« Avec le début de l’attaque de DAECH contre al Sina, un grand complexe pénitentiaire en Syrie du Nord et de l’Est dans la nuit du 20 janvier 2022, nous en tant que YPG International (internationalistes de partout dans le monde) sommes impliqués sur le terrain et avons suivi de près la couverture des événements par les médias du monde entier. A l’heure où une délégation de l’organisation jihadiste talibane est reçue en Norvège pour des entretiens avec l’UE et est prise au mot par les médias sur ses intentions de « démocratiser » l’Afghanistan, on est pourtant plus que surpris par le portrait médiatique des Forces démocratiques syriennes (FDS) de la Syrie du Nord et de l’Est. Tel que:
« Les FDS dominées par les Kurdes » – France 24
« Les Forces démocratiques syriennes dirigées par les Kurdes » – Al Jazeera
« L’agression s’est produite dans un établissement contrôlé par les forces kurdes » – Le Monde
« Des combattants de l’État islamique ont tenté de s’évader d’une prison kurde » BBC News
« La plupart des détenus arabes ont été détenus sans inculpation ni procès, alimentant le ressentiment des membres tribaux qui accusent les forces kurdes de discrimination raciale, une accusation démentie par les forces dirigées par les Kurdes » NBC News
De nombreux médias occidentaux ont couvert la situation de la tentative d’évasion de la prison de l’État islamique à Hasakah, et tous semblent suivre un schéma similaire de désinformation et d’omission pointue. La similitude entre les erreurs commises dans ces articles et les mensonges délibérés diffusés par l’État islamique rend la situation d’autant plus préoccupante.
Ces articles ne tiennent pas compte du fait que la majorité de la population qui compose l’administration autonome du nord-est de la Syrie ainsi que la majorité des FDS elle-même sont en fait arabes. Dans un explicatif du Rojava Information Center (RIC) indépendant publié en mai 2020, il a été mentionné que les FDS sont composée à plus de 50% d’Arabes. En même temps, les Arabes participent à tous les niveaux de l’auto-administration. Lorsque nous avons nous-mêmes rejoint la lutte contre le récent soulèvement de l’État islamique, nous avons parlé avec de nombreux combattants également engagés dans l’opération ; sans surprise, beaucoup d’entre eux sont arabes. Il ne faut pas s’étonner que les Arabes, eux aussi, aient subi les mêmes blessures que leurs compatriotes kurdes pendant les années noires de la tyrannie de l’EIIS soient tout aussi profondément motivés pour protéger leur patrie.
Ces rapports sont le plus beau cadeau que l’on puisse faire aux propagandistes de l’Etat islamique, qui ont toujours tenté de raconter la fable de la division raciale entre les peuples qui, ensemble, ont subi les terribles conséquences de l’avancée de l’Etat islamique et les ont ensemble expulsés de leurs foyers au prix de nombreux martyrs. . Présenter les FDS comme une « force kurde » ou « dominée par les Kurdes » n’est pas seulement une offense impardonnable à la mémoire de ces Arabes, Turkmènes, Assyriens et Arméniens qui ont donné et continuent de donner leur vie dans la lutte, cela prête directement crédit à la propagande de l’Etat islamique et transmet leur objectif de déstabiliser une région que les FDS se sont battus avec tant de force pour protéger.
La prison de Ghwayran/Al Sina elle-même, opérant sous l’embargo extrêmement sévère imposé au nord-est de la Syrie, n’est pas apte dans ces conditions à répondre aux normes d’une prison de haute sécurité. Il n’a pas été spécialement construit mais modernisé pour accueillir jusqu’à 5 000 prisonniers de l’EI, une solution que les FDS ont décrite à plusieurs reprises à la Coalition internationale comme inadaptée à long terme. Le rôle et la responsabilité ultime des forces internationales sont extrêmement pertinents, car encore une fois, contrairement aux représentations médiatiques occidentales, la population de la prison est en fait composée d’environ 2 000 étrangers des pays occidentaux. De notre point de vue en tant que YPG International, le refus des nations occidentales d’assumer la responsabilité de leurs citoyens qui a créé tant de chagrin et de douleur en Syrie n’est tout simplement pas juste et acceptable.
De plus, nous pensons qu’il est plus qu’important de mentionner, mais il manque dans pratiquement toute la couverture médiatique que, alors que cette tentative d’évasion qui a été organisée sur une période de 6 mois, les forces arabes et kurdes qui sont allées aider à Hasakah ont été ciblées par des frappes de drones turcs. Dans le même temps, ceux qui ont le plus souffert de l’Etat islamique étaient les Yézidis de Sinjar, une fois de plus ils ont été ciblés par la Turquie, membre de l’OTAN, lors d’une frappe aérienne le jour même.
Nous souhaiterions que les agences de presse occidentales soient plus prudentes et responsables dans leur couverture de la région et du conflit en cours. Présenter la réalité sur le terrain aiderait à surmonter les préjugés existants dans la région et aiderait à trouver une solution pour l’ensemble de la Syrie et de son peuple.