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Le double combat de Sakine Cansiz : Abolition du patriarcat et Autonomie du Kurdistan

PARIS – Le 9 janvier 2013, les militantes kurdes Sakine Cansiz (Sara, co-fondatrice du PKK), Fidan Dogan (Rojbin), représentante de KNK à Paris, et Leyla Saylemez (Ronahi), membre du mouvement de jeunesse kurde, ont été abattues de plusieurs balles dans la tête par un espion turc dans les locaux du Centre d’Information du Kurdistan, à Paris.

9 ans après ce triple féminicide politique dont la justice française tarde à juger les responsables, nous avons voulu republier ce portrait de Sakine Cansiz réalisé par Samint en 2016.

Le double combat de Sakine Cansiz : Abolition du patriarcat et Autonomie du Kurdistan

Sakine Cansiz est une combattante féministe laïque kurde connue pour son charisme, son courage, sa combativité, sa constance et son aura. Son apport à la cause politique de l’autonomie du Kurdistan force le respect et lui a valu d’être tour à tour emprisonnée, torturée, exilée puis assassinée en France par les services secrets turcs (MIT) dont l’implication ne fait nul doute. « Sara » est son nom de guerre car elle fut une figure emblématique de la résistance kurde contre la répression turque. Sakine Cansiz avait un rôle de premier plan dans la lutte armée, que lui conférait le statut de co-fondatrice à part entière du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) qui a été créé en 1978 par Sakine Cansiz et Abdullah Öcalan est une organisation assimilée à un mouvement de « guérilla » ou de « rebelles » revendiquant l’indépendance des territoires de la population kurde répartis entre la Turquie, la Syrie, l’Iran et l’Irak.

Le combat de Sakine Cansiz fut double, en l’occurrence celui de la lutte féministe pour l’abolition du patriarcat avec l’émergence d’une société égalitaire sans distinction de genre et respectueuse des droits humains ; ainsi que celui du mouvement séparatiste pour l’autonomie du Kurdistan réclamant une place dans le concert des nations. Sakine Cansiz est une figure de proue pour les femmes kurdes mais aussi pour tout un peuple. Elle a donc combattu toute sa vie durant, contre une double oppression – celle du système patriarcal ainsi que celle des états de la région refusant le droit à l’autodétermination aux kurdes.

Dès sa jeunesse, elle s’est engagée dans la lutte armée pour la cause kurde sans jamais renoncer à son engagement pour l’émancipation des femmes et des filles, que cela soit au sein de la famille, des institutions, de la société civile ou dans l’exercice du pouvoir. En effet, Sakine Cansiz a très tôt compris qu’il ne fallait surtout pas céder à la hiérarchisation des luttes et encore moins oublier de se battre pour sa propre survie dans ce système oppresseur qu’est le patriarcat, c’est pourquoi elle a pris le commandement de plusieurs unités militaires de défense féminine et de bataillons mixtes. Les femmes sont une classe de sexe qui doit se battre pour sa sécurité au sein même de sociétés patriarcales subissant par ailleurs l’autoritarisme de tel ou tel Etat.

« Toute ma vie a été une lutte »

Sakine Cansiz est née 1958 dans la province de Tunceli située à l’Est de la Turquie, où la population est majoritairement kurde et alévie. Sakine Cansiz fut arrêtée par la police turque en 1979 pour avoir implanté le PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) dans la province d’Elazig puis condamnée à 24 années de détention.

Elle fut incarcérée dans la prison de Diyarbakir située dans le sud-est anatolien pour y être torturée par les autorités turques – un sort systématiquement réservé aux prisonnier.ère.s politiques. Sakine Cansiz était une combattante féministe qui faisait déjà partie de l’inconscient collectif du peuple kurde en raison de sa bravoure lors des combats militaires menés dans les montagnes, de sa résistance héroïque face à la torture, n’hésitant pas à cracher au visage de ses tortionnaires ou à leur tenir tête. Son frère, Metin Cansiz a également été fait prisonnier dans les geôles de Diyarbakir.

En 1984, le PKK avait alors décidé d’opter pour la lutte armée contre Ankara, ce qui se solda par plus 40 000 morts essentiellement parmi les fractions rebelles. L’insurrection du PKK avait donc débuté en août 1984 dans la Région de l’Anatolie du sud-est de la Turquie (avec la proclamation d’un état d’urgence élargi à plusieurs provinces environnantes) et s’était terminé dans un bain de sang, mais le conflit reprit en 2015. Sakine Cansiz fut la première membre du PKK à prononcer une plaidoirie politique lors des « procès » organisés par le régime ayant perpétré un coup d’Etat militaire en Turquie. En 1988, lors d’un de ses simulacres de procès, elle fut condamnée à 76 années d’emprisonnement pour avoir eu l’audace de parler kurde dans l’enceinte du tribunal, ce qui était vécu comme un véritable affront aux yeux du pouvoir turc, qui du coup tripla sa peine de prison.

