SYRIE / ROJAVA – Le commandant kurde, Mazloum Abdi déclare que Damas aborde positivement la question de la décentralisation réclamée par de nombreux peuples de la Syrie.
Le commandant en chef des Forces démocratiques syriennes (FDS) a confirmé l’attitude positive de Damas à l’égard de la décentralisation, précisant que des discussions sont en cours concernant la modification de la Constitution et que les Forces démocratiques syriennes et les Forces de sécurité intérieure (FSI) seront intégrées au ministère de la Défense. Il a également appelé les Kurdes d’Afrin à se préparer à un retour organisé.
Dans une émission spéciale sur Ronahi TV, le commandant en chef des Forces démocratiques syriennes (FDS), Mazloum Abdi, a évalué la situation politique et militaire, les récentes réunions avec la délégation américaine et le gouvernement de transition, la situation des déplacés et l’intégration des FDS dans l’armée syrienne.
Voici l’interview menée par Ronahi TV :
Vous avez rencontré une délégation américaine, accompagnée de l’envoyé spécial des États-Unis en Syrie, Tom Barrack. Quels ont été les sujets abordés lors de cette rencontre ?
La visite de M. Tom Barrack et du commandant en chef du Commandement central américain (CENTCOM) a été importante. Ils ont exprimé leur soutien à la coopération avec les FDS et à la lutte contre Daech, ainsi qu’au dialogue entre nous et Damas. Nous avons discuté de la situation en Syrie, de la levée des sanctions du César Act et de la mise en œuvre de l’accord du 10 mars. Par ailleurs, nos rencontres avec Damas ont stagné ces derniers temps ; nous avons donc discuté des moyens de les renforcer et de les accélérer, ainsi que de la lutte contre le terrorisme aux côtés du nouveau gouvernement syrien. Notre réunion sur ces questions a été fructueuse, et elle a été reflétée lors de nos rencontres avec le gouvernement de transition le lendemain, constituant ainsi une base pour ces rencontres.
Une délégation officielle s’est rendue à Damas et a rencontré des responsables du gouvernement de transition. Quels ont été les sujets abordés lors de cette réunion ?
On peut dire que nous avons eu une série de réunions avec le président Sharaa et le ministre des Affaires étrangères Shibani au cours des six derniers mois, et nous avons évalué la situation. Pourquoi l’accord n’a-t-il pas progressé autant ? L’autre question est de savoir comment nous allons faire progresser le processus de dialogue à partir de maintenant. Nous avons discuté très franchement, et c’est pourquoi la réunion a été fructueuse. Nous sommes tombés d’accord sur de nombreuses questions fondamentales, et bien sûr, nos délégations et la leur se réuniront maintenant pour la mise en œuvre.
Vous avez mentionné être tombés d’accord sur certains points. Sur quels points et questions avez-vous trouvé un consensus avec le gouvernement de transition jusqu’à présent, notamment dans le cadre de l’Accord du 10 mars ?
Notre rencontre avec le ministre de la Défense et le directeur du renseignement a été l’une des avancées les plus significatives. Nous avons pris la décision d’appliquer un cessez-le-feu global sur tous les fronts. Ce cessez-le-feu est l’une des dispositions fondamentales de l’accord du 10 mars. Malheureusement, nous avons récemment été témoins de nombreuses violations, ce qui a conduit à l’ingérence de puissances extérieures dans nos affaires intérieures. L’important est de poursuivre ces rencontres au plus haut niveau. Nous avons également abordé des questions telles que la constitution, l’armée et la sécurité. Bien que nous ne soyons pas totalement d’accord sur certains points, nous avons compris nos points de vue respectifs et sommes parvenus à un consensus préliminaire sur certains points. Sur cette base, nos réunions peuvent se poursuivre.
Dans le cadre de ces discussions, quelles sont vos prochaines étapes pratiques ?
Nous avons déjà exprimé notre volonté d’une Syrie décentralisée et nous en avons discuté. Si nous ne sommes pas d’accord sur la terminologie, nous souhaitons néanmoins nous mettre d’accord sur le fond. Il existe une convergence de vues sur la question de la décentralisation. Une délégation de l’Administration autonome se rendra dans les villes syriennes pour examiner le nouveau système et présenter ses points de vue sur la décentralisation et les administrations locales. La rédaction de la constitution sera en cours, mais nous souhaitons qu’elle soit amendée. Certaines dispositions de l’Accord de mars ne figurent pas dans la nouvelle constitution, et les amendements ne sont pas contestés. Il existe une convergence de vues positive sur cette question, et nous avons fait un pas en avant.
Participerez-vous à la modification de la constitution ?
De nombreuses mesures seront prises ensemble. Un rapprochement est en cours avec les autorités syriennes, et certaines doivent être prises. Elles accordent une grande importance à l’aspect militaire et considèrent l’intégration des Forces démocratiques syriennes à l’armée syrienne comme une unité du territoire syrien. Pour notre part, nous ne nous y opposons pas, mais cela doit reposer sur une Syrie décentralisée. Nous pensons que des progrès seront réalisés dans la révision de la Constitution dans les prochains mois.
Quelles sont vos propositions à l’armée syrienne concernant l’intégration des Forces démocratiques syriennes ? Comment ces forces peuvent-elles être intégrées à l’armée syrienne ?
