Pendant des siècles, le secret de la pierre gravée de 2 mètres de haut dans le passage de Kelashin, l’une des régions les plus escarpées des montagnes Zagros, était inconnu.
Pendant des siècles, le secret de la stèle de Kelashin [« pierre bleue » ou « stèle bleue » en kurde, « kel » désignant habituellement une stèle funéraire], pierre gravée de 2 mètres de haut dans le passage de Kelashin, l’une des régions les plus escarpées des montagnes Zagros, était inconnu. Le monument se trouvait à 3 000 mètres d’altitude et s’appelait la pierre Kelashin. Il a gardé son secret plus de cent ans après sa découverte en 1828. En 1961, l’inscription était entièrement déchiffrée et une information intéressante apparaissait : La pierre était maudite.
Le Kurdistan a connu une avalanche d’explorateurs, d’archéologues et de voyageurs du début du XIXe siècle au milieu du XXe siècle. Les antiquités d’anciennes civilisations de ces terres, berceaux de l’histoire, ont suscité un vif intérêt de la part des Occidentaux. Cette période était aussi une période de grands pillages. De nombreux objets historiques ont été passés en contrebande du Kurdistan en Europe.
Friedrich Eduard Schulz, orientaliste et archéologue allemand, était l’un des hommes qui s’intéressait beaucoup aux objets historiques du Kurdistan au XIXe siècle.
Schulz était un jeune professeur de philosophie de l’Université Giessen en Allemagne et était considéré comme l’un des scientifiques les plus prometteurs de l’époque. Schulz se voit confier par l’orientaliste français Antoine-Jean Saint-Martin une mission d’étude au Moyen-Orient en raison de son intérêt pour les sciences orientales et d’une invitation de Paris.
Schulz est arrivé au Kurdistan en 1826 et a commencé les fouilles à Van et ses environs. Dans ces fouilles ont été découvertes les ruines de Behura, ancienne ville de l’âge de bronze. Les efforts de Schulz ont permis de découvrir les premières découvertes sur l’Urartus.
Schulz partit en voyage en Iran et au Kurdistan d’Est (Rojhelat) en 1828-1829. Au cours de ce voyage, il a découvert le monument en pierre des Urartus dans le passage de Kelashin. Schulz a travaillé sur l’inscription sur la pierre Kelashin et les a toutes documentées, puis est passé à Başkale.
Schulz a parlé avec les villageois et pris des notes. Le Mir Nurullah Bey d’Hakkari a eu vent de sa visite et Schulz a été tué sur ordre de Nurullah Bey, soupçonné d’être un espion ottoman. La plupart des notes de Schulz ont été détruites.
Nurullah Bey a participé à l’insurrection de Bedirhan en 1847. Après l’échec de l’insurrection, il s’est rendu en 1849 et est décédé plus tard en Crète, où il a été exilé.
Le spécialiste britannique en assyriologie, Sir Henry Crexwicke Rawlinson faisait partie des explorateurs voyageant au Kurdistan au cours de la même période. Rawlinson est arrivé du côté irakien à Kelashin, mais il faisait très froid et la pierre de Kelashin était gelée. Rawlinson resta quelque temps dans la région et tenta plusieurs fois d’accéder à l’inscription sur la pierre de Kelashin, mais en vain.
Après le retour de Rawlinson de Kelashin les mains vides, l’orientaliste allemand R. Rosch se dirigea vers la pierre de Kelashin. Rosch est arrivé à Kelashin avec un groupe de 38 personnes, mais n’est jamais revenu. Rosch et ses compagnons ont été trouvés abattus et volés.
Après cet incident, les archéologues occidentaux ont eu du mal à trouver des guides pendant longtemps. Les habitants de la région savaient de leurs ancêtres que la pierre Kelashin était maudite, et ils pensaient que cela apportait un malheur à tous ceux qui la touchaient. Les inscriptions ne pouvaient pas être lues et déchiffrées. C’était comme si la pierre Kelashin se protégeait.
En 1857, l’orientaliste allemand Otto Blau entreprit également d’explorer la pierre Kelashin. Blau arriva accompagné d’une véritable armée et il construisit un moule pour copier les inscriptions de la pierre Kelashin. Blau pensait avoir accompli un grand exploit, mais la moulure a éclaté sur le chemin du retour. Blau envisagea de retourner sur la pierre Kelashin pour un nouveau moule, mais fut envoyé à Trabzon avec une lettre urgente.
Un autre orientaliste allemand, Waldemar Bleck, souhaitait se rendre à la pierre de Kelashin en 1891, mais fut attaqué par des cavaliers kurdes en chemin et réussit à peine à sauver sa vie. Dans cette attaque, les 15 compagnons de Bleck ont été tués.
En 1892, Bleck se rendit à la pierre Kelashin en compagnie d’un autre orientaliste Lehmann-Haupt, mais le temps ne leur permit pas de lire l’inscription. La pierre Kelashin était gelée. Par la suite, Bleck fut à nouveau attaqué et ne retourna jamais dans le passage où se trouve la pierre de Kelashin.
Le secret de la pierre dévoilé
Jusqu’à l’archéologue américain George Cameron en 1951, très peu de gens montèrent à nouveau dans le passage de Kelashin et ils échouèrent tous comme les autres. Cameron fut le premier de l’histoire à copier les inscriptions avec succès. Il couvrit tous les écrits avec du latex et les envoya à l’Université du Michigan pour inspection.
La recherche des inscriptions a pris plus de 10 ans. Les scientifiques qui ont effectué des recherches sur les inscriptions sur la pierre Kelashin ont été confrontés à une chose intéressante : le monument qui se dressait à 3 000 mètres d’altitude pendant 2760 ans était maudit.
Le monument fut érigé par Ishpuinis, roi d’Urartu, en 802 avant notre ère Le roi revenait de la conquête de la ville de Musasir, qui abrite le temple du dieu de la guerre Haldi, lorsqu’il franchit le passage de Kelashin. Un côté du monument était écrit en urartou, l’autre en assyrien et racontait l’histoire de la conquête de Musasir et de l’ampleur du sacrifice fait au nom de Haldi.
Sentences infligées au monument
Le roi Ishpuinis avait maudit le monument avec ces mots :
« Quiconque détruit ce monument,
celui qui lui fait du mal,
celui qui l’enterre sous terre,
celui qui le jette dans l’eau,
celui qui le cache au soleil,
que la colère d’Haldi soit sur lui »
Après que Cameron ait dévoilé le secret de la pierre, un archéologue italien s’est rendu dans le passage de Kelashin en 1976 avec un grand groupe et a travaillé sur le monument. Mais ce voyage n’a rien révélé de nouveau.
La pierre Kelashin a été prise par l’armée iranienne et emmenée dans la ville kurde d’Urmiye après le début de la guerre Iran-Irak en 1980. Le monument est exposé au musée archéologique d’Urmiye depuis la fin de la guerre.
Certains pensent que le monument qui existait jusqu’en 1980 avait finalement perdu ses pouvoirs. D’autres pensent que c’est maintenant entre les mains de ceux qui le protégeraient. D’autres croient encore que la malédiction de la pierre reviendra et qu’elle sera renvoyée au passage de Kelashin.