SYRIE / ROJAVA – Mustafa Jamil Sheikho, un jeune Kurde de 18 ans, a été abattu par des mercenaires de l’occupation turque alors qu’il surveillait les panneaux solaires contre du vol dans la région d’Afrin.
Des sources locales ont rapporté le meurtre de Mustafa Jamil Sheikho, né en 2007 et originaire du village de Haj Hassani dans le district de Jandaris, à une heure du matin alors qu’il gardait des panneaux solaires pour les protéger du vol.
Selon les sources, le jeune homme a été tué par des mercenaires de l’occupation turque.
L’incident a déclenché une colère publique généralisée parmi les résidents locaux, qui appellent à la fin des violations répétées visant la population d’Afrin.Malgré l’effondrement du régime d’Assad dans la région et le contrôle formel des centres de sécurité par les forces de sécurité générale sous le gouvernement de transition syrien, les bases militaires turques restent actives à Afrin.En outre, de nombreuses factions armées, initialement prévues pour être intégrées au ministère syrien de la Défense, ne se sont pas encore retirées et continuent à commettre des crimes de guerre et crimes contre l’humanité dans la région kurde d’Afrin occupée en mars 2018 par la Turquie et ses mercenaires alliés.
IRAN / ROJHILAT – Dans le sillage de la guerre en cours entre la République islamique d’Iran et Israël, les services de sécurité iraniens ont lancé une vague d’arrestations arbitraires dans plusieurs villes signale l’ONG kurde Hengaw. Les personnes arrêtées sont accusées d’« espionnage pour le compte du Mossad », de « soutien médiatique à Israël » et de « trouble à l’opinion publique ». La plupart des personnes arrêtées sont des civils et des utilisateurs des réseaux sociaux.
Selon les informations obtenues par l’Organisation Hengaw pour les droits humains, des dizaines de personnes, dont des militants de la société civile, des utilisateurs des réseaux sociaux, des professeurs d’université et même des ouvriers, ont été arrêtées lors de cette vague de répression. Ces arrestations s’inscrivent dans le cadre des mesures de représailles et de répression de la République islamique d’Iran et ont été menées au mépris des normes fondamentales des droits humains.Arrestations sans procès équitable et aveux forcésL’enquête de Hengaw révèle que ces arrestations ont eu lieu en dehors de toute procédure judiciaire équitable. De nombreux détenus ont été soumis à des pressions lors des interrogatoires et contraints à des aveux. Les médias d’État ont ensuite utilisé ces aveux obtenus sous la contrainte pour justifier de nouvelles arrestations.Les médias officiels iraniens ont reconnu ce modèle, déclarant :« Compte tenu des aveux obtenus auprès des agents du Mossad arrêtés, le Mossad opère à travers un réseau dont les membres ne se connaissent souvent pas et sont dirigés par des opérateurs étrangers. »Nombre de détenus par villeSelon les rapports officiels publiés par les médias affiliés à l’État iranien, les arrestations suivantes ont été confirmées :Baneh, province du Kurdistan (Sanandaj) – 1 personne accusée d’« espionnage pour le compte du Mossad »Ilam – 1 personne dans une garnison militaire accusée d’« espionnage pour le compte du Mossad »Lorestan – 18 personnes accusées de « trouble à l’ordre public »Savojbolagh, province d’Alborz – Deux personnes inculpées d’« appartenance au Mossad » et de « collaboration sécuritaire avec l’ennemi »Fashafouyeh et province du sud de Téhéran – 3 personnes inculpées d’« appartenance au Mossad », de « possession d’explosifs », de « détention de drones » et d’« espionnage »Ardabil – Cinq personnes arrêtées pour activité sur les réseaux sociaux, accusées de « trouble à l’opinion publique »Téhéran – 28 personnes accusées de faire partie d’un réseau opérationnel lié à IsraëlIspahan – 16 personnes arrêtées ; des poursuites judiciaires ont été ouvertes contre 60 autres personnes accusées de « soutien médiatique à Israël », de « propagande contre l’État », d’« insulte aux martyrs » et de « trouble à l’opinion publique ».Golestan – 3 personnes inculpées pour « trouble à l’opinion publique »Mazandaran – 15 personnes accusées de « propagation de fausses informations » et de « trouble à l’opinion publique »Semnan – 21 personnes arrêtées pour activités sur les réseaux sociaux, accusées de « troubler l’opinion publique »Hormozgan – 14 personnes accusées de « propager des rumeurs liées à Israël »Kerman – Deux personnes inculpées de « soutien médiatique à Israël »Lali, province du Khuzestan – 4 personnes arrêtées pour « activité de propagande en faveur d’Israël sur les réseaux sociaux »Province de Shahrekord, Chaharmahal et Bakhtiari – 1 personne accusée de « création de troubles psychologiques dans la société »Par ailleurs, selon un rapport vérifié obtenu par Hengaw, au moins 18 jeunes filles de moins de 18 ans ont été arrêtées le mardi 17 juin par les services de renseignement de Mahabad pour avoir publié sur les réseaux sociaux des contenus liés à la guerre Iran-Israël. Après plusieurs heures d’interrogatoire et l’ouverture d’une procédure judiciaire, elles ont été libérées sous caution.Répression numérique : les utilisateurs des réseaux sociaux comme principales ciblesD’après les enquêtes de terrain menées par Hengaw et les preuves recueillies, de nombreux détenus ont été ciblés uniquement en raison de leurs activités sur les réseaux sociaux, notamment pour avoir exprimé des opinions sur la guerre Iran-Israël ou critiqué la politique intérieure. Certaines arrestations semblent avoir pour but de semer la peur et de restreindre la liberté d’expression en ligne. Ces actions reflètent les efforts plus vastes déployés par les services de sécurité pour renforcer le contrôle d’Internet et réprimer la dissidence.La justice ordonne