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SERBIE. Hospitalisation d’un militant kurde en grève de la faim contre son extradition vers la Turquie

Il fut de la résistance du Parc Gezi d’Istanbul et a rejoint celle anti-EI au Rojava, avant de demander l’asile en Europe… mais il est détenu en Serbie depuis près de 3 ans et risque d’être livré à la Turquie. Mardi, Ecevit Piroğlu a été hospitalisé après 107 jours de grève de la faim tandis qu’une manifestation en sa faveur était organisée devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) à Strasbourg. Dans le texte suivant, Sarah Glynn revient sur ce scandale juridique qui ternit l’image de l’Europe.
 

Mardi, des manifestants se sont rassemblés devant les portes de la Cour européenne des droits de l’homme pour dénoncer une grave erreur judiciaire commise par deux membres du Conseil de l’Europe : la Turquie et la Serbie. Le même jour, le Kurde au centre de cette affaire, Ecevit Piroğlu a été hospitalisé après 107 jours de grève de la faim.

Piroğlu est un socialiste dévoué qui a vécu sa vie pour le bien des autres. Sinan Önal, qui le connaît personnellement, le décrit comme « un activiste et un révolutionnaire totalement dévoué à la libération socialiste des peuples kurde et turc », ajoutant qu’« avec la révolution du Rojava, il s’est profondément engagé dans le nouveau paradigme libertaire ».

Les manifestants devant la Cour européenne ont entendu – en français et en turc – comment, depuis 1992, Piroğlu s’est engagé dans les luttes des travailleurs et des opprimés et, comme tant de militants de principe en Turquie, a passé du temps en prison.

Il a participé aux manifestations du parc Gezi et, en 2015, il s’est rendu au Rojava pour rejoindre la défense contre l’Etat islamique.

En juin 2021, il a demandé l’asile en Serbie. Il est arrivé légalement à Belgrade avec son passeport turc, mais a découvert que la Turquie avait émis un avis d’Interpol appelant à son extradition. Il a été arrêté par les autorités serbes et n’est plus en liberté depuis. Depuis près de trois ans, il est enfermé, d’abord en prison puis dans un centre de détention pour immigrés.

Ses avocats ont contesté son extradition devant le système judiciaire serbe et ont obtenu gain de cause en mai dernier devant la Cour suprême de Serbie, qui a rejeté les arguments de la Turquie. Mais les autorités serbes ont continué à le détenir sans motif légal.

Malgré la décision contraignante du tribunal, le ministre serbe de la Justice a affirmé cette semaine que l’affaire d’extradition était toujours en cours.

Amnesty International, qui a fourni un modèle de lettre appelant à sa libération, a observé qu’il existe un risque que Piroğlu soit expulsé vers la Turquie soit directement, soit via un pays tiers, et qu’en Turquie, il « courrait un risque réel de graves atteintes à la vie humaine », violations des droits humains, notamment détention arbitraire, procès inéquitable, torture et autres mauvais traitements. Ils notent également qu’il pourrait être détenu indéfiniment en Serbie.

La santé de Piroğlu a été affaiblie par une grève de la faim de 136 jours en 2023 – exacerbée par des soins médicaux inadéquats. Cependant, les autres voies étant bloquées, il a entamé le 12 février une deuxième grève de la faim pour protester contre son purgatoire illégal en prison. Aujourd’hui, tant sa situation juridique que son état de santé physique suscitent de graves inquiétudes. Les images récentes contrastent de manière choquante avec les photographies antérieures, et les militants déclarent que « sa santé s’est détériorée et que sa vie est en danger ». (Medya News)