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TURQUIE. La fille de Taybet Inan : « L’État ne reconnaît jamais les massacres qu’il commet »
TURQUIE / KURDISTAN – Şaristan Algan, la fille de Taybet İnan, assassinée par l’armée turque devant sa maison à Silopi et dont le corps est resté dans la rue pendant 7 jours, devenant un symbole de la brutalité infligée au peuple kurde, a déclaré : « Nous n’oublierons pas, même 100 ans après, pas seulement 10. »
Dix ans se sont écoulés depuis l’instauration du couvre-feu militaire imposé dans le district de Silopi, à Şırnak, le 14 décembre 2015. Ce couvre-feu a duré 38 jours durant lesquels les forces turques ont exécuté de nombreux civils kurdes, dont des femmes et des enfants. Depuis, aucun des soldats et policiers impliqués dans les meurtres n’a été poursuivi. Taybet İnan, âgée de 57 ans, a perdu la vie pendant le couvre-feu à Silopi. Le 19 décembre 2015, elle a été assassinée devant son domicile par des policiers des forces spéciales, qui l’ont abattue de dix balles. Ses proches n’ont pas été autorisés à récupérer son corps pendant sept jours. Son beau-frère, Yusuf İnan, qui a tenté de lui porter secours, a également été tué par balle dans la cour de leur maison. De même, le mari de Taybet İnan, Halit İnan, fut blessé par balle par la police alors qu’il tentait de récupérer le corps. Le fait que le corps de Taybet İnan soit resté dans la rue pendant des jours devint un symbole de la brutalité infligée aux habitants de la ville à cette époque, un symbole de la barbarie perpétrée contre toute une population. Seuls ses deux fils et son frère furent autorisés à assister à ses funérailles.
Suite à l’incident, une enquête a été ouverte par le parquet de Silopi. Cependant, aucune avancée n’a été constatée. La famille İnan a saisi la Cour constitutionnelle turque (AYM) le 1er janvier 2021, invoquant des violations du « droit à la vie », du « droit à un procès équitable », de l’« interdiction de la torture et des mauvais traitements », de l’« obligation de mener une enquête effective » et du « principe de respect de la vie privée ». Le 24 septembre 2025, l’AYM a rejeté la requête concernant les violations du « droit à la vie », du « droit à un procès équitable », de l’« interdiction de la torture et des mauvais traitements » et de l’« obligation de mener une enquête effective » au motif de la « prescription ». Les avocats de la famille poursuivent leurs préparatifs en vue d’un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). Ce recours devrait être déposé le 19 décembre, date anniversaire du meurtre de Taybet İnan.
Dix ans après sa mort, Taybet İnan (Taybet Ana, ou Mère Taybet) n’a pas été oubliée. Chaque année, un hommage lui est rendu sur le lieu de son assassinat et sur sa tombe. Cette année, un nouvel hommage lui sera rendu demain, le 19 décembre, à 13 heures, au même endroit.
Le calvaire de Taybet İnan est le reflet des souffrances endurées par le peuple kurde durant les cinquante années de conflit. En novembre 1993, dix enfants, dont Botan (4 ans) et Esmer (10 ans), les enfants de Taybet İnan, ainsi que trois neveux, dont l’aîné avait 11 ans, périrent dans l’explosion d’une mine au cœur de Silopi. Taybet İnan ramassa de ses propres mains les membres mutilés de ses enfants assassinés. Après le massacre, le père, Halit İnan, qui s’était rendu au commissariat pour s’enquérir du sort de ses enfants, fut arrêté et emprisonné pendant quatre ans. Les dépouilles des enfants tués furent enterrées dans une fosse commune, et aucune enquête ne fut menée. Les responsables de la sécurité de l’époque affirmèrent que sept des enfants, dont l’aîné avait 11 ans, étaient morts lors de la préparation d’une opération à leur encontre.