des poursuites rapides face au risque d’exécutions extrajudiciairesFace à la vague croissante d’arrestations arbitraires, Gholamhossein Mohseni-Ejei, président de la Cour suprême iranienne, a ordonné la « poursuite et la sanction immédiates » des personnes arrêtées pour des accusations liées à Israël. De nombreux détenus sont incarcérés dans des centres de détention sécuritaires, sans accès à un avocat, soumis à de fortes pressions et à des interrogatoires prolongés.Cette directive constitue une violation flagrante du droit à un procès équitable et de la présomption d’innocence, et est perçue comme faisant partie d’une campagne de représailles en réponse aux attaques israéliennes. Les décisions judiciaires accélérées, sans procédure régulière, suscitent de vives inquiétudes quant aux exécutions extrajudiciaires et expéditives.Menaces officielles et conditions de détention difficilesLe ministère du Renseignement et l’organisation de renseignement du CGRI ont tous deux publié des déclarations menaçant de punir toute collaboration réelle ou perçue avec Israël de la « punition maximale ». Ces menaces sont proférées alors que les détenus sont maintenus au secret, privés de toute représentation juridique et maintenus sous la contrainte dans des centres de sécurité.Le 12 juin, le procureur général iranien a publié une déclaration avertissant que les médias et les utilisateurs des réseaux sociaux qui publieraient des contenus « portant atteinte à la sécurité mentale publique » s’exposeraient à des poursuites judiciaires. Parallèlement, l’agence de presse Mizan a rapporté que les autorités engageraient des poursuites judiciaires contre ce qu’elle qualifie de « faux contenus ». Ces actions s’inscrivent dans la stratégie actuelle de l’État visant à réprimer la liberté d’expression et à renforcer le contrôle de la sphère publique.Arrestations de militants civils et universitairesHengaw avait déjà signalé l’arrestation de plusieurs personnes lors de cette dernière vague de répression. Le 13 juin, Motahareh Gouneh’i, militante étudiante et ancienne prisonnière politique, a été arrêtée et emmenée dans un lieu tenu secret après avoir exprimé publiquement son opinion sur les attaques israéliennes. À la même époque, Masoumeh Shahnavaz, enseignante à la retraite, a été arrêtée à Sabzevar après une descente des forces de sécurité à son domicile.Mostafa Mehraeen, sociologue et professeur d’université, a également été arrêté et transféré à la prison d’Evin après avoir publié une lettre ouverte adressée à Ali Khamenei. Ces arrestations reflètent la poursuite de la politique de répression menée par l’État contre les voix civiles et universitaires.Exécution d’Esmail FekriAu quatrième jour de la guerre Iran-Israël, Esmail Fekri, un habitant de Téhéran précédemment condamné à mort pour « espionnage au profit d’Israël », a été exécuté. Cette exécution a eu lieu malgré de graves vices de procédure et en violation des normes d’équité des procès.Hengaw avait auparavant mis en garde contre le risque d’exécutions de prisonniers politiques, considérant de tels actes comme faisant partie des stratégies répressives et de vengeance de la République islamique d’Iran en réponse aux crises extérieures et à la dissidence intérieure.Hengaw condamne la répression et appelle à une action internationale contre les arrestations arbitrairesL’Organisation Hengaw pour les droits humains condamne fermement cette vague d’arrestations arbitraires. Elle affirme que, sous couvert de conflit extérieur, la République islamique d’Iran a intensifié sa répression intérieure, utilisant des accusations liées à la sécurité pour restreindre la liberté d’expression et les activités en ligne des citoyens et des militants. Hengaw appelle les organisations internationales de défense des droits de l’homme à agir immédiatement et à mettre en place un contrôle indépendant des conditions de détention.
SUISSE – Les autorités suisses ont arrêté la femme politique kurde Şükriye Erol qu’elles veulent livrer à la Turquie. Şükriye Erol, qui a demandé l’asile politique en Suisse en décembre 2022, est actuellement détenue à l’aéroport de Zurich en attendant son extradition vers la Turquie où elle risque la prison, voir la torture et mauvais traitements.
Les activistes kurdes ont lancé une pétition exigeant la libération immédiate de Şükriye Erol. (Pétition à signer ici: Non à l’expulsion de Sukriye Erol)
Le fils d’Erol, Seyfettin Erol, a déclaré que sa mère était engagée en politique en Turquie depuis plus de trente ans et avait été coprésidente des partis politiques kurdes HDP et du DBP. Il a ajouté que la famille avait dû quitter le pays pour des raisons politiques. Il a également rappelé que leur père avait été tué par les forces de l’ordre à Mardin en 1992.
Les médias kurdes rapportent que Şükriye Erol, convoquée ce matin au Bureau des migrations de Glaris dans le cadre de la procédure d’extradition, a été invitée à signer les documents de rapatriement, mais a refusé. Erol aurait alors été menottée dans le dos et trainée au sol par la police qui l’a emmenée de force à l’aéroport de Zurich pour être extradée vers la Turquie.
Acculé par les attaques incessantes israéliennes, le régime sanguinaire iranien semble vivre ses dernières heures. Les Kurdes du Rojhilat sous l’occupation iranienne retiennent leur souffle, espérant ne pas servir de bouc émissaire aux mollahs iraniens, ni ceux qui les remplaceront (il semblerait que l’Israël mise sur le retour du fils du Shah chassé d’Iran avant la prise du pouvoir par l’Ayatollah Khomeini). Les Kurdes veulent pouvoir enfin vivre libres sur leurs terres, loin des massacres et des politiques d’assimilations forcée subis depuis plus d’un siècle dans les 4 parties du Kurdistan colonisé.
