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Une délégation du Vatican en visite officielle au Rojava

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SYRIE / ROJAVA –  Une délégation composée de représentantes du Vatican est en visite officielle dans le nord et l’est de la Syrie.

 

La délégation qui a rencontré les institutions de l’administration autonome s’est informée sur la pratique des régions et a observé la culture de coexistence entre les communautés sur le terrain.

Trois femmes membres du clergé faisaient partie de la délégation

La délégation comprenait Sœur Thérèse Elias Kanakri (Syrienne), porte-parole des Sœurs Franciscaines Mariamites, Sœur Nadia Amin Ghali (Égyptienne) et Sœur Mary Habib Keyrouz (Libanaise).

Les Sœurs étaient accompagnées d’Armin Mardo, porte-parole du Conseil des Églises chrétiennes d’Alep, et de Karakious Klayjian, représentant du Conseil religieux chrétien de Raqqa.

Visites institutionnelles

La délégation a visité le Département des Relations extérieures de l’Administration autonome du Nord et de l’Est de la Syrie, où elle a été reçue par les coprésidents Ilham Ahmed et Fanar Gait, ainsi que leurs adjoints Gulistan Ali et Robel Beho. La réunion s’est tenue à huis clos, et les deux parties ont échangé des cadeaux en signe de respect mutuel.

Visite de l’initiative « Liberté pour Abdullah Öcalan »

La délégation du Vatican a ensuite visité les sièges de l’Initiative « Liberté pour Abdullah Öcalan » et de l’Initiative des avocats pour la défense d’Abdullah Öcalan. Lors de la visite, l’accent a été mis sur l’appel de M. Öcalan à la paix et à une société démocratique, et il a été souligné que l’État turc n’a pas répondu à ces appels.

Les porte-parole des initiatives ont déclaré que les idées de M. Öcalan ont uni divers segments de la société, en particulier les femmes, et ont joué un rôle important dans les avancées démocratiques dans la région. À l’issue de la réunion, la délégation s’est vu remettre l’ouvrage en cinq volumes de M. Öcalan, intitulé « Le Manifeste de la civilisation démocratique ».

Les visites se poursuivent

Dans le cadre de la visite de la délégation du Vatican, des rencontres sont prévues aujourd’hui avec le Conseil religieux du Nord et de l’Est de la Syrie et le Bureau des relations diplomatiques. Demain, la délégation s’entretiendra avec le Conseil démocratique syrien (MSD), les Forces démocratiques syriennes (FDS), les Unités de protection des femmes (YPJ) et le Parti de l’union syriaque. (ANF)

Les attaques islamistes ciblant les minorités plongent la Syrie dans le chaos

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SYRIE – Massacres des Alaouites et des Druzes, kidnappings des femmes alaouites, menaces envers les acquis des femmes et des Kurdes du Rojava… la Syrie fait face à une nouvelle « guerre sainte » ciblant tous les peuples et minorités non sunnites, mais aussi les femmes qui refuseraient de vivre dans un pays régie par la charia islamiste. Il est révoltant de voir qu’après avoir mis fin à une décennie sanglante causée par le boucher el-Assad et le groupe État Islamique (EI ou DAECH), les habitants de la Syrie soient aujourd’hui de nouveau menacé par un spiral sanglant car les puissances internationales ont décidé de remplacer le boucher el-Assad par les groupes jihadistes regroupés autour d’al-Charaa (alias Jolani). Il est encore temps d’arrêter cette folie meurtrière, en soutenant tous ceux qui œuvrent pour une Syrie séculaire et décentralisée reconnaissant les droits de toutes les minorités, comme le rappelle le journaliste Hassan Remo dans l’article suivant.

 

La Syrie au bord de l’effondrement sectaire

 

La Syrie traverse actuellement l’une des phases les plus périlleuses de son histoire moderne, après plus d’une décennie de conflit dévastateur. Une dangereuse escalade des tensions sectaires et ethniques – illustrée récemment par les violences de Jaramana et d’Ashrafiyat Sahnaya, dans la campagne de Damas – a ravivé les images obsédantes des premières années de la guerre. Ces événements soulèvent de graves questions quant à l’avenir du pays et à la capacité des autorités de Damas à contenir la fragmentation sociale qui s’aggrave rapidement.

Les communautés druzes sous le feu des tirs dans la campagne de Damas : un massacre silencieux

Les récents troubles à Jaramana et Ashrafiyat Sahnaya ont débuté par la diffusion d’un enregistrement audio provocateur, qui a rapidement déclenché des affrontements meurtriers. Ces affrontements ont entraîné la mort de 47 personnes, dont des civils, des miliciens druzes locaux et des combattants affiliés aux forces auxiliaires du ministère syrien de la Défense.

Les violences ont dépassé les affrontements conventionnels, culminant avec l’exécution sommaire de civils druzes dans un élevage de volailles – un crime assimilable à une atrocité de guerre. Ces exécutions auraient été perpétrées par des milices opérant ouvertement sous l’égide des ministères de la Défense et de l’Intérieur. Même si aucun ordre direct n’a été donné par les autorités centrales, le gouvernement de Damas porte la responsabilité politique, juridique et morale de ces actes.

La tragédie a continué de se dérouler le long de l’autoroute Damas-Souwayda, où un convoi de jeunes druzes en route pour soutenir leur communauté en difficulté est tombé dans une embuscade. Des tirs ont coûté la vie à six personnes et en ont blessé plusieurs autres. De plus, les villages druzes de Souwayda ont été bombardés au mortier et à la mitrailleuse lourde, ce qui a intensifié l’indignation publique et aggravé les tensions communautaires.

Les victimes alaouites et le silence de l’État : les massacres du 6 mars restés sans réponse

La crise est aggravée par le silence flagrant qui entoure le massacre perpétré sur les côtes syriennes entre le 6 et le 9 mars. Selon des témoignages documentés, plus de 1 500 civils alaouites ont été tués. Malgré l’ampleur de cette atrocité, aucune enquête officielle n’a été ouverte et aucun responsable n’a été traduit en justice. Le massacre a été entouré d’un black-out médiatique quasi total, comme si les victimes étaient considérées comme des citoyens de seconde zone.

Cette indifférence officielle face à un crime sectaire d’une telle ampleur révèle la fragilité du régime à gérer les conflits communautaires. Elle ouvre également la voie à des interprétations profondément troublantes, notamment celle selon laquelle certains acteurs pourraient intentionnellement laisser ces crises s’envenimer afin de justifier une sécurisation accrue ou de façonner de nouvelles réalités sur le terrain.

Le gouvernement de Damas peut-il être exonéré ?

Le plus alarmant est peut-être le fait que plusieurs groupes impliqués dans les atrocités de Jaramana et d’Ashrafiyat Sahnaya ont reconnu leurs liens avec les ministères de la Défense et de l’Intérieur, certains agissant en réalité comme des extensions de ces institutions.

Compte tenu de ce lien direct, les autorités de Damas peuvent-elles raisonnablement se déclarer irresponsables ? Peut-on parler d’« État souverain » s’il est incapable – ou peu disposé – à contrôler les acteurs armés intégrés à ses propres structures officielles, acteurs qui se livrent à des exécutions extrajudiciaires et à des embuscades sectaires sans contrôle légal ?

La réalité est frappante : Damas n’est plus aujourd’hui un État au sens institutionnel du terme, régi par le droit et la responsabilité. Il s’agit plutôt d’une autorité de fait dominée par des réseaux sécuritaires et des factions militaires interdépendants, chacun poursuivant son propre programme et défendant ses propres intérêts.

La plus grande menace pour la Syrie : le sectarisme

Après plus de 14 ans de guerre destructrice, la Syrie ne peut plus supporter une fragmentation sociale accrue. Son tissu social, déjà mis à rude épreuve par les épisodes douloureux de Homs, Alep, la Ghouta, Deraa et Idlib, se défait désormais à Damas et dans les régions côtières.

L’incitation sectaire comme arme et le besoin urgent d’un nouvel avenir pour la Syrie

L’incitation sectaire est devenue un outil répandu et dangereux, facilement déployé pour déclencher un conflit en un instant, tandis que les autorités ferment les yeux, alors même que ces discours de haine circulent ouvertement sur les réseaux sociaux. Des appels au massacre des Kurdes, des Alaouites et des Druzes sont diffusés sans conséquence, même par des groupes armés ayant officiellement déclaré leur dissolution et leur intégration au ministère de la Défense.

Est-ce là la Syrie que nous sommes censés accepter ? Un État où les citoyens sont massacrés uniquement en raison de leur appartenance confessionnelle, enterrés sans justice, et où les auteurs sont libres de réitérer leurs crimes ailleurs ?

Quelle est la solution ? La Syrie peut-elle échapper à cet effondrement accéléré ?

Face à la montée des violences sectaires et au fossé grandissant entre les composantes sociales, la nécessité de solutions fondamentales et transformatrices est plus urgente que jamais. Un avenir sûr et stable est impossible sans s’attaquer aux causes profondes de la crise, plutôt que de se contenter d’en gérer les symptômes par des mesures sécuritaires et militaires.

