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TRIBUNE. « Soutenons le processus de paix, n’abandonnons pas les Kurdes ! »

PARIS – Des élu·es et représentant·es des partis du NFP se sont rendus fin janvier au Nord Est de la Syrie. Ils exhortent la France à « faire entendre son soutien à la participation des FDS (Forces Démocratiques Syriennes) aux discussions en cours en Syrie, que le dialogue inter syrien n’exclue aucune communauté et région et se déroule sans ingérence extérieure notamment de la Turquie. »

Voici leur tribune:

« Soutenons le processus de paix, n’abandonnons pas les Kurdes ! »

Elu·es et représentant·es des partis du NFP, nous nous sommes rendus fin janvier au Nord Est de la Syrie (AANES) pour les 10 ans de la libération de la ville de Kobané. Nous avons par la suite accueilli une délégation de l’AANES qui a été reçue à l’Hôtel de Ville de Paris, au Sénat et à l’Assemblée Nationale.

Aujourd’hui, nous voulons briser le silence de la communauté internationale, alors que des milices islamistes payées par la Turquie attaquent chaque jour le barrage de Tichrine, commettant les mêmes exactions et crimes que Daesh hier, au service d’une idéologie obscurantiste analogue et que des drones turcs continuent de frapper la population. Ce ne sont pas seulement les forces armées, (FDS, YPG et YPJ) qui défendent cette position militairement stratégique et essentielle pour l’accès à l’électricité et l’eau dans toute la région, mais les populations elles-mêmes au prix de leur vie. Ces attaques impactent la lutte menée par les FDS contre Daesh qui se poursuit également.

Pourtant, en 2015, toute la communauté internationale saluait le courage des forces YPG, YPJ et alliés qui ont battu  Daesh, pour la liberté, les droits des femmes dans la région comme dans le monde entier, notamment en France où nous avons subi les attentats islamistes.

Nous ne devons pas les abandonner. L’Union européenne et la France doivent intervenir urgemment auprès de la Turquie d’Erdogan, comme auprès d’Israël qui occupe le Golan, pour que cessent ces offensives contraires au droit international remettant en cause les frontières souveraines de la Syrie. La coalition internationale doit installer une no fly-zone dans le nord et nord-est de la Syrie pour protéger les populations, exiger un cessez-le-feu et un embargo sur les armes.

Dans le même temps, le nouveau gouvernement syrien demande aux groupes armés de Syrie, y compris aux YPG, YPJ et FDS, de rendre les armes pour intégrer une seule armée dans une Syrie unifiée alors même qu’ils font face aux attaques et que la menace de Daesh est toujours bien présente dans la région. Nous apprenons que les services secrets turcs sont invités et très présents dans les discussions du nouveau gouvernement de Syrie. Les déclarations du nouveau gouvernement syrien qui considère que les femmes n’ont pas à faire partie de l’armée mais doivent rester à la maison font craindre de terribles reculs pour les droits des femmes.

L’Union européenne et la France doivent soutenir, sans ingérence, les revendications de l’AANES pour une Syrie unifiée indépendante de la Turquie, décentralisée qui respecte une autonomie pour chaque région et notamment leur région du nord-est de la Syrie. Son contrat social, basé sur le vivre ensemble et la participation démocratique de toutes les communautés (kurdes, arabes, syriaques, etc.), l’égalité entre hommes et femmes et leur implication dans toutes les sphères de la société et de l’armée est une chance pour toute la Syrie pour un processus constituant à construire.

Après avoir visité le camp d’Al Hol incluant le camp des prisonniers étrangers de Daesh et d’autres camps de réfugiés internes notamment en provenance d’Afrin, nous réaffirmons l’urgence d’un processus de paix dans la région qui passe par une solution politique négociée avec l’AANES pour que cessent les déplacements subis de populations. Un tribunal pénal international doit être instauré pour juger tous les djihadistes de Daesh et aussi ceux de toutes les milices financées par l’Etat turc. À défaut, le rapatriement des ressortissants français doit être organisé. Par ailleurs, les enfants français doivent être rapatriés et pris en charge par la France, conformément aux conventions internationales dont elle est signataire. Il serait irresponsable de laisser le camp d’Al Hol, véritable bombe à retardement, et ses 39 000 réfugiés dont 24000 enfants en provenance des anciennes zones dirigées et radicalisées par Daesh sous la responsabilité de la Turquie ou du nouveau gouvernement de Syrie. Il faut autoriser les populations déplacées d’Afrin, de Tal Abyad et de Serekeniye en 2018, octobre 2019 et décembre 2024 par l’occupation turque à récupérer leurs maisons dans une nouvelle Syrie.

Les récentes déclarations d’Abdullah Öcalan et du PKK ouvrent une nouvelle perspective pour un dialogue élargi, qui pourrait contribuer à la stabilité en Turquie mais aussi en Syrie. En avançant vers une solution politique, elles ôtent à la Turquie un prétexte pour poursuivre ses attaques contre les Kurdes de Syrie. Il est donc essentiel de saluer cette initiative et de la soutenir activement afin qu’elle aboutisse.

Le Président Macron a organisé le 13 février dernier une conférence internationale sur la Syrie. Les représentants de l’AANES auraient dû y être conviés. Le ministre des Affaires étrangères s’y était engagé à l’Assemblée nationale en réponse à la question d’actualité de Danielle Simonnet. Mais le porte-parole du ministère est revenu sur cette promesse, au motif que « c’est une conférence ministérielle (…) avec des invitations qui ont été lancées à des ministres des affaires étrangères donc à des gouvernements donc les kurdes ne sont pas dans cette conférence », alors même que différentes ONG ont pu y participer. Celles et ceux qui ont combattu Daesh hier et ont construit dans le Nord-est de la Syrie une démocratie exigeante, respectueuse du pluralisme et féministe ne sont pas un « problème » pour la Syrie de demain, mais la solution. La France doit faire entendre son soutien à la participation des FDS aux discussions en cours en Syrie, que le dialogue inter syrien n’exclue aucune communauté et région et se déroule sans ingérence extérieure notamment de la Turquie.

Les signataires :

Les député.es Danielle Simonnet (groupe Écologiste et social, co-fondatrice de l’APRÈS), Thomas Portes (groupe La France Insoumise, président du groupe d’études Kurdes à l’Assemblée nationale)

Les conseiller.es de Paris Geneviève Garrigos (Parti Socialiste) Jérôme Gleizes (Écologistes)

La conseillère départementale Lamya Kirouani (Parti communiste)

Et Dylan Boutiflat (secrétaire national du PS aux relations internationales).