Concernant l’opportunité que l’affaiblissement du régime iranien pourrait représenter pour les Kurdes, Nazile Afkhami, militante kurde réfugiée en Suisse et membre de l’Institut Kurde de Lausanne ainsi que de l’ONG féministe Femmes du Kurdistan (Women of Kurdistan), a écrit:
« À toutes mes amies et tous mes amis européens, qui ne connaissent pas vraiment la réalité de l’Iran et pensent que la situation peut se résoudre par le dialogue :Nous, les [Kurdes], n’avons jamais recherché la guerre. Nous sommes un peuple opprimé depuis plus d’un siècle. Nous avons vécu avec nos souffrances, appris à résister, à persévérer, à survivre. Et surtout, à travers nos organisations, nos associations et nos partis politiques, nous avons fait un choix essentiel : ne pas laisser notre identité nous être arrachée.Imaginez l’effort que cela représente depuis cent ans, dans un pays qui nous a systématiquement niés. Nous n’avons jamais eu le droit d’être éduqués dans notre langue maternelle. On nous a forcés à renier notre identité. Nous avons été soumis aux lois d’un État qui ne nous a offert que répression, marginalisation et mort.En 1946, nous avions fondé la République du Kurdistan à Mahabad. Quelques mois plus tard, le régime Pahlavi l’a brutalement écrasée. Notre président Peshawa [Qazi Muhammad] et ses compagnons ont été exécutés sur la place publique.Oui, nous avons toujours voulu négocier avec les États qui occupent nos terres. Mais la réponse a toujours été la même : la violence.Connaissez-vous le docteur Abdulrahman Ghassemlou, notre leader kurde ?Il s’était rendu à Vienne pour négocier avec des représentants du régime iranien. Il y a été assassiné en 1989, avec ses compagnons.Et le docteur Sadegh Sharafkandi ? (Secrétaire général du parti politique du Kurdistan iranien) Lui aussi a été assassiné, en 1992, à Berlin, par des agents du régime iranien.Combien de fois nos partis politiques ont tendu la main, proposé un dialogue, simplement exigé la reconnaissance de nos droits ?Et à chaque fois, on nous a répondu par la prison, la torture, l’exécution.Connaissez-vous Ramin Hossein Panahi ? Il avait 23 ans lorsqu’il a été exécuté. Sa mère, #Daya_Sharifa, cherche encore son corps.Et Zeynab Jalalian ? Elle est en prison depuis ses 25 ans, elle est condamnée à perpétuité, simplement pour avoir appartenu à un parti politique kurde. Elle y est toujours détenue aujourd’hui.Et ce ne sont là que quelques noms parmi des milliers de Kurdes assassinés ou emprisonnés.Dans cet État, les femmes n’ont aucun droit fondamental : elles ne peuvent ni travailler ni voyager sans l’autorisation de leur mari.Et les femmes [kurdes], comme celles d’autres peuples opprimés, subissent une double discrimination.On nous a imposé des prénoms iraniens, une langue étrangère, une identité fabriquée. On nous a arraché notre dignité, brisé notre esprit. Et plus récemment le mouvement [Jin Jiyan Azadî] (…) a été écrase dans le sang. Et c’est pour cette raison que, oui : l’attaque d’Israël contre l’Iran peut, pour nous, être une opportunité. Non pas parce que nous aimons la guerre, mais parce qu’elle peut affaiblir ou renverser un régime criminel, colonial, inhumain.Une fin amère attend ce régime. Un début joyeux nous attend, nous, les peuples opprimés. »
IRAN / ROJHILAT – Les Kurdes du Rojhilat sous colonisation perse semblent être le bouc émissaire idéal pour le régime iranien qui encaisse les attaques armées israéliennes, comme dans le passé. Chaque fois que les États impérialistes occupant le Kurdistan sont au pied du mur, ils s’en prennent à la population kurde sans défense! Même si le massacre des Kurdes ne suffira pas aux mollahs iraniens détestés par leur propre peuple de garder le pouvoir, ils vont commettre un énième massacre kurde avant de finir dans les poubelles de l’Histoire.
IRAN / KURDISTAN – L’Association des femmes libres du Kurdistan oriental (en kurde: Komelgeha Jinên Azad a Rojhelatê Kurdistanê, KJAR) déclare que la lutte démocratique des femmes mènera à la liberté, et non à la guerre entre États-nations, ajoutant que: « Sans la présence des femmes, on ne peut pas parler d’un avenir libre pour l’Iran. »
Dans une déclaration concernant la guerre en cours entre Israël et l’Iran, la Société des femmes libres du Kurdistan oriental (KJAR) a souligné que les guerres entre États-nations ne sont pas une voie vers la liberté pour les sociétés.
Voici le communiqué du KJAR publié aujourd’hui:
Au cinquième jour de la guerre entre l’Iran et Israël, Israël a lancé de lourdes attaques contre des centres militaires, des médias d’État et des hôpitaux dans plusieurs villes iraniennes. La République islamique a également mené plusieurs frappes de représailles. Il est clair que la guerre va se poursuivre, causant de nouvelles victimes et de nouvelles destructions.Cette guerre en cours est le résultat de politiques préconçues du système capitaliste, qui visent à créer un nouveau paysage géopolitique au Moyen-Orient, ciblant cette fois le régime iranien. La guerre d’Israël contre l’Iran vise à contraindre le régime à opérer des changements conformes à l’ordre mondial. Autrement dit, l’objectif des récentes négociations était de légitimer les assauts actuels.Dans les guerres entre États-nations, ce sont les sociétés, et en particulier les femmes et les enfants, qui paient le plus lourd tribut. Le conflit entre Israël et l’Iran ne fait pas exception. Cependant, il est important de rappeler que la République islamique mène une guerre contre sa propre société, et en particulier contre les femmes, depuis des années, par le biais d’exécutions, de féminicides et de la propagation de la pauvreté et du chômage. La rupture fondamentale entre la République islamique et la société, et en particulier les femmes, remonte à loin, et cette guerre ne fera que l’accentuer et la rendre plus visible.Il faut souligner que cette guerre n’est pas une guerre de libération des sociétés, notamment des femmes. Les revendications des peuples, et en particulier des femmes, ne figurent pas à l’ordre du jour d’Israël ou de l’Iran. Les représentants des États-nations scandant des slogans tels que « Jin, Jiyan, Azadî » (Femme, Vie, Liberté) ne peuvent annoncer la liberté ni promettre un avenir radieux à la société, surtout s’ils ne comprennent pas véritablement l’importance des luttes des femmes.Il faut rappeler que « Jin, Jiyan, Azadî » n’est pas un slogan destiné à gagner l’opinion publique en Iran, en particulier parmi les femmes, mais plutôt l’expérience vécue de femmes et d’hommes qui ont risqué leur vie au cours des trois dernières années en transformant les rues en un champ de bataille pour la liberté.Les mouvements démocratiques menés par des femmes ont démontré que leurs objectifs concordent avec la création d’une vie libre pour tous les segments de la société iranienne. Cependant, atteindre ces objectifs nécessite de s’éloigner du centralisme, des dogmes religieux, du patriarcat et du nationalisme. La guerre entre les États-nations et le système capitaliste mondial n’offre aux femmes qu’un choix entre le pire et le pire, qui leur sont imposés. Pourtant, les femmes ne se sont pas contentées de s’opposer à cet état d’esprit ; elles sont également devenues les porte-drapeaux et les leaders du combat pour la liberté et la démocratie en Iran, au Moyen-Orient et au-delà.La révolution « Jin, Jiyan, Azadî » est un exemple clair du leadership des femmes dans la démocratisation de la société.KJAR souligne l’importance de l’organisation et du renforcement de la base pour la liberté de la société, et en particulier des femmes. Dans un contexte de guerre entre pouvoirs autoritaires et systèmes patriarcaux, KJAR souligne qu’il n’existe aucune lueur d’espoir, de liberté ou d’égalité. C’est pourquoi KJAR appelle tous ses membres et groupes en Iran à s’unir et à faire preuve de solidarité en créant des comités populaires et des organisations populaires dans tout le pays.KJAR appelle également toutes les femmes des partis et organisations œuvrant pour la liberté à collaborer et à s’unir pour les femmes en Iran. La création de structures transpartisanes au Kurdistan et d’organisations transnationales en Iran est une étape cruciale vers l’instauration de la démocratie. Sans la présence des femmes, on ne peut pas parler d’un avenir libre pour l’Iran. (ANF)
L’anthropologue Felix Padel a déclaré que l’appel historique du chef kurde Abdullah Öcalan était une « avancée incroyable », ajoutant que : « Le modèle de confédéralisme démocratique, qui a été mis en place dans une certaine mesure au Rojava, est quelque chose dont le monde doit absolument s’inspirer, si l’humanité veut progresser vers la prochaine étape du début d’une civilisation démocratique. »
L’« Appel à la paix et à une société démocratique » lancé le 27 février par le leader du peuple kurde Abdullah Öcalan continue de faire écho. Suite à cet appel, le PKK a convoqué son 12e congrès et décidé de mettre fin à ses activités. Cette décision, inscrite à l’ordre du jour mondial, a commencé à être débattue dans de nombreux cercles.