« Sara » : cheffe de file féministe de la cause kurde

Sakine CansizTout d’abord, le féminisme de Sakine Cansiz fut en corrélation avec le rejet de l’oppression envers les femmes kurdes, qu’elle percevait justement comme une classe de sexe : elle a bénéficié d’une conscientisation politique par le biais du marxisme. Sakine Cansiz a entretenu très tôt des liens avec les milieux révolutionnaires, dès les années 70 contre l’avis de sa famille et avant de partir s’installer à Ankara. Ainsi, elle s’engagea dès son plus jeune âge dans la lutte pour l’autonomie du Kurdistan et participa activement à la création du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) en novembre 1978 à l’aube de ses vingt ans, à Lice non loin de sa ville natale. Ensuite, Sakine Cansiz mettait un point d’honneur à rendre la voix des femmes audibles et à leur donner plus de visibilité, plus d’autonomie et plus de poids politique ; n’hésitant pas à monter au créneau si cela était nécessaire et ceci malgré le fait qu’elle fut un temps la seule femme présente devant une assemblée (exclusivement) masculine. Par ailleurs, ce fut dans la capitale turque qu’elle entra en contact avec Abdullah Öcalan et que ces derniers eurent plus tard l’idée de fonder conjointement le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). En effet, Abdallah Öcalan avait convoqué une vingtaine de militants à Lice, dans le sud-est de la Turquie majoritairement kurde, pour co-fonder le PKK avec Sakine Cansiz. « Sara » devint alors le nom de guerre de Sakine Cansiz à sa sortie de prison et elle continua à jouer un rôle de premier plan dans la cause kurde.

« Sara » dans sa réflexion féministe sut montrer sa détermination au sein de l’appareil très masculin du parti et faire avancer la cause des droits et libertés des femmes : il s’agit d’une véritable révolution. Suite à d’importantes pertes humaines masculines et à une volonté des femmes de s’engager dans la lutte armée, la formation idéologique des militant.e.s devint alors une priorité. Le camp d’entraînement libanais fut reconverti en académie militaire et en 1988 la libération des femmes s’inscrivait clairement comme la préoccupation première du mouvement. Le PKK sous l’impulsion de sa cofondatrice a mis en place des ateliers de « jinéologie » consistant à jeter les bases d’une « Science des femmes » pluridisciplinaire qui analyse de manière concrète le vécu des femmes victimes de violences machistes, étant centrée sur leur propre expérience personnelle. L’objectif est de réfléchir à l’élaboration de concepts philosophiques féministes en dehors des institutions via des associations et des centres éducatifs non-mixtes par exemple afin de créer une dynamique émancipatrice pour les femmes et pour transmettre le savoir de cette « science des femmes ». A l’origine le PKK était issu des milieux universitaires avec des intellectuel.le.s de tendance marxiste, mais dans les années 80 l’arrivée de nombreux militants analphabètes ou peu éduqués originaires de différentes régions rurales ou des villages rasés par l’Etat turc avait fait surgir l’urgence de faire entendre les voix des femmes pour un Kurdistan (vraiment) « libre » sans opprimer la moitié de sa population.

Le mouvement de libération des femmes kurdes soutenu par « Sara » a pour objectif de défendre un projet d’émancipation des femmes pour que l’égalité femmes/hommes soit une norme tant dans la société civile que sur le champ de bataille. « Sara » fut assassinée à un moment où les kurdes commencèrent à retranscrire leur vision politique à Rojava (Kurdistan syrien) consistant à mettre en place une démocratie directe ou participative et évidemment laïque dans le respect d’une égalité de traitement entre les citoyen-n.es peu importe leur genre, leur religion, leur ethnie, leur orientation sexuelle ; tout en ayant le souci de la préservation de l’environnement et d’instaurer un système d’auto-gestion (anticapitaliste) et d’auto-défense de la zone. A Rojava, les femmes kurdes ont obtenu des garanties importantes telles que la présence de femmes à au moins 40% au sein des commissions et que toutes les organisations de la société civile et politique soient co-présidées de manière paritaire. Les femmes ont contribué à cette « autonomie démocratique » et en furent même un pilier ; leur pouvoir de décision n’était donc pas remis en cause dans les différentes instances de l’administration, contrairement à la configuration des régimes politiques de la région du Moyen-Orient. Les femmes kurdes ont à plusieurs reprises affirmé que les avancées constatées furent le fruit d’une trentaine d’années de lutte révolutionnaire pour le peuple kurde et de combat féministe au sein du mouvement de libération. Les féministes kurdes ont mis en exergue l’importance d’organisations non-mixtes tout au long de ce processus.

