« Nous, femmes kurdes, quand nous chantons, nous pleurons.
Nos enfants sont morts, nous sommes exilés, nos malheurs sont sans fin. »
« Les Etats qui se sont partagés les régions peuplées par les Kurdes après la première guerre mondiale, notamment la Turquie, l’Iran, l’Irak et la Syrie, ont essayé, soit de contrôler, soit d’anéantir, souvent de manière extrêmement violente, l’identité, la langue et la culture de ces populations. En Turquie d’aujourd’hui, 80 ans après la fondation de la République, il existe plus que jamais des gens pour se dire Kurdes. Il semble même le mot kurde et les expressions « cultures kurdes », « traditions kurdes », « musiques kurdes » ou encore « histoires kurdes » se chargent aujourd’hui de nouveaux sens. Ces dernières décennies,beaucoup de Kurdes ont connu le chemin de l’exil, soit vers les villes environnantes, soit vers les grandes métropoles turques, soit encore en Europe ou aux États-Unis. Ces départs sont le résultat de déplacements forcés de population par l’armée turque ou sont parfois un exode lié à des raisons économiques.
C’est dans ce contexte, et en choisissant les conditions d’exil, que je me suis penchée sur le rôle des lamentations des femmes dans la culture kurde aujourd’hui.
J’ai choisi de travailler uniquement sur les Kurdes de Turquie qui ont été obligés de quitter leur village et ont fui vers d’autres régions de la Turquie.Ces populations ont ainsi été déplacées de force à l’intérieur du pays, mais n’ont pas obtenu de statut de réfugiés. Ce choix laisse de côté les Kurdes des autres pays, et ceux de la diaspora internationale. »
La thèse universitaire d’Estelle Amy de la Bretèque (soutenue en 2010 à l’université Paris Ouest Nanterre). A lire ici
Estelle Amy de la Bretèque est une chercheuse au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) en France.
Image via Agos, des femmes kurdes pleurent sur les tombes de leurs enfants tués dans le massacre de Roboski en décembre 2011.