L’anthropologue Félix Padel, qui a étudié aux universités d’Oxford et de Delhi et est bien connu pour son travail sur la vie et les luttes environnementales des peuples autochtones en Inde, en particulier les communautés Adivasi, est impliqué dans les campagnes du mouvement kurde depuis de nombreuses années.
L’Agence Mezopotamya (MA) a interviewé Padel concernant le paradigme et l’appel d’Abdullah Öcalan.
L’APPEL EST UNE AVANCÉE INCROYABLE
Qualifiant l’appel d’Abdullah Öcalan d’avancée « incroyable », Padel a souligné que cet appel devait être réciproque en Turquie. « Erdogan a, d’une certaine manière, acquis une grande crédibilité à l’échelle internationale grâce à sa position sur la question palestinienne. Et, bien sûr, certains d’entre nous pourraient y voir une certaine hypocrisie, alors qu’il commet également ce qui peut être considéré comme un génocide contre le peuple kurde. Il gagnera beaucoup plus de crédibilité s’il apporte une réponse concrète à la question kurde, en répondant véritablement au geste du PKK. »
LA LIBÉRATION D’ÖCALAN
Soulignant les déclarations claires et efficaces d’Abdullah Öcalan sur les structures démocratiques, Padel a affirmé que ces structures devraient être renforcées dans tous les pays, y compris au Royaume-Uni et en Inde. Affirmant que la libération d’Abdullah Öcalan ne se résume pas à une revendication individuelle de droits, Padel a rappelé que, dans de nombreuses régions du monde, des personnes sont emprisonnées pour des motifs controversés. Padel a rappelé qu’en Inde comme en Turquie, de nombreux acteurs de la lutte des Adivasis, peuple autochtone, sont emprisonnés sur la base de « fausses accusations » et a exprimé la nécessité d’une prise de conscience collective. « Si ce geste pouvait être fait pour libérer Öcalan, cela libérerait bien plus que la liberté d’un seul homme », a-t-il conclu.
LA DÉCISION DU PKK
Commentant les décisions du congrès du PKK, Padel a déclaré : « Comme d’autres, je réclame depuis des années que le PKK soit démantelé. De toutes les luttes armées dans le monde, celle-ci est l’une des rares où je soutiens le recours fréquent à la lutte armée, sachant aussi combien de fois ils ont appelé à la paix ou fait des gestes en ce sens. Je pense donc que c’est un acte très courageux. Et encore une fois, cela nécessite une réponse de l’État turc. Ce n’est pas seulement en Turquie, mais aussi dans le nord de l’Irak et au Kurdistan. Cette militarisation doit cesser. Cet appel au désarmement et à la cessation d’activité du PKK peut sembler paradoxal. Mais je pense qu’il doit être perçu comme un geste de force, un geste incroyablement positif dans le contexte actuel. Et je dis cela en tant que partisan du PKK, car il lutte depuis des années pour les droits fondamentaux contre l’impunité des militaires, etc., et il a fait de nombreux gestes de paix. »
Rappelant l’accord de paix signé en Colombie en 2016 entre les FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie) et l’État après plus de 50 ans de conflit armé, Padel a déclaré : « Le désarmement a été extrêmement problématique. Des centaines de membres des FARC ont été assassinés depuis. Il faudra donc une prise de conscience absolue des dangers liés à la suppression des armes. Si la police et l’armée agissent en toute impunité, il est fort probable qu’elles le resteront. Il faut donc agir avec la plus grande prudence. »
Notant que le droit international et les droits humains ont été bafoués avec les attaques contre Gaza et la réélection de Trump, Padel a déclaré : « Les droits humains doivent être placés au centre de tout ce qui est appelé développement. »
« LE MODÈLE DE CONFÉDÉRALISME DÉMOCRATIQUE »
Affirmant que l’idée de confédéralisme démocratique d’Abdullah Öcalan est essentielle à la protection des droits humains et au développement de la démocratie, Padel a déclaré : « Nous avons un modèle de démocratie qui existe même en Grande-Bretagne, et certainement en Inde, qui est considérée comme la plus grande démocratie du monde. Ce n’est pas très démocratique, car de nombreuses décisions sont prises à huis clos, car les groupes de pression, qui sont souvent les entreprises d’armement, le lobby sioniste ou d’autres, exercent une grande influence sur les politiciens. »
Padel a ajouté : « Lorsqu’un gouvernement tombe et que l’opposition arrive au pouvoir, il n’y a pas de continuité politique. Ce n’est pas très démocratique. Le modèle de confédéralisme démocratique, qui a été mis en place dans une certaine mesure au Rojava, est un modèle dont le monde doit absolument s’inspirer si l’humanité veut progresser vers l’avènement d’une civilisation démocratique. »
L’ÉCOLOGIE
S’exprimant sur l’écologie sociale, qui occupe une place importante dans le paradigme d’Abdullah Öcalan, Padel a déclaré : « Les ressources mondiales ne sont pas gérées de manière durable, c’est le moins qu’on puisse dire. On se concentre sur le pétrole et bien plus encore. Il faut savoir comment gérer l’eau, les terres, les forêts et les minéraux. Et est-ce au bénéfice des populations ? Puisque la majeure partie de l’argent est investi dans la guerre, est-ce uniquement pour tous les pays dits développés ? Si on les regarde, l’industrie de l’armement est au cœur de leur économie, y compris la Grande-Bretagne. Et cela doit changer. Ce sera très difficile. Mais ces intérêts particuliers dans la guerre et les conflits doivent changer. Car les écosystèmes terrestres sont en train d’être détruits. Je peux citer une centaine d’écosystèmes en Inde qui sont gravement menacés. Et pour être franc, ils ne sont pas menacés par les émissions de carbone. Ils sont menacés par les processus d’extraction de l’eau, avec la construction de barrages et l’exploitation de l’eau, et par l’utilisation non durable de l’eau. Terre. Intérêts à court terme, les écosystèmes sont complètement dévastés. C’est donc la meilleure façon pour Öcalan d’apprendre de Murray Bookchin et d’autres, et de véritablement intégrer cela à ce qui était au départ une vision marxiste-léniniste traditionnelle. C’est là encore un sujet d’une importance capitale pour le monde entier. »