Le fait d’avoir une féministe convaincue telle que Sakine Cansiz au sein même de la Direction du PKK a permis aux femmes kurdes ne plus être réduites au silence, d’obtenir d’un statut politique digne de ce nom mais ceci fut le résultat d’une lutte permanente car les droits et libertés des femmes n’ont jamais été donnés mais toujours arrachés au patriarcat. Les femmes kurdes sont confrontées à des oppressions de types additionnelles dans des sociétés patriarcales et imprégnées de la mouvance islamiste tout en étant membres d’une nation sans Etat ce qui les a tout particulièrement sensibilisées à la notion de la Liberté, qu’elles sont déterminées à atteindre et non pas seulement dans le sens abstrait ou empirique du terme. En 1987, les femmes kurdes d’Europe avaient également initié un mouvement féministe depuis l’étranger avec la création de l’Association des Femmes Kurdes Patriotes du Kurdistan qui joua un rôle important dans la lutte contre les violences masculines. Cependant, les politiques d’assimilation niant leur culture ont été un facteur de mobilisation des femmes kurdes sur le terrain de la politique et de la prise de conscience du caractère systémique des violences qu’elles subissaient : elles refusèrent d’établir une frontière entre le « public » et le « privé ». Les femmes du mouvement de libération organisaient des rencontres d’éducation populaire féministe destinées aux hommes afin de les sensibiliser sur les rapports sociaux de sexe inégalitaires établis par le patriarcat et de faire un travail de terrain contre le conditionnement social.

« Sara » fut une figure de proue de la lutte des droits et libertés des femmes kurdes au Kurdistan et au sein de la diaspora. Puis, elle lança au milieu des années 90 les premières organisations non-mixtes kurdes avant de s’exiler en Europe. Ainsi, « Sara » en tant que féministe lutta tout naturellement contre la domination masculine y compris dans les instances de son propre parti. En 1995, Sakine Cansiz fut également la cofondatrice de l’Union des Femmes Libres du Kurdistan. Le mouvement des femmes décida de se constituer en parti politique en 1999 : le Parti des Femmes Travailleuses du Kurdistan, qui par la suite deviendra le Parti de la Libération des Femmes Kurdes car les femmes kurdes ont vraiment l’ambition d’offrir un nouveau contrat social axé sur leur émancipation et leur sécurité et pour une société plus humaniste. Leur but est d’éradiquer les violences conjugales ou les féminicides dans une société sécularisée afin de changer les mentalités et de se préserver des dangers du fondamentalisme religieux.

« Sara » participait aux combats militaires dans le milieu hostile des montagnes et appelait les kurdes à se révolter. Le PKK arriva ainsi à infliger de sérieux revers à l’armée turque. « Sara » avait un parcours militaire plus qu’exemplaire et elle se déplaçait dans les différentes régions kurdes de Turquie, de Syrie, d’Irak et d’Iran. En 1997, les Etats-Unis puis d’autres pays de l’Union Européenne placèrent le PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) dans la liste des organisations terroristes en raison de son ambition de créer un Kurdistan indépendant par la lutte armée. Etant donné que la plupart des pays occidentaux acceptèrent d’étiqueter le PKK comme mouvement terroriste, celui-ci se subdivisa alors en quatre entités : le PRD pour la Turquie, le PYD pour la Syrie, le PÇDK pour le Kurdistan irakien et le PJAK pour l’Iran (ainsi que d’autres entités) afin de brouiller les pistes. En outre, le PKK fut aussi soupçonné de trafic de stupéfiants par les Etats-Unis pour pouvoir financer leur « guérilla » contre la Turquie.

« Sara » obtint en 1998 l’asile politique en France où elle y résidera plusieurs années. Cependant, le 19 mars 2007 elle fut arrêtée à Hambourg par la police allemande car Ankara avait émis un mandat d’arrêt international à son encontre, mais elle fut relâchée le 25 avril suivant après avoir passé un peu plus d’un mois en prison. Dans une note des autorités américaines, les Etats-Unis identifièrent le rôle majeur de « Sara » dans la collecte de fonds du PKK en Europe et projetèrent alors son arrestation. En février 1999, ce fut au tour d’Abdullah Öcalan d’être capturé mais cette fois au Kenya lors d’une opération conjointement menée par les services secrets turcs et américains – les services secrets israéliens (Mossad) auraient fourni une aide substantielle à la Turquie. Le cofondateur du PKK a tout d’abord été condamné à la peine de mort pour trahison et tentative de division de la Turquie puis la sentence de « Apo » fut commuée en une peine de prison à vie (suite à l’abolition de la peine de mort en 2002 dans la perspective d’une adhésion à l’Union Européenne). Il purge toujours sa peine d’emprisonnement à vie dans la prison de l’île d’Imrali, située en mer de Marmara (Turquie) où il subit des pressions psychologiques quotidiennes. Le 1er septembre 1999, depuis sa cellule de prison, « Apo » ordonna l’abandon de la lutte armée mais ce cessez-le-feu n’était décrété que de manière unilatérale ce qui sera ultérieurement contesté par le PKK avec l’organisation d’attentats-suicides.