1. Un nouveau contrat social représentant tous les Syriens

La déclaration constitutionnelle publiée par les autorités de Damas en mars n’est guère plus qu’une reproduction de l’ordre autoritaire traditionnel, qui centralise le pouvoir entre les mains d’une élite restreinte tout en marginalisant les revendications de larges pans de la société syrienne. Sans une profonde restructuration de l’État et un rééquilibrage du pouvoir politique, tout discours sur la réconciliation ou la stabilité reste illusoire.

2. Une transition vers un système démocratique décentralisé

L’expérience de ces dernières années a montré que l’État-nation centralisé n’a pas su gérer la riche diversité de la Syrie ; au contraire, il a souvent creusé les divisions existantes. Un modèle décentralisé est essentiel, qui permette à toutes les communautés, qu’elles soient ethniques, religieuses ou sectaires, de participer pleinement à la gouvernance. Ce modèle doit être fondé sur l’inclusion, et non sur l’exclusion ou la domination.

3. Fin immédiate de l’incitation sectaire et responsabilisation des instigateurs

Aucune paix sociale ne peut s’instaurer tant que les discours de haine prolifèrent sur les plateformes médiatiques et dans le discours public. Il est impératif d’appliquer des mesures juridiques strictes à l’encontre de quiconque incite à la violence sectaire et de veiller à ce que les responsabilités soient établies par un système judiciaire indépendant, et non par des marchandages sectaires ou des vengeances personnelles. La guerre ne peut être stoppée qu’en brisant le cycle de la haine mutuelle ; le ressentiment n’engendre que davantage de ressentiment.

4. La justice transitionnelle comme fondement indispensable 

Une véritable réconciliation commence par la reconnaissance des violations et la poursuite des auteurs par des institutions judiciaires justes et impartiales. Cela ne doit pas se réduire à une vengeance ou à une punition collective. Toute tentative de construire une nouvelle Syrie sans justice ne peut que semer les germes de violences futures.

 

5. Mettre fin à l’ingérence étrangère

Les interventions régionales font désormais partie du problème plutôt que de la solution. Elles continuent de saper la souveraineté syrienne et de transformer les conflits locaux en guerres par procuration. Sans un consensus national rejetant toute forme d’ingérence étrangère – et en premier lieu l’intervention turque –, il ne peut y avoir de projet national crédible et indépendant.

Vers une nouvelle Syrie : une vision pour l’avenir

La voie vers une Syrie sûre, stable et démocratique n’est pas toute tracée, mais elle n’est pas impossible. Ce chemin commence par la profonde reconnaissance que ce dont souffre le pays n’est pas seulement une crise politique ou sécuritaire, mais une crise d’identité nationale et un système de gouvernance qui n’a pas su gérer la diversité, garantir la justice et garantir l’égalité d’appartenance à tous les citoyens. La nouvelle Syrie ne sera pas construite sur les ruines du confessionnalisme, ni sur la persistance de la centralisation et de la domination, mais sur les valeurs de citoyenneté, de pluralisme, de décentralisation et de responsabilité.

Cela exige du courage politique et moral – non seulement de la part du parti dominant mais de toutes les forces nationales – pour s’asseoir à une véritable table de dialogue qui place les intérêts des Syriens au-dessus de tout et qui produise une nouvelle constitution qui représente tout le monde, n’exclut personne et ne reproduit pas le passé.

Ce n’est que par la paix, la justice et la participation que la Syrie pourra renaître des cendres de la guerre et retrouver sa dignité, sa souveraineté et son identité en tant qu’État civil et démocratique qui accueille tous ses fils et filles, quelles que soient leurs ethnies, leurs religions ou leurs sectes.

En conclusion : la Syrie se trouve aujourd’hui à un carrefour dangereux. Soit elle s’oriente vers une fragmentation totale et des conflits civils ouverts fondés sur des divisions sectaires et ethniques – dont aucun groupe ni aucune région ne sera épargné –, soit elle ouvre un dialogue national courageux, commençant par la reconnaissance des crimes, passant par le démantèlement de l’État sécuritaire et aboutissant à un nouveau contrat social conduisant à une Syrie démocratique décentralisée, préservant les droits de tous et protégeant l’unité de son territoire et de son peuple. (ANHA)

IRAN. Au moins 122 prisonniers exécutés en avril

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IRAN / ROJHILAT – En avril dernier, le régime iranien a exécuté au moins 122 prisonniers, dont 4 femmes, 32 Baloutches, 15 Lors, 14 Kurdes, 11 Turcs et 6 Afghans.
 
Au moins 122 prisonniers ont été exécutés dans les prisons de la République islamique d’Iran au cours du mois dernier. Ce chiffre marque une augmentation de 59 % – équivalent à 45 exécutions supplémentaires – par rapport à avril 2024, lorsque 77 exécutions ont été enregistrées.
 
L’ONG de défense des droits humains, HENGAW a confirmé l’identité de 118 prisonniers exécutés, tandis que l’identité de quatre autres fait toujours l’objet d’une enquête.
 
Parmi les personnes exécutées figuraient au moins cinq militants religieux – Abdolrahman Gorgij, Abdolhakim Azim Gorgij et Taj Mohammad Khormaly d’Aq Qala ; Farhad Shakeri de Gonbad-e Kavus ; et Malek Ali Fadaei – ainsi que trois prisonniers politiques : Hamid Hoseinnezhad Heidaranlu de Chaldoran, Rostam Zeynaldini de Lashar et Mohsen Langarneshin de Nowshahr.
 
Le rapport indique également qu’au moins quatre femmes ont été exécutées, deux dans chacune des prisons de Mashhad et d’Ispahan. Trois ont été reconnues coupables d’infractions liées à la drogue et une a été condamnée à mort pour meurtre. Aucune exécution de mineur (moins de 18 ans) n’a été enregistrée en avril.
 
Il convient de souligner que sur les 122 exécutions effectuées en avril, seules trois ont été signalées par des sources officielles iraniennes ou des sites web affiliés au pouvoir judiciaire. De plus, les exécutions de sept prisonniers ont été menées en secret, sans que leurs familles ne soient averties ni autorisées à leur rendre une dernière visite.
 
Répartition ethnique des personnes exécutées :
 
Au moins 32 prisonniers baloutches ont été exécutés, ce qui représente 26 % de tous les cas en avril. Les exécutions comprenaient également 15 prisonniers lor, 14 prisonniers kurdes et 11 prisonniers turcs.
 
• Prisonniers baloutches : 32
• Prisonniers persans (Fars) : 23
• Prisonniers lors : 15
• Prisonniers kurdes : 14
• Prisonniers turcs : 11
• Prisonniers gilak et mazani : 5
• Prisonniers turkmènes : 3
• Prisonniers arabes : 3
• Ressortissants afghans : 6
• Non identifiés : 10
 
Répartition par chef d’accusation
 
Les infractions liées à la drogue sont restées la principale cause d’exécutions en avril, avec 58 personnes (47,5 % du total) exécutées pour de telles accusations.
 
• Crimes liés à la drogue : 58
• Meurtre : 47
• Activisme religieux : 5
• Activisme politique : 3
• Viol : 2
• Vol à main armée : 1
 
 
Répartition des exécutions par province :
 
Le plus grand nombre d’exécutions a eu lieu dans les prisons de la province de Razavi Khorasan, avec 21 cas. Au total, des exécutions ont eu lieu dans 23 provinces, la province d’Alborz suivant de près avec 20 cas.
 
• Khorasan Razavi : 21
• Alborz : 20
• Sistan-Baloutchistan : 13
• Khuzestan : 8
• Ispahan : 6
• Qom, Fars et Azerbaïdjan oriental : 5 chacun
• Lorestan et Markazi : 4 chacun
• Kermanshah, Hormozgan, Hamadan, Yazd, Golestan et Qazvin : 3 chacun
• Kohgiluyeh et Boyer-Ahmad, Kerman, Zanjan, Semnan, Bushehr et Azerbaïdjan occidental (Urmia) : 2 chacun
• Gilan : 1
 
Hengaw
 
 
 

SUISSE. Fondation de l’Institut kurde de Lausanne

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SUISSE – Aujourd’hui, lors d’une conférence de presse, un groupe d’intellectuels kurdes a annoncé la fondation officielle de l’Institut kurde de Lausanne (en kurde: Enstîtuya Kurdî ya Lozanê). Necat Zanyar est le président de l’Institut kurde de Lausanne. 
 
   
 
Selon le communiqué lu lors de la conférence de presse, l’Institut kurde de Lausanne
a pour objectif principal la défense des droits des Kurdes à l’autodétermination. L’ensemble des objectifs de l’institut ont été annoncés par une déclaration lue en kurde et en français. De nombreux écrivains, universitaires, représentants politiques et représentants d’institutions de la diaspora kurde ont assisté à la conférence de presse.
 
