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Les politiques misogynes et la violence masculine au Kurdistan et dans le monde

A l’occasion de la Journée mondiale de lutte pour l’élimination des violences faites aux femmes, un collectif de femmes kurdes et turque réunies sous le nom « La plateforme révolutionnaire de lutte » a publié un communiqué dressant un tableau tragique des féminicides, des violences masculines et étatiques visant les femmes en Turquie et au Kurdistan. Elles déclarent qu’elles sont décidées à mettre fin à ces violences et prendre leur vie en main.

Voici le communiqué publié par la plateforme révolutionnaire de lutte:

« Les politiques misogynes et la violence masculine
 
Les femmes ont été acceptées, non seulement dans la Turquie d’AKP, mais presque dans toute l’histoire, dans la mesure où elles jouaient les rôles sexués qui leurs étaient réservés. Lorsqu’elles sont sorties des rôles sociaux qui leur étaient assignés et ont voulue tenir têtes à cette discrimination sexiste, elles ont été déclarées « ennemies ».
 
Le maintient de la femme dans les limites tracées ne se borne pas à son rôle de reproduction sociale. Dans la hiérarchie sociale, les femmes occupent également une place critique dans la transmission des codes idéologiques très importants pour le système. La bourgeoisie et ses représentants assument des rôles particuliers dans la militarisation de la société, en gardant en vie l’accumulation du chauvinisme et de la réaction historique. Garder les masses de femmes sous contrôle pour répondre à ce besoin acquiert naturellement une importance et une signification particulières.
 
La femme est chargée de missions importantes telles que la garde de la famille, faire la gendarme de l’homme, et l’éducation des enfants avec des valeurs qui garantiront la «survie» du système.
 
Pour cette raison, le rôle de la femme est « vital ». Rester là où elle est enchaînée, resserrer ses chaînes à chaque fois qu’elles se desserrent est une d’une importance vitale, et c’est le cas de tous les capitalistes et États du monde.
 
La crise secouant le culte de la domination des hommes, l’institution familiale et la crise des relations habituelles entre les deux sexes ne se trouvent pas seulement dans des pays comme la Turquie, elle secoue l’ensemble du système capitaliste impérialiste.
 
Bien qu’il y ait des différences, le problème est le même au niveau mondial. Mais historiquement, à tous les égards, l’un des problèmes des femmes à partir d’une crise sociale globale se transformant en triangulation de la crise dans un pays comme la Turquie s’aggrave davantage avec la crise. Cela devient de plus en plus chaotique en combinant la religion de l’AKP et l’accumulation réactionnaire historique avec son utilisation comme outil idéologique.
 
Des scènes apocalyptiques d’une Turquie balayée par le fascisme d’AKP-MHP
 
Officiellement, une hausse de 1400 % de meurtres de femmes, et 700 % de maltraitance d’enfants ont été constatés en Turquie. Le nombre de dossiers de harcèlement sexuel portés devant les tribunaux au cours des 15 dernières années est de 200 000.
 
Depuis l’arrivée de AKP au gouvernement, c’est-à-dire il y 18 ans, l’AKP, qui tente de construire un nouveau mode de vie et de façonner la société à travers les femmes, tente de faire avancer les politiques discriminatoires, répressives et sexistes.
 
Son objectif principal était la soumission des femmes et de leur imposer une obéissance absolue, de les objectiver en les dépossédant de leur identité, de punir toutes les autres attitudes et comportements avec des formes violentes, et d’essayer de répandre cela dans la société.
 
Au début de son pouvoir, l’AKP avait adopté une politique plus modérée concernant les droits des femmes afin d’être bien vu par la société.
 
Avec une loi promulguée en 2003, il a instauré le principe de l’égalité de rémunération entre hommes et femmes en interdisant la discrimination salariale liée au genre. En 2005, le viol dans le cercle familial a été considéré comme un crime.
La définition du « consentement » a été supprimée dans les abus sexuels sur enfants et la peine a été aggravée.
 
À partir de 2007, « l’importance des femmes pour la survie de la famille » a commencé à être soulignée. En 2011, le Ministère responsable de la femme a été rebaptisé en Ministère de la famille et des politiques sociales. Mais l’AKP ne s’est pas contenté de cela, il l’a transformé en ministère de la Famille, du Travail et de la Sécurité sociale en 2018.
 
À partir de 2016, le gouvernement a mis en place des règlements afin de légitimer le viol des enfants par le mariage en disant qu’il y a des « victimes de mariage» (des hommes qui se retrouvent en prison pour s’être mariés avec des filles mineures).
 
L’AKP attend l’occasion pour faire passer la loi qui amnistiera 10 000 hommes dans les prisons, pour avoir séquestrer et violer les enfants, D’après les données du ministère de la Justice, au cours des 10 dernières années, 145 939 enfants ont été recensés comme ayant étaient victimes de « rapports sexuels avec des mineurs ».
 