« Sara » qui résidait donc en France par la suite, était incontestablement une cadre importante du mouvement en Europe, du fait de son engagement, de son parcours et de son activité de lobbying politique en faveur du Kurdistan et de la cause des droits des femmes. Mais elle travaillait aussi en étroite collaboration avec le commandement militaire du PKK présent dans les zones de combats. « Sara » s’occupait aussi de transmettre des informations sur les différentes exactions constatées en Turquie, en dénonçant par exemple les arrestations arbitraires ou les « meurtres non élucidés » de kurdes. En 2012, un mouvement de contestation à l’endroit du gouvernement turc naquit en France au sein de la communauté kurde de Strasbourg qui réclamait une amélioration des conditions de détention d’Abdullah Öcalan. En effet, ce dernier était à l’isolement sans avoir la possibilité de parler à un avocat – ces manifestations avaient rassemblées plus de 40 000 personnes selon les autorités. Après plus d’une trentaine d’années de militantisme acharné et de lutte armée, « Sara » occupa une position politique stratégique tout en ayant un rôle clé dans la gestion du financement de la cause kurde en Europe. Elle avait déjà eu la charge de la défense des intérêts du PKK à l’étranger, notamment en Allemagne auprès de la diaspora et en collaboration avec Abdullah Öcalan alors qu’il s’était exilé en Syrie.

Dans la nuit du 9 au 10 janvier 2013, Sakine Cansiz et deux autres militantes furent assassinées à Paris, non loin de la gare du Nord, par un agent des services secrets turcs (MIT) bien qu’elles étaient sous surveillance policière. Sakine Cansiz fut inhumée à Tunceli (« Dersim » en kurmandji), sa ville natale, située dans le Kurdistan turc ayant une histoire sanguinaire avec l’Etat turc. En effet, suite au massacre de la population kurde perpétré en 1937 par l’armée turque et à l’initiative de Mustafa Kemal Atatürk dans le cadre d’une « mission de civilisation » : la ville de Dersim fut renommée Tunceli, ce qui signifie « main de bronze ». L’Etat turc avait donc opté pour une mesure de type « punitif » envers les kurdes, pour s’être révolté.e.s et pour avoir apporté une protection à de nombreux arménien-ne.s pendant le génocide. Par ailleurs, la ville de Dersim où Sakine Cansiz repose est un haut lieu de la culture alévie, proche de la nature et humaniste où les hommes et les femmes seraient de facto égaux.

« Armée des femmes »

Sakine CansizSakine Cansiz fut également à l’origine de la création de l’« armée des femmes » à sa sortie de prison, chose qu’ Abdullah Öcalan approuva en évoquant d’ailleurs une adéquation avec l’idée de l’« émergence d’une femme forte libérée du féodalisme masculin » qu’il approuvait. Sakine Cansiz fut relâchée en 1991, soit après avoir purgé 12 années d’emprisonnement et de tortures, ce qui n’avait pas entamé sa détermination. Ensuite, elle recommença à militer clandestinement et reprit les armes pour combattre la répression turque qui rasait des villages et arrêtait des kurdes de manière arbitraire. Dans le sud-est de la Turquie, elle apporta son appui à la lutte armée dans les rangs du PKK et participa également à une conférence initiée par Abdullah Öcalan, dans un camp d’entraînement localisé au Liban dans la plaine de la Bekaa.

Sakine Cansiz, aidée par son aura et son charisme, continua sans relâche à inciter les kurdes à se rebeller ainsi qu’ à œuvrer à la création de stratégiques unités de défense féminines puisque la participation des femmes dans la lutte armée était de grande envergure. A noter qu’Abdullah Öcalan (cofondateur du PKK) avait publiquement reconnu les qualités incontestables de leadeuse de Sakine Cansiz au sein de l’organisation marxiste ainsi que son rôle prépondérant dans le mouvement de libération du Kurdistan. Lors d’une réunion officielle, ce dernier la présenta comme une personne « plus courageuse et même plus ambitieuse » que lui. Abdullah Öcalan partageait la réflexion féministe de Sakine Cansiz et affirmait que « le principe fondamental du socialisme est de tuer l’homme dominant ». Le mouvement armé kurde a été créé en 1992, soit une année après la remise en liberté de Sakine Cansiz qui continuait à contribuer politiquement à la résolution de la question kurde ainsi qu’à lutter pour la libération des femmes kurdes en Europe, en étant notamment membre du Congrès National du Kurdistan (KNK) à Bruxelles.