Lors de la signature de l’accord du 10 mars, ce sujet a été au cœur des discussions. Nous avions alors conclu un accord pour l’intégration des Forces démocratiques syriennes à l’armée. Nous l’avons réitéré, et Ahmed al-Sharaa s’est montré ouvert à cette question, tout comme eux, à nos opinions. Nous avons accepté de rejoindre l’armée, mais bien sûr, la délégation tiendra des réunions pour discuter des détails. Pour nous, l’essentiel est de ne pas gaspiller nos efforts et notre travail. Nous devons obtenir la place que nous méritons au sein de l’armée, renforcer l’armée syrienne et apaiser les craintes de notre peuple. Bien entendu, chacun souhaite bénéficier de cette expérience. Le ministre de la Défense a également clairement indiqué qu’il avait besoin de l’expérience des Forces démocratiques syriennes, et un accord a été trouvé à ce sujet. Notre délégation militaire se rendra prochainement au ministère de la Défense pour discuter de cette question.
Comment la question de la sécurité intérieure a-t-elle été soulevée dans cette discussion ?
Les Forces de sécurité intérieure devraient rejoindre les Forces de sécurité intérieure syriennes, à l’instar des Forces démocratiques syriennes. Nous avons également bénéficié de l’expérience de Cheikh Maqsoud, et ce processus va également commencer. Une délégation des Forces de sécurité intérieure se rendra à Damas avec les Forces démocratiques syriennes pour discuter de cette question. Ils en discuteront les détails.
Vous avez évoqué la guerre contre Daech, et des efforts sont actuellement déployés pour inclure Damas dans la coalition. Comment la lutte contre Daech se poursuivra-t-elle désormais ?
La coalition internationale nous a informés : « Nous avons officiellement demandé à l’État syrien de rejoindre la coalition contre Daech. » Damas, comme nous l’avons compris, accueille favorablement cette question. Nous avons également reçu des demandes lors de la réunion de Hassaké, que nous avons jugées pertinentes. Concernant la question des prisons, du camp d’al-Hawl et des familles de Daech, notre lutte contre Daech s’est jusqu’à présent limitée au nord et à l’est de la Syrie, où une unité conjointe était chargée de cette mission avec l’aide des forces américaines. Désormais, la lutte sera nationale et syrienne.
Le retour des personnes déplacées était l’une des principales dispositions de l’accord du 10 mars. Des centaines de milliers de personnes ont été déplacées d’Afrin, de Girê Spî et de Serê Kaniyê, et les habitants attendent leur retour. Où en est cette question dans les discussions ?
Ce sujet a été abordé lors de récentes réunions, et des problèmes de sécurité subsistent, mais l’heure est venue d’un retour organisé. La population est inquiète. Il a également été souligné lors de la réunion que l’heure du retour était venue. Dans les prochains jours, des travaux seront menés sur la question du retour de nos populations à Afrin, et les habitants d’Afrin doivent également s’y préparer. La situation à Girê Spî et Serê Kaniyê est également à l’ordre du jour. Par ailleurs, des personnes ont été déplacées de nos régions, et nous garantissons leur retour.
Des affrontements ont eu lieu dans les quartiers de Cheikh Maqsoud et d’Achrafieh à Alep, et des routes ont été bloquées. Comment avez-vous perçu cette situation, étant donné que vous étiez à Damas à ce moment-là ?
Chacun sait que ces deux quartiers ne représentent aucune menace pour Alep, et les allégations à ce sujet sont fausses. Le cessez-le-feu était donc un point important. Certaines parties se livrent à des provocations à Alep. Certes, elles ne sont présentes qu’à Alep, mais cela nous concerne tous. La solution idéale est la mise en œuvre de l’accord d’avril concernant Cheikh Maqsoud et Achrafieh. Je félicite également les habitants de Cheikh Maqsoud et Achrafieh pour leur résistance. Ils ont prouvé à tous leur capacité à se défendre.
Les droits des Kurdes ont-ils été discutés lors de la dernière réunion, car ils constituent l’une des dispositions de l’accord du 10 mars ?
Concernant la question kurde, les autorités de Damas affirment n’y voir aucun inconvénient. L’accord du 10 mars comportait cette disposition, mais elle n’a pas encore été mise en œuvre. L’important est sa mise en œuvre. La Constitution doit être amendée et préciser cela. Il y a aussi la question de la langue et de l’éducation, mais globalement, le rapprochement est positif. Cela doit également se faire par l’intermédiaire de la délégation kurde, qui doit se rendre à Damas pour discuter de cette question. Ils s’y préparent, et nous travaillons également à y parvenir rapidement.
Comment percevez-vous le rôle de la Turquie en Syrie, notamment lors de vos rencontres avec le gouvernement de transition ? Envisagez-vous une rencontre avec la Turquie ?
Nous avons abordé cette question lors de nos rencontres avec Damas. Les Syriens doivent régler leurs problèmes eux-mêmes. Il est vrai que certains pays jouent un rôle de garant, mais cette ingérence est inacceptable. La Turquie peut jouer un rôle positif ; son influence sur la Syrie est indéniable et ses intérêts doivent être pris en compte. Des canaux de communication sont ouverts entre nous et la Turquie, et nous espérons qu’ils se développeront davantage à l’avenir. (ANHA)