LA JINÉOLOGIE
Padel a déclaré que la liberté des femmes occupe une place essentielle dans le paradigme d’Öcalan et a attiré l’attention sur le point où en est arrivée la jinéologie (Science des femmes). Padel a ajouté que la compréhension d’Öcalan selon laquelle les femmes constituent la principale classe opprimée au monde l’a profondément marquée et que les femmes avec lesquelles elle s’est entretenue étaient du même avis : « Je n’ai jamais entendu de meilleures oratrices que les femmes kurdes. Je pense que c’est parce que la lutte en Turquie s’est menée à la fois contre le patriarcat interne de la société kurde ou turque, et contre l’ennemi extérieur. C’est une idée fondamentale. Toute lutte pour la liberté doit s’opposer aux idées patriarcales sexistes, ainsi qu’aux ennemis extérieurs. Et si un mouvement ne travaille pas sur ce point, il ne sera pas démocratique. La jinéologie est donc pour moi l’une des idées les plus importantes. »
« CHACUN DOIT PRENDRE SES RESPONSABILITÉS »
Critiquant l’attitude des médias grand public et du monde universitaire envers la lutte pour la liberté des Kurdes, Padel a déclaré que la raison du silence est liée à des préoccupations de carrière et de statut. Soulignant la nécessité pour les citoyens de s’unir et de faire entendre leur voix, Padel a déclaré : « Nous constatons une forme d’unité à travers le monde, de la part des peuples du monde, y compris Erdogan en Turquie. Si les gens peuvent prendre conscience de cette situation, ils doivent aussi prendre conscience du génocide kurde, qui dure depuis longtemps. Parce que les médias n’en ont pas suffisamment parlé, les gens sont souvent moins conscients, mais c’est quelque chose d’extrêmement important. Je considère le peuple kurde comme l’un de ces peuples présents depuis la nuit des temps. Dans les écrits d’Öcalan, je perçois cette conscience. Et comme je suis étudiant en histoire ancienne, j’en comprends parfaitement la force. On pourrait dire que le peuple kurde a résisté à l’assimilation dans l’Empire sumérien il y a 5 000 ans. Et il est en première ligne pour refuser l’assimilation dans un État-nation oppressif. Et je pense aussi à ce qu’Öcalan a écrit sur son enfance en Turquie, lorsqu’il a été contraint d’aller à l’école. « Dire : « Je suis turc et je parle turc. » C’est à ce genre d’assimilation que les gens résistent de plus en plus en Équateur, en Inde et ailleurs. Il est donc nécessaire que chacun prenne davantage ses responsabilités et fasse front commun face à ces enjeux cruciaux auxquels le monde est confronté, à une époque où la guerre est devenue le principal business. »
TURQUIE / KURDISTAN – Le vœu de la célèbre dengbêj (chanteuse) kurde, Ayşe Şan décédée il y a 29 ans à Izmir, a été exaucé aujourd’hui avec son inhumation au cimetière de Yeniköy, à Amed (Diyarbakir). Des femmes ont porté le cerceuil, ramené d’Izmir, sur leurs épaules, en scandant le slogan « Jin, jiyan, azadî » (Femme, vie, liberté) jusqu’à sa nouvelle tombe.
La co-maire de la municipalité métropolitaine de Diyarbakır, Doğan Hatun, a déclaré que le vœu d’Ayşe Şan (Eyşe Şan) s’était exaucé aujourd’hui : « Bienvenue sur ta terre. »Le député Serhat Eren a salué la contribution culturelle et la détermination d’Eyşe Şan : « Elle est allée jusqu’à Bagdad pour chanter en kurde. Elle a traversé de grandes épreuves, mais elle n’a jamais baissé les bras. Elle a résisté. Elle a œuvré avec acharnement pour le développement de la langue kurde. »Le fils d’Ayşe Şan aux côtés de la maire de Diyarbakir (à droite)
Vingt-neuf ans après le décès d’Eyşe Şan, son fils Murat Kersen a fait part de ses sentiments concernant l’accomplissement des volontés de sa mère à l’Agence Mezopotamya (MA). Il a expliqué qu’il n’avait pas pu ramener le corps de sa mère à Amed pendant de nombreuses années pour diverses raisons. Kersen a déclaré : « Ma mère est maintenant réunie avec nous, avec vous et son peuple. Désormais, elle est confiée au peuple kurde. Vous viendrez ici plus souvent que nous, vous prendrez soin d’elle. Tous les Kurdes viendront ici. C’était une artiste qui appartenait au peuple kurde. Je suis heureux qu’elle soit réunie avec le peuple kurde. (…) Ma mère est sous votre protection. »« Elle est retournée à sa maison, à sa terre »
Elif Kersen, la petite-fille d’Ayşe Şan, a déclaré : « C’était un peu tard, mais elle a retrouvé ses proches. Elle est rentrée chez elle, sur sa terre. Je pense que son âme trouvera la paix. J’espère qu’elle recevra de nombreuses prières. Ses proches viendront prier. Nous n’avons aucun autre souhait. Sa volonté a été accomplie. J’espère que chacun lui témoignera l’amour et l’attention qu’elle mérite. »La jeune musicienne, Sarya Ertaş chante Hey wax dayê [Ô mère] sur la tombe d’Ayşe Şan
Qui était Ayşe Şan ?