Sakine Cansiz a soutenu l’apport idéologique et féministe fourni aux femmes kurdes dans les années 90 et accompagné le changement en profondeur de l’organisation de la lutte armée. Les femmes étaient en première ligne lors des insurrections et des manifestations contre les opérations militaires de l’Etat turc. De plus, les soldates kurdes ont assuré à plusieurs reprises des opérations d’aide aux réfugié.e.s d’ordre éducatif, sanitaire, médical, psychologique logistique et de défense des zones militaires. Les combattantes kurdes ont joué un rôle décisif dans la résistance armée mais pas seulement, elles intervenaient également sur les aspects relatifs à la « guerre de l’information » en rédigeant des communiqués de presse multilingues, en accordant des interviews, en établissant des solidarités internationales, en maintenant un lobbying politique et des synergies avec la diaspora. Abdullah Öcalan estimait à juste titre que « la paix des kurdes passe par les femmes ».

L’ « armée des femmes » permit aux femmes d’avoir leur propre état-major en 1999 et donc d’être décisionnaires au sein du mouvement révolutionnaire du fait de la participation importante des femmes au combat jugée comme essentielle. Sakine Cansiz a créé des unités de défense féminines ayant leur commandement attitré. Gulnaz Karatas Beritan fut l’une des premières commandantes d’unités non-mixtes qui mena une lutte acharnée contre l’ennemi jusqu’à sa dernière munition et qui brisa sa kalachnikov (afin qu’elle soit hors d’usage pour le camp adverse) avant de se jeter d’une falaise car elle refusait l’éventualité d’être prisonnière. Par conséquent, les autorités kurdes s’illustraient alors dans le fait qu’elles étaient les seules à s’être dotées d’un corps d’armée exclusivement féminine. Dernièrement, ces bataillons de femmes ont remporté des succès militaires contre Daech et ceci sans aucune aide internationale, du moins dans les premiers temps. De plus, la commandante Nassrine Abdallah ayant libérée Kobané affirmait que ses unités féminines avaient un « ascendant psychologique » sur les islamistes car ces derniers auraient une crainte supplémentaire au combat, à savoir celle de ne pas aller au « paradis » s’ils étaient tués par une femme (perçue comme impure ou comme un être inférieur). Les femmes kurdes ont refusé de rester à la maison et ont choisi l’engagement dans l’ « armée des femmes » depuis plus d’une vingtaine d’années mais il y avait des antécédents de commandement militaire de ce type par le passé.

Les soldates de l’« armée des femmes » ont combattu au front aux côtés de leurs homologues masculins et leur capacité numérique pouvait représenter jusqu’à 50% des forces armées en fraction selon les zones de conflits. En Syrie, elles ont notamment intégré les Unités de défense du peuple (YPG) qui encadraient les forces armées kurdes – refusant tout régime spécial par rapport à leur camarades masculins dont elles assuraient également la protection. Les revers militaires que les commandantes kurdes ont infligées à Daech, comme par exemple à Kobané ou avec la mise en place d’une « autonomie démocratique » à Rojava ont alimenté ce regain d’intérêt pour la question kurde : elles sont porteuses d’un nouveau contrat social. Elles incarnent justement tout ce que le fondamentalisme religieux haït : l’émancipation des femmes, la liberté, l’égalité, la laïcité ou la reconnaissance de l’homosexualité. Des « Unités de protection des femmes » appelées Yekîneyên Parastina Jinê (YPJ) luttent contre les violences patriarcales telles que les féminicides, les « mariages » forcés, la polygamie, les viols ou les mutilations sexuelles entre autres. Elles pratiquent également la dénonciation publique des violences conjugales chez les combattants kurdes ; la bataille n’est pas seulement militaire mais aussi idéologique. Les combattantes affirment s’opposer à tout ce qui représente une menace contre « leurs droits en tant que femmes » et contre « leurs droits en tant que peuple kurde ». Elles sont donc des peshmergas à part entière car elles « affrontent la mort » au sens littéral du terme.