« Une université kurde sera créée en Europe »
 
La déclaration fondatrice de l’Institut kurde de Lausanne est la suivante :
 
Aujourd’hui, avec responsabilité historique et conscience nationale, nous déclarons la création de l’Institut kurde de Lausanne pour déterminer et protéger les droits nationaux, l’existence culturelle et politique de la nation kurde. L’Institut kurde de Lausanne tire son nom du traité de Lausanne de 1923, par lequel le droit à l’autodétermination de la nation kurde a été systématiquement nié et les Kurdes sont devenus apatrides.
 
Ce nom n’est pas pour nous un symbole de rejet, mais de confrontation, de reconstruction et de renaissance. C’est pour cette raison que l’institut a été créé pour reconstruire la vérité supprimée là où le déni a eu lieu et a fait ici son premier pas. Notre institut a été fondé comme une démarche intellectuelle et institutionnelle pour exposer et surmonter cette rupture historique.
 
Un siècle de silence historique
 
Le régime de déni, de fragmentation et de silence que le traité de Lausanne a imposé à la nation kurde pendant plus de cent ans touche désormais à sa fin. Les changements au Moyen-Orient après 2023 modifient le langage des relations internes des Kurdes et du droit international. L’Institut est le produit de la vision qui a vu ce moment historique et l’a transformé en un pionnier intellectuel.
 
Mission et objectifs
 
L’objectif principal de notre institut est de protéger le droit de la nation kurde à l’autodétermination d’un point de vue historique, juridique et politique et de préparer les bases intellectuelles au niveau institutionnel et par des méthodes légitimes. Dans ce contexte, les problèmes d’identité, de langue, de culture et de liberté des Kurdes constituent les points principaux du travail et de la recherche de l’institut.
 
Les objectifs de l’institut sont de travailler comme un groupe de réflexion menant des recherches sur les Kurdes et le Kurdistan aux niveaux régional, national et international et, à long terme, d’établir une université kurde en Europe, une institution dotée d’une autonomie académique capable de rassembler les connaissances universelles, la science, l’art et la pensée.
 
De la fragmentation à l’unité
 
L’Institut kurde de Lausanne se fonde sur le dépassement de la ghettoïsation des divisions entre les Kurdes, résultant de la fragmentation historique, et sur l’unité nationale et le renouveau mental et institutionnel. Le système de gestion de notre institut est basé sur la volonté dominante de toutes les régions du Kurdistan. Cette combinaison représente l’avenir uni de la nation kurde sur le plan mental et pratique. Elle s’oppose non seulement aux ghettos parmi les Kurdes, mais aussi aux ghettos sociaux dans les pays où vivent les Kurdes, et promeut une existence nationale fondée sur l’unité, la confiance en soi et l’intégration.
 
Un appel historique à Lausanne
 
Nous sommes heureux et déterminés d’annoncer qu’à l’occasion de l’anniversaire du Traité de Lausanne, en juillet 2025, nous organiserons à Lausanne un atelier intitulé « Autodétermination et avenir des Kurdes », sous la direction de notre institut, avec la participation d’universitaires, de juristes et de politiciens. Cet atelier sera une plateforme qui fera entendre au monde la voix de notre quête de liberté et de notre pouvoir intellectuel, à la place du déni historique.
 
L’Institut kurde de Lausanne considère la Suisse (…) comme un exemple de liberté de pensée, de pluralisme politique et de démocratie avancée. Notre institut a pour objectif de s’intégrer à la société suisse et au monde culturel de ce pays. Sur cette base, nous tenons à exprimer notre sincère gratitude aux amis suisses, aux institutions et au public qui nous ont soutenus, notamment lors de la création de l’institut.
 
Une institution au-delà de la diaspora
 
Avec cette déclaration, nous déclarons non seulement un institut, mais aussi le début d’une nouvelle étape intellectuelle dans la marche de la nation kurde vers la liberté. L’Institut Kurde de Lausanne est l’institution intellectuelle, scientifique, culturelle et académique d’une nation ancienne. Nous appelons tous les intellectuels, universitaires, artistes et patriotes kurdes à participer à cet effort. (Rudaw)
 
Institut Kurde De Lausanne – Enstîtuya Kurdî ya Lozanê – Kurdish Institute of Lausanne – Kurdisches Institut Lausanne – logos multilingues

TURQUIE. Marche blanche pour les victimes du massacre de Dersim

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TURQUIE / KURDISTAN – Le 4 mai 1937 marquait le début du massacre de plus de 70 000 Kurdes alévis de Dersim et la déportation de 100 000 autres par l’État turc, sous les ordres de Mustafa Kemal Ataturk. Aujourd’hui, une marche blanche a été organisée à Dersim où les descendants des rescapés du génocide du Dersim ont exigé que l’État turc affronte son histoire concernant le massacre de Dersim.

 

La plateforme du travail et de la démocratie de Dersim a organisé une marche à l’occasion du 88e anniversaire du massacre de Dersim.

Les victimes du massacre de Dersim ont été commémorées lors d’une marche blanche à laquelle ont participé les Associations démocratiques alévies (DAD), des membres du Parti de l’égalité des peuples et de la démocratie (DEM), le Parti socialiste des opprimés (ESP), de nombreuses institutions et organisations et des citoyens. Tout au long de la marche, les citoyens portaient des photos de Seyit Rıza et des œillets dans leurs mains, tandis que les femmes ouvraient une banderole noire. La marche silencieuse s’est terminée sur la place Seyit Rıza (Seyid Riza).

Appel aux Alévis

Dans le communiqué de presse publié ici, une minute de silence a été observée pour les personnes assassinées. Le premier à prendre la parole fut le président de la Fédération des associations du Dersim (DEDEF), Ali Rıza Bilir, qui a déclaré : « Comme le prédisaient les rapports sur le Dersim, après le massacre, le processus d’assimilation culturelle s’est effectivement mis en place. Dans de nombreuses régions du Dersim, les fils d’Ocak qui guidaient notre chemin ont été massacrés et le système d’Ocak a été mis à mal. Notre peuple a été plongé dans un processus de désintégration sociale et de séparation de son identité religieuse. Avec un programme politique et éducatif fondé sur les interdits et l’assimilation, la volonté de notre peuple, c’est-à-dire la volonté de toutes ses accumulations, a été mise en échec. À l’occasion du 88e anniversaire de la décision du Conseil des ministres du 4 mai, nous appelons notre peuple à insister sur la réalité du Dersim, consumé par la spirale du génocide qui fait de nous des êtres humains, sur notre place dans l’humanité alévie et sur notre identité en tant que peuple, et à mener résistance et lutte. »

« Nous devons faire face à l’histoire »

Le président général de l’Association Pir Sultan Abdal, Cuma Erçe, a également déclaré que la cause des problèmes actuels réside dans l’absence de confrontation avec les massacres et a déclaré : « Nous devons affronter non seulement l’histoire de la République, mais aussi toute l’histoire qui l’a précédée. Si nous ne parvenons pas à mener à bien cette confrontation, nous n’aurons aucune chance d’atteindre la justice, la démocratie et la paix que nous désirons aujourd’hui. »

Ergin Tekin, président du Parti travailliste de la province de Dersim, a attiré l’attention sur le fait que des dizaines de milliers de personnes ont été non seulement massacrées, mais aussi déportées vers d’autres villes pour y être assimilées. Il a déclaré : « Si nous voulons atténuer un peu cette souffrance, l’un des moyens les plus importants est de lutter contre ce massacre. Si nous ne l’avons pas fait, nous nous retrouvons face à des gouvernements qui l’utilisent à des fins politiques. »

« Les responsables doivent rendre des comptes »

S’exprimant au nom de l’ESP, Orhan Çelebi a déclaré que les responsables des massacres doivent être tenus responsables. Rappelant que les auteurs du massacre de Sivas ont été graciés par le président, Orhan Çelebi a souligné dans son discours que même si 88 ans se sont écoulés depuis le massacre de Dersim, la douleur est aussi vive qu’au premier jour et qu’ils ne permettront pas qu’elle soit dissimulée sans tenir les auteurs responsables.

Faisant référence à ce processus, Hüseyin Mat, président de la Fédération des associations alévis européennes, a déclaré que les alévis sont ceux qui souhaitent le plus la paix.