Ayşe Şan (Eyşe Şan), reine de la musique kurde ayant subi la double oppression (le patriarcat et le colonialisme) en tant que femme et kurde, nous a quitté le 18 décembre 1996 à l’âge de 58 ans.
Née à Diyarbakır (Amed), Eyşe est considérée comme l’une des plus grands chanteurs de la musique kurde contemporaine.
Le père d’Eyşe était un dengbêj (conteur kurde traditionnel). Eyşe commence à chanter à soirées de chant traditionnels, puis, à partir de 1958, malgré l’opposition de sa famille, a se produire en public.
Après une tentative infructueuse de mariage, qui lui avait été imposé, elle s’est installée à Antep (Dilok), où elle a commencé à enregistrer des chansons turques pour la radio locale, chanter en kurde étant alors interdit. Puis, elle est partie à Istanbul, où elle enregistre son premier album en langue kurde en 1963. La première chanson qui contribue à sa notoriété est Ez Xezalım [Je suis une gazelle]. En 1972, suite à des tracas administratifs, elle s’est installée en Allemagne. Une de ses chansons les plus connues, Qederê [Oh le destin], est écrite après la mort de sa fille de 18 mois.
En 1979, elle s’est rendue au Kurdistan irakien, où elle a rencontré de nombreux musiciens et chanteurs kurdes telles que Mihemed Arif Cizîrî, Îsa Berwarî, et Tahsin Taha. Le morceau d’Arif Cizîrî, Eysana Elî, lui est dédiée. À partir de années 1980, elle s’est installée à Izmir. Dans les années 1990, elle écrit en réaction à l’oppression des Kurdes des chansons telles que Werin pêsmerge [Venez les combattants kurdes]. Elle a écrit également des chansons sur la condition des femmes telles que Derdê hewîyê [Chagrin de polygamie] ou encore Hey wax dayê [Ô mère]. tout sa vie, elle a dû faire face à la double oppression (le patriarcat et le colonialisme).
TURQUIE / KURDISTAN – La célèbre dengbêj kurde, Ayşe Şan (Eyşe Şan), a été inhumée par les femmes avec des slogans « Jin, jiyan, azadî » (femme, vie, liberté) dans sa ville natale de Diyarbakir (Amed) 29 ans après sa mort à Izmir. La diva kurde avait demandait à être enterrée dans sa ville natale.
Ayşe Şan a été inhumée après une cérémonie au cimetière de Yeniköy, dans le district de Rezan. Des femmes, des députés du DEM Parti, des co-maires de la municipalité métropolitaine de Diyarbakir, des intellectuels, des écrivains, des représentants de la société civile kurde, des militantes du Mouvement des femmes libres (TJA) et le fils d’Ayşe Şan et ses proches assisté à la cérémonie d’enterrement d’Ayşe Şan.
La co-maire de la municipalité métropolitaine de Diyarbakır, Doğan Hatun, a déclaré que le vœu d’Ayşe Şan s’était exaucé aujourd’hui : « Bienvenue sur ta terre. »
Qui était Ayşe Şan ?
Ayşe Şan (Eyşe Şan), reine de la musique kurde ayant subi la double oppression (le patriarcat et le colonialisme) en tant que femme et kurde, nous a quitté le 18 décembre 1996 à l’âge de 58 ans.
Née à Diyarbakır (Amed), Eyşe est considérée comme l’une des plus grands chanteurs de la musique kurde contemporaine.
Le père d’Eyşe était un dengbêj (conteur kurde traditionnel). Eyşe commence à chanter à soirées de chant traditionnels, puis, à partir de 1958, malgré l’opposition de sa famille, a se produire en public.
Après une tentative infructueuse de mariage, qui lui avait été imposé, elle s’est installée à Antep (Dilok), où elle a commencé à enregistrer des chansons turques pour la radio locale, chanter en kurde étant alors interdit. Puis, elle est partie à Istanbul, où elle enregistre son premier album en langue kurde en 1963. La première chanson qui contribue à sa notoriété est Ez Xezalım [Je suis une gazelle]. En 1972, suite à des tracas administratifs, elle s’est installée en Allemagne. Une de ses chansons les plus connues, Qederê [Oh le destin], est écrite après la mort de sa fille de 18 mois.
En 1979, elle s’est rendue au Kurdistan irakien, où elle a rencontré de nombreux musiciens et chanteurs kurdes telles que Mihemed Arif Cizîrî, Îsa Berwarî, et Tahsin Taha. Le morceau d’Arif Cizîrî, Eysana Elî, lui est dédiée. À partir de années 1980, elle s’est installée à Izmir. Dans les années 1990, elle écrit en réaction à l’oppression des Kurdes des chansons telles que Werin pêsmerge [Venez les combattants kurdes]. Elle a écrit également des chansons sur la condition des femmes telles que Derdê hewîyê [Chagrin de polygamie] ou encore Hey wax dayê [Ô mère]. tout sa vie, elle a dû faire face à la double oppression (le patriarcat et le colonialisme).
On estime que huit à dix millions de Kurdes vivent en Iran, soit environ 10 % de la population du pays et environ 25 % des 40 millions de Kurdes du Moyen-Orient. Ils sont concentrés dans les régions du nord-ouest du pays, notamment dans les provinces du Kurdistan, de l’Azerbaïdjan occidental, de Kermanshah [Kirmaşan] et d’Ilam. Les Kurdes appellent ces régions Rojhelat, ou Kurdistan oriental.
