L’ancien secrétaire d’État américain Henry Kissinger, dont la realpolitik a façonné la politique étrangère polarisée des États-Unis au XXe siècle pendant la guerre froide, est décédé à l’âge de 100 ans. L’approche de Kissinger à l’égard des Kurdes fait partie de son héritage notoire.
Henry Kissinger, le tristement célèbre secrétaire d’État américain pendant la guerre froide, est décédé mercredi à son domicile du Connecticut, à l’âge de 100 ans.
Conseiller clé des présidents américains Richard Nixon et Gerald Ford, Kissinger s’est fait connaître sous l’administration Nixon. L’approche de Kissinger envers les Kurdes fait partie de son héritage notoire.
Au cours des huit années allant de 1969 à 1976, lorsque Henry Kissinger a façonné la politique étrangère de Nixon et Ford en tant que conseiller à la sécurité nationale et secrétaire d’État, les conséquences des actions de Kissinger ont entraîné la mort d’environ trois à quatre millions de personnes, selon Greg Grandin, historien à l’Université de Yale.
Il s’agissait à la fois de « crimes commis par commission », comme au Cambodge et au Chili, et d’actes d’omission, comme l’approbation de la violence indonésienne au Timor oriental, le soutien aux actions du Pakistan au Bangladesh et le début d’une regrettable tradition américaine d’utilisation puis d’abandon des Kurdes.
Malgré les controverses, notamment son implication dans les coups d’État anticommunistes en Amérique latine, il reçut le prix Nobel de la paix en 1973.
L’influence de Kissinger s’est étendue au Moyen-Orient, notamment dans la région kurde dans les années 1970. Face à l’alliance irako-soviétique, les États-Unis considéraient les Kurdes comme un atout stratégique. Le contexte a été façonné par le récent traité d’amitié entre l’Irak et l’Union soviétique, signé le 9 avril 1972. En soutenant les Kurdes, on pensait que l’Irak et les Soviétiques seraient préoccupés, réduisant ainsi la probabilité d’une action contre les voisins de l’Irak.
Les Kurdes irakiens ont ensuite reçu un soutien militaire de l’Iran, alors dirigé par le Shah allié des États-Unis, ainsi qu’une aide financière et en armement substantielle des États-Unis. Ce soutien s’est toutefois avéré temporaire et les États-Unis ont brusquement retiré leur aide après l’affaiblissement du régime baasiste.
Suite au retrait de l’aide américaine, une vague de violence s’est propagée dans les régions kurdes d’Irak, le régime baasiste attaquant systématiquement la population kurde, entraînant la mort de centaines de milliers de civils. Selon des sources kurdes, quelque 182 000 civils kurdes, pour la plupart non armés, ont été assassinés.
Suite aux critiques de la position de Kissinger, il a défendu cette perception de trahison lors d’un témoignage au Congrès, déclarant : « L’action secrète ne doit pas être confondue avec le travail missionnaire ».