« On ne peut pas parler de démocratie s’il n’y a pas de confrontation »

S’adressant à la foule, le coprésident de la Commission des peuples et des croyances du parti DEM, Yüksel Mutlu, a commencé son discours en présentant ses condoléances aux proches du membre de la délégation d’İmralı, Sırrı Süreyya Önder, décédé hier. Yuksel Mutlu a déclaré :

« Si nous sommes réunis aujourd’hui, c’est à cause du génocide du Dersim, une souffrance qui dure depuis 88 ans, une barbarie, un combat que nous menons et poursuivons encore aujourd’hui, les cris de notre peuple et de nos aînés perçant le ciel et la terre. Nous parlons d’une souffrance incessante qui dure depuis 88 ans et que nous appelons génocide. Seyit Rıza a prononcé deux mots qui sont entrés dans l’histoire. L’un est : « C’est une honte, un péché, une cruauté, nous sommes les enfants de Kerbela » et l’autre : « Je n’ai pas pu supporter vos mensonges et vos ruses, cela m’a causé des ennuis, je ne me suis pas agenouillé devant vous, laissez cela vous causer des ennuis. » Ces deux phrases contiennent le sens de la barbarie. Il y a lutte, résistance, génocide, et il y a des successeurs qui poursuivent ce combat. Sans confrontation, nous ne pouvons pas parler de démocratie en Turquie. Tel est le sens de l’appel à la « paix et à une société démocratique » lancé par Sırrı Süreyya. Önder a mené la journée et faisait partie de la délégation d’İmralı. Nous devons intensifier ce combat. Sinon, « venir ici symboliquement le 15 novembre ou le 4 mai ne suffira pas. » 

« Nous nous battrons jusqu’à ce que nous obtenions une citoyenneté égale »

Yüksel Mutlu a conclu son discours par les mots suivants :

« La décision du Conseil des ministres du 4 mai n’existe nulle part dans le monde. Nulle part au monde des filles n’ont été saisies comme butin de guerre, mais elles l’étaient. Nous les poursuivons, nous poursuivrons notre lutte. Nous poursuivrons notre lutte jusqu’à l’égalité des citoyens, jusqu’à ce que tous les peuples, Kurdes et Alévis, Arméniens, Assyriens, Turcs, soient égaux et libres. C’est la solution au problème kurde. »

« Ils nous laissent sans histoire et sans langue »

Prenant la parole enfin, Zeynel Kete, coprésident des Associations démocratiques alévies (ADA), a souligné que ceux qui se sont unis et se sont rassemblés contre l’injustice ont formé une communauté et ont vécu avec justice sur ces terres, mais les dirigeants les ont massacrés parce qu’ils n’étaient pas satisfaits de l’ordre qu’ils avaient établi. Zeynel Kete a déclaré : « Les tombes de nos martyrs (…) qui ont marché vers Dieu pour cette cause n’ont pas été révélées ; leur emplacement a été gardé secret. Car avoir une tombe, c’est avoir une valeur, un lieu sacré, une histoire, une mémoire. Avoir une tombe, c’est aussi avoir une histoire. Dans la croyance alévie, la tombe est le lieu le plus sacré, c’est votre visite. Nous réglons nos problèmes sur les tombes. Si on nous laisse sans tombe aujourd’hui, on nous laisse sans culture, sans histoire et sans langue. » (Jinha)

 

Armes chimiques allemandes utilisées contre les Kurdes de Dersim

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TURQUIE / KURDISTAN – Grâce à des documents officiels fuités par le régime turc d’Erdogan en 2019, on apprenait officiellement que la Turquie avait utilisé des armes chimiques achetées à l’Allemagne nazie lors du massacre des Kurdes-alévis de Dersim en 1937/38.

 

 
Le 4 mai 1937 marquait le début du massacre de plus de 70 000 Kurdes alévis de Dersim et la déportation de 100 000 autres par l’État turc, sous les ordres de Mustafa Kemal Ataturk.

Des documents fuités en mai 2019 révélaient que le fondateur de la Turquie, Ataturk avait acheté des armes chimiques à l’Allemagne nazie (1937) pour les utiliser dans le massacre des Kurdes alévis à Dersim. (Nous avions donné cette information en 2019, mais nous la republions pour ceux qui ne l’aurait pas vue.)

Un membre d’HDP, Nesimi Aday a déclaré : « On savait que l’armée turque avait utilisé des armes chimiques contre des civils kurdes à Dersim, mais qu’on ne pouvait pas le prouver. Les derniers documents trouvés dans les archives présidentielles turques confirment l’utilisation de ces armes qui avaient été évoquées par par Nuri Dersimi dans son livre « Kurdistan tarihinde Dersim » en 1952 ».

Dersim’de nazi gazı (« Gaz nazi à Dersim », article en turc)
 En plus de 20 tonnes de gaz toxique, la Turquie a acheté également des avions Heinkel à l’Allemagne nazie.
L’Etat turc a tué des dizaines de milliers de civils à Dersim, au Kurdistan du Nord, en 1937-38.
 

Le gaz toxique acheté à l’Allemagne nazie était : La moutarde au soufre (ypérite), le chlorure de phénacyle (chloracétophénone).

Des documents montrent qu’Atatürk ordonne que du gaz toxique soit transporté à Elaziz (Elazig) pour être utilisé contre des civils à Dersim, au Kurdistan. 

 
Atatürk prouve à Hitler que tuer des civils avec un gaz toxique n’est « pas un crime » en 1937, puis Hitler marche sur son chemin et fait exactement la même chose aux Juifs en Allemagne.
 
Kemal Ataturk a fait gazer les Kurdes alévis dans les grottes de Dersim, Adolf Hitler a fait gazer les Juifs dans les chambres à gaz d’Auschwitz.
 

L’ancien ministre turc des Affaires étrangères Ihsan Sabri Caglayangil a également avoué que l’armée turque avait utilisé des armes chimiques contre des femmes et des enfants piégés dans des grottes et avait exterminé toute la population de Dersim dans cette vidéo (en turc) : 

 
Une photo d’un soldat turc remplaçant le drapeau allemand d’Hitler par le drapeau turc sur un bombardier Heinkel He-111. L’Allemagne nazie a livré ses premiers avions (24 He 111F-1s) en 1937. Les attaques chimiques de Dersim menées par les mêmes avions Heinkel.
Ci-dessus, Sabiha Gokçen, la fille adoptive d’Atatürk, l’un des pilotes qui survolèrent le Dersim alors que l’aviation turque lâchait du gaz sur la population kurde. Un aéroport d’Istanbul porte son nom en l’honneur de son rôle de première femme pilote de chasse en Turquie.

TURQUIE. Le chef du CHP attaqué à la sortie de la cérémonie funéraire d’Önder

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TURQUIE – ISTANBUL – Le président du CHP, Özgür Özel, a été attaqué par un criminel se disant « fils d’ottomans » alors qu’Ozel quittait les funérailles de Sırrı Süreyya Önder, député du DEM Parti pro-kurde décédé hier à Istanbul.

Le chef du Parti républicain du peuple (CHP), Özgür Özel, a été agressé devant le Centre culturel Atatürk (AKM) à Istanbul, après avoir prononcé une déclaration lors des funérailles de Sırrı Süreyya Önder, membre de la délégation d’İmralı du Parti pour l’égalité des peuples et la démocratie (Parti DEM). L’agresseur serait Selçuk Tengioğlu qui avait tué ses enfants Barış et Mutlu à İskenderun en 2004.

Le DEM Parti et de nombreuses personnalités politiques, dont le député CHP Sezgin Tanrıkulu ont condamné l’agression visant Ozgur Ozel.

TURQUIE. Le décès de Sirri Sureyya Onder éclipse les commémorations du génocide de Dersim

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TURQUIE / KURDISTAN. Les commémorations du massacre des Kurdes-alévis de Dersim (1937-38) ont été éclipsées par les funérailles de Sirri Sureyya Onder, député de DEM Parti décédé hier à Istanbul…
 
 
Par exemple, le DEM Parti « pro-kurde » n’a pas publié de communiqué sur le génocide de Dersim. On l’a vérifié en allant sur leur site internet et le compte officiel X (ancien Twitter). La seule chose qu’on y voit est un communiqué de 2 mai demandant la création d’une commission d’enquête parlementaire sur le massacre de Dersim.
 
Les autres organisations ou médias kurdes ne font pas mieux, en priorisant les infos relatives au décès – certes malheureux – de Sirri Sureyya Onder, alors qu’ils n’ont pas ou peu parlé du massacre de Dersim jusqu’à présent. Pourtant, le massacre de Dersim (environs 70 000 morts et des milliers de déportés) a eu des conséquences graves pour les Kurdes qu’on ne peut aucunement comparable à la disparition de Sirri Sureyya Onder…
 

TURQUIE. Préparation de la Journée de la langue kurde

TURQUIE / KURDISTAN – Les organisations kurdes ont annoncé le programme d’actions et d’événements qui se tiendront à Amed entre le 4 mai et le 1er juin à l’occasion de la Journée de la langue kurde.

Les institutions de la langue kurde ont annoncé le programme des actions et événements organisés à l’occasion de la Journée de la langue kurde, le 15 mai, par un communiqué de presse au parc Koşuyolu, dans le quartier de Yenişehir à Amed. Sous le slogan « Statut pour la langue kurde, éducation en kurde », les actions et événements se dérouleront du 4 mai au 1er juin.

Le texte de presse a été lu en dialecte kirmanckî (zazakî ou Dimilî) par Şükran Yakut, coprésident de l’Association de recherche sur la langue et la culture de la Mésopotamie (MED-DER), et en dialecte kurmancî par Heval Dilbahar, co-porte-parole de la Commission de la langue, de la culture et des arts du Parti de l’égalité des peuples et de la démocratie (Parti DEM).