La formation militaire des soldates kurdes de l’ « armée des femmes » incluait l’apprentissage de la « jinéologie », cette science initiée par les femmes et pour les femmes. La « jinéologie » consiste à partager un savoir concernant les rapports de domination du système patriarcal : « une méthode de recherche qui ne prendrait pas en compte la réalité des femmes, qui ne mettrait pas les femmes au centre de ses préoccupations ne permettra jamais de développer une véritable lutte pour la liberté et l’égalité ». Le préfixe kurde « jin » signifie femme, en grec « jiyan » veut dire vie et « logos » fait référence à la science en lien avec la parole, la raison. Les femmes écrivent leur propre histoire en dehors du patriarcat. Cette « science » consistait à donner la parole aux femmes et à créer un espace de dialogue et d’analyse des violences masculines dans des structures non-mixtes indépendantes des institutions, de l’Etat turc et des bailleurs de fonds. Ainsi, les « Académies des femmes » qui s’organisaient dans un mode de fonctionnement d’auto-gestion servirent de support à la transmission de l’enseignement de cette science (et à la mise en place de projets collectifs dans une optique de partage de connaissances). Elles avaient donc l’occasion de lire et de réfléchir sur des textes féministes provenant d’horizons divers mais elles tenaient à développer leur propre vision politique et anticapitaliste des rapports femmes/hommes et exprimaient une hostilité envers une certaine forme d’hégémonie occidentale qui pouvait, selon elles, considérer les femmes du Moyen-Orient comme « arriérées » ou incapables de construire une conscience politique. Les soldates kurdes devaient savoir manier les armes mais aussi être en mesure de se forger leur propre pensée politique de manière autonome. Abdullah Ocalan a précédemment rappelé une évidence, à savoir qu’« une société ne peut être libre que si les femmes y sont libres ».

Sakine Cansiz avait également le commandement d’unités de défense mixtes et les hommes étaient triés sur le volet avec l’obligation d’adresser une sorte de profession de foi, d’expliquer et de convaincre la direction sur leur motivation (s’ils voulaient bénéficier d’une formation idéologique féministe et universaliste). La médiatisation de ces femmes courageuses en armes a pu occulter l’existence d’un ambitieux projet d’émancipation des femmes et le fait qu’elles incitaient toutes les femmes à s’organiser, se réunir, s’entraider pour créer une dynamique contre le système patriarcal, le capitalisme, le despotisme des Etats, sans faire de distinction entre le « privé » et le « politique » : une révolution féministe !

Assassinat de Sakine Cansiz : une affaire d’Etat franco-turque

Sakine Cansiz s’est courageusement battue sur tous les fronts pour que le peuple kurde puisse obtenir son indépendance. Les kurdes remplissent tous les critères leur permettant de prétendre à l’autonomie du Kurdistan : continuité territoriale, histoire, langue, culture. Le Kurdistan est une sorte territoire sans frontières et le fruit d’une Histoire complexe faite d’insurrections, de massacres et de trahisons politiques tant de la part des pays occidentaux au lendemain de la première guerre mondiale par exemple que sous l’Empire Ottoman. Les Kurdes sont dispersé.e.s sur quatre pays entre la Turquie (40%), l’Irak (15%), l’Iran (25%) et la Syrie (5 à 10%) – à noter que ces pays ne sont pas spécialement connus pour leur respect des droits humains ou des minorités. Les kurdes sont parfois présenté.e.s comme un « peuple fragmenté » mais qui compte dans la région du Moyen-Orient tant d’un point de vue démographique (35 millions), géopolitique (localisation), économique (pétrole, eau) que socio-culturel (arabisation) sur une superficie équivalente à celle de la France, sans oublier l’existence d’une diaspora. Dans le contexte de la guerre en Syrie contre le terrorisme, le fait que les kurdes combattent vaillamment l’obscurantisme de Daech leur a permis de bénéficier d’un coup de projecteur sur la scène médiatique internationale.

Assassinats politiquesSakine Cansiz en tant que cofondatrice du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), Fidan Dogan représentante du Congrès National du Kurdistan (KNK) et l’activiste Leyla Soylemez furent froidement exécutées d’une balle dans la nuque – par les services secrets turcs (MTI) – au siège du Bureau d’Information kurde situé dans le Xe arrondissement de Paris. Il est évident que Sakine Cansiz était une cible de choix pour les autorités turques : elle fut donc assassinée pour ses idées car elle défendait ardemment l’autonomie du Kurdistan tout en étant l’initiatrice d’un mouvement laïque de libération des femmes qui n’était pas du goût ni de la Turquie ni des fondamentalistes religieux de la région du Moyen-Orient. Ces trois femmes auraient eu le tort de se battre pour la reconnaissance des droits fondamentaux du peuple kurde et leurs activités politiques et/ou associatives respectives consistaient principalement à dénoncer les violations des droits humains perpétrées en Turquie contre la population kurde. Néanmoins, elles militaient pour la paix et pour une résolution pacifique de la question kurde en soutenant notamment les pourparlers entre le gouvernement turc et le PKK. Sakine Cansiz (cadre de la direction du PKK), Fidan Dogan (lobbyiste du parti) et Leyla Soylemez (représentante de la section jeunesse du mouvement) furent abattues le mercredi 9 janvier 2013, soit quelques jours après l’annonce de l’ouverture de négociations entre Ankara et Abdullah Öcalan — qui est toujours emprisonné à île d’İmralı dont il serait le seul résident. Le contexte privilégie forcément la piste de l’ « assassinat politique » à un moment où des négociations avaient lieu en Turquie. L’objectif de ces négociations entre Ankara et le PKK était de trouver une solution politique au conflit kurde dans le but de mettre fin à une lutte armée d’une trentaine d’années ayant fait plus de 40 000 morts, des centaines de milliers de déplacé.e.s et des prisionnier.ère.s politiques dans les geôles turques.