L’AKP a créé la « Commission du divorce » au Parlement. Afin de renforcer l’institution familiale, il a pris une série de mesures telles que rendre le divorce difficile, limiter dans le temps le droit à la pension alimentaire pour la femme, essayer d’empêcher les femmes d’avoir leur part de 50 % du régime de propriété, chercher à placer le service d’orientation et de conseil psychologique pour la famille sur une base religieuse qui a été mis en pratique d’ailleurs.
 
Les politiques et les actes qui ciblent les LGBT, accompagnées de discours définissant l’homosexualité comme une maladie, ont fait en sorte que les hommes assassinent les transsexuelles comme le faisait Daech.
 
Après avoir lutté pendant des années, les femmes ont réussis à mettre à l’ordre du jour « La Convention d’Istanbul », mais par la suite, l’ AKP, avec sa politique réactionnaire, discriminatoire et misogyne, a commencé à empêcher la mise en œuvre de la Convention d’Istanbul et à annoncer qu’il ne ratifiera pas cette convention.
 
Les femmes : une dynamique de résistance qui ne peut être réduite au silence
 
Que ce soit en Turquie ou au Kurdistan, ils ont élargi leur haine qu’ils nourrissaient envers les femmes qui ne cessent de lutter pour leurs droits, malgré le gouvernement fasciste, à toutes les femmes qui osent dire « je ». Le massacre des femmes est devenu une politique officielle qui inclut toutes les femmes qui violent les limites établies par l’ordre.
 
Encore une fois, l’AKP défie les femmes en disant que « celles qui franchissent les limites seront tuées ». La « Convention d’Istanbul » qui est restée lettre morte car aucune application n’a été effectuée, est une issue importante dans cette lutte acharnée.
 
C’est une lutte sérieuse pour faire en sorte que la convention qui assure la sécurité de la vie et la protection relatives aux femmes qui sont victimes de violence et de viol, aux enfants qui sont maltraités, violés, aux segments de la société qui sont victimes de discrimination en raison de leurs orientations sexuelles ou de leurs différences ethniques … Il est évident que cela sera possible avec le changement social.
 
L’AKP dit : « cette convention brise l’unité familiale, expose les hommes à la persécution de la pension alimentaire. De plus, les femmes se tournent vers le divorce ou d’autres choses parce qu’elles obtiennent le pouvoir du contrat, et c’est la principale raison de leur meurtre. » On parle de « perturber l’unité familiale » ou de « provoquer des meurtres ». Pour cette raison, ils protègent les meurtriers des femmes avec une politique d’impunité. Même le processus de poursuite des meurtriers après les meurtres délibérés et brutaux de femmes exige de grandes luttes. Même si les faits sont si clairs, ils discutent maintenant de se retirer de la convention qu’ils n’ont pas encore mise en œuvre.
 
Il a été convenu que cette convention est basée sur la philosophie selon laquelle la violence à l’égard des femmes est le résultat de l’inégalité entre les hommes et les femmes et de la discrimination à l’égard des femmes. Cette philosophie est le point central de l’approche hostile du pouvoir et des cercles fascistes réactionnaires, qui ne peuvent tolérer l’égalité des femmes avec les hommes et considèrent les femmes comme une esclave qui doit seulement obéir à l’homme.
 
Il s’agit d’amener la définition de la violence contre les femmes au-delà de la violence physique visible au plan de la violence économique, sexuelle et psychologique. La Convention étend la portée de la lutte contre ces formes de violence avec quatre approches de base consistant en « politiques de prévention, de protection, de poursuites et de soutien ».
 
Les femmes qui veulent décider de sa propre vie deviennent une cible à abattre.
 
Rien qu’en octobre dernier, 27 femmes ont été assassinées. Ces politiques, qui ont ouvert la voie au meurtre de femmes et au viol d’enfants dans un enfer où le féminicide a augmenté de 1 400%, sont soutenues par la justice avec des décisions qui protègent les auteurs avec le bouclier du « bon comportement ».
 
Les femmes se sont rebellées contre le fascisme de l’AKP-MHP, ne se sont pas tues, n’ont pas obéi. Elles ont fait reculer l’État fasciste quand celui-ci a tenté de faire passer de lois réactionnaires, qu’il a voulu se retirer de la Convention d’Istanbul, et sont devenues la principale dynamique de résistance.
 
La résistance inexorable du peuple kurde, des femmes et les « politiques de guerre spéciales »
 
L’AKP est dans une attaque désespérée contre le peuple kurde, ses représentants politiques, les institutions et les militantes depuis le tout début. Le niveau de cette agression a augmenté ces dernières années. Le HDP, le DBP, leurs coprésidents, les parlementaires, les co-présidents municipaux et les femmes du mouvement des femmes kurdes ont été arrêtés et emprisonnés.
 
La misogynie et les politiques sexistes semblaient si dominantes que le premier travail des administrateurs nommés par l’AKP dans les municipalités du HDP a été de fermer les institutions pour femmes au sein des municipalités, les maisons de vie établies contre la violence, et d’annuler les projets produits pour autonomiser les femmes.
 