La langue kurde continue d’être réprimée

La déclaration soulignait que la nation kurde est l’un des peuples les plus anciens de l’humanité et précisait : « La langue kurde est également l’une des valeurs les plus fondamentales et indispensables de la nation kurde et de l’humanité tout entière. Malheureusement, en raison du déni du peuple kurde depuis un siècle, la culture et la langue kurdes, comme beaucoup d’autres langues et cultures, ont été victimes de tentatives de destruction brutale. Cependant, ces efforts ont échoué en raison de la lutte nationale kurde. Pourtant, nous constatons des tentatives de relancer des pratiques visant à supprimer la langue kurde. Le kurde n’est toujours pas reconnu par la bureaucratie ; il continue d’être ignoré, interdit, encerclé et réprimé par diverses méthodes. L’objectif de rendre le turc dominant dans tout le Kurdistan et partout où vivent les Kurdes est d’assimiler les Kurdes et, à terme, d’effacer la langue kurde. C’est un crime contre l’humanité. »

Ceux qui ne peuvent pas défendre leur langue ne peuvent pas défendre l’humanité

La déclaration soulignait que la langue maternelle est l’existence, l’identité et l’âme d’un peuple : « Notre langue est la source et le fondement de notre unité nationale et la clé de notre libération à tous égards. Le kurde est notre ligne rouge. M. Abdullah Öcalan déclare notamment : « Protéger et développer sa langue et sa culture est une exigence de l’être humain. Ceux qui ne peuvent protéger leur langue ne peuvent rien protéger. Ceux qui ne peuvent protéger leur langue ne peuvent protéger l’humanité. Ceux qui ne connaissent pas ou ne développent pas leur langue maternelle restent des êtres humains incomplets. Si vous n’apprenez pas votre langue maternelle et ne recevez pas une éducation dans celle-ci, vous ne pouvez pas penser correctement ou magnifiquement, et vous ne pouvez rien produire ; vous avez l’impression que votre cerveau est mort. La langue maternelle est aussi importante que le pain et l’eau. Ces 50 dernières années, nous avons mené une lutte acharnée contre l’interdiction de notre langue et de notre culture. Protéger notre langue et notre culture est le devoir de chacun. »

Soutien à l’appel du 27 février

La déclaration continue : « L’ appel à la paix et à une société démocratique de M. Abdullah Öcalan a renforcé le débat sur la liberté de la langue kurde. Nous soutenons pleinement cet appel historique. Nous affirmons clairement que les droits linguistiques, culturels, politiques, juridiques et à l’autonomie de la nation kurde ne sont pas négociables et que tous les obstacles à l’exercice de ces droits doivent être supprimés. Pour construire une société libre, démocratique et pacifique, la langue kurde doit se voir accorder un statut officiel et devenir une langue d’enseignement. 

Bien entendu, pour que cela se produise, M. Abdullah Öcalan doit pouvoir agir librement et œuvrer à l’instauration de la paix et d’une société démocratique. Les conditions nécessaires doivent être créées ; l’identité, les valeurs et les droits de la nation kurde, en particulier la langue kurde et le droit à l’autonomie, doivent être reconnus politiquement et juridiquement, et garantis par la Constitution et les lois. »

Nous lançons une nouvelle phase dans la lutte pour la langue kurde

Le communiqué ajoute : « Nous savons pertinemment que l’isolement de M. Öcalan est directement lié à l’isolement de toutes les valeurs de la nation kurde, en particulier de la langue kurde. C’est pourquoi nous allons plus que jamais intensifier et élargir notre lutte pour protéger et développer la langue kurde. À cette fin, toutes les institutions, partis politiques, organisations, secteurs et divers milieux kurdes et démocratiques, y compris nous-mêmes, lancent une nouvelle phase de la lutte pour la langue kurde avec le slogan : Un statut pour le kurde, une éducation en kurde. »

 

 

 

Actions et événements prévus

Le communiqué souligne que « le 15 mai, Journée de la langue kurde, sera célébré dans toutes les régions du Kurdistan et de Turquie. Nous organiserons diverses luttes, actions, programmes et activités au sein de la société. Nos actions seront menées dans chaque district, village, quartier, rue, foyer, auprès des jeunes, des enfants, des universités, des commerçants et dans tous les autres domaines. »

Il s’agira notamment de marches, d’annonces de masse, de campagnes de tracts, de banderoles et de panneaux d’affichage en kurde, de réunions avec le public et les institutions, de forums, de plateformes publiques, de tentes, de pièces de théâtre, de foires du livre kurde, de panels, de colloques, d’ateliers, de conférences, de concerts et d’événements numériques.

Il y aura également des programmes de collaboration avec les gouvernements locaux/municipalités, des efforts parlementaires et diplomatiques, le tout couvert par un plan global et complet.

Nous intensifierons particulièrement la lutte pour obtenir la reconnaissance juridique et pratique du kurde, son statut de langue d’enseignement, la restauration de la toponymie kurde et l’inversion des termes turcisés. De plus, nous sensibiliserons à l’organisation et à l’enseignement de la langue kurde dans toutes les régions du Kurdistan et partout où vivent des Kurdes. (ANF) 

SYRIE. Pourquoi HTC s’en prend aux Druzes?

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SYRIE – Les attaques contre les Druzes visent à adresser de multiples messages à diverses parties. Elles sont susceptibles de s’étendre à une campagne plus vaste visant tous les peuples de la région. Mais pourquoi HTC s’en prend aux Druzes ? Réponses avec le journaliste kurde Firat Dicle.

Dans la soirée du 28 avril, des forces affiliées au HTS (Hayat Tahrir al-Sham, ou HTC) ont lancé une attaque à l’arme lourde contre la région de Jaramana, située au sud de Damas. Les attaques se sont rapidement propagées au-delà de Jaramana, vers Sahnaya, Achrafiya et Suwayda, causant la mort de dizaines de civils.

Comme l’a déjà rapporté le site Lekolin.org dans ses articles des 7 et 13 mars, l’Organisation nationale du renseignement turc (MIT), en coordination avec HTS, a élaboré des plans secrets pour la région. Lors d’une réunion à l’ambassade de Turquie en Syrie, des responsables du MIT auraient donné pour instruction aux commandants de HTS de prendre le contrôle de la région de Soueïda et de ses environs, d’empêcher l’expansion militaire des forces druzes et de semer le chaos en réponse aux frappes aériennes israéliennes ciblant les bases T-4 et Palmyre occupées par la Turquie. Dans le cadre de ce plan, le MIT et HTS auraient utilisé l’IA pour fabriquer une vidéo semblant montrer un dirigeant druze, Marwan Kiwan, insultant le prophète Mahomet. Immédiatement après, les attaques contre la population druze ont commencé. Des membres de l’EI et des djihadistes étrangers au sein de HTS ont ciblé des étudiants druzes à Homs et Damas avant de se tourner vers Jaramana, où des dizaines de civils ont été massacrés dans la nuit du 28 avril.

Malgré la condamnation par le chef religieux druze de l’extrait audio fabriqué et des attaques, des groupes turkmènes au sein de HTC, étroitement liés à l’État turc, ont intensifié leurs attaques à Jaramana, Sahnaya, Ashrafiya, Thala et Suwayda. Dans un premier temps, le gouvernement de Damas est resté silencieux. Un accord aurait ensuite été conclu entre les cheikhs druzes et le gouvernement, mais il n’a eu aucun impact réel sur le terrain. Les attaques se sont poursuivies sans relâche.

Israël est intervenu

Après les attaques du HTS, Israël a d’abord condamné verbalement, puis annoncé avoir frappé un convoi djihadiste en route pour attaquer les communautés druzes. Bien que les responsables militaires et politiques israéliens aient déclaré qu’ils ne toléreraient pas les attaques contre les Druzes, leur réponse n’a pas eu d’effet dissuasif. La situation demeure incertaine.

Risque de nouveaux massacres

La communauté druze est bien organisée, mais manque d’expérience militaire. La poursuite des attaques pourrait conduire à un massacre généralisé de la population druze. Les massacres qui visaient auparavant les Alaouites s’étendent désormais aux Druzes. Ces attaques ne sont que les premières manifestations d’une idéologie profondément ancrée, dans sa forme la plus faible. À mesure que HTC se renforcera, il est probable qu’il mènera davantage d’attaques meurtrières contre les populations de Syrie et de la région. Il ne s’agit là que d’une phase préparatoire. Par conséquent, les populations syriennes doivent de toute urgence mettre en place des structures d’autodéfense et des organisations locales.

Plusieurs messages derrière les attaques

Les attaques contre les Druzes visent à envoyer de multiples messages à différentes parties.