Le féminicide des trois militantes kurdes a fait naître une véritable « affaire d’Etat » puisqu’il a eu lieu sur le sol français et à un moment où la Turquie avait repris (depuis fin 2012) le dialogue avec le PKK, par le biais de négociations directes avec Abdullah Öcalan – dans le but d’obtenir son désarmement ce qui est un enjeu de taille pour la Turquie. Ces assassinats politiques sont évidemment une manière de torpiller les négociations avec Ankara par un nouvel usage de la force de façon à faire pencher la balance du côté turc ou à déstabiliser les kurdes. Pourtant, les services secrets turcs ont officiellement démenti toute implication dans cette « affaire » en janvier 2014. Ce démenti a été communiqué suite à la diffusion dans les médias turcs d’un enregistrement sonore relatif à des cibles potentielles de la guérilla kurde : il s’agissait d’une conversation entre deux agents du MIT et un homme identifié comme Omer Güney qui est le seul « suspect » dans cette affaire d’Etat. Omer Güney avait facilement réussi à infiltrer le PKK via une stratégie d’entrisme, en s’impliquant dans le milieu associatif de la communauté kurde et en offrant ses services d’interprète en langue allemande et française – jusqu’à se voir confier l’accompagnement de Sakine Cansiz. Il a rapidement été arrêté et mis en examen pour le motif d’avoir perpétré des « assassinats en relation avec une entreprise terroriste ». L’enquête révèle que le meurtrier est bien Omer Güney, chauffeur de Sakine Cansiz, et qu’il a des liens avec une organisation politique d’extrême droite turque ultranationaliste et hostile aux kurdes nommée les « Loups Gris » – étant initialement l’emblème de la section jeunesse du Parti d’action nationaliste (MHP en turc). Les « Loups Gris » disposent d’une sorte de signe de ralliement au moyen d’un geste de la main censé représenter la tête d’un loup et sont connus pour les violentes offensives envers les communistes.

La thèse de l’implication des services secrets turcs dans ces assassinats politiques est étayée par l’existence de plusieurs « éléments » à charge tels qu’un enregistrement sonore, la présence de résidus de poudre dans une sacoche trouvée à l’intérieur véhicule d’Omer Güney (semblable à celle des images de vidéosurveillance), les relevés téléphoniques du « suspect » faisant état de contacts réguliers avec le MIT, la publication sur Internet d’un document officiel (une année après les assassinats) mentionnant clairement que le meurtrier a agi sur ordre du MIT (services secrets turcs) via un « ordre de mission ». Dans cette affaire, le réquisitoire du parquet indique que « de nombreux éléments de la procédure permettent de suspecter l’implication du MIT dans l’instigation et la préparation des assassinats ». Le manque de volontarisme des autorités turques et françaises pour faire la lumière sur le meurtre de ces trois militantes kurdes crève les yeux.

Dans la Turquie de Recep Tayyip Erdoğan qui se voit en nouveau « sultan », une enquête a été ouverte et malgré une commission rogatoire internationale, aucune information n’a été partagée avec la justice française. En France, le gouvernement a refusé de lever le secret-défense sur les renseignements qui auraient pu permettre l’avancement de l’enquête judiciaire. Les juges chargé.e.s de l’instruction du dossier sont par conséquent contraint.e.s de clore leur réquisitoire définitif – sans avoir pu officiellement remonter jusqu’aux commanditaires qui sont pourtant identifiés. En revanche, l’ancien ministre de l’Intérieur, Claude Guéant, lors d’une interview à iTélé s’est étonnamment dit être « à peu près certain que les services turcs ne sont pour rien dans cette affaire ». En 2011, Claude Guéant avait signé avec le gouvernement turc un accord de coopération dans la lutte contre le terrorisme (échange d’informations avec la police turque), chose que Jean-Marc Ayrault, ancien premier ministre (premier gouvernement de François Hollande) a maintenu en y consacrant même un projet de loi. Mais, faut-il rappeler que pour les autorités turques toute personne kurde serait un.e « terroriste » en puissance ?

