pas d’écoles ou d’universités de langue kurde à Diyarbakır, Tunceli (Dersim), Van, ni même à Istanbul ou Izmir ?

Ayant été directement témoin de la violence multiforme imposée par l’État, il est clair que celui-ci doit cesser de contrôler les frontières de ma langue maternelle. Les paramètres racistes nés de la pression étatique et sociétale doivent changer. Ce processus a de graves conséquences psychologiques. Même pour ma génération, élevée à Istanbul, il a provoqué un traumatisme linguistique. Ayant appris sa langue maternelle sur le tard, j’en ai fait l’expérience directe. Dans le cadre de ma thèse de doctorat en art, j’ai exploré ces dommages avec ironie à travers la figure de « Küçük Emrah ».

« Küçük Emrah », figure de la culture pop turque post-coup d’État et acteur de musique arabesque, est devenu un symbole de souffrance projeté sur le corps kurde dans l’espace culturel turc. Il représentait le traumatisme et la victimisation. Bien sûr, ce symbole n’est plus valable ; on est passé du sujet victime à une subjectivité subalterne. Pourtant, la manière dont la figure de « l’enfant de la douleur », façonnée par la pauvreté et le déplacement dans la culture populaire, en est venue à refléter le traumatisme de l’identité kurde migrante est devenue évidente par la suite.

La culture kurde doit rompre avec ses liens coloniaux

Il s’agit d’un processus psychique et masochiste. Pourtant, dès le milieu des années 1980, le traumatisme a commencé à être brisé par des opportunités de résistance. Dans les années 1990, la musique kurde a émergé avec ferveur grâce aux initiatives de Kom Music. Les années 2000 ont été un véritable printemps. Bien sûr, la musique arabesque, tout en étant l’expression culturelle de chaque travailleur kurde contraint de migrer des villages incendiés vers les ghettos ou les banlieues, ne représentait pas seulement une position de classe au sein de la culture populaire turque. Elle reflétait plutôt une tentative plus profonde d’effacer la mémoire de la musique en langue kurde. Les arabesques en turc ont contribué au processus d’assimilation. Mais après les années 2000, une forme d’arabesque kurde a émergé en réponse, chantée en kurde.

Comme on le sait, la culture populaire kurde a commencé à prendre forme en Turquie et en Irak au milieu des années 1990. Aujourd’hui, nous sommes à une époque totalement différente. Le contexte de lutte et de création a changé. La dynamique repose désormais davantage sur la lutte décoloniale et la créativité. Ces processus doivent être observés attentivement et soutenus par le développement de politiques culturelles et artistiques.

La Biennale de Mardin, par exemple, est très contestée. Sans généraliser, il faut souligner que nombre de celles et ceux venus d’Occident continuent de reproduire un biennalisme colonial, traitant l’espace kurde comme une île nouvellement découverte, un sujet touristique. Ce langage, déconnecté d’un contexte artistique et politique commun, ne parvient pas à rassembler les diverses dynamiques de la région kurde. Il est difficile de comprendre pourquoi Mardin, qui a la capacité d’embrasser l’ensemble du Moyen-Orient, ne le fait pas en coopération avec les acteurs kurdes. De telles biennales ne reflètent pas les dynamiques ou la conjoncture politiques locales. Au contraire, elles continuent de fonctionner dans un cadre nationaliste turc.

Aujourd’hui, les expériences décoloniales en Amérique latine, en Afrique et dans certaines régions d’Asie, ainsi que les analyses de théoriciens comme Walter Mignolo sur l’« esthétique décoloniale », pourraient apporter une contribution considérable au contexte kurde. Des analyses comme celle de l’esthétique décoloniale servent désormais de cadres de connexion entre les continents. Plus que tout, ces biennales et ces initiatives artistiques doivent contribuer à remettre en question le caractère exclusif de la modernité républicaine sans pour autant ignorer la position coloniale et décoloniale des Kurdes.

Les grands événements culturels comme la Biennale de Mardin ne devraient pas hésiter à aborder les questions contemporaines ; au contraire, ils devraient les amplifier. À l’heure où la nécessité de décoloniser les musées est de plus en plus reconnue à l’échelle mondiale, les biennales ne peuvent pas non plus en faire l’économie, comme l’ont clairement démontré les récents débats autour de la Biennale de Venise. Le cloisonnement ethnique des pavillons et l’échec à confronter la mémoire coloniale sont toujours visibles. Les projets collectifs sont clairement façonnés par leurs dynamiques locales, et chaque cadre conceptuel évolue à partir de ces fondements. Événements artistiques, expositions, biennales, centres d’art sont autant d’expressions et de résultats de la mémoire et du débat collectifs.