Les gouvernements iraniens successifs ont nié les droits fondamentaux des Kurdes et réprimé violemment la dissidence kurde. De ce fait, les Kurdes d’Iran sont à l’avant-garde des mouvements anti-régime et de la lutte nationale pan-kurde depuis près d’un siècle.
Le premier État kurde de la région, l’éphémère République du Kurdistan, a été établi à Mahabad en 1946. Les Kurdes ont participé au soulèvement contre le Shah à la fin des années 1970 ; ils ont continué à lutter pour l’autonomie contre la République islamique nouvellement formée après que d’autres courants progressistes de la révolution aient été marginalisés.
Lorsque l’EI a attaqué les régions kurdes d’Irak et de Syrie en 2014, les Kurdes iraniens ont rejoint leurs frères et sœurs sur le front, de Kirkouk à Kobané. En 2022, l’assassinat de Jina Amini, une Kurde, par la « police des mœurs » iranienne a déclenché des manifestations kurdes qui ont conduit à un soulèvement national. Le slogan des manifestations – « Jin, Jiyan, Azadi » ou « Femmes, Vie, Liberté » – trouve ses racines dans la pensée politique kurde.
Opposition kurde organisée
Aujourd’hui, il existe plusieurs partis d’opposition kurdes importants. Ces groupes ont mené des campagnes armées intermittentes contre l’État iranien et s’organisent politiquement, clandestinement en Iran et ouvertement en exil.
Le Parti démocratique du Kurdistan iranien (PDKI) a été créé en 1945 et est le parti fondateur de la république de 1946. Le Parti démocratique du Kurdistan-Iran (PDK-I) s’est séparé du PDKI suite à un conflit de direction, mais l’a réuni en 2022. Komala a été fondé en 1969 par un groupe d’étudiants universitaires. Le Parti de la liberté du Kurdistan (PAK) a été fondé en 1991. Le Parti pour une vie libre au Kurdistan (PJAK) a été fondé par le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) en 2004, lorsque le groupe s’est restructuré et a créé des filiales dans différentes régions kurdes.
Tous les principaux partis kurdes iraniens exigent le renversement de la République islamique. Le PDKI, le Komala et le PJAK revendiquent les droits nationaux des Kurdes au sein d’un Iran démocratique, laïc et fédéral, tandis que le PAK réclame la création d’un État kurde indépendant. Ces partis ont exprimé leur intérêt pour une collaboration avec d’autres groupes d’opposition en Iran, et notamment avec d’autres minorités ethniques.
Tous ont été engagés dans un conflit armé avec l’État iranien à divers moments de leur histoire. Dans les années 2010, nombre de leurs membres ont acquis une expérience et des compétences supplémentaires en combattant Daech aux côtés des Peshmergas kurdes irakiens et des YPG/J kurdes syriens.
Les médias locaux et internationaux ont signalé une augmentation du nombre de jeunes Kurdes, hommes et femmes, rejoignant des groupes armés en réponse au soulèvement « Femmes, Vie, Liberté » de 2022. Cependant, aucune force armée kurde iranienne n’a pris d’action directe contre l’État cette fois-ci, probablement pour éviter de nouvelles représailles contre les manifestants. On ignore dans quelle mesure chaque parti dispose actuellement de forces militaires en Iran. En 2023, l’Iran, l’Irak et le GRK ont commencé à collaborer pour désarmer les partis kurdes iraniens et les relocaliser loin de la frontière irano-irakienne.
Le facteur kurde et la guerre Iran-Israël
Les partis d’opposition kurdes ont réagi au déclenchement du conflit entre Israël et l’Iran en réitérant leurs appels à la chute de la République islamique. Le KDPI, le Komala, le PAK et le PJAK ont tous imputé la responsabilité finale de la guerre aux politiques autoritaires et agressives de l’État. Les partis ont divergé dans leurs appréciations des actions d’Israël. Le PAK a exprimé son soutien aux frappes israéliennes contre des cibles iraniennes. Le PJAK a condamné les deux camps pour « le nombre élevé de victimes civiles, en particulier de femmes et d’enfants, en Iran et en Israël lors de ces attaques ».
Les Kurdes sont connus pour être le segment le mieux organisé de l’opposition iranienne. En cas de guerre prolongée, ils sont susceptibles d’agir pour assurer la stabilisation et la protection de leurs régions. Cependant, plusieurs facteurs peuvent les inciter à la prudence.
Premièrement, les régions kurdes d’Iran sont fortement militarisées en raison de leur proximité avec les frontières du pays et des craintes de l’État iranien à l’égard du militantisme et des organisations politiques kurdes. Cette situation a pour double effet de freiner toute mobilisation potentielle de l’opposition et d’attirer les attaques israéliennes. Depuis le début du conflit, les autorités iraniennes ont menacé de punir tous les détracteurs de l’éffort de guerre du gouvernement, tandis qu’Israël a frappé un hôpital à Kermanshah.
Deuxièmement, les Kurdes sont peu incités à s’attaquer d’abord à l’État. Rien ne garantit que d’autres acteurs les suivront ou les soutiendront. La campagne de bombardements aveugles d’Israël crée un effet de « ralliement autour du drapeau » chez de nombreux Iraniens qui, autrement, pourraient s’opposer à la République islamique. En revanche, parmi les principaux groupes d’opposition qui ont profité de la guerre pour défendre leur position contre la République islamique figurent des partisans de la monarchie déchue, elle aussi violemment opposée aux droits des Kurdes. Lors du soulèvement de 2022, lorsque les régions kurdes et d’autres minorités ethniques ont subi de plein fouet la répression étatique, certains groupes et dirigeants d’opposition persans ont minimisé leurs inquiétudes et blanchi l’identité kurde de Jina Amini.
Troisièmement, un engagement rapide des Kurdes pourrait attirer une intervention étrangère que les Kurdes seraient incapables de contrer depuis leur position actuelle. Le leader d’extrême droite turc Devlet Bahceli a déjà affirmé que la véritable cible de la guerre israélienne n’était pas l’Iran, mais la Turquie. Si les Kurdes agissent avant d’être en mesure de défendre leurs acquis, la Turquie pourrait intervenir – directement ou indirectement par l’intermédiaire de son allié l’Azerbaïdjan et de l’importante population azérie d’Iran – pour écraser leurs efforts.