Le président turc Erdoğan a déclaré un jour : « Même si nous ne sommes pas les meneurs de jeu, nous sommes doués pour les perturber. » Conscient que la Turquie n’a aucune influence sur l’avenir de la Syrie, Erdoğan cherche à saboter toute équation future potentielle et à propager la guerre à une région plus vaste. L’État turc envoie un signal à tous les groupes ethniques et religieux de Syrie, à Israël, à la Coalition, au monde arabe, et en particulier aux Kurdes.

En ripostant aux frappes aériennes israéliennes sur les bases aériennes T-4 et Palmyre, la Turquie envoie également le message qu’Israël ne peut opérer librement dans l’espace aérien syrien. Alors qu’Israël considère les Druzes comme des alliés, la Turquie souhaite bloquer toute alliance de ce type et rappeler à Israël ses limites en Syrie.

L’État turc tente également de perturber les accords conclus par Israël avec les États arabes. En cas de succès, la Turquie se présenterait aux forces de la coalition comme un acteur perturbateur, mais indispensable, dans la région.

En menaçant les Kurdes, notamment ceux qui ont tenu une conférence à Qamichli le 26 avril, la Turquie vise à les contraindre à accepter les conditions de HTC. À tout le moins, la Turquie cherche à empêcher l’unité kurde par des actes de violence de masse, et prépare déjà le terrain dans les villes druzes. Des groupes turkmènes fidèles à la Turquie ont également menacé les Kurdes. De plus, la Turquie cherche à bloquer toute relation potentielle entre Kurdes et Israël en détournant l’attention d’Israël dans le sud de Damas tout en lançant une nouvelle offensive contre les Kurdes.

Les attaques contre les Druzes et les Alaouites s’inscrivent dans une stratégie plus vaste visant tous les peuples de la région. Il est donc essentiel de ne pas rester silencieux face à ces attaques. Des mesures préventives doivent être prises immédiatement, sinon il pourrait être trop tard. Seules des forces organisées peuvent mettre fin à ces massacres. Il n’y a pas de temps à perdre. (ANF)

SYRIE. Des Druzes exigent-ils que Mazloum Abdi soit à la tête du gouvernement syrien?

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SYRIE / ROJAVA – Le vétéran internationaliste des Unités de protection du peuple (YPG) ayant combattu le groupe État islamique, Karim Marcello Franceschi affirment que les Druzes syriens exigent que le commandant kurde, Mazloum Abdi prenne la tête du gouvernement de transition syrien.

Voici le poste de Karim Marcello Franceschi publié ce matin sur X (ancien Twitter):

Des voix druzes s’élèvent… réclamant que Mazloum Abdi prenne la tête du gouvernement de transition syrien, remplaçant Ahmed al-Sharaa. Leurs appels font écho aux cris désespérés des anciens alaouites lors des tempêtes génocidaires qui ont ravagé le littoral.
 
Je l’ai rencontré pour la première fois en 2015, lors de l’offensive de Sarrin. Membre de l’unité de tireurs d’élite de Kobané, j’assistais au briefing des commandants. Je n’étais pas l’internationaliste le plus haut gradé (Şervan, du légendaire 223e régiment de Tabur, avait cet honneur), mais je me souviens clairement d’Abdi. Il portait le même treillis qu’il porte encore aujourd’hui : non repassé, taché de poussière et effiloché par son but. Des chaussures de course usées. Pas de médailles, pas de faste. Il a grandi en buvant du thé, en mangeant du pain et en profitant des maigres ressources de la vie de guérilla dans les montagnes. Il ne s’est jamais marié. Il a choisi une vie de célibat et de dévouement. Et il n’a jamais dévié.
 
Il s’exprima clairement. « On n’est plus à Kobané », dit-il. « Daech est affaibli. Ses meilleurs éléments sont déjà tombés. Avancez vite, mais surtout, respectez la population. »
 
Ce moment reste gravé dans ma mémoire ; non seulement comme un briefing tactique, mais aussi comme une déclaration. Il a déclaré :
 
Nous ne gagnerons pas par la force. Ce n’est pas une guerre de pouvoir. La force ne fait pas le droit. Et il y a des plus forts. Nous gagnons parce que nous sommes justes. Parce que les peuples sont avec nous. Nous nous battons pour eux – Kurdes, Arabes, Yézidis, musulmans, chrétiens, juifs, Arméniens, Tchétchènes, Turkmènes… peu importe.
 
Dans ces mots, j’entendais plus qu’une simple logique militaire : j’entendais le rejet de la domination comme ontologie, le refus de la souveraineté comme théologie de la violence. Une politique ancrée non dans la transcendance, mais dans la terre, la sueur et la survie partagée.
 
Aujourd’hui, Heval Şahin [nom de guerre de Mazloum Abdi ou Mazlum Kobanî] porte un costume mal ajusté, probablement acheté dans la rue. Il lave probablement encore lui-même son linge. Et pourtant, les images de massacres, de nettoyages, de violations ne proviennent jamais de l’AANES. Pas même des prisons de l’EI, où les pires sont détenus avec plus de dignité que les mercenaires de Jolani n’en offrent aux civils.
 
Le monde regarde désormais vers le Rojava. Et tandis que le mirage de l’empire s’effondre, une lueur d’espoir subsiste. Une politique non pas de confiscation, mais de subsistance. Une révolution silencieuse, nourrie par la terre, par le peuple, par la certitude que la justice ne crie pas, mais s’enracine.
 
Un dernier espoir, peut-être, pour maintenir la Syrie entière.

La politique turque hostile à Dersim héritée de l’empire ottoman

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TURQUIE / KURDISTAN – Il y a 88 ans jour pour jour, le gouvernement turc lançait une campagne génocidaire ciblant les Kurdes-alevis de la province de Dersim qui refusaient la soumission à l’État turc-sunnite. Plus de 70 000 Kurdes alévis de Dersim furent massacrés et des milliers d’autres chassés de leurs terres, tandis que l’État turc rebaptisait Dersim en « Tunceli » (Main de bronze) du nom de l’opération militaire de l’époque. Retour sur le contexte dans lequel le génocide de Dersim a eu lieu. 

Une politique turque hostile à Dersim héritée de l’empire ottoman

En mai 2020, l’historien et chercheur kurde, Sedat Ulugana expliquait le contexte dans lequel le génocide de Dersim a eu lieu, en mettant en évidence la continuité d’une politique anti-Dersim de l’État turc héritée de l’empire ottoman. Un long reportage qui fut réalisé par Barış Balseçer et publié sur le site Yeni Ozgür Politika le 13 mai 2022 : 
 
83 ans se sont écoulés depuis le génocide de Dersim. Selon les chiffres officiels, entre 1937 et 1938, 14 245 [Kurdes alévis] ont été tués lors du massacre, du nom du décret « Opération Tunceli Tenkil », publié avec la décision du Conseil des ministres du 4 mai 1937. Cependant, selon des chercheurs historiques et de nombreuses sources, environ 70 000 personnes ont été tuées lors du génocide, parmi lesquelles des enfants, des personnes âgées et des femmes. Nous avons parlé avec le chercheur-écrivain Sedat Ulugana du génocide de Dersim.
 
Quel genre de transformation politique les Ottomans ont-ils connu avant le génocide de Dersim? Quand on regarde ce massacre commis par les Kémalistes, est-il possible de dire qu’une inimitié historique a été perpétuée ?
 
Contrairement à d’autres endroits du Kurdistan, Dersim est une zone que les Ottomans ne pouvaient pas contrôler complètement jusqu’aux Tanzimat (« réorganisation » en turc ottoman – ère de réformes qui ont eu lieu entre 1839 et 1876). Dersim a un statut relativement indépendant par rapport aux autres émirats kurdes. Bien qu’il semble parfois être lié à l’émirat de Çemişgezek, Dersim était une région tribale et les Ottomans ne purent y entrer vraiment qu’au milieu des années 1800. Le processus des Tanzimat que l’histoire officielle turque nous offre comme «occidentalisation et modernisation» est en fait l’imposition d’une autorité centrale au Kurdistan. Avec ce processus, le transfert à Istanbul du capital accumulé chez les Mîrs (émirs) kurdes a été planifié et mis en pratique.
 
Dans le processus des Tanzimat, les Ottomans tentent d’établir une autorité à Dersim, mais quand on regarde le Kurdistan, c’est le seul endroit où les Ottomans ont échoué. De l’ère Abdülhamit aux Tanzimat, les tribus sont sévèrement punies. Immédiatement après ce processus, le projet des régiments «Hamidiye» a été lancé en 1892. En fait, de nombreuses tribus alévies kurdes de Dersim souhaitent également participer à ce projet. Parce qu’ils voient ce projet comme un «statut» et une «capitulation» pour eux-mêmes. Un autre nom de ce processus est «la paix de l’État et des tribus». Le processus des régiments Hamidiye est la paix de l’État avec les tribus. Donc les Tanzimat sont aussi un projet pour les Kurdes. Cependant, malgré toutes les demandes, aucune tribu kurde-kizilbash de Dersim n’a été inclue aux régiments Hamidiye [Les Hamidiés étaient des régiments de cavalerie légère de l’armée ottomane créé en 1891 et recrutés principalement parmi les tribus kurdes. Leur nom « Hamidiye » vient de celui du sultan Abdülhamid II]. On inclus dans le projet des régiments Hamidiye uniquement des tribus kurdes sunnites.
 