Taybet İnan a changé le nom de sa fille, née trois mois avant le massacre et initialement prénommée Sozdar, en Hezne (par chagrin). Hezne İnan, confrontée à l’oppression et au déni de son identité kurde, s’est réfugiée dans les montagnes en 2008, rejoignant le mouvement de libération kurde et reprenant le nom de Sozdar. Hezne İnan (Sozdar Şerger) figurait parmi les 177 personnes brûlées vives dans les « sous-sols de la torture » lors du couvre-feu instauré à Cizîr (Cizre) le 14 décembre 2015, qui a fait 288 victimes.
La fille de Taybet İnan, Şaristan Algan (41 ans), a raconté à l’agence Mezopotamya (MA) ce qu’elle a vécu au cours des 10 dernières années.
Sharistan Algan, qui a déclaré avoir grandi dans la souffrance, a dit : « J’ai 41 ans et nous n’avons jamais connu un seul jour de répit. Nous avons toujours grandi dans la souffrance. Ma mère a enduré les pires souffrances. Elle me disait toujours : « Si je te racontais la douleur que j’ai vécue, tu n’aurais plus un seul cheveu. Aucun livre ne suffirait à tout te dire. » Ma mère se voyait toujours jeune, elle refusait de vieillir. Elle était toujours en quête de quelque chose. Elle était très altruiste et dévouée à son combat. Elle ne se voyait pas seulement comme notre mère. Elle disait : « Je suis la mère de tous les enfants qui luttent. » Si les mains des jeunes qu’elle appelait ses enfants avaient été coupées pendant les couvre-feux, elle n’y aurait pas laissé sa vie, mais sa conscience l’en empêchait. »
Se souvenant que sa mère avait perdu deux enfants dans l’explosion d’une mine en 1993, qui avait coûté la vie à sept enfants, Şaristan Algan a déclaré : « Deux des sept enfants étaient ceux de ma mère, trois étaient ses neveux et nièces, et les deux autres étaient les enfants du voisin. Aujourd’hui, les sept enfants reposent dans la même fosse commune. Ma mère a recueilli leurs dépouilles mutilées de ses propres mains. Bien que l’État nie toute implication, nous savons que c’est lui qui a perpétré ce massacre. L’une des filles de ma mère (Hezne İnan) a elle aussi rejoint la lutte contre l’oppression. Elle a péri brûlée vive dans le sous-sol. Ma mère avait fait une promesse à sa fille et à ses amis, et elle l’a tenue jusqu’à son dernier souffle. Nous aussi, nous perpétuons la promesse de notre mère. Nous poursuivrons son combat jusqu’au bout. »
En réaction au rejet par la Cour constitutionnelle de la requête de la famille concernant le meurtre de Taybet İnan, Şaristan Algan a déclaré : « L’État ne reconnaît jamais les massacres qu’il commet. Nous irons jusqu’au bout dans cette affaire. Nous irons partout où cela sera nécessaire jusqu’à ce que les assassins soient retrouvés. » Évoquant le processus de paix et de société démocratique initié par le leader du peuple kurde Abdullah Öcalan, Şaristan Algan a poursuivi : « Nous avons toujours aspiré à la paix et nous continuerons de la réclamer. L’État n’a pas pu et ne peut pas éliminer le peuple kurde par le massacre. Aujourd’hui, la table des négociations est ouverte. Il est tenu d’écouter les revendications des Kurdes. Les Kurdes ont payé un lourd tribut et ne renonceront pas à leur combat. Il n’y a d’autre issue que la paix. Nous remercions tout le peuple kurde qui n’a pas oublié ma mère. Même si cent ans s’écoulent, et non seulement dix, nous n’oublierons pas et nous ne laisserons pas son souvenir tomber dans l’oubli. Les Kurdes doivent être unis partout. Si nous ne sommes pas unis, nous périrons un à un. » (Mezopotamya)
TURQUIE. Torture d’un otage originaire du Rojava
TURQUIE / KURDISTAN – Des images montrant le moment où l’otage originaire de Manbij, Omer Cuma Salih a été battu par des gardiens ont été diffusées par l’agence kurde Mezopotamya. On y voit des ecchymoses et un gonflement sur le visage de Salıh après l’incident qui a eu lieu en juillet dernier. Un rapport d’expert avait conclut à des « mauvais traitements ».
