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TURQUIE. L’appel historique d’Abdullah Öcalan

Le leader du peuple kurde, Abdullah Öcalan, détenu depuis 1999 dans la prison d’Imrali, a pour la première fois envoyé un message vidéo. Appelant le PKK à renoncer aux armes, Öcalan a déclaré :
 
« Je crois en la force de la politique et de la paix sociale, non en celle des armes. Et je vous appelle à mettre en œuvre ce principe. »
 
Le message vidéo d’Öcalan a été publié par l’agence de presse kurde ANF. L’agence a également diffusé une nouvelle photo d’Öcalan. Sur cette image, on peut voir qu’en réponse à sa demande de création d’un « secrétariat », plusieurs détenus ont été placés à ses côtés.
 
Le message d’Öcalan intervient à la veille d’une cérémonie symbolique de reddition des armes par un petit groupe de membres du PKK au Kurdistan d’Irak, et s’inscrit clairement comme un appel direct à ce désarmement annoncé.
 
Dans son message, Öcalan souligne que « le mouvement du PKK fondé sur le déni de l’existence et l’objectif d’un État séparé, ainsi que la stratégie de guerre de libération nationale sur laquelle il s’appuyait, ont pris fin. » Il ajoute que l’objectif de « Paix et Société Démocratique » qu’il a appelé à réaliser le 27 février peut être atteint « à travers une perspective d’intégration positive. »
 
Il avertit également que la politique ne tolère aucun vide et appelle ses camarades à combler ce vide avec un programme intitulé « Paix et Société Démocratique ».
 
Voici le message d’Öcalan :
 
« Chers camarades,
Je considère comme un devoir éthique envers vous d’apporter, même de manière répétée, des réponses claires et créatives aux questions relatives à l’étape atteinte par notre mouvement de camaraderie communaliste, à la situation concrète, aux problèmes et aux solutions, à travers une lettre détaillée.
 
1. Je continue à défendre l’Appel pour la Paix et la Société Démocratique du 27 février 2025.
2. Je considère comme une réponse historique votre réaction positive, avec un contenu très pertinent, à travers le 12ᵉ Congrès de Dissolution du PKK.
3. L’étape atteinte doit être considérée comme précieuse et historique. Les efforts des camarades en lien de médiation sont tout aussi précieux et méritent reconnaissance.
4. Au terme de tous ces développements, j’ai préparé un Manifeste de la Société Démocratique qui doit être considéré comme une transformation historique. Ce manifeste est à même de remplacer avec succès le manifeste « La voie de la Révolution du Kurdistan » élaboré il y a près de 50 ans. Je suis convaincu qu’il porte un contenu social et historique non seulement pour la société kurde, mais aussi à l’échelle régionale et mondiale. Je n’ai aucun doute qu’il constitue un exemple réussi de la tradition des manifestes historiques.
5. Je dois clairement indiquer que tous ces développements ont eu lieu à la suite des discussions menées à Imrali. Un soin extrême a été apporté à ce que les échanges se fassent sur la base de la volonté libre.
6. L’étape atteinte nécessite de passer à la pratique par de nouvelles initiatives. Il est impératif de comprendre que cette étape et les pas à franchir sont d’une nature historique, de rester fidèle à leurs exigences et de progresser en conséquence.
 
 
1. Le mouvement du PKK fondé sur le déni de l’existence et visant un État séparé, ainsi que la stratégie de guerre de libération nationale sur laquelle il reposait, a pris fin. L’existence a été reconnue, et par conséquent, l’objectif principal a été atteint. C’est dans ce sens qu’il est dit que le mouvement a atteint ses limites. Le reste a été évalué comme répétitif et sans issue. Sur cette base, une autocritique approfondie se poursuivra.
2. Puisque la politique ne tolère aucun vide, ce vide doit être comblé par un programme intitulé « Paix et Société Démocratique », une stratégie de « politique démocratique », et une législation globale comme tactique fondamentale. Il s’agit d’un processus historique et décisif.
3. Dans le cadre du processus global, l’abandon volontaire des armes et le travail d’une commission établie légalement au sein de la Grande Assemblée nationale turque (TBMM) sont importants. Il est essentiel de faire preuve de vigilance et de sensibilité dans les étapes à franchir, sans tomber dans une logique stérile du type « toi d’abord ». Je sais que les pas déjà franchis ne seront pas vains. Je vois la sincérité et j’ai confiance.
 
On cherche donc à passer à des étapes plus pratiques et concrètes de déblocage. Voici les principales thèses que je propose :
 
1. Il est possible d’atteindre l’objectif de Paix et Société Démocratique, si chacun accomplit son devoir, à travers une perspective d’intégration positive. La conclusion à tirer de tout ce qui a été dit est la suivante :
2. Le PKK a renoncé à son objectif d’un État-nation, et avec cet abandon, il a également renoncé à sa stratégie principale de guerre, mettant ainsi fin à son existence. Il est attendu que cette étape historique soit portée encore plus loin.
3. Il est naturel que vous assuriez, de manière ouverte aux parties concernées et à l’opinion publique, l’abandon des armes, à la fois pour donner du sens à la Grande Assemblée nationale turque et à sa commission, et pour dissiper les doutes du public et tenir parole. La mise en place d’un mécanisme de désarmement fera avancer le processus. C’est une transition volontaire de la phase de lutte armée à celle de la politique démocratique et du droit. Ce n’est pas une perte, mais doit être considéré comme un gain historique. Les détails du désarmement seront définis et mis en œuvre rapidement.
4. Le DEM, qui siège sous le toit du Parlement, accomplira sa part du travail, avec les autres partis, pour assurer le succès de ce processus.
5. Quant à ma situation de liberté, qui figure comme condition indispensable dans tous les textes de décision : vous savez que je n’ai jamais considéré ma propre liberté comme un problème individuel. Philosophiquement, la liberté individuelle ne peut être séparée de la société. Plus l’individu est libre, plus la société l’est, et plus la société est libre, plus l’individu peut l’être. Il est évident que cette logique sera respectée.
 
Je crois en la force de la politique et de la paix sociale, non en celle des armes. Et je vous appelle à mettre en œuvre ce principe.
 
Les récents développements dans la région confirment clairement l’importance et l’urgence de cette étape historique que nous avons franchie.
 
Je tiens à dire que j’attends avec impatience toutes vos critiques, suggestions et contributions sur ce processus. Je suis très optimiste, prêt, désireux et enthousiaste à l’idée que ces débats amèneront les Forces de la Modernité Démocratique à un nouveau programme théorique, à une nouvelle étape stratégique et tactique au niveau national, régional et mondial, et que les efforts de préparation ont déjà commencé.
 
Mon appel pour la période à venir est de nous engager dans cette direction sur la base des décisions du congrès et des opinions et propositions exprimées dans cette lettre, afin de progresser vers le succès.
 
Recevez mes salutations et mon affection camarades, en toute fidélité.
 
Le 19 juin 2025
Abdullah Öcalan »
 
Via Maxime Azadî