Peut-on porter le voile et être féministe ?
Être féministe c’est agir pour l’égalité en droits, devoirs et dignité des femmes et des hommes. Cela dépasse les clivages politiques, géographiques ou l’appartenance à un sexe. Les féministes sont des femmes et des hommes qui agissent pour l’autonomie et l’émancipation de tous les êtres humains, « indépendamment de leur couleur, sexe ou religion » (Condorcet).
Le féminisme est un principe démocratique, qui se décline en lois et comportements soutenant l’égalité sociale, juridique, politique et économique des femmes et des hommes.
Le port du voile islamique dans l’espace public est-il conciliable avec cet idéal démocratique ?
La démocratie repose sur l’indistinction des droits entre les sexes dans l’espace public, espace où hommes et femmes ont le même statut. Or dans cet espace, le voile islamique n’est porté que par les femmes, entrainant immédiatement ségrégation, apartheid sexué, discrimination.
Circuler dans l’espace public en cachant sa chevelure qui serait une attraction sexuelle à laquelle les hommes seraient incapables de résister, c’est s’en exclure soi-même, c’est se mettre à part dans la cité. C’est se considérer comme responsable de la violence masculine envers les femmes.
Le voile empêchant d’identifier les femmes et les filles dans l’espace public, c’est voler leur identité.
Être féministe induit la mixité dans la sphère publique, dans le choix du conjoint, l’égalité entre les conjoints, le droit à la contraception et à l’avortement, à l’homosexualité, au divorce, à l’héritage, le refus de la polygamie.
En trois mots : autonomie, liberté de conscience, solidarité avec les femmes du monde entier.
Porter un accessoire vestimentaire qui, dans toute une partie du monde, est une obligation légale imposée aux femmes pour leur signifier un statut de deuxième rang (polygamie, reconnaissance juridique et héritage inégalitaires, absence de liberté de circulation, …) représente une allégeance à l’égard des théocraties qui y font la loi. Affirmer qu’on le porte volontairement n’en efface pas le sens humiliant.
Se voiler, c’est refuser toute solidarité avec les femmes vivant sous le joug de l’islamisme étatique, communautaire, familial, en Afghanistan, en Algérie, en Égypte, en Iran, … et également dans des pays occidentaux.
C’est oublier que le voile islamiste est souillé du sang des femmes fouettées, lapidées, égorgées, tuées parce qu’elles refusent de porter « cette relique médiévale de l’intimidation » (Halima Magroune), ce marquage archaïque possessionnel et obsessionnel du corps féminin.
Dans le dernier quart du XXème siècle, les femmes musulmanes, comme toutes les femmes dans le monde, se sont émancipées du patriarcat théocratique.
Panique chez les machocrates.
Pour maintenir la servitude volontaire ou forcée des femmes et des filles, leur stratégie : faire croire aux femmes que les dieux ont les yeux fixés sur elles. Ainsi, elles vont obéir à un code vestimentaire, supposé divin, de bonne conduite.
Le voile devient le symbole de « la » femme musulmane. Les messages iconographiques la réduisent à ce stigmate, depuis les publicités jusqu’à ONU Femmes qui en oublie la Convention pour l’élimination des discriminations envers les femmes.
Assignée à l’injonction de « la bonne » musulmane, porte-drapeau de l’idéologie masculiniste des fondamentalismes politiques et religieux, enfermée dans une vision archaïque inégalitaire des rapports sociaux de sexe, prétendre être féministe relève de l’escroquerie intellectuelle.
Porter le voile, stigmate de discrimination, de séparation, de fantasmes sexuels, c’est être machiste.