En fin de compte, s’il est essentiel d’établir le langage de la paix et du dialogue plutôt que celui de la violence et de la coercition, guérir le traumatisme d’un enfant qui parle kurde à la maison mais est contraint d’apprendre le turc à l’école n’est pas seulement une question de droit, mais est lié à la liberté de la langue kurde. En s’inspirant de l’approche de Paulo Freire, il apparaît clairement que pour construire une pédagogie des opprimés, il est nécessaire de développer une nouvelle éthique politique, qui accepte cela comme une question de domination coloniale de classe.

Passer d’une spirale de mort à une existence centrée sur la vie comporte également des risques. Comment définir ces risques ?

Le soutien le plus efficace pour ceux qui ont rejoint la guérilla, combattu pendant des années et sont restés sur le champ de bataille jusqu’à présent est un soutien institutionnel pour les aider à s’adapter à la vie quotidienne. Il ne s’agit pas seulement d’un soutien psychologique, peut-être même pas du tout. Ces personnes ont probablement combattu pour une cause à laquelle elles croyaient. Plutôt que de les menacer de sanctions judiciaires ou d’incarcération politique, elles ont besoin d’une assistance qui leur permette de prendre leur vie en main. La première étape doit être des initiatives pédagogiques favorisant leur intégration à la vie urbaine, et un rejet catégorique des approches fondées sur la punition et la discipline.

Il peut y avoir des traumatismes et des pathologies des deux côtés. Pour quelqu’un qui a longtemps combattu dans la guérilla, la transition vers la vie ordinaire et l’intégration à la société urbaine après avoir quitté les montagnes sont loin d’être faciles. Il en va de même pour les soldats ; ceux qui ont servi pendant de longues périodes au Kurdistan présentent souvent des symptômes rappelant le « syndrome du Vietnam ». En France, il existe des archives neuropsychiatriques concernant la guerre d’Algérie, et des diagnostics tels que la « névrose de guérilla » spécifique à ce conflit ont été documentés. Ce n’est pas mon domaine d’expertise, cela relève de la sociopsychologie, mais il est important de le souligner. À ma connaissance, les taux de suicide chez les soldats ont atteint des niveaux alarmants. Le taux de suicide dans l’armée turque a considérablement augmenté, mais cette réalité n’est pas reflétée dans le discours public. Nous parlons de troubles sociopsychodynamiques dépressifs tels que l’effondrement narcissique, le sentiment de faiblesse, la régression libidinale, l’anxiété, la peur de l’avenir, la mort et l’exposition aux massacres.

Le service militaire, institution militariste, est structuré de manière à éliminer les personnalités les plus fragiles par des processus de sélection, excluant ainsi celles présentant des vulnérabilités psychologiques. Pourtant, en Turquie, personne ne s’engage volontairement dans l’armée ; elle est traitée comme une profession obligatoire. Cela accentue la visibilité des tensions psychologiques, en particulier chez les personnes les plus vulnérables. Les domaines les plus fortement impliqués au sein de l’armée sont ceux liés à la santé mentale, les unités de l’EMDR [psychothérapie par mouvement oculaires qui cible les mémoires traumatiques des individus]. Sans entrer dans un langage diagnostique théorique, il ressort clairement des témoignages de ceux qui travaillent et observent l’armée que les niveaux de traumatismes sont extrêmement élevés, et que les conflits et la guerre ne font qu’aggraver la situation.

Si l’on examine la trajectoire historique de la guerre d’Algérie, de la guerre du Vietnam et, plus récemment, peut-être, de l’évolution de la situation en Palestine, sujets de nombreuses thèses, on observe un schéma récurrent de multiples troubles psychologiques. La guerre n’est pas seulement un problème de santé publique ; c’est une force traumatique qui peut transformer la paranoïa induite par la violence en un état psychologique permanent. Elle peut entraîner chez certains individus une anxiété, une dépression et un syndrome de stress post-traumatique permanents. Ces troubles finissent par se répercuter sur la société, donnant naissance à des processus marqués par l’insécurité sociale, l’isolement, voire le suicide.

Les périodes d’après-guerre doivent être surveillées de près

La structure mentale d’une personne ne se façonne pas uniquement par l’éducation ou les expériences acquises. Elle émerge de multiples strates : expériences vécues, exposition à la violence, soumission à l’autoritarisme. Ni l’éducation, ni la psychologie, ni la famille, ni le droit, ni l’expérience de vie ne peuvent préparer une personne aux réalités de la guerre. En guerre, une personne devient une machine, absorbée par une zone traumatique totalement différente. La guerre engourdit émotionnellement les individus, façonnés par des couches de peur, de violence et de conflit.

La plupart des psychoses fonctionnelles et des déséquilibres caractériels ou sociaux surviennent chez les personnes directement impliquées dans les zones de combat, tandis que les névroses s’installent souvent durablement dans leur vie. C’est pourquoi les périodes d’après-guerre doivent être observées avec une attention particulière. Cela ne signifie pas pour autant que le processus doive être confié uniquement aux psychologues ou aux psychiatres. Au contraire, la situation exige une approche collective et à plusieurs niveaux.

