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TURQUIE. La liberté de la presse bâillonnée par la « loi sur la censure »

TURQUIE / KURDISTAN – L’Association des études juridiques et médiatiques (MLSA) a publié un rapport intitulé « La liberté d’expression à l’ombre de la loi sur la censure » , qui examine les effets de la « loi sur la censure » du Code pénal turc (l’article 217 alinéa A/1) promulgué en octobre 2022. Selon ce rapport, des milliers de personnes ont fait l’objet d’enquêtes en vertu de cette loi, les journalistes étant soumis à des pressions particulièrement intenses.

La plupart des enquêtes sont liées à la couverture du séisme et à la corruption

Le rapport de L’Association des études juridiques et médiatiques (en anglais: The Media and Law Studies Association, MLSA) indique qu’au moins 93 enquêtes ont été ouvertes en vertu de la loi, ciblant 65 journalistes, 11 avocats, huit YouTubeurs et créateurs de contenu, deux hommes politiques, deux écrivains et un médecin, un universitaire et un sociologue. Les motifs les plus fréquents de ces enquêtes étaient des publications sur les réseaux sociaux et des reportages liés au tremblement de terre dévastateur en Turquie, ainsi que des allégations de corruption.

Au total, 19 personnes, dont 14 journalistes, ont fait l’objet de poursuites judiciaires pour leur couverture du séisme du 6 février 2023 qui a frappé les régions du Sud-Est à majorité kurde-alévi. Certaines ont été arrêtées, tandis que d’autres ont été frappées d’interdiction de voyager. La journaliste Yüsra Batıhan a été condamnée à dix mois de prison pour avoir couvert la distribution de secours pendant la catastrophe.

Incertitude juridique et application arbitraire

La plupart des poursuites engagées en vertu de la loi sur la censure sont liées à la couverture du tremblement de terre et aux reportages sur le processus électoral, indique le rapport. Il note également que la majorité de ces affaires se soldent par un acquittement, ce qui suggère que la loi est principalement utilisée comme un outil d’intimidation des journalistes plutôt qu’à des fins légales légitimes.

Le ministère de la Justice n’a pas divulgué de statistiques détaillées sur les poursuites engagées en vertu de cette loi. Cependant, selon les archives de la Commission de la justice du Parlement turc, 4 590 personnes ont fait l’objet d’une enquête en vertu de cette loi au cours de ses deux premières années d’application. Parmi elles, 33 ont été arrêtées, tandis que 2 005 ont été formellement inculpées.

La liberté de la presse menacée

Le rapport souligne que la loi sur la censure restreint sévèrement les activités journalistiques et que le système juridique est instrumentalisé pour réprimer le journalisme critique. Il appelle à une pression internationale plus forte et à une mobilisation publique accrue pour protéger les journalistes et la liberté des médias en Turquie.