TURQUIE / KURDISTAN – Dans la province de Şirnak, la police turque a attaqué une cérémonie organisée en hommage à une martyre kurde, malgré l’autorisation du ministère de l’Intérieur. Plusieurs personnes ont été arrêtées violemment.
Dans la province kurde de Şirnex (en turc : Şırnak), la police a dispersé lundi un rassemblement funèbre en hommage à Berivan Katar, combattante du groupe de guérilla féminin YJA Star (Unions des femmes libres). Les autorités ont bloqué l’accès au lieu de recueillement et ont confronté les personnes rassemblées. Des violences physiques ont eu lieu et au moins une personne a été arrêtée.
Berivan Katar, également connu sous son nom de guerre Rêvan Aslan, a été tué lors d’une attaque turque dans la