Le Parti de la justice et du développement (AKP) dirigé par Recep Tayyip Erdoğan est un parti politique que nous pouvons qualifier d’islamo-conservateur liberticide gangrené par la corruption – ouvertement réactionnaire, antiféministe, LGBTphobe, antisémite et opposé à la laïcité kémaliste tout en faisant la promotion du port du voile sous couvert de « liberté religieuse ». Cependant, pour tenter de récuser les accusations d’islamisme, Recep Tayyip Erdoğan, qui a le sens de la formule, s’est déclaré « démocrate conservateur » ou « démocrate musulman ». L’année suivant la prise de pouvoir du Parti de la justice et du développement (AKP), Reporters sans frontières (RSF) a qualifié la Turquie de « première prison au monde pour les journalistes » et les ONGs ont confirmé ce durcissement du gouvernement turc. Les associations féministes l’accusent même d’encourager les féminicides et/ou de banaliser le fléau des violences conjugales. Le président français François Hollande avait alors gardé un silence coupable et opté pour la realpolitik en maintenant d’étroites relations diplomatiques avec la Turquie alors que ces assassinats politiques ont été perpétrés sur notre territoire. Son intérêt manifeste pour le néo-libéralisme l’a tout naturellement conduit à préférer la signature de juteux contrats commerciaux (12 milliards d’€ pour Airbus et 15 milliards d’€ pour GDF Suez) et ceci à peine trois mois après le meurtre des trois militantes kurdes à Paris, alors que la justice française avait pointé les « accointances » du suspect avec les services secrets turcs. La France reste murée dans son silence et fait passer le message que les droits humains ne valent visiblement pas grand chose face aux transactions financières que représentent la vente d’une centaine d’avions ou d’une poignée de centrales nucléaires. La France ne semble pas non plus faire preuve d’enthousiasme à l’idée de demander (justement) des comptes à la Turquie pour ces crimes commis dans sa capitale, qui ont été ressentis comme un véritable électrochoc par la communauté kurde. Il semble que les familles des victimes n’aient même pas été reçues par François Hollande. Les associations kurdes ne se privent pas d’ironiser sur la passivité et sur les « déclarations politiques ambiguës » du président français en l’incitant à aborder la question kurde d’une manière qui serait plus « démocratique » ou tout simplement plus respectueuse du droit international. « Le problème kurde n’est pas le problème d’une partie de notre peuple, mais le problème de tous. C’est donc aussi le mien. Nous allons régler chaque problème avec encore plus de démocratie, plus de droits civils et plus de prospérité, dans le respect de l’ordre constitutionnel, du principe républicain et des principes fondamentaux que nous ont légués les pères fondateurs de notre pays ». La Turquie a malgré tout l’ambition d’intégrer l’Union Européenne et fait mine de s’engager dans un processus de « démocratisation » avec des islamistes aux manettes.

Les kurdes jouent un rôle déterminant dans la lutte contre Daesh ce qui n’est visiblement pas le cas de la Turquie compte tenu des prises de positions du président turc élu depuis 2014 (après avoir été Premier ministre de 2003 à 2014). Recep Tayyip Erdogan lors de son mandat de Premier ministre, n’a pas hésité à privilégier publiquement la piste d’un règlement de compte interne au PKK ou d’une quelconque « tentative de sabotage » des pourparlers pour ce qui concerne les assassinats des trois militantes kurdes, optant donc pour la victimisation. En effet, le Parti de la justice et du développement (AKP en turc) aurait certainement apprécié d’obtenir le désarmement de la rébellion kurde avant l’échéance des élections présidentielles. Dans un communiqué diffusé sur le site internet du mouvement séparatiste, le Centre d’Information du Kurdistan de Paris écartait catégoriquement cette éventualité en affirmant qu’il s’agissait d’« un assassinat politique exécuté d’une façon très professionnelle » et rendait également un vibrant hommage à Sakine Cansiz pour avoir marqué l’ « armée des femmes » de son empreinte.

« Sara » mena un double combat, celui contre l’oppression du patriarcat et pour l’égalité de droit entre les femmes et les hommes tout en luttant activement contre la répression turque (entre autres) afin que le peuple kurde puisse avoir accès à une « autonomie démocratique ». Les féministes kurdes nous confirment la nécessité d’avoir des instances politiques, militaires et associatives indépendantes ainsi que non-mixtes pour faire valoir les droits et libertés des femmes de manière plus efficace. Les combattantes kurdes rappellent que « glorifier » les soldates uniquement comme des ennemies de Daech demeure contre-productif si la dimension politique et féministe n’est pas prise en compte dans l’analyse de leur lutte (qui a bénéficié d’une culture de la résistance tout au long de son Histoire). La « jinéologie » comprend une vision féministe mais pas seulement, cela englobe aussi une retranscription et une étude de l’évolution du statut des femmes au sein de différentes cultures. Les femmes kurdes ont su passer à la pratique en mettant en place un système démocratique et écologique basé sur la co-gérance femmes/hommes avec le « confédéralisme » comme modèle politique à Rojava.

La disparition de Sakine Cansiz est commémorée chaque année par des milliers de kurdes venus de toute l’Europe pour déposer une gerbe sur les lieux du crime.

Par SAMINT, via le site Révolution Féministe