PARIS – Neuf ans après l’assassinat des militantes kurdes Sakine, Fidan et Leyla à Paris et dont le crime commis par les services secrets turcs est resté impuni, les femmes kurdes ont organisé une « marche pour la vérité » ce mercredi, avant la grande manifestation annuelle du samedi 8 janvier.
Plusieurs activistes kurdes venus d’Europe ainsi que le frère de Sakine Cansiz, Metin Cansiz, se sont rendus à Paris à l’occasion de la marche blanche d’aujourd’hui jusqu’au lieu du crime, devant l’immeuble 147, rue Lafayette.
Les élus parisiens Hélène Bidard, Adjointe à la Maire de Paris, Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, Elie Joussellin, élu communiste du 10e arrondissement, et Laurence Patrice, Adjointe à la maire de Paris, et des citoyens français étaient aux côtés de Kurdes lors de la marche blanche qui sera suivie d’une manifestation ce samedi et d’un rassemblement le 9 janvier, jour anniversaire du triple assassinat…
Metin Cansiz, mais aussi des militants kurdes et quelques élus français qui ont pris la parole lors de la cérémonie sur les lieux du crimes, ont réitéré leurs demandes de justice dans cette affaire d’État que les autorités françaises ont voulu enterré dès le départ. Cansiz a déclaré que le combat pour condamner les responsables de l’attaque se poursuit.
« Sans justice, la France restera coupable »
La militante kurde Zeynep Dersim, du mouvement des femmes kurdes en Europe, a déclaré que : « Les auteurs de ce massacre ont été identifiés dès le premier jour. Jusqu’à ce qu’ils soient traduits en justice, nous continuerons à nous battre. Tous les complices sont ceux qui ne se comportent pas envers les meurtres et ne nomment pas les coupables. La France a l’obligation de résoudre le crime. »
Fabien Roussel, secrétaire national du Parti Communiste Français 5PCF), a déclaré être solidaire du mouvement des femmes kurdes et a également appelé à ce que la justice soit enfin rendue aux trois militantes kurdes. Il a déclaré que France était redevable au peuple kurde qui se bat pour la liberté, également en raison de leur résistance à l’organisation terroriste État islamique (EI).
« L’État français, au nom du peuple kurde, à un devoir de vérité, un devoir de justice. Je demande la levée du secret défense qui empêche la vérité et la condamnation des complices, véritables coupables de ces féminicides politiques!
Nous avons un devoir de solidarité envers les militantes kurdes. Je demande l’arrêt des persécutions contre les kurdes en France. Ils et elles ont besoin de sécurité. »
Murat Ceylan de l’Association européenne kurde KCDK-E a critiqué la dictature fasciste en Turquie et le silence de la France et a appelé à participer à la grande manifestation du 8 janvier à Paris.
Retour sur un triple meurtre politique au coeur de la capitale française
Le 9 janvier 2013, les militantes kurdes Sakine Cansiz, Fidan Dogan (Rojbîn) et Leyla Saylemez ont été abattues de plusieurs balles dans la tête dans les locaux du Centre d’Information du Kurdistan, à Paris, par un espion turc.
Le 23 janvier 2017 devait débuter le procès aux Assises d’Ömer Güney, le présumé coupable. Le suspect, qui était lié aux services de sécurité turcs à Ankara selon les informations obtenues par les avocats des familles des victimes, est décédé subitement en prison le 17 décembre, un mois avant le début du procès. Depuis, une nouvelle enquête a été ouverte à la demande des familles des trois victimes.
Les trois femmes ont été ciblées et assassinées pour leurs activités politiques au nom du peuple kurde. Sakine était une militante de longue date et membre fondatrice du PKK. Elle a passé de nombreuses années en prison dans des conditions terribles et a été torturée à la prison de Diyarbakir dans les années 1980 après le coup d’État militaire. Elle a dirigé le mouvement de protestation à l’intérieur de la prison et, après sa libération, s’est jointe à la lutte armée pour la libération du Kurdistan. Elle a été une puissante force d’inspiration pour le mouvement des femmes kurdes, qui demeure à ce jour un symbole d’espoir pour les femmes du Moyen-Orient. Fidan et Leyla étaient également des activistes dévouées à la cause kurde.
Pour la communauté kurde, tant que la justice ne sera pas rendue dans ce triple assassinat politique, la France restera coupable.