TURQUIE – La journaliste Neşe İdil a été condamnée à la prison avec sursis pour un tweet montrant des femmes kurdes célébrant la libération de Kobanê de l’Etat islamique en 2015. Elle est accusée d’avoir « diffusé de propagande terroriste ».
Un tribunal turc a condamné à une peine de prison avec sursis la journaliste Nece İdil pour avoir tweeté en 2015 une photo de femmes des Unités de protection des femmes (YPJ), une brigade entièrement féminine des forces armées présentes dans les régions kurdes du nord de la Syrie, ayant libéré la ville kurde de Kobani (Kobanê) de l’État islamique (DAECH / ISIS).
İdil a été jugée pour une image publiée dans une publication sur son compte de réseau social X en janvier 2015, accompagnée d’un commentaire indiquant « Les femmes des YPJ célébrant la libération de Kobanê de l’Etat islamique ».
Le tribunal d’Istanbul a entendu l’affaire le 20 février en l’absence d’İdil, représentée par son avocat Fatih Aydın. Le procureur a réitéré sa demande initiale de peine de prison, arguant que le message d’İdil, qui présentait des membres armés des YPJ, constituait de la propagande en faveur d’organisations illégales et ne relevait donc pas du champ d’application de la liberté d’expression.
La défense d’İdil a souligné que les YPJ n’avaient été reconnues comme organisation terroriste par la Cour de cassation turque que cinq mois après la publication du message et a plaidé pour l’acquittement d’İdil.
Le tribunal a condamné İdil à un an et trois mois de prison pour propagande terroriste, avec un sursis de cinq ans.
L’organisation internationale Coalition For Women In Journalism (CFWIF) a condamné l’utilisation abusive par la Turquie des lois antiterroristes pour faire taire la presse et a exhorté le tribunal à annuler sa décision.
Les organisations de défense des droits reprochent régulièrement à la Turquie de restreindre la liberté de la presse en emprisonnant des journalistes. Selon un rapport de l’Association des médias et des études juridiques (MLSA), un nombre stupéfiant de 314 journalistes ont fait l’objet de poursuites judiciaires en 2023, dont 29 sont en détention provisoire. Les accusations liées au terrorisme représentaient la majorité des affaires impliquant des journalistes, représentant 43 pour cent des procès.