L’AKP, qui a fermé plus de 50 institutions de femmes kurdes sous son règne, s’est tournée vers les organisations de femmes qui luttent contre la violence masculine en 2020. Il a déclaré une guerre systématique contre les organisations de femmes qui défendent les droits des femmes et des enfants, qui s’efforcent de sensibiliser la société aux opérations de corruption, aux meurtres de femmes et à la violence. Même participer aux 8 mars et 25 novembre à la lutte contre le féminicide et la violence a été considéré comme un crime.
 
L’AKP a concentré l’agression massive contre le peuple kurde sur les femmes et les enfants sous le nom de « politiques de guerre spéciales». L’augmentation du harcèlement et des viols des femmes et des enfants dans les villes kurdes, ainsi que les décès suspects de femmes ont augmenté au-delà de toute estimation. Les crimes de harcèlement et de viol commis par des sergents spécialisés travaillant dans les provinces kurdes à l’encontre des enfants et des femmes kurdes ont été couverts par des décisions d’impunité protégeant les auteurs.
 
Musa Orhan, qui a poussé Ipek Er [une jeune Kurde de 18 ans] à se suicider après l’avoir violée, a été libéré. Le sergent violeur Musa Orhan, qui s’était fait photografié en faisant un signe des Loups Gris fascistes, a été relaché. Sur ces terres, o* il y a des années, un gouverneur turc avait dit, au sujet des femmes combattantes kurdes: « au lieu d’aller dans les montagnes ou de lancer des pierres, elles devraient se prostituer », les hommes comme Musa Orhan sont libres tandis que ce sont des femmes comme Ipek Er qui se suicident.
 
Le bloc AKP-MHP qui est porte-parole du système patriarcal, de la bourgeoisie veut enfermer les femmes à la maison, les enchaîner à la famille, les empêcher de décider de leur vie, de leur avenir. Il veut barrer la route à la lutte des femmes pour leurs droits et libertés. C’est pourquoi ce bloc travaille avec les tribunaux qui libèrent les meurtriers des femme, des casernes militaires qui humilient les femmes, avec la rhétorique masculine de ceux qui sont au sommet de l’État.
 
Le système dominé par les hommes oblige les femmes qui brisent les frontières à obéir, dissolvant toutes sortes de réactions et d’agressions afin de les dresser. Ils sont conscients que la liberté relative que les femmes acquièrent menace la famille qui forme la base du système, tout le système réactionnaire conventionnel de valeurs, et donc le système lui-même.
 
Nous briserons les frontières, ils ne pourront pas nous en empêcher !
 
Ils savent que la force de la femme est immesurable et ont peur que cette force prenne le dessus sur le système.
 
Quoi qu’ils fassent, ils ne pourront pas empêcher les développements sociaux vécus, la recherche de libération des femmes ; elles feront face à cette population de fascistes.
 
Nous savons que nous ne pouvons pas ouvrir la voie à la liberté sans viser la famille, les relations de production capitalistes qui dessinent les relations l’exploitation et l’oppression, et la propriété privée dont elle prend racine et l’État bourgeois-fasciste.
 
Nous éradiquerons cet ordre et toute réaction qui maintient cet ordre en vie alors que nous parlons de notre propre destin, émettant des décrets en notre nom pour abattre les murs de cellules construits autour de nous et faire de nous la cible de tous les réactionnaires aussi vieux que l’histoire!
 
Aucune femme qui comprendra l’importance de la liberté, ne l’abandonnera facilement !
 
L’histoire du Rojava nous à démontrer que la révolution féminine est une force et un appel puissant pour toutes les femmes. Nous devons porter cette révolution dans tous les domaines et nous devons la développer de façon originale.
 
Sur le chemin de notre liberté, l’unité de la camaraderie des femmes qui transcende les frontières sera la lutte politique radicale du mouvement des femmes unies. La clé de la lutte de libération des femmes réside dans les organisations politiques et militaires qui assureront une position claire contre tout type de pouvoir fasciste capitaliste et réactionnaire, et le détruiront. Les femmes n’ont pas d’autre alternative que de renforcer la lutte commune. L’alternative réside dans la lutte organisée de la femme.
 
Dans tous les coins du monde, du Liban au Chili, du Soudan à la Pologne, de la Grèce au Rojava, la force du poing serrer des rébellions libératrices, est notre force.
 
Nous voyons les cris des femmes s’élèveront des maisons, des rues, des places et des montagnes s’uniront et se transformeront en une tempête qui nettoiera l’inégalité dans le monde.
 
Ce dont nous avons besoin, c’est une orientation persistante, une organisation décisive, une ligne d’action permanente/irréversible et la volonté de gagner !
 
Aucune femme qui comprendra la valeur de la liberté ne l’abandonnera facilement ! »
 
La plateforme révolutionnaire de lutte
7 novembre 2020