TURQUIE / BAKUR – Feleknas Uca et Hişyar Özsoy, les deux porte-paroles de la commission des affaires étrangères du HDP, ont déclaré dans un communiqué que le gouvernement turc poursuivait sa répression contre toute sorte d’opposition démocratique dans le pays, contre le HDP en particulier, en utilisant la pandémie du COVID-19 comme une opportunité pour renforcer son régime autoritaire.
Feleknas Uca et Hişyar Özsoy ont appelé la communauté internationale à ne pas rester silencieuse face à l’utilisation du climat du COVID-19 par le gouvernement turc contre ses citoyens dissidents et pour consolider son régime autoritaire.
Ils ont souligné que « c’est maintenant presque un tabou de critiquer les politiques du gouvernement sur la crise économique ou la santé publique dans le cadre du COVID-19, sans parler des questions brûlantes comme la question kurde ou les invasions militaires en Syrie ».
Uca et Özsoy donnent quelques exemples de la répression : « Selon la Fondation des droits de l’Homme de Turquie (TIHV), entre le 11 mars et le 10 mai, la police est intervenue lors de 8 événements organisés pour protester contre les mesures du gouvernement concernant le Covid-19 et 42 personnes ont été détenues. De plus, une enquête a été ouverte contre deux membres du Parlement pour leurs déclarations critiques sur les mesures du Covid-19, l’un d’eux affirmant que le gouvernement a caché la vérité concernant les cas de coronavirus dans les prisons. Selon le ministère de l’intérieur, au 5 mai 2020, un total de 7 127 comptes de médias sociaux ont fait l’objet d’une enquête en raison de messages concernant le COVID-19 qui auraient « provoqué la panique et le chaos au sein de la population », 496 personnes ont été détenues et 10 arrêtées. En outre, avant et le jour de la fête du travail (1er mai), au moins 64 personnes ont été mises en détention arbitrairement, dont les présidents de certains des plus grands syndicats du pays.
En plus de ces attaques contre la société démocratique (…) la vague de répression plus violente contre le HDP se poursuit. En mars et en mai, 13 autres municipalités du HDP ont été saisies et des gouverneurs nommés illégalement ont remplacé nos co-maires. Le nombre total de municipalités kurdes saisies a ainsi atteint 51 (sur les 65 remportées par le HDP en mars 2019). »
Les deux responsables du HDP ont rappelé que « le 22 mai 2020, la police a mené des raids aux domiciles de nombreux responsables politiques et activistes kurdes et a arrêté 18 personnes – 13 femmes et 5 hommes – à Diyarbakir (Amed). Cette opération spécifique visait principalement les femmes politiciennes kurdes et les activistes de l’Association des femmes Rosa (RKD), du Mouvement des femmes libres (TJA), du Parti des régions démocratiques (DBP) et du HDP. La police a également fait une descente dans le bureau du RKD et a confisqué leurs documents en l’absence de d’avocats. Le RKD a été créé après que toutes les organisations de femmes de Diyarbakir aient été interdites et fermées sous l’état d’urgence en 2016. C’est la seule organisation de femmes de la ville qui s’implique dans le travail de soutien et les luttes contre la violence envers les femmes. Parmi les personnes placées en détention se trouvent de nombreuses figures de l’activisme féminin dans les provinces kurdes ».
Les dirigeants du HDP ont appelé de nouveau, la communauté internationale à ne pas rester silencieuse face aux attaques du gouvernement turc visant ses citoyens dissidents pour consolider son régime autoritaire en pleine pandémie du coronavirus.
Par ailleurs, dans une déclaration récente, le HDP rappelait comment le pouvoir turc continuait à violer la volonté du peuple kurde en s’en prenant systématiquement à ses élus:
Dans une précédente déclaration (24 mars 2020) sur la saisie de nos municipalités, nous avons souligné que le gouvernement turc poursuivait sa politique pernicieuse à l’encontre des Kurdes, même dans le contexte de la crise mondiale liée à la pandémie. Le gouvernement turc profite de la pandémie pour réprimer davantage les institutions démocratiques kurdes, en particulier les municipalités. En plus de saper la démocratie locale et la volonté politique du peuple kurde, il détruit les infrastructures sociales et sanitaires déjà faibles mises en place par les municipalités, ce qui rend les villes concernées encore plus vulnérables à la pandémie.
Le 23 mars, le gouvernement a illégalement saisi huit municipalités kurdes dirigées par le HDP. Moins de deux mois plus tard, le 15 mai, jour de la fête de la langue kurde, cinq autres municipalités kurdes ont été saisies. Il s’agit de Siirt, Iğdır, Kurtalan, Baykan et Altınova, les deux premières étant des chefs-lieux de province et les autres des districts. La police turque a encerclé les municipalités avec des barricades ; nos maires ont été arrêtés après des perquisitions brutales menées à leur domicile très tôt le matin, et remplacés par des « administrateurs », qui ne sont autres pour nous que des agents coloniaux.
Ces dernières saisies portent à 45 le nombre des municipalités du HDP auxquelles le gouvernement turc a assigné des administrateurs depuis les élections locales du 31 mars 2019 où le HDP a remporté 65 municipalités. En outre, 6 comaires du HDP se sont vu refuser leur mandat au lendemain de ces élections, au prétexte qu’ils avaient antérieurement été licenciés par décret-loi pris dans le cadre de l’état d’urgence. Au total, ce sont donc 51 mairies qui ont été saisies.
À ce jour, 21 comaires kurdes élus en mars 2019 sont derrière les barreaux et 5 en garde à vue. Par ailleurs, des dizaines d’anciens maires HDP élus en 2014 sont toujours emprisonnés.
Tout comme dans les cas précédents, ces nouvelles arrestations et nominations de tuteurs ne sont justifiées par aucune décision de justice. Il s’agit de mesures administratives prises par le ministère de l’intérieur. Les accusations portées contre nos maires sont typiques : « soutien au terrorisme ». Dénuées de tout fondement, elles servent juste de prétexte à la destruction des municipalités kurdes.
Comme nous avons déjà eu l’occasion de le souligner, nous luttons simultanément contre deux virus, le COVID 19 et l’autoritarisme raciste dirigé contre les Kurdes et leur volonté démocratique, autrement dit, deux graves problèmes de santé publique.
Une fois de plus, nous appelons la communauté internationale, le Secrétaire général du Conseil de l’Europe, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux et le Comité des régions de l’UE en particulier, ainsi que nos partis frères et tous les tenants de la démocratie à élever la voix et agir contre ces politiques racistes du gouvernement turc qui tente d’ériger le “régime de tutelle” en norme.