FRANCE – Des volontaires français qui ont combattu DAECH / ISIS en Syrie appellent à sauver le Rojava.
Voici leur appel :
« Le 9 Octobre 2019, en décidant de retirer ses troupes de Syrie, Donald Trump a permis à la Turquie de lancer une invasion sur le territoire du Rojava, région du nord-est de la Syrie tenue par nos alliés Kurdes des Forces Démocratiques Syriennes (FDS). Après des années d’alliance et de nombreuses promesses, c’est un acte de trahison envers nos alliés auquel tout l’occident se trouve associé.
Nous, les volontaires français partis combattre les terroristes de l’Etat Islamique (EI) aux côtés des Kurdes de Syrie et d’Irak, lançons un appel au soutien actif de la France contre cette offensive militaire aux conséquences terribles, aussi bien pour les Kurdes que pour l’Europe.
Nous sommes des Français, partis volontairement rejoindre les rangs des Kurdes pour nous opposer au califat de l’EI, protéger notre pays et notre civilisation de la déferlante d’attaques terroristes islamistes. Nous nous sommes battus, l’arme à la main et épaule contre épaule avec les combattants kurdes pour éradiquer ce mal qui s’étendait à l’Est. Certains ont été tués, d’autres blessés, tous ont souffert. C’est le prix de la liberté et nous étions tous prêts à le payer pour défendre nos valeurs et notre mode de vie.
Les volontaires français signataires ne sont les porte-paroles ni d’une idéologie politique ni du peuple kurde ; nous ne sommes que des compatriotes, qui aimons notre pays. Nous avons passé de longues périodes totalement immergés dans la région, y avons appris à connaître la valeur de nos alliés, la force de nos ennemis et l’importance des enjeux réels qui basculent aujourd’hui en notre grande défaveur. C’est pourquoi nous ne pouvons rester silencieux alors que tous nos efforts, nos sacrifices, sont sur le point d’être réduits à néant et nos amis trahis. Nous sommes révoltés, écœurés.
Nous avons une dette envers les Kurdes. Ils étaient les principaux alliés de la coalition occidentale contre Al Qaida et l’EI dont la France était une composante majeure. Nos propres forces armées ont combattu sur le terrain avec les Kurdes, et notre victoire n’aurait pas été possible sans la guerre farouche que les FDS ont menée au sol sous le commandement kurde, face à un ennemi extrêmement puissant, innombrable et déterminé. Une guerre que les Kurdes ont menée avec un courage, une discipline, une morale et une loyauté exemplaires. Nous leur devons cette victoire ! Nous avons pu compter sur eux, ils doivent pouvoir compter sur nous !
Cette invasion turque est autant une attaque contre nos valeurs que contre le territoire et le peuple kurdes. Le Rojava n’a jamais inquiété militairement la Turquie qui, depuis la coupure de la route du djihad, a construit un mur frontalier sur toute la longueur du Rojava et n’a jamais enregistré aucune attaque ni aucun tir provenant du territoire kurde syrien. En revanche, le système politique mis en place par les Kurdes dans le nord-est de la Syrie, qui repose sur des valeurs civilisationnelles que nous, Français, partageons et jugeons universelles, telle que la démocratie, l’égalité homme/femme, la protection des libertés fondamentales, la laïcité, est une menace pour la Turquie d’Erdogan.
C’est ce Confédéralisme Démocratique, dont nous avons été témoins, que la Turquie veut détruire, alors que les populations de diverses ethnies, confessions, tribus, y ont toutes adhéré, pour vivre en paix dans leur pays. Le fait pour l’Occident d’abandonner les Kurdes à la mort et à l’occupation signifie aussi abandonner nos valeurs « universelles » face à l’expansion militaire de l’obscurantisme islamiste. Quel sera le message retenu par nos ennemis, et pire, par nos amis ?
Car ce qui attend le Rojava n’est pas une simple occupation militaire par l’armée turque, non, car Erdogan agit avec nos ennemis : les combattants déployés au sol contre les FDS sont pour la quasi- totalité des djihadistes, des groupes récemment encore affiliés à Al Qaida ou des anciens combattants de l’EI. Ces mêmes terroristes islamistes que nous avons eu tant de mal à chasser de ces terres reviennent avec la cruauté de leur extrémisme, aujourd’hui mêlée à celle de la vengeance. Le Rojava subira la même oppression que celle que subit la région d’Afrin, envahie en 2018 par la Turquie et ses supplétifs djihadistes. Cette région connaît depuis lors une arabisation et islamisation forcées. Au travers de cette nouvelle invasion, il s’agit tout simplement de dissoudre l’ethnie Kurde. Nous n’avons rien fait en 2018 et nous ne faisons rien aujourd’hui. Comment le justifier ?
Mais cette tragédie aura aussi des conséquences en Europe, car sympathisants et cellules dormantes de l’EI sont encore très présents dans les territoires qui sont aujourd’hui sous le contrôle des FDS. Or depuis le début de l’invasion turque, de nombreuses attaques coordonnées ont eu lieu, à Raqqa et en d’autres lieux que nous avions pourtant sécurisés. Plus de 800 djihadistes se sont enfuis des prisons et des milliers seront bientôt remis en liberté par les supplétifs commandés par Ankara, et prendront la direction des prochaines cibles du djihad, au Liban, en Irak et bien sûr en Europe. Les Kurdes ne pourront plus traquer et maîtriser les terroristes pour nous et l’Occident aura perdu tout contrôle sur cette menace.
N’oublions pas que ce sont les nombreuses victoires de l’EI en 2014, 2015 et 2016 qui avaient créé un engouement très important dans le monde musulman et poussé de très nombreux radicaux à rejoindre le califat, ou à manifester leur soutien en réalisant des attentats meurtriers dans le monde entier et particulièrement en France. Le renversement de situation que nous vivons aujourd’hui ne manquera pas de générer un nouvel enthousiasme parmi les islamistes, et les attentats, les massacres de masse seront plus nombreux que jamais.
Nous savons qu’Erdogan soutient le djihad et a l’ambition de faire renaître un Califat Ottoman. Nous savons que son régime est un danger pour la paix mondiale et la sécurité en Europe, il nous menace aujourd’hui ouvertement. La Turquie d’Erdogan membre de l’OTAN est un anachronisme : le maître d’Ankara consulte plus volontiers Moscou que Washington ou Paris, fait du chantage à l’immigration de masse, soutient les terroristes islamistes, viole régulièrement les droits de l’Homme, oppresse les minorités ethniques sur son territoire, enferme opposants politiques et journalistes. La Turquie d’Erdogan n’est plus notre alliée depuis longtemps, mais les Kurdes le sont. En 1938 la France a abandonné son alliée la Tchécoslovaquie entre les mains d’un Hitler belliqueux afin de sauver la paix. Elle y a perdu son Honneur, et n’y a pas gagné la paix. Nous savons Erdogan expansionniste, belliqueux, et dans la défiance de l’Europe, allons-nous répéter les erreurs du passé ?
La France est l’un des seuls pays occidentaux à avoir eu le courage de clamer son opposition face à l’invasion Ottomane d’Erdogan. Mais cela ne suffit pas. La France est une puissance mondiale, son action est attendue et appelée. Elle doit se conduire en leader pour trouver une solution à cette crise qui ne sera jamais apportée par Ankara. Mais il faut agir vite, car chaque jour compte !
Les Kurdes combattent farouchement mais ne tiendront pas plus de quelques semaines. Après, il sera trop tard. Nous, Volontaires, avons pris les armes contre DAECH. Mais aujourd’hui, impuissants, nous demandons aux dirigeants de notre pays d’agir par tous les moyens pour stopper cette inacceptable invasion, de protéger les civils du massacre et d’installer une zone d’exclusion aérienne sur le Rojava.
Protégez nos alliés du Rojava, sauvez l’Honneur de l’Occident, préservez le salut de l’Europe ! »
Signataires :
William / Roj Rojava
Guillaume / Serhat Bayard
Damien / Gelhat Azadi
Marc / Serhat Bakur
Gillian / Mexas Herekol
Florient / Sidar
Dimitri / Vlad
Frédéric / Tcheknas Roj
Olivier / Tekosher Alisher
Maxime / Gelhat Azadi