Les relations entre les tribus Cibran et Xormeks, limitées à Dersim, jouent un rôle très important pour Dersim. Dersim devint alors le refuge des tribus Kizilbash. En plein pillages des régiments Hamidiye, les tribus des Xormek et des Lolan de Varto pouvaient riposter contre les pillages effectués par la tribu Cibran.
 
Pendant l’İttihat Terakki (Comité Union et Progrès – CUP, en turc İttihat ve Terakki Cemiyeti) il y eu une certaine calme à Dersim. Surtout avec la dissolution des régiments d’Hamidiye et la sécularisation de la politique d’islamisation Abdulhamid accès sur le sunnisme, Dersim peut enfin respirer. Mais la période de détente a lieu pendant les premières années de l’İttihat Terakki. Par la suite, l’İttihat Terakki met en place la politique de « turquification ». A partir de 1913, l’Etat renoue avec les méthodes de l’époque d’Abdulhamid pasha. Avec la mise en oeuvre des politiques de turquification, l’Etat mettra sur sa liste Dersim qui faisait partie de quelques régions jamais soumises. C’est à dire que l’Etat a décidé qu’a Dersim, la pensée étatique devait prévaloir. Cette liste a été léguée aux Kémalistes après l’İttihat Terakki.
 
Dersim est l’un des endroits que le kémaliste Abdülhalik Renda, l’un des noms importants de l’époque, député de Çankırı, a cités dans ses rapports en 1926, « Il y a trois lieux de problèmes au Kurdistan ». Dersim fait partie de ces lieux cités par Renda. L’hostilité anti-Dersim du pouvoir ottoman citée dans ces rapports, se lège au régime des Tanzimat; Du régime Tanzimat à l’Ittihat Terakki; Il est passé du Comité d’union et de progrès et enfin aux Kémalistes. En 1937, les Kémalistes ont réalisé le rêve que les Ottomans et les Unionistes n’avaient pas pu réalisé jusqu’alors.
 
Dersim est situé au centre du Kurdistan, c’est le cœur du Kurdistan. C’est une région très difficile [du fait sa position géographiques montagneuse difficile d’accès] . En raison de l’incapacité de l’État d’y régner, Dersim devient un port où toutes les tribus des environs peuvent se réfugier, une base pour les Kurdes. Tout comme le Rojava est une base à la fin des années 1920, Dersim est un port interne pour les mouvements kurdes. L’État sait que les codes kurdes de Kizilbash étaient très forts à cette époque. Déjà, en regardant les lettres de Seyid Rıza, la forte revendication kurde est perceptible. Dans de nombreux rapports préparés au cours de cette période, Dersim a été déclaré comme le «centre du kurdisme ». Conformément à ces informations, le régime kémaliste a décidé de disposer de cette base et a mis en œuvre le projet d’anéantissement complet des Kurdes.
 

Alors, peut-on dire que les tribus ont pris part à la résistance contre le massacre?

Certaines tribus ne participent pas à la résistance. Mais ce n’est pas seulement un cas spécifique à Dersim. Dans toutes les sociétés où le féodalisme est fort, il est extrêmement facile de profiter des conflits internes et d’activer la dynamique interne de ces sociétés. En fait, en s’en prenant à Dersim, on cible Seyid Rıza. Parce qu’il y a la lettre qu’il a envoyée à Sèvre en 1920. La raison pour laquelle Dersim est une cible est l’insistance de Dersim en kurdicité.

 
Quand nous regardons l’histoire officielle de l’État turc, on s’aperçoit qu’ils donne comme prétexte la rebelion comme étant la cause profonde des massacres qu’ils ont commis et en même temps, dans leurs discours, ils qualifiaient de « réactionnaires-féodaux », etc. afin de donner une justification légale au massacre. en ajoutant des discours. Pourquoi est-ce ainsi ?
 
Depuis la rebelion de Bitlis en 1914, jusqu’en 1938, l’État s’efforce de dépouiller toutes les révoltes et résistances kurdes d’une personnalité politique pour le revêtir d’un « déguisement judiciaire ». Telle est la politique de l’État et cette politique a commencé avec le processus de rébellion de Bitlis en 1914. Ils ont codé le processus Bitlis comme « un soulèvement réactionnaire contre le régime constitutionnel ». Ils ont également fait témoigner les leaders des tribus et les notables arméniens dans ce sens. Le consul russe de Bitlis de l’époque le reconnaît. Lors de la rébellion de Şêx Said en 1925, une opération a été menée auprès de la presse, et en particulier, on a fait pression sur la presse pour qu’elle présente la rébellion comme étant « réactionnaire, une révolte pour la charia ».
 
Pour la rébellion d’Ağrı, qui est intervenue entre ces deux rebellions, on ne peut trouver un tel alibi. Alors, on la qualifie d’ « agissement de gang » et d’« incitation des États étrangers », et on accuse l’Iran et les Britanniques. Le terme de « pouvoirs extérieurs » d’aujourd’hui remonte en fait à cette époque. Pour Dersim, on a utilisé la qualification de « liquidation du féodalisme ». Quand nous regardons le codage de toutes ces révoltes par le régime républicain, ils ont trouvé un alibi pour chaque rébellion afin de les vider de la kurdicité.
 
Les révoltes kurdes sont-elles connectées les unes aux autres?
 
Toutes ces révoltes et résistances kurdes entre 1914-1938 sont interconnectées. Il s’agit en fait d’un mouvement monolithique. Mais ce sont des projets que l’État a brisés; les empêchant de fusionner entre-eux. Lors de la Rébellion de Bitlis en 1914, si les instructions de Bedirxan avaient étaient attendues, c’est-à-dire si la rébellion avait éclate pendant la guerre, la Première Guerre mondiale aurait pu changer le sort de la rébellion. Cela aurait pu entraîner un résultat positif pour les Kurdes. Mais à cette époque, l’État a pris toutes les précautions pour qu’elle reste locale. L’État a arrêté les membres du clan Bedirxan, en a exécuté quelques-uns, en a exilé plusieurs et en a acheté certains.
 
On voit les mêmes motivations dans la rébellion de Şêx Said en 1925. C’est un calcul remarqué plus tard. Pour le pouvoir ottoman, c’est la revanche sur la rebelion de Bitlis. Cette année-là, Cibranlı Halit Bey avertit de ne pas tenter de soulèvement. Nous n’avons pas de documents, mais je pense que Cibranlı Halit Bey et Alişer se connaissaient, notamment sur la ligne Erzurum. Halit Bey est la seule personne de la tribu Cibran que les tribus Xormek et Lolan respectent . Si la rébellion de 1925 avait été dirigée par Cibranlı Halit Bey, il aurait pu réaliser les unités tribales kurdes et alévies, en particulier au sein du Dersim. Il existe également une telle possibilité.
 
Quel le degré de véracité quand on décrit le massacre de Dersim comme un massacre d’Alévis ?
 
Quand on regarde Tokat, Kastamonu, Bandırma, en dehors de la géographie du Kurdistan, par exemple, les codes alévis des Turcs sont plus radicaux que les codes alévis kurdes. En d’autres termes, le régime kémaliste n’a pas de problème avec l’alévisme tel quel. Par conséquent, il ne suffit pas de qualifier le massacre de Dersim de «massacre d’Alevis» seulement. La raison prédominante orientant l’État contre Dersim est qu’il est kurde. Et c’est le pouvoir que les Kızılbaş (Qizilbash, l’ordre soufi chiite des Safavides auquel certains des Kurdes alévies ont adhéré) ont ajouté à la kurdicité.
 
Quel est le nombre de personnes massacrées et déplacées à Dersim?
 
Étant donné qu’une ou deux personnes de presque toutes les familles ont été anéanties à Dersim, il s’avère qu’entre 70 et 80 000 habitants de Dersim ont été massacrés. Beaucoup de gens ont été tués par le typhus et le choléra dans les prisons où 50 personnes ont été enfermées dans des cellules pour 10 personnes. Il y a beaucoup de gens qui sont morts sur les routes de l’exil. Il y a ceux morts de faim. Cela signifie qu’au moins la moitié de la population de Dersim a été assassinée.
 
Mais les dirigeants kurdes ne pouvaient-ils pas voir un tel massacre ou l’attention de l’État?
 
C’était absolument prévu. Surtout chez les Kurdes après le génocide arménien de 1915, Il y a la suspicion de « Ce qui a été fait aux Arméniens pourrait-il nous arriver? » Quelques années plus tard, le massacre de Koçgiri arrive comme une réponse à cette suspicion. On se disait : « L’État fera des massacres, mais chez les Kurdes alévis ». Cette fois-ci, on s’est dit : « Le feront-ils aux Kurdes sunnites? ». 4-5 ans plus tard, dans le triangle Palu-Genç et Lice, lorsque les villages kurdes ont été incendiés, avec enfants, vieillards, femmes, il était devenu certain qu’on allait massacrer tous les Kurdes.
 