Des images ont fait surface montrant la torture du détenu Omer Cuma Salıh, originaire de Manbij, dans le nord-est de la Syrie, par des gardiens lors d’une fouille effectuée le 7 juillet à la prison n° 2 d’Elazığ. La vidéo de 14 minutes et 6 secondes, filmée pendant une fouille menée par les gardiens sous prétexte de chercher un message qui serait envoyé via un ballon jeté dans la cour de la prison, montre le chef des gardiens entrer dans la cellule et proférer des menaces : « Quand je trouverai (la boussole), tu ne pourras pas ranger [cette cellule] pendant un mois, et je vous ferai tous expulser. » La vidéo montre également les gardiens participant à la fouille saccager la cellule, donnant des coups de pied et jetant des affaires, endommageant les lits, cassant une table et dispersant des médicaments. Malgré les réponses des détenus affirmant qu’il n’y avait pas de boussole lorsqu’on leur demande « Où est la boussole [message] ? », on entend les gardiens insister sur le sujet, prétendant que la boussole venait d’arriver.
Les images montrent des gardiens emmenant Salih sur la mezzanine de sa cellule afin d’éviter que la torture ne soit filmée. On entend le chef des gardiens le frapper, ainsi que les cris de Salih : « Ne me frappez pas ! » Pour empêcher l’enregistrement des cris et des souffrances, le chef des gardiens serre Salih dans ses bras, et l’équipe de tournage semble tenter de détourner la caméra des prisonniers. Si le visage de Salih ne présente aucune trace de blessure au début de la vidéo, il apparaît tuméfié et meurtri à la fin. Les images montrent également le chef des gardiens frapper Salih à la poitrine en quittant la cellule, ce qui incite l’équipe de tournage à détourner la caméra.
Le rapport d’expertise demandé par le parquet d’Elazığ concernant l’incident indique également que Salih a subi des mauvais traitements. Ce rapport, établi le 28 juillet, précise : « Lors de la fouille, un gardien de prison a crié : ‘Ne mens pas !’ ; le chef a déclaré : ‘Donne-moi la boussole, sinon tu n’auras pas fini de ranger cet endroit en un mois (…)’ »
Le rapport indique qu’à 5 minutes et 38 secondes de l’enregistrement, alors que la caméra filmait à l’étage, Omer Cuma Salıh, qui se trouvait au rez-de-chaussée, a prononcé des paroles inintelligibles, du type : « Oh, ne me frappez pas ! » Le rapport note qu’à 9 minutes et 30 secondes de l’enregistrement, alors que la caméra filmait au rez-de-chaussée, on a entendu Omer Cuma Salıh, qui se trouvait à l’étage (mezzanine), crier de douleur. Il précise ensuite que ses paroles suivantes étaient inaudibles et semblaient lui couvrir la bouche. À ce moment-là, le responsable aurait dit « Chut ! », et certains agents pénitentiaires au rez-de-chaussée ont regardé vers l’étage. Le rapport conclut : « Il a été établi que, bien que la caméra ait filmé le rez-de-chaussée et non l’étage, les sons entendus suggèrent qu’Omer Cuma Salıh a subi des mauvais traitements. »
Dans sa déposition au parquet d’Elazığ le 16 décembre, Salih a expliqué que le jour de l’incident, lui et trois autres détenus s’étaient rendus dans la zone de promenade lorsqu’un ballon est arrivé d’une provenance inconnue. Il a déclaré que des gardiens étaient venus les voir et leur avaient dit qu’un message avait été envoyé avec le ballon ; ils voulaient savoir de quoi il s’agissait et le leur remettre. Salih a affirmé : « Je leur ai dit que le ballon était arrivé d’une manière inconnue, qu’il ne contenait aucun message, qu’il était au sol et qu’ils devaient l’examiner. Quinze gardiens sont alors venus dans ma cellule et l’ont fouillée minutieusement. »
Dans sa déposition, Salih a déclaré avoir été conduit à la mezzanine du quartier, qu’il a décrit comme un dortoir, par le surveillant-chef. Il a raconté que ce dernier, accompagné de six ou sept autres gardiens, l’avait frappé à la jambe avec un manche à balai, l’avait giflé à deux ou trois reprises et lui avait serré la mâchoire. Il a précisé que du sang coulait de sa bouche, tant la mâchoire avait été serrée violemment. Salih a affirmé que les autres ne l’avaient pas frappé, mais qu’ils l’avaient maintenu pendant les coups. Il a ajouté : « Le surveillant-chef est alors descendu et nous a menacés : “Si vous en parlez à qui que ce soit, et que vos camarades l’apprennent, nous reviendrons.” »
Dans sa déclaration, Salih s’est plaint du chef des gardiens qui l’a torturé.