Le contexte régional kurde
Les positions des autres acteurs kurdes au Moyen-Orient, notamment le GRK et le PKK, pourraient influencer et être influencées par les réalisations des Kurdes d’Iran. Aucun des deux n’est susceptible de prendre des mesures radicales maintenant, mais tous deux pourraient espérer influencer tout mouvement kurde iranien susceptible de voir le jour.
Le GRK ne souhaite pas être entraîné dans une guerre régionale. L’Iran pourrait nuire à l’économie de la région et la déstabiliser gravement par ses frappes. Les partis d’opposition kurdes iraniens étant largement basés sur le territoire kurde irakien, la région a à la fois une cible sur le dos et un certain pouvoir d’influence sur le comportement de ces groupes.
Si le GRK estime qu’une avancée majeure des Kurdes iraniens est improbable, il pourrait chercher à restreindre davantage l’activité des partis d’opposition. Cependant, si la situation en Iran se détériore et que les mouvements kurdes gagnent en puissance, le GRK usera probablement de son influence et de ses relations pour accroître son influence dans la région.
Le PKK, en revanche, pourrait tirer profit de la confrontation israélo-iranienne. La Turquie est menacée par la perspective de voir les Kurdes d’Iran exploiter un gouvernement central affaibli, comme l’ont fait autrefois les Kurdes d’Irak et de Syrie. Elle craint également que les contacts potentiels avec les groupes kurdes, que ce soit par l’Iran ou par Israël, incluent des offres de soutien contre la Turquie. Les dirigeants turcs sont donc incités à offrir à leur propre population kurde un meilleur accord dans le cadre des négociations de paix en cours avec le PKK si le conflit se poursuit.
La fin de la guerre du PKK contre la Turquie pourrait permettre au PJAK de jouer un rôle plus actif dans la politique kurde en Iran. Le groupe aurait gagné en influence ces dernières années. De nombreux Kurdes admirent le rôle du mouvement kurde, inspiré par Öcalan, dans la lutte contre Daech et son influence philosophique sur le soulèvement « Femmes, Vie, Liberté ». Le PJAK est également le seul grand parti kurde iranien à ne pas être affecté par le processus de désarmement GRK-Irak-Iran.
Après que le fondateur et chef du PKK, Abdullah Öcalan, eut appelé son organisation à se désarmer et à se dissoudre, le PJAK a affirmé que cet ordre ne s’appliquerait pas non plus à ses forces. Le groupe a déclaré qu’il ne combattrait pas sauf attaque, mais qu’il défendrait les communautés kurdes d’Iran si nécessaire. Un accord de paix conclu entre la Turquie et le PKK pourrait même permettre à la Turquie de cohabiter, voire de collaborer, avec les entités politiques et militaires kurdes iraniennes.
Parallèlement, le PKK pourrait utiliser l’existence du PJAK comme un atout dans les négociations avec la Turquie, en proposant le désarmement de sa branche en échange de concessions turques. Dans un tel cas, le personnel et les sympathisants du PJAK pourraient se tourner vers d’autres factions kurdes.
Quelle est la prochaine étape ?
Les partis kurdes sont susceptibles d’observer l’évolution de la situation et de se préparer à protéger leurs communautés si la violence s’intensifie.
S’appuyant sur les leçons des expériences kurdes en Syrie et en Irak, où les divisions politiques ont parfois entravé la poursuite des objectifs nationaux, ils pourraient tenter d’unifier leurs objectifs et leurs stratégies dès le début. Les récentes avancées en faveur de la coopération intra-kurde en Syrie et de la paix en Turquie ont atténué les tensions extérieures qui auraient pu entraver les efforts d’unité. La plupart des principaux partis d’opposition poursuivent des objectifs similaires ; leurs déclarations après le déclenchement des affrontements suggèrent également une volonté de front uni.
Si le conflit se poursuit et que l’État est incapable de contrôler les régions kurdes ou refuse de donner la priorité à leur défense, les groupes kurdes pourraient prendre le contrôle de la gouvernance locale sans confrontation active, à l’instar de la reprise des villes du nord-est par les Kurdes syriens aux mains des forces gouvernementales en 2011-2012. Dans ce cas, une organisation civile clandestine et semi-clandestine renforcée pourrait être privilégiée avant les préparatifs militaires et les actions militaires ouvertes.
À moyen et long terme, cependant, une certaine capacité d’autodéfense sera probablement nécessaire. Si la répression étatique s’intensifie, parallèlement aux frappes israéliennes destructrices et à la détérioration de la situation économique, des troubles dans les régions kurdes pourraient être inévitables. Même en cas de chute ou de fragmentation de la République islamique, un nouveau gouvernement ou un ensemble de groupes d’opposition prédominants pourraient être tout aussi nationalistes et hostiles à l’autonomie kurde – un scénario dont les Kurdes se souviennent bien de la Syrie. S’ils doivent conserver et défendre un territoire, la meilleure solution pour les partis kurdes serait de trouver un moyen de coordonner et d’unifier leurs forces armées sous une structure de commandement commune. Le modèle des FDS, qui a réuni plusieurs groupes armés existants aux idéologies et aux cultures militaires différentes, pourrait être pertinent ici.
Quoi qu’il en soit, avec l’autonomie kurde irakienne établie et la négociation entre la Turquie et la Syrie avec leurs communautés kurdes, l’Iran est le seul État à avoir exclu toute extension des droits des Kurdes. Si la guerre s’intensifie ou prend fin, la question kurde restera une source potentielle de conflit en Iran jusqu’à sa résolution.
Par Meghan Bodette* (Version originale à lire ici: Israel-Iran War: How Will Kurdish Actors Respond?)
*Meghan Bodette est directrice de recherche au Kurdish Peace Institute (Institut Kurde pour la Paix). Titulaire d’une licence en sciences du service extérieur de l’Université de Georgetown, où elle s’est spécialisée en droit international, institutions et éthique, elle s’intéresse aux questions kurdes, notamment aux droits de l’homme, à la paix et à la démocratie ; aux droits des femmes ; et aux opérations militaires transfrontalières de la Turquie au Kurdistan irakien et dans le nord de la Syrie. Elle a informé des responsables gouvernementaux et d’institutions internationales de ses conclusions et a été interviewée par des médias nationaux, dont NPR et NowThis, pour son expertise.