TURQUIE / BAKUR – Le barrage Ilisu construit sur les rives du Tigre près de la région kurde de Batman a englouti un joyau de l’humanité nommé Hasankeyf : une ville antique de plus de 12 000 ans. Hasankeyf avait accueilli de nombreuses civilisations telles que les Sumériens, les Assyriens, les Babyloniens, les Byzantins, les Omeyyades, les Abbassides, les Artuqides, les Kurdes, etc. A Hasankeyf, la Turquie a commis un écocide doublé d’un ethnocide.
En plus d’Hasankeyf, où plus de vingt cultures ont laissé leur empreinte au fil de 12 000 ans d’histoire – que l’UNESCO aurait dû inscrire sur sa liste des sites protégés – le barrage Ilisu a également englouti près de 200 villages, chassant de leurs terres des dizaines de milliers de Kurdes, les ennemis jurés de l’Etat turc qui voudrait mettre fin à leur existence par tous les moyens…
Pourquoi le barrage Ilisu est un écocide doublé d’un ethnocide ?
Premièrement, Hasankeyf (Heskîf en kurde) est le patrimoine culturel de l’humanité avec ses plus de 12 000 ans d’histoire laissée par de nombreuses civilisations successives. Hasankeyf compte plus de 5000 grottes, 300 monticules et n’a pas encore livré tous ses secrets, fautes de fouilles archéologiques…
Deuxièmement, ce grand barrage d’Ilisu va chasser de leurs terres les populations qui vivent dans cette région depuis des millénaires. (On parle de plusieurs milliers de personnes ainsi déracinées de la région qui sera inondée par le barrage.)
Troisièmement, la réduction du débit des eaux du Tigre asséchera les marais située dans le sud de l’Irak causant une autre catastrophe écologique dans une région déjà dévastée par les changements climatiques et sécheresses répétées, tandis que la nature d’Hasankeyf sera engloutie par l’eau alors que la Turquie l’avait déclarée « zone de conservation naturelle » en 1981.
Quatrièmement, avec ce barrage, l’État turc prendra le contrôle des ressources en eau et sera en mesure de couper l’eau du Tigre à tout moment, affectant ainsi l’Irak. L’eau est très importante non seulement pour les Kurdes, mais aussi pour les Arabes et l’Irak. L’eau du Tigre ne doit pas être une arme de guerre laissée entre les mains du pouvoir turc.