Une psychanalyse politique orientée vers les pauvres est nécessaire

Mon ami d’université Florent Gabarron-Garcia, dans son livre Histoire populaire de la psychanalyse, réfléchit à l’époque fasciste, s’appuyant sur Wilhelm Reich pour analyser la pédagogie et le discours de l’époque, nous offrant des rappels cruciaux. Il souligne la nécessité de parler d’une psychanalyse politique orientée vers les pauvres, plutôt que d’une psychanalyse façonnée par l’idéologie dominante du pouvoir. Ce sur quoi nous devons nous concentrer n’est pas une psychanalyse institutionnelle prise dans la spirale de la politique réactionnaire, mais plutôt une formation psychanalytique qui contribue à guérir les traumatismes du peuple kurde, une formation qui émerge à travers le langage, la vie quotidienne et le droit.

Florent note que, dès le début du siècle dernier, des institutions ont été fondées avec une attention particulière portée aux plus démunis et à la justice sociale. Il est aujourd’hui indispensable de déployer des efforts scientifiques pour guérir le moment présent. Les blessures de la guerre ne peuvent être traitées par les seules interventions psychanalytiques institutionnelles ; au contraire, il faut s’orienter vers la psychothérapie populaire. Par exemple, la création de départements de psychologie ou de sociologie en langue kurde n’est pas le seul enjeu. Il est tout aussi important de contribuer à la production de pédagogies alternatives permettant aux Kurdes de mettre en place des initiatives contre-institutionnelles dans leur propre langue et leur propre géographie.

Il ne s’agit pas de suggérer que la responsabilité incombe uniquement aux psychanalystes ou aux psychologues. Il s’agit plutôt de dire que les efforts institutionnels pour surmonter cette ère d’autoritarisme et de violence doivent être dissociés du langage et du corps de l’autoritarisme lui-même. Il est nécessaire de rejeter les cadres punitifs et de construire un langage de dialogue. À la place de la figure masculine et œdipienne de l’« État-père », il faut une structure démocratique et fondatrice qui remplisse discrètement son rôle institutionnel en coulisses.

Le traumatisme vécu par une génération contrainte d’abandonner sa langue et son identité s’exprime dans les codes mélancoliques de la musique arabesque, récit psychanalytique en soi. C’est peut-être par des interactions qui font remonter l’inconscient à la surface et abolissent ces barrières psychologiques qu’une véritable contribution à la paix et à la réconciliation peut être apportée.

La question kurde et le colonialisme sont des questions de classe

La question est donc la suivante : dans un pays militariste qui n’a jamais été en mesure de mettre en œuvre une constitution démocratique ni une démocratie participative, qui répondra aux traumatismes, aux dépressions et aux vides ressentis au lendemain de la guerre ? Qui le fera ? L’État ? Les psychologues ? Les sociologues ? Les politiques ? Ou le Parti républicain du peuple (CHP), « oppositionnel », dont le leader, Özgür Özel, se contente d’évoquer la question kurde en passant lors de rassemblements ?

Qui peut restaurer l’amitié entre les deux peuples ? Je ne parle pas de fraternité, car la fraternité repose sur une hiérarchie définie par les aînés et les cadets. Il faut plutôt parler de la liberté d’un peuple opprimé précisément par ce type de structure hiérarchique et antidémocratique. L’égalité est liée à la libération et à la réalisation de la justice. Ce dont nous avons besoin, ce n’est pas de fraternité, mais d’égalité, de réconciliation et de purification du racisme par un dialogue sincère.

Il est désormais évident que ce processus évolue vers une période où ces questions vont se multiplier et s’aiguiser, et il est absolument nécessaire qu’il progresse avec une approche critique. Dans un contexte d’insécurité aussi précaire, il est impossible d’aborder cette question à la turque ou sous le couvert du secret, à moins de prendre des mesures pour démanteler le régime de tutelle, criminaliser le racisme, abolir le système de gardes villageoises et établir un dialogue avec les familles des disparus. (Le processus de paix de 2013 a été un échec à cet égard.)

Au contraire, ce n’est que lorsque la paix sera pleinement socialisée et envahira la rue que nous pourrons pérenniser ce désir de réconciliation grâce à un soutien politique. De même que certains groupes de gauche en Turquie dans les années 1970 n’ont pas sérieusement abordé la question de la libération des femmes, préférant la reporter à la révolution, qui a finalement contraint le peuple kurde à s’organiser de manière indépendante, il n’y a plus de place aujourd’hui pour une politique ancrée dans le ressentiment, la condescendance de type « Grand Frère » ou la vengeance masculine. Ce dont nous avons besoin, ce sont plutôt des mesures urgentes à prendre immédiatement, ici et maintenant. Car la question kurde et le colonialisme sont fondamentalement des questions de classe. (ANF)