Après le massacre de Zilan en 1930, la géographie du Kurdistan a été sérieusement réduit en silence. Dersim connaissait très bien le massacre de Zilan en 1930. De toute évidence, ils en avaient peur. Mais les habitants de Dersim n’avait pas d’autre choix. Donc, quoi qu’ils fassent, l’État allait commettre ce massacre. On a réfléchi à la manière de prévenir le massacre et des mesures ont été prises pour l’empêcher. La phrase de Seyid Rıza qui aurait dit , «je viendrai me rendre, pourvu que vous n’attaquiez pas Dersim », et le fait que le massacre ait tout de même eu lieu est une indication que l’État ne voulait en aucun cas faire de compromis. A Dersim, le gouvernement veut liquider complètement celui qu’il considère comme un « bandit », « nuisible à la turquicité », et il le fait.
 
Quelle est l’attitude des autres États face à cela ?
 
Aucun Etat ne réagit. Des avions britanniques ont même été utilisés à Zilan. Certains documents ont été rendus publics. «Nos avions ont été utilisés lors de la rébellion d’Ağrı. Nous nous demandons les forces de manœuvre. Mais les Kurdes en ont abattus quelques-uns ». Les Britanniques ont donné des armes à l’État turc à cette époque et ont transformé le Kurdistan en laboratoire. Des documents indiquant que les gaz toxiques utilisés à Dersim appartiennent à l’Allemagne sont également apparus récemment. En dehors de cela, il y a des lettres envoyées par Seyid Rıza à l’Angleterre et à la France, mais ces pays n’entendent pas le cri de Dersim, ils bouchent leurs oreilles.
 
Je suis tombé sur la correspondance interne de la France à cette époque. « Dans ce processus, l’État kémaliste a tué tant de Kurdes à Dersim. Nous entendons cela ». Mais il n’y a aucun commentaire sur les documents. Ils prennent juste l’information, c’est tout. Je n’ai pas trouvé de déclaration condamnant les massacres. Mais surtout avant le massacre de Dersim, les Français ont empêché les Xoybunistes de venir depuis la frontière syrienne. En bloquant les frontières, ils ont apporté un soutien implicite à l’État turc.
 
Quelle est la raison principale du soutien international au Kémalisme?
 
En réalité, les kémalistes se sont en fait battus contre les Grecs, les Arméniens et les Kurdes. Il n’y a pas de combat avec des puissances européennes telles que les Français, les Britanniques, etc., comme le décrit l’histoire officielle. Le régime kémaliste a dominé l’Anatolie à cette époque, en échange de la cession de la province de Mossoul aux Britanniques et de la province d’Alep aux Français et de renoncer à d’autres terres au Moyen-Orient. Il a amélioré ses relations avec les bolcheviques. Les Russes ont abandonné le Kurdistan aux Kémalistes. En fait, il n’y a pas de victoire comme le prétend l’histoire officielle turque. Le sultan Vahdettin allant en Angleterre, le régime ottoman est devenu le régime kémaliste. Les limites sont les mêmes. Le seul changement aux frontières est l’inclusion d’Hatay en 1937 et l’annexion de Chypre en 1974.
 
Quand nous regardons le présent, nous voyons que la politique néo-ottomane est toujours menée par Erdogan et le bloc au pouvoir. Comment les Kurdes peuvent empêcher cette tentative d’occupation?
 
Surtout en 1920, il y a une conspiration internationale contre les Kurdes dans le cadre du traité de Sèvres. Les Kurdes doivent tenir compte du fait que cette conspiration sera répétée. La seule chose qui déjouera cette conspiration est « l’unité nationale ».
 
Le rapport de Mustafa Abdülhalik Renda
 
Mustafa Abdülhalik Renda est l’une des rares personnes à connaître l’esprit de la rébellion kurde et à avoir étudié les révoltes kurdes. Ce sont des gens de Roumélie (la partie de la péninsule balkanique sous domination ottomane), du Comité de l’Union. Pendant leur séjour à Roumélie et dans les Balkans, ce sont les unionistes qui ont connu la guerre avec les insurgés des Balkans et ont lu le concept de rébellion de la littérature française sur le plan politique. Renda a été trouvée dans différentes parties du Kurdistan de 1913 jusqu’au milieu des années 1920. C’est une personne qui dit ne pas avoir digéré le « kurdisme » de son propre aveux, en parlant de la période allant de la rébellion de Bitlis qui a eu lieu en 1914 à la rébellion de Şêx Said en 1925. Le rapport qu’il a préparé en 1926 est important. Dans le rapport, « Il y a trois districts au Kurdistan. La première de ces régions est le mont Ararat et le ruisseau de Zilan; le deuxième est Sason et le troisième est Dersim ». Ils ont perpétré le massacre de Zilan en 1930. Ils ont perpétré un massacre à Sason en 1935. Ils ont perpétré le massacre de Dersim entre 1937 et 1938.
 
L’origine du Comité de l’Union
 
Quand on regarde toutes les révoltes kurdes, on voit que presque tous les commandants turcs qui ont organisé des massacres ou préparé des rapports étaient d’origine thracienne ou balkanique. Comment dois-je lire ceci?
 
Le lieu où le Comité d’union et de progrès a été créé n’est pas le territoire anatolien, c’est Roumélie. Ces personnes sont principalement des immigrants Roumélie. L’Armée du Mouvement, dont l’Union et les progressistes ont pris le commandement, est arrivée à Istanbul de Thessalonique. Cette équipe s’assure que tous les officiers des quartiers de Thessalonique et Roumélie arrivent à des postes clefs. En fait, ce sont ces cadres qui ont fondé la république kémaliste. En d’autres termes, tout en faisant la promotion du turc anatolien ou d’un officier d’origine kurde, arabe et albanaise promu capitaine; Le régime kémaliste – également lié au fait qu’Ataturk soit originaire de Thessalonique – garantit que les immigrants de Roumélie de l’armée montent jusqu’au grade de général. Ce fut le cas jusqu’aux dernières années.
 
Première; ce sont des Serbes, Bulgares, etc. islamisés. Ce sont des peuples des Balkans. En d’autres termes, ce sont des personnes issues de familles islamisées il y a plus de 100-200 ans. Il n’y a aucun autre endroit où ces gens peuvent aller. Ils voient l’Anatolie comme une patrie.
 
De Cevdet Sunay à Fevzi Çakmak, Salih Omurtak, Alpdoğan… Ces personnes sont des officiers de réserve diplômés en tant qu’étudiants militaires, bien avant le génocide de Dersim. Ce sont la génération prometteuse de l’Ittihat Terakki. Ces personnes avaient déjà appris comment le génocide pouvait se faire systématiquement. Cette génération a réalisé le génocide à Zilan en 1930, ils ont théorisé complètement le génocide. Par la suite, ils ont publié des livres éducatifs appelés «guides de recherche de passeurs et de bandits» dans les écoles de gendarmerie. Le but principal de ces livres est de savoir comment tuer des Kurdes et comment faire des massacres. Les directives ont été publiées entre 1930 et 1933. Ils ont été formés au massacre et au génocide dans les écoles de gendarmerie et d’officiers.
 
L’importance de Nuri Dersimi et d’Alişer
 
Quelle est l’importance de Nuri Dersimi et Alişer en termes d’histoire kurde?
 
Contrairement aux intellectuels kurdes, Nouri Dersimi est également un militant. L’anxiété intellectuelle est plus dominante quand on regarde Celadet Ali Bedirhan ou Memduh Selim. Nuri Dersimi est un homme de lutte, d’action. Plus que Seyid Rıza, je pense que Nuri Dersimi n’a pas agit indépendamment d’Alişer. Nuri Dersimi avait un lien politique important avec le Mouvement Xoybun qui était en Syrie. De même, dans son livre, il essaie d’exprimer qu’il a des réseaux de renseignement. À cette époque, nous voyons que le Xoybun existait sous forme d’organisation clandestine presque partout au Kurdistan. En ce sens, je pense que Nuri Dersimi est en fait l’un des rares cadres politiques de la Résistance de Dersim.
 
Un autre de ces cadres politiques est bien sûr Alişer. Alişer a une ambition. Dans sa lettre de 1920, il apparaît comme un acteur kurde ayant l’intention de porter le fardeau de tout le Kurdistan (avec les sunnites, les alévis et les Êzîdîs) et d’être leur dirigeant. Dans sa lettre, il dit: « J’ai parlé aux Russes au nom de 8 millions de Kurdes ». Quand on regarde la lettre qu’Alişer a écrite en 1920, on voit aussi qu’il a suivi attentivement les travaux de la kurdologie de l’époque.

 

*Des documents fuités en mai 2019 révélaient que le fondateur de la Turquie, Ataturk avait acheté des armes chimiques à l’Allemagne nazie (1937) pour les utiliser lors du massacre des Kurdes à Dersim.