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Le verdict belge concernant la guérilla kurde peut-il créer une jurisprudence en Europe?

BRUXELLES – « Le PKK n’est pas une organisation terroriste », a jugé le 28 janvier la Cour de cassation belge. Lors d’une conférence de presse à Bruxelles, des politiciens, des avocats et des responsables kurdes qui représentaient la partie kurde lors du procès du PKK ont appelé à une nouvelle approche de l’UE sur la question kurde.
 
Suite à la confirmation définitive par la Cour de cassation belge qui a statué que le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) n’est pas une organisation terroriste, les avocats, les députés européens et les politiciens kurdes Remzi Kartal et Zübeyir Aydar ont parlé de la question lors d’une conférence de presse à Bruxelles aujourd’hui. « La décision du tribunal a ouvert une brèche dans la politique de criminalisation contre le mouvement kurde », ont commenté les participants.
 
La Cour de cassation de Bruxelles a finalement confirmé mardi la décision de la Cour d’appel de mars 2019, selon laquelle le Parti des travailleurs kurdes n’est pas une « organisation terroriste » mais une partie à un conflit armé. Il y a deux semaines, le procureur général de la Cour de cassation de Bruxelles avait déjà fait une recommandation à en ce sens.
 
L’argument du terrorisme légitime la répression de l’opposition
 
La conférence au European Press Club a été ouverte par l’eurodéputé socialiste Andreas Schieder, Nikolaj Villiumsen du GUE et François Alfonsi du groupe vert. Villiumsen a déclaré que la décision du tribunal devrait avoir des conséquences. Il a évoqué la répression du régime AKP contre l’opposition en Turquie, en particulier contre le HDP, qui est fondée sur des accusations de terrorisme.
 
L’argument du terrorisme a également été utilisé pour l’invasion de la Syrie. Cependant, le problème ne peut pas être résolu par la force, a déclaré Villiumsen, appelant le gouvernement turc et le PKK à négocier une solution politique.
 
Andreas Schieder a souligné que le problème n’était pas le terrorisme, mais les droits d’une partie de la population. Il a déclaré que la lutte pour les droits culturels, politiques et économiques était légitime.
 
Le fait que le PKK soit sur la liste des organisations terroristes empêche une solution politique
 
Par la suite, Villiumsen a repris la parole et a déclaré que l’inscription du PKK parmi les organisations terroristes était une erreur de l’UE qui avait empêché une solution à la question kurde. Il a fait remarquer que la décision belge pourrait aider à lancer un processus politique.
 
Interrogé par l’ANF sur la manière dont la déclaration du ministre belge des Affaires étrangères Philippe Goffin sur le jugement doit être appréciée, Villiumsen a déclaré qu’il s’agissait d’une déclaration très regrettable. Goffin avait déclaré mercredi que la décision de justice n’avait pas changé l’attitude du gouvernement belge qui considère toujours le PKK comme une organisation terroriste. Villiumsen a annoncé que la décision serait également discutée au Parlement européen.
 
L’eurodéputé vert François Alfonsi a qualifié la décision du tribunal de Bruxelles de mesure positive contre la criminalisation du mouvement kurde. « Maintenant, il est important de faire appliquer la décision dans tous les pays de l’UE », a-t-il déclaré.
 
Le procès du PKK et l’ingérence du ministre belge des Affaires étrangères
 
Par la suite, les quatre avocats Jan Fermon, Joke Callewaert, Paul Bekaert et Luc Walleyn, qui représentaient la partie kurde, ont parlé du processus judiciaire et de son importance.
 
Paul Bekaert a souligné que l’oppression par l’accusation de terrorisme est dirigée non seulement contre le PKK, mais contre tous les Kurdes.
 
«Maintenant, la question est de savoir si le gouvernement belge respectera la décision du tribunal. La justice belge a rendu une décision claire, qui devrait également avoir un impact sur la liste des organisations terroristes de l’UE.»
 
Jan Fermon a expliqué le déroulement de la procédure et s’est référé aux documents de Wikileaks, qui ont rendu public que l’ambassade américaine avait exercé des pressions à cet égard. « Classer le PKK comme une organisation terroriste par l’UE était également une décision politique qui devait être révisée », a déclaré Fermon et a qualifié la déclaration du ministre belge des Affaires étrangères d’ « ingérence dans la justice ».
 
Prêt pour une solution politique
 
Ensuit, Remzi Kartal a pris la parole en tant que coprésident de Kongra Gel et Zübeyir Aydar du Conseil exécutif du KNK (Congrès national du Kurdistan). Les deux politiciens kurdes figuraient parmi les accusés lors du procès en Belgique.
 
Kartal a exprimé le souhait que le verdict change la politique de criminalisation en Europe dirigée contre les Kurdes: « Le problème n’est pas le PKK. Le PKK est utilisé comme prétexte pour attaquer le peuple kurde. » Il a appelé l’UE à considérer la décision de justice belge comme un précédent et à trouver une nouvelle approche de la question kurde.
 
Zübeyir Aydar a souligné que la liste des organisations terroristes de l’UE légitime les arrestations, les tortures et les assassinats de l’État turc: « Personne ne devrait continuer à se faire complice d’Erdoğan. En Europe, des dizaines de milliers de personnes ont été criminalisées par la qualification du PKK comme organisation terroriste. Nous sommes un parti de guerre et défendons la liberté de notre peuple. Nous sommes prêts à résoudre le problème pacifiquement par le dialogue. J’appelle le gouvernement belge et l’UE à se conformer à la décision de justice et à retirer le PKK du liste des organisations terroristes. »