Le 18 mai 1973, le jeune révolutionnaire kurde-alévi, Ibrahim Kaypakkaya a été abattu par des officiers turcs à l’âge de 24 ans. Son cadavre a été mutilé et mis en morceaux. Son père, Ali Kaypakkaya, raconte la scène :
« J’ai récupéré le corps de mon fils à Diyarbakir. J’ai pris un porteur pour le transporter. Il m’a demandé : « Qu’est-ce que c’est ? » J’ai répondu : « C’est mon fils, gauchiste, étudiant, tué sous la torture.» Le porteur a pleuré, n’a pas pris l’argent (…). »
Le 18 mai 1973, İbrahim Kaypakkaya a été torturé à mort, puis abattu par des militaires turcs. Son cadavre a été mutilé et mis en morceaux.
İbrahim Kaypakkaya fût l’un des principaux dirigeants du mouvement communiste en Turquie et le fondateur du Parti communiste Marxiste-Léniniste de Turquie(TKP/ML).
Il est vu par nombre de communistes comme un symbole de résistance. Il est décrit comme un agrégateur des idées d’autres grands leaders et penseurs du marxisme-léninisme-maoïsme.
Sa vie
Ibrahim Kaypakkaya est né en 1949 d’une famille kurde de la province de Çorum. Dans sa jeunesse, il livrait des magazines politiques dans les villages voisins. Plus tard, il s’est ouvert aux idées révolutionnaires en tant qu’étudiant au département de physique de la faculté des sciences de l’université d’Istanbul. Il est devenu membre du Parti révolutionnaire des ouvriers et des paysans de Turquie. En 1967, il est l’un des fondateurs d’une branche locale de la Fédération des clubs d’idées (Turkiye Fikir Kulüpleri Federasyonu FKF). Il rejoint la fondation du Club des idées Çapa (Çapa Fikir Kulubü) en mars 1968 et devient le président du club. En novembre 1968, Kaypakkaya a été expulsé de l’université pour avoir préparé un tract contre la 6e flotte de la marine américaine arrivée en Turquie.
Kaypakkaya, qui a adopté le point de vue de la Révolution démocratique nationale, a travaillé pour le journal İşçi Köylü (« Travailleur-Paysan »). Il a écrit des articles dans les magazines Aydınlık et TÜRKSOLU (« Gauche turque »); à ne pas confondre avec le magazine moderne Türksolu). Kaypakkaya s’est ensuite séparé de Doğu Perinçek et de son groupe, car il considérait Perinçek (un nationaliste turc ouvertement anti-kurde) comme un révisionniste et un opportuniste. Kaypakkaya, qui a participé à la lutte de la paysannerie, a formé le Parti communiste de Turquie/marxiste-léniniste (Türkiye Komünist Partisi/Marksist-Leninist, abrégé TKP/ML) et l « Armée de libération des ouvriers et des paysans » (Türkiye İşci ve Köylü Kurtuluş Ordusu – TIKKO), la branche armée de son parti, et a mené des activités dans les villes de Dersim, Malatya et Gaziantep.
Kaypakkaya et ses camarades ont interrogé et abattu un informateur qui a causé l’assassinat des membres de THKO (turc : Türkiye Halk Kurtuluş Ordusu ; « Armée populaire de libération de la Turquie ») Sinan Cemgil et ses deux autres camarades par les forces de l’Etat turc. Kaypakkaya est devenu un symbole de solidarité révolutionnaire et de camaraderie pour ses partisans au moment de la loi martiale.
Capture et exécution
Suite au mémorandum militaire de 1971, le gouvernement turc a réprimé le mouvement communiste en Turquie. Le 24 janvier 1973, Kaypakkaya et ses alliés ont été attaqués par les forces militaires turques dans les montagnes de Dersim. Il a été grièvement blessé tandis que son camarade Ali Haydar Yıldız est décédé. Les militaires turcs sont partis croyant avoir tué également Kaypakkaya, lui permettant ainsi d’éviter la capture. Durant cet hiver, les conditions météorologiques et la neige l’ont forcé à s’abriter dans une grotte pendant cinq jours. Par la suite, il est parti pour un village où il a demandé l’aide d’un enseignant qui l’a dénoncé aux militaires.
Les officiers militaires turcs ont torturé Kaypakkaya pendant quatre mois dans la prison de Diyarbakır (ville kurde d’Amed), tristement célèbre pour son traitement brutal des détenus. Dans son cas, il a été torturé pendant deux semaines, après quoi il a été forcé de marcher pieds nus sur la neige et la glace de ville en ville sur 50 km. Le gouvernement turc a persécuté et liquidé les dirigeants du TKP/ML. Kaypakkaya, et plusieurs de ses collègues ont été arrêtés. Kaypakkaya a été exécuté par balles en prison en 1973 après avoir été torturé pendant plus de 4 mois. Le 18 mai 1973, il a été torturé jusqu’à la mort, puis abattu par des officiers militaires à l’âge de 24 ans. Son cadavre a été mutilé et découpé.
L’Organisation nationale des renseignements turcs (Milli İstihbarat Teşkilatı, MİT) a déclaré que Kaypakkaya était le révolutionnaire le plus dangereux de Turquie et une menace sérieuse pour le gouvernement.
Héritage culturel
Après sa mort, Kaypakkaya est devenu un martyr pour le mouvement révolutionnaire communiste turc en choisissant de mourir plutôt que de donner des informations qui compromettraient ses camarades. Malgré son jeune âge, il était l’un des plus éminents théoriciens marxistes de Turquie. L’œuvre la plus connue de Kaypakkaya est sa critique du kémalisme, des principes de l’État turc, et sa thèse sur la question nationale, notamment la question kurde.
Aujourd’hui, il est vénéré comme un symbole de la résistance en Turquie et dans d’autres pays.
Doctrine
Ses vues doctrinales étaient basées sur la séparation de l’idéologie de l’Union soviétique voisine, l’adoption du maoïsme et le soutien à la révolution culturelle.
Kaypakkaya et la question kurde
Malgré son jeune âge, Ibrahim Kaypakkaya était l’un des théoriciens marxistes les plus en vue de la Turquie. Le travail le plus connu de Kaypakkaya est sa critique du kémalisme, des principes étatiques de la Turquie, et sa thèse sur la question nationale, notamment la question kurde. Il est l’un des premiers révolutionnaires de Turquie à avoir prôné l’indépendance du Kurdistan dans le cadre du droit à l’autodétermination des peuples. Il est aussi l’un des premiers communistes à s’être opposé au kémalisme en déclarant que : « le kémalisme a instauré un régime bourgeois au service de l’impérialisme ». (Wikipedia)
(…)
« Nous défendons et continuons à défendre de toutes nos forces le droit de la nation kurde à former un État. Nous respecterons ce droit jusqu’au bout ; nous ne soutenons pas la position privilégiée des Turcs par rapport aux Kurdes (…) ; nous éduquons les masses à reconnaître ce droit sans hésitation et à rejeter le droit de former un État comme le privilège dans le monopole d’une seule nation ».