TURQUIE. Mort d’un otage kurde malade
TURQUIE / KURDISTAN – Sezai Aksu, un prisonnier kurde de 42 ans atteint d’un cancer est décédé quelques temps après avoir été hospitalisé à Van des suites de l’aggravation de son état.
La famille d’Aksu a récupéré le corps qui sera inhumé au cimetière de Bajerge, dans le district de Gever, à Colemêrg (Hakkari).
TURQUIE. Leyla Zana victime d’insultes sexistes lors d’un match de foot
TURQUIE / KURDISTAN – Les supporters de Bursaspor, un club de football turc célèbre pour son fascisme anti-kurde, se sont de nouveau pris aux Kurdes en proférant des insultes sexistes envers la femme politique kurde Leyla Zana lors d’un match qui l’opposait au club kurde Vanspor.
Hier, lors du match Vanspor-Bursaspor, les supporters de Bursaspor ont arboré une affiche du célèbre tueur à gage (Yesil) responsable de nombreux massacres de civils kurdes dans les années 1990 et celle d’une « Toros blanche » tout en criant des insultes sexistes ciblant la femme politique kurde Leyla Zana, première députée kurde du parlement turc qui a passé 10 ans dans les geôles turques pour avoir parlé en kurde au parlement turc.
Alors que la fédération de football turque joue les trois singes devant le fascisme des hooligans de Bursaspor qui veut étouffer l’affaire, de nombreuses voix kurdes s’élèvent pour dire « #LeylaZanaOnurumuzdur » (Leyla Zana est notre fierté) et demander que le Bursaspor soit sanctionné pour la conduite ignoble de ses supporters. En mars 2023, lors du match Bursaspor – Amedspor, les supporters de Bursapor avaient également déployé des affiches du paramilitaire sanguinaire Mahmut Yıldırım, alias « Yeşil » [Vert], et celles d’une Toros blanche (Beyaz Toros), un modèle de voiture Renault, utilisée par les paramilitaires turcs (JITEM) dans les années 1990 pour le kidnappings et la disparition forcées des milliers de Kurdes et jeté des projectiles sur les joueurs kurdes, sans que les autorités turques, ni la fédération turque de football réagissent… L’impunité fait pousser des ailes aux fascistes turcs qui s’en prennent aux Kurdes à la moindre occasion. A quand la justice pour les Kurdes en Turquie?
SYRIE. Les Alaouites face à un génocide systématique
SYRIE / ROJAVA – Massacres et kidnappings des civils alaouites, pillages et destructions de leurs biens… une femme alaouite réfugiée dans les zones sous le contrôle arabo-kurde déclare que sa communauté est ciblée systématiquement par les gangs djihadistes affiliés à Damas dans une interview accordée à l’agence ANF.
Après près de quatorze années de guerre civile en Syrie, un an s’est écoulé depuis la prise de pouvoir à Damas par des groupes djihadistes affiliés à Hayat Tahrir al-Sham (HTS). Durant cette année, les massacres visant les communautés alaouites et druzes se sont multipliés. Face à des violations des droits humains atteignant des niveaux alarmants, les femmes sont particulièrement touchées.
En mars, des attaques systématiques contre les Alaouites dans les régions côtières ont fait des milliers de morts. En juillet, cette fois à Sweida (Suwayda), près de deux mille personnes ont perdu la vie lors d’attaques visant la communauté druze. Le régime d’HTS, arrivé au pouvoir il y a un an avec des promesses de démocratie, n’a apporté que destruction.
Au milieu de la vague de massacres, Büşra, une femme alaouite originaire de Homs (Humus) qui a fui vers le nord et l’est de la Syrie, a témoigné auprès d’ANF au sujet des événements survenus après ce qui a été décrit comme la « libération de la Syrie ». Büşra a déclaré qu’une politique de génocide systématique était menée contre la communauté alaouite dans les zones côtières et à Homs.
Büşra a souligné que ce qui a suivi la prise de pouvoir par HTS n’était pas une libération, mais une nouvelle phase d’occupation fondée sur la terreur sectaire, les déplacements forcés et un régime d’impunité totale.
Büşra a déclaré avoir vécu à Homs pendant 36 ans et a expliqué que, malgré les graves erreurs, les crimes et les destructions causés par le régime baasiste, il existait auparavant un minimum de protection sociale. Elle a noté que les relations interconfessionnelles durant cette période reposaient sur un rapport de force oppressif, ajoutant : « Malgré tous les défauts du régime, il n’y avait pas de ciblage sectaire direct. Les sunnites étaient sunnites, les druzes étaient druzes, les alaouites étaient alaouites. »
Parallèlement, Büşra a souligné que cette réalité ne justifiait en aucun cas les crimes commis par le régime baasiste. Elle a insisté sur le fait que les civils ne sauraient être tenus responsables des politiques d’un régime qu’ils n’ont pas choisi et a rejeté l’instrumentalisation des crimes passés du régime pour justifier la punition collective infligée aujourd’hui à la communauté alaouite.
Ce soi-disant jour de liberté a été une catastrophe pour nous
Büşra a déclaré que la date présentée comme un « jour de liberté » marquait pour eux le début d’une catastrophe. Elle a souligné qu’après la prise de contrôle de Homs par HTS, la ville s’était largement vidée, tandis que la peur et les déplacements forcés se propageaient rapidement. Elle a expliqué que les groupes ayant pris le contrôle appelaient les habitants à rentrer chez eux, leur promettant sécurité, immunité et un retour à la vie normale.
Cependant, Büşra a déclaré que ces appels s’étaient rapidement transformés en piège, ajoutant qu’une campagne d’intimidation systématique avait débuté en mars, immédiatement après le retour des habitants dans leurs foyers. Elle a précisé : « Des pillages, des meurtres et des enlèvements visant la communauté alaouite ont commencé. On interrogeait ouvertement les gens sur leur appartenance religieuse ; ceux qui étaient connus pour être alaouites étaient exécutés. »
Incitation sectaire
Selon Büşra, cette période a marqué un tournant en Syrie, la répression politique cédant la place à un ciblage sectaire ouvert. Elle a déclaré que les insultes, les menaces et l’incitation directe à la haine contre les Alaouites se sont normalisées, ajoutant que les sièges et les massacres perpétrés dans les régions côtières étaient systématiques.
Büşra a rejeté les tentatives de qualifier ces crimes d’« actes individuels », déclarant : « Ce ne sont pas des actes individuels ; les qualifier ainsi encourage les meurtres et la destruction des communautés en Syrie. » Elle a souligné qu’aucun auteur n’avait été poursuivi, qu’aucune mesure n’avait été prise pour rendre des comptes et que l’impunité avait ouvert la voie à de nouveaux crimes.
Non pas des opérations de recherche, mais des pillages et des enlèvements.
Büşra a également évoqué les opérations de recherche menées par les forces affiliées au Gouvernement de transition syrien, affirmant que ces pratiques visaient uniquement la communauté alaouite. Elle a déclaré qu’aucune arme n’avait été trouvée, ajoutant : « Il ne s’agissait pas de collecter des armes, mais de tuer, d’enlever et de piller des maisons. »
Büşra a déclaré que des jeunes avaient été enlevés sous les yeux de tous dans son quartier de Homs et a posé la question suivante : « Si l’État a décidé de collecter les armes, pourquoi seuls les Alaouites ont-ils été ciblés ? »
Büşra a déclaré que de nombreuses tribus restent armées et a cité les attaques contre Sweida et Homs en exemple, soulignant que ces groupes ont conservé leurs armes et ont même filmé et diffusé leurs attaques. Insistant sur le fait que ce qui s’est passé ne peut être qualifié de liberté, Büşra a affirmé : « Ce n’est pas la liberté ; c’est une occupation. »
Büşra a ajouté que les violations quotidiennes font désormais partie de son quotidien et a partagé les tragédies personnelles qu’elle a vécues. Elle a raconté que son cousin avait été tué il y a des mois et que sa voiture avait été saisie, et que le mari de sa sœur avait également été assassiné. Elle a déclaré : « Je veux la justice pour le sang de mon cousin et du mari de ma sœur. Qui traduira ces criminels en justice ? »
Femmes enlevées et le mensonge « d’honneur »
Büşra a également abordé les rumeurs circulant concernant l’enlèvement de femmes alaouites, affirmant que les récits prétendant que ces femmes étaient parties de leur plein gré étaient des inventions visant à disculper les auteurs de ces actes. Elle a souligné que, historiquement, les femmes alaouites n’ont pas été opprimées au sein de leurs familles, mais ont toujours été des individus libres et forts, ajoutant qu’aujourd’hui, le discours sur « l’honneur » est instrumentalisé pour légitimer des crimes.
Büşra a également critiqué les célébrations marquant l’anniversaire de la soi-disant « libération de la Syrie », affirmant que des écoliers étaient contraints d’y assister. Elle a ajouté : « Ils ne se sont libérés que d’eux-mêmes. Nous ne considérons pas ce qui s’est passé comme une libération. »
Appel à la lutte commune et à la solidarité
Büşra a lancé un appel à toutes les communautés, ethnies et composantes sociales de Syrie, soulignant que la situation actuelle menace non seulement les Alaouites, mais aussi les Kurdes, les Arabes, les Druzes et tous les peuples. Elle a affirmé qu’une position collective contre ces violations est essentielle.
Elle a également remercié le peuple kurde et l’Administration autonome du Nord et de l’Est de la Syrie (AANES), soulignant leur accueil chaleureux envers la communauté alaouite et la mise à disposition de refuges sûrs. Appelant la population à se réfugier dans les zones contrôlées par les Forces démocratiques syriennes (FDS), Büşra a déclaré : « Ici, nous avons trouvé sécurité et stabilité. Nous pouvons protéger nos enfants et nos femmes et assurer notre sécurité. » (ANF)
SYRIE. Kidnappings d’Alaouites, dont des enfants et des femmes
SYRIE – De nombreuses personnes, dont un enfant et des femmes, ont été enlevées ces derniers jours à Homs et à Lattaquié, signale l’agence kurde ANHA qui ajoute que la situation de la communauté alaouite en Syrie est de plus en plus précaire.
De nombreux enlèvements ont eu lieu à Lattaquié et à Homs ces derniers jours. Alors que la situation sécuritaire dans les zones contrôlées par le Gouvernement fédéral de transition syrien demeure instable, aucune information officielle n’a encore été communiquée quant au sort des personnes enlevées, rapporte l’agence de presse Hawar (ANHA). Le climat d’insécurité lié aux conflits religieux dirigés contre la communauté alaouite ne cesse de s’aggraver.
Parmi les victimes d’enlèvement figure Marah Muhannad Darwish, âgée de 16 ans. Elle a été enlevée lundi vers 14 heures près d’une pharmacie à Homs, alors qu’elle se rendait chez son grand-père. Depuis, on est sans nouvelles de l’adolescente.
À Homs, un autre incident s’est produit : Yasmin al-Amouri, une Alaouite, et son fils de trois ans, Elia al-Hassan, auraient été enlevés samedi. Ils ont disparu alors qu’ils rentraient de chez leurs parents.
Des enlèvements ont également eu lieu à Lattaquié.
Des incidents similaires ont également été signalés à Lattaquié. Basel Nasr Saqour est porté disparu depuis vendredi matin. Cet homme de 36 ans a été vu pour la dernière fois à son travail, dans le village de Jabal al-Nuwiya, au nord de Lattaquié.
Par ailleurs, Ali Haitham Assaf, âgé de 20 ans, et Hadi Nizar Assaf, âgé de 17 ans, sont portés disparus depuis samedi. Ils auraient été enlevés alors qu’ils vendaient du lait dans le village d’Al-Muzayri’a.
Tous ces enlèvements visaient des membres de la communauté alaouite à Homs et à Lattaquié. Selon des sources locales, cette situation continue d’alimenter les crimes à motivation religieuse et un climat d’insécurité en Syrie. (ANF)
Journée du drapeau kurde : symbole d’unité et de lutte
KURDISTAN – Les Kurdes du Kurdistan du Sud et des communautés kurdes du monde entier ont célébré mercredi la Journée du drapeau du Kurdistan, commémorée chaque année le 17 décembre comme un symbole d’identité nationale, d’unité et de décennies de lutte pour les droits et la reconnaissance.
Les institutions gouvernementales, les écoles et les bâtiments publics de la région du Kurdistan d’Irak (KRI) ont hissé le drapeau kurde, tandis que des responsables et des dirigeants politiques ont publié des déclarations soulignant l’importance historique et culturelle de ce drapeau.
Le drapeau tricolore rouge, blanc et vert, orné d’un soleil jaune à 21 rayons en son centre, représente depuis longtemps les aspirations kurdes à la dignité, à la paix et à l’autodétermination.
Le 17 décembre a été désigné Journée du drapeau du Kurdistan pour commémorer le premier hissage officiel du drapeau kurde dans la ville de Mahabad en 1945, au cours de la première phase de l’autonomie kurde dans ce qui allait devenir la République du Kurdistan.
Bien que la république ait eu une existence éphémère, le drapeau a perduré comme symbole national unificateur pour les Kurdes d’Irak, de Syrie, de Turquie, d’Iran et de la diaspora.
L’emblème solaire, connu sous le nom de Roj, reflète un héritage culturel profondément enraciné et un renouveau, tandis que les 21 rayons sont généralement associés à Newroz, le Nouvel An kurde célébré le 21 mars.
Le drapeau a été officiellement adopté par les autorités du Kurdistan dans les années 1990 suite au soulèvement contre l’ancien régime irakien et à la création d’institutions kurdes autonomes.
Malgré les divisions politiques persistantes et les défis régionaux, la Journée du drapeau du Kurdistan demeure un moment de réflexion collective pour les Kurdes, soulignant l’histoire commune, les sacrifices et les appels continus à la liberté, à la démocratie et à la coexistence. (North Press Agency)
MARSEILLE. Marche Vérité et Justice pour les militant·es kurdes assassiné·es à Paris
MARSEILLE – Ce samedi 20 décembre, les Kurdes de Marseille et leurs ami·es manifesteront pour demander vérité et justice pour les militant·es kurdes assassiné·es à Paris en 2013 et 2022.
La marche organisée par l’Assemblée Démocratique Kurde de Marseille partira à 13H depuis les Réformés, en haut de la Canebière.
La manifestation honorera la mémoire de Sakine Cansız, cofondatrice du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan), de Fidan Doğan, représentante du KNK (Congrès national du Kurdistan) à Paris, et de Leyla Şaylemez, membre du Mouvement de la jeunesse kurde, assassinés à Paris le 9 janvier 2013, ainsi que d’Evîn Goyî, membre du conseil exécutif du KCK (Union des communautés du Kurdistan), de l’artiste kurde Mir Perwer et de l’activiste Abdurrahman Kızıl, assassinés devant le siège du Conseil Démocratique Kurde en France (CDK-F) et du centre culturel kurde Ahmet Kaya à Paris le 23 décembre 2022.
Appel à participer aux commémorations des martyrs kurdes de Paris
PARIS – Le Conseil Démocratique Kurde en France (CDK-F) appelle à participer aux commémorations des martyrs assassinés à Paris lors de deux attentats terroristes (2013 et 2022) ciblant la communauté kurde et invite la France à « lever le secret-défense et faire toute la lumière sur le triple assassinat du 9 janvier 2013 ».
Voici le communiqué du CDK-F :
« Le 9 janvier 2013, un premier attentat terroriste frappait les Kurdes en plein cœur de Paris. Il coûtait la vie à trois militantes kurdes : Sakine Cansız, figure historique du mouvement kurde, Fidan Doğan, responsable du Centre d’Information du Kurdistan (CIK), lieu même de l’attentat, et Leyla Şaylemez, militante du mouvement de jeunesse kurde en Europe.
Presque dix ans plus tard, le 23 décembre 2022, trois autres militants kurdes étaient assassinés, encore à Paris, dans un attentat qui visait cette fois-ci le siège du CDK-F, au 16 rue d’Enghien. Parmi les victimes figurait Evîn Goyî (Emine Kara), responsable du mouvement des femmes kurdes en France et ancienne combattante contre Daesh au Rojava. Les deux autres victimes étaient Mîr Perwer, jeune chanteur kurde récemment réfugié en France, et Abdurrahman Kızıl, un habitué de l’association. L’enquête sur le triple assassinat du 9 janvier 2013 a mis en évidence de nombreux indices — corroborés par des documents rendus publics — démontrant que l’assassin, Ömer Güney, agissait sous les ordres des services de renseignement turcs (MIT). Décédé en prison fin 2016, peu avant son procès, il n’a jamais été jugé. Les commanditaires, quant à eux, n’ont jamais été inquiétés, l’instruction étant entravée par le secret-défense opposé par les autorités françaises. Concernant l’attentat du 23 décembre 2022, son caractère terroriste n’a toujours pas été reconnu, malgré les déclarations explicites de l’assassin, William Malet, démontrant des motivations terroristes et un ciblage délibéré de notre association, en tant que représentation du peuple kurde. À ce jour, les services de renseignement français n’ont pas été interrogés sur d’éventuels liens de l’auteur avec des services étrangers. Treize ans après le triple féminicide de 2013, l’impunité demeure. En refusant de lever le secret-défense, la France commet un déni de justice et entretient l’impunité de crimes politiques et terroristes, encourageant leur répétition. La France doit lever le secret-défense et faire toute la lumière sur le triple assassinat du 9 janvier 2013. La justice française doit reconnaître le caractère terroriste de l’attentat du 23 décembre 2022 afin que les commanditaires soient identifiés, jugés et condamnés. Appel aux commémorations Afin d’honorer la mémoire des victimes et de réaffirmer notre exigence de vérité et de justice, le CDK-F appelle à participer aux commémorations des deux attentats :Hommage à Evîn Goyî (Emine Kara), Mîr Perwer et Abdurrahman Kızıl
Mardi 23 décembre 2025
11h00
16 rue d’Enghien – Paris
Hommage à Sakine Cansız, Fidan Doğan et Leyla Şaylemez
Vendredi 9 janvier 2026
12h30
147 rue La Fayette – Paris
Grande Marche « Vérité et Justice »
Enfin, afin d’exiger vérité et justice et de rappeler la primauté du droit, nous appelons toutes et tous à rejoindre la Grande Marche « Vérité et Justice »,
Samedi 10 janvier 2026
À partir de 11h00
Départ : Gare du Nord – Paris
PARIS. Projection/Débat autour des disparitions forcées des civils kurdes
PARIS – L’Institut kurde de Paris organise une projection/débat le vendredi prochain autour du documentaire Dargeçit (Kerboran) racontant le combat des familles kurdes dont les proches sont portés disparus entre les mains des forces armées turques dans les années 1995. Elles entreprennent de longs trajets de plusieurs heures pour chaque audience du procès, qui a finalement débuté en 2015. Bien qu’il semble impossible de percer le carcan de l’impunité de l’État, « la vérité est là pour ceux qui veulent la voir ». (Dargeçit a reçu de nombreux prix.)
Modératrice : Dilan SALIK

Intervenantes : Berke BAŞ, Özgür Sevgi GÖRAL
(Le débat se déroulera en anglais)
Berke Baş • Documentaire Dargeçit • VO en kurde et turc sous-titré en français • 82 minutes • Turquie, 2024