TURQUIE – ISTANBUL – Cela fait 24 ans que le journal Ozgur Ulke a été victime d’attentats à la bombe. De nombreux journalistes se sont rencontrés devant le bâtiment d’Özgür Ülke et ont déclaré : « Cette tradition va perdurer. »
La plate-forme des femmes journalistes de Mezopotamya et l’Initiative pour des journalistes libres ont fait une déclaration à la presse devant le bâtiment d’Özgür Ülke (Pays libre), qui a été victime d’attentats à la bombe il y a 24 ans.
Rassemblés devant le bâtiment bombardé du journal, les journalistes ont ouvert une banderole sur laquelle on pouvait lire : « La liberté de la presse ne peut être réduite au silence. » Ils portaient les photos des journalistes qui ont perdu la vie dans l’attentat.
S’exprimant lors de la déclaration à la presse, la porte-parole de la Plate-forme des journalistes de Mezopotamya Ayşe Güney a déclaré qu’aucun progrès n’avait été réalisé dans l’enquête lancée sur l’affaire d’attentats contre Ozgur Ulke depuis 24 ans.
35 autres journaux ont fait leur apparition après Özgür Ülke
Rappelant que « 35 autres journaux suivant la tradition de la presse libre sont sortis après le journal Özgür Ülke », Güney a déclaré : « Alors que certains de ces journaux ont été fermés en quelques jours, d’autres l’ont été en quelques semaines. Enfin, le journal Özgürlürlükçü Demokrasi (Démocratie libertaire) a été fermé le 28 mars 2018 (…). Lorsque le journal a été perquisitionné par des policiers et le syndic qui les accompagnait, un syndic a également été nommé à l’imprimerie de Gün, où le journal a été imprimé, et ses employés ont été arrêtés. »
Eren : « L’attitude envers les journalistes n’a pas changé »
Le président du syndicat de la presse Faruk Eren a déclaré : « C’est un triste jour, une triste période pour les journalistes. Des dizaines de nos amis sont allés en prison. Il y a des milliers de procès intentés contre nos amis journalistes. L’attitude à l’égard des journalistes n’a toujours pas changé. Des dizaines de journalistes d’Abdi İpekçi à Uğur Mumcu, de Musa Anter à Metin Göktepe, de Kadri Bağdu à Hrant Dink ont été assassinés. »
Keskin : « Cette tradition perdurera »
La coprésidente de l’Association des droits de l’Homme (IHD), Eren Keskin a déclaré : « Plusieurs de ses chroniqueurs, distributeurs de journaux ont été massacrés, mais cette tradition n’a pas pris fin. Cette tradition est toujours d’actualité. C’est l’exemple d’un journalisme qui s’est donné pour mission de faire connaître les chagrins et les souvenirs interdits d’une géographie interdite. Et cette tradition a subi de sérieuses pressions pour cette raison. »
Hamzaoğlu : « Il sera trop tard dans le futur »
Le porte-parole du Congrès démocratique des peuples (HDK) Onur Hamzaoğlu a également souligné que le journal Özgür Ülke « a été attaqué par ceux qui ne supportaient pas la presse libre » et a souligné que « la presse libre est nécessaire non seulement pour nous, mais aussi pour tous les peuples du pays ».
Oluç : « Nous avons grandi et devenus plus nombreux »
Dans son discours, le porte-parole du Parti démocratique des peuples (HDP), le député Saruhan Oluç a souligné que l’attaque qui a été menée il y a 24 ans n’a pas été couronnée de succès : « S’il y a une presse libre, alors, cela signifie qu’il y a une possibilité de changement dans l’avenir. C’est pour ça qu’ils ont mis le feu il y a 24 ans. Ce feu les a brûlés aussi. Mais nous avons grandi et augmenté en nombre. »
QUE S’EST-IL PASSÉ ?
Le 3 décembre 1994, des bombes ont explosé au siège technique du journal Özgür Ülke, situé à Istanbul/Kadırga, au bureau central à Cağaloğlu et au bureau d’Ankara.
L’attaque à la bombe a tué Ersin Yıldız (32 ans), transporteur, et blessé 23 travailleurs.
À la suite de l’explosion, le journal n’a pu fonctionner qu’avec la solidarité d’autres journaux socialistes, le personnel d’Özgür Ülke travaillant dans leurs bureaux.
Le 4 décembre 1993, le journal était publié avec 4 pages intitulées « Ce feu vous brûlera aussi. »
Environ 15 jours après l’attentat, le journal Özgür Ülke a publié un article sur un document secret signé par la Première ministre de l’époque Tansu Çiller.
Le document citait ce qui suit avec une référence directe au journal :
« Les activités des médias soutenant les [organisations] séparatistes (…) sont récemment devenues une menace manifeste pour l’avenir de l’Etat [turc] et ses valeurs morales. Afin d’éliminer cette menace contre l’unité du pays et de la nation, des mesures doivent être prises … »