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FRANCE. Les Kurdes victimes de l’injustice française

PARIS – Cela fait 8 ans jour pour jour, Sakine Cansiz, Fidan Dogan et Leyla Saylemez, 3 militantes kurdes, ont été assassinées à Paris. Assez vite, de nombreux éléments de l’enquête ont pointé du doigt les services secrets turcs et un suspect arrêté. Mais la justice française a trainé l’affaire pendant plusieurs années car dévoiler une affaire d’assassinat politique impliquant un État étranger, en l’occurrence la Turquie, n’était pas anodin.
 
L’assassin présumé, Omer Guney est mort en prison en décembre 2016 et certains ont prié pour que l’affaire soit classée sans suite. Mais les familles des victimes ont porté plainte. Ainsi, un nouveau juge anti-terroriste fut saisi en mai 2019 et une information judiciaire a été ouverte pour « complicité d’assassinats en relation avec une entreprise terroriste » et « association de malfaiteurs terroriste criminelle ». Depuis, c’est de nouveau silence radio.
 
La France espère que le temps aura raison des Kurdes qui cesseront de demander que la justice soit rendue aux trois militantes tuées au coeur de Paris le 9 janvier 2013. Mais les Kurdes restent mobilisés et descendent dans les rues de Paris à chaque date anniversaire de l’assassinat politique visant trois femmes il y a 8 ans.
 
Cette année, en raison des restrictions dues à la pandémie du coronavirus, les Kurdes n’ont pas pu faire une manifestation centrale à Paris. Ils ont défilé par milliers dans de plusieurs villes françaises, dont Paris, Bordeaux, Strasbourg, Toulouse, Marseille, Rennes… et ont demandé à la France de juger le dirigeant turc, Erdogan, pour le meurtre de Sakine Cansiz, Fidan Dogan et Leyla Saylemez. A Paris, il y avait environs 5000 manifestants, dont de nombreux élus, représentants de partis politiques et d’organisations de la société civile.
 
Retour sur un crime d’Etat commis sur le sol français
 
Le 9 janvier 2013, les militantes kurdes Sakine Cansiz, Fidan Dogan (Rojbîn) et Leyla Saylemez ont été abattues de plusieurs balles dans la tête dans les locaux du Centre d’Information du Kurdistan, à Paris.
 
Le 23 janvier 2017 devait débuter le procès aux Assises d’Ömer Güney, le présumé coupable. Le suspect, qui était lié aux services de sécurité turcs à Ankara selon les informations obtenues par les avocats des familles des victimes, est décédé subitement en prison le 17 décembre, un mois avant le début du procès.
 
Les trois femmes ont été ciblées et assassinées pour leurs activités politiques au nom du peuple kurde. Sakine était une militante de longue date et membre fondatrice du PKK. Elle a passé de nombreuses années en prison dans des conditions terribles et a été torturée à la prison de Diyarbakir dans les années 1980 après le coup d’État militaire. Elle a dirigé le mouvement de protestation à l’intérieur de la prison et, après sa libération, s’est jointe à la lutte armée pour la libération du Kurdistan. Elle a été une puissante force d’inspiration pour le mouvement des femmes kurdes, qui demeure à ce jour un symbole d’espoir pour les femmes du Moyen-Orient. Fidan et Leyla étaient également des activistes dévouées à la cause kurde.
 
Une nouvelle enquête relancée autour du rôle des services secrets turcs
 
En mars 2018, les familles des trois femmes assassinées ont déposé une plainte avec constitution de partie civile pour obtenir la reprise des investigations sur le rôle des services secrets trucs dans ce triple meurtre.
 
Un juge antiterroriste a été chargé en mai 2019 pour reprendre l’enquête sur l’assassinat en 2013 à Paris de trois militantes kurdes, à la demande des familles qui réclament d’approfondir la thèse de l’implication des services secrets turcs (MIT).
 
Qui sont les 3 femmes abattues ?
 

Sakine Cansiz
 
Cofondatrice du PKK (Parti des Travailleurs du Kurdistan), Sakine Cansız est née dans la province de Dersim en 1957. Après plusieurs années d’activité dans le mouvement de la jeunesse étudiante à Elazıg, elle rejoint en 1976 le mouvement révolutionnaire kurde.
Suite à sa participation au congrès du PKK, le 27 novembre 1978, la jeune femme est arrêtée à Elazıg et envoyée en prison avec un groupe d’amis. Soumise à de lourdes tortures dans la période ayant suivi le coup d’État militaire du 12 septembre 1980, elle n’est libérée qu’en 1991.
 
Après sa libération, elle poursuit ses activités militantes dans l’ouest et le sud du Kurdistan.
 
Après de longues années de lutte dans les montagnes du Kurdistan, Sakine Cansız va en Europe où elle prend la direction du mouvement des femmes kurdes. Figure pionnière du mouvement de libération kurde, elle a grandement contribué au renforcement des organisations kurdes au sein de la diaspora.
 
Fidan Dogan
 
Fidan Doğan est née en 1982, à Elbistan, dans la province de Maraş. Fille d’une famille d’immigrés, elle grandit en France.

Dès son enfance, elle se met en quête de son identité kurde. À partir de 1999, elle s’engage dans les organisations kurdes en Europe. À partir de 2002, elle travaille activement dans le domaine de la diplomatie. Elle devient représentante à Paris du Congrès national du Kurdistan (KNK).
 

Leyla Saylemez
 
Fille d’une famille originaire de Lice, dans la province de Diyarbakir, Leyla Saylemez est née dans la ville turque de Mersin où elle passe son enfance jusqu’à ce que sa famille déménage en Allemagne, dans les années 90. Après un an d’études en architecture, elle rejoint la lutte pour la liberté au Kurdistan et s’engage particulièrement dans les activités de la jeunesse kurde.