SYRIE / ROJAVA – À l’occasion du 65e anniversaire de l’incendie du cinéma Amuda, une cérémonie commémorative a eu lieu pour les 180 enfants kurdes brûlés vifs dans l’incendie du cinéma d’Amuda, à Qamishlo, le 13 novembre 1960.
Le Centre Hori pour la culture et l’art d’Amuda, dans le canton de Jazira, a organisé un événement culturel pour commémorer les martyrs du massacre du cinéma d’Amuda, auquel ont participé des habitants de la ville, des représentants d’organisations de la société civile, du Mouvement mésopotamien pour la culture et l’art démocratiques, de la Commune du cinéma du Rojava, ainsi qu’un certain nombre d’intellectuels, de poètes et d’artistes.
L’événement s’est déroulé sur le site du monument « Shahrazad » du cinéma Amuda, où 20 peintures réalisées par 11 artistes du Free Word Forum étaient exposées sur les murs du cinéma. Ces œuvres représentaient la souffrance et la douleur engendrées par le tragique incident survenu dans le cinéma.
La commémoration a débuté par une minute de silence en hommage aux martyrs. Ensuite, la Commune du cinéma du Rojava a publié un communiqué concernant le cinquième Festival international du film du Rojava.
Après le communiqué, Kurdyar Derei, membre de l’Union des intellectuels du canton de Jazira, a prononcé un discours dans lequel il affirmait que l’incendie du cinéma était prémédité et visait l’extermination du peuple kurde.
Bashir Mulla Nawaf, membre de l’Union des intellectuels de Jazira et témoin de l’incident, a récité un poème qu’il a dédié aux mères des martyrs.
Ensuite, deux témoins de l’incendie du cinéma Amuda, Mohamed Amin Abdel Salam et Rashid Fati, ont pris la parole, racontant le début de l’incident et expliquant qu’ils avaient été invités à assister à une projection de film et que, pendant la séance, la salle avait pris feu, un moment qui reste gravé dans leur mémoire.
La commémoration s’est conclue par une prestation de l’artiste Samir Orkesh, qui a interprété une sélection de chansons incarnant la tragédie de l’incendie du cinéma Amuda. (ANHA)
Retour sur l’incendie meurtrier du cinéma d’Amudê
Le 13 novembre 1960, des centaines d’écoliers kurdes, dont la plupart avaient moins de 14 ans, périrent dans un incendie dans un cinéma d’Amûde, en Syrie. Le nombre de morts varie entre 180 et 300 enfants. Personne ne sait avec certitude, sauf que presque toutes les familles d’Amûde ont perdu un enfant ce jour-là.
Le film d’horreur égyptien «The Midnight Ghost» était projeté au cinéma d’Amûdê. Le directeur du sous-district d’Amûde avait ordonné à tous les élèves du primaire d’assister au film. L’Algérie se battait à cette époque pour son indépendance face à la France et la recette du film devait être reversée aux Algériens.
C’était la dernière représentation de la journée et 500 enfants étaient entassés dans la structure de bois, de paille et d’argile conçue pour accueillir 200 personnes. La plupart des enfants étaient entassés les uns à côté des autres sur de longs bancs. Le projecteur avait tourné toute la journée pour montrer le film égyptien à des centaines d’autres personnes. Dans cette dernière projection, il a surchauffé et s’est enflammé et les flammes se propagèrent rapidement à travers le bâtiment.
Les enfants piégé par les flames ont paniqué. Ils coururent vers les sorties – deux portes étroites de seulement 80 cm de large – tombant et trébuchant l’une sur l’autre. Les portes s’ouvraient vers l’intérieur et avec les enfants à l’intérieur empilés contre les portes, ils ne pouvaient pas les ouvrir.
Amûde n’avait pas de pompiers. On a appelé les pompiers de Qamişlo et Heseke (al-Hasakeh), mais ils sont arrivés trop tard.
Le cinéma d’Amude après l’incendie
Des témoins oculaires de l’époque ont déclaré que le projectionniste et les propriétaires du cinéma étaient partis après que l’incendie se soit déclaré et que les portes avaient été bloquées de l’extérieur. Ils ont également déclaré que lorsque les parents et les résidents ont tenté de sauver la vie des enfants emprisonnés à l’intérieur, la police les a arrêtés, affirmant que c’était « trop dangereux ». Cependant, un résident local, Mihemed Deqorî, a réussi à sauver 11 enfants de l’incendie, mais a péri en essayant de sauver un douzième.
Des sources kurdes estiment que 283 à 300 ont péri dans l’incendie du cinéma. Un journal égyptien Akhir Daqiqah a cité 200 morts et 450 blessés. Le magazine égyptien al-Musawir a fait état de 180 morts et 121 blessés. De nombreux enfants gravement blessés ont succombé par la suite à leurs blessures.
Mihemed Deqorî (Saeed Agha)
Cette tragédie a eu lieu pendant l’union éphémère de la Syrie et de l’Égypte – la République arabe unie (1958-1961). Les Kurdes étaient considérés comme une menace majeure pour le projet d’unité panarabe et le sentiment anti-kurde était élevé. Les activités politiques et culturelles des groupes minoritaires ont été étroitement surveillées; Des professeurs égyptiens ont été envoyés dans la région.
C’est dans ce climat de tension que les affirmations de la population kurde et des partis syro-kurdes ont fait surface selon lesquelles l’incendie était une attaque délibérée contre les Kurdes, motivée par un sentiment anti-kurde. Le rapport KurdWatch sur l’incendie déclare qu ‘«il n’y a aucune preuve concrète que l’incendie et la catastrophe qui s’en est suivie étaient autre chose qu’un accident causé par des mesures de sécurité inadéquates». Il dit plutôt que les événements de l’époque ont donné lieu à cette interprétation.
Le régime syriens n’a jamais mené d’enquête sur la cause de l’incendie qui a dévoré près de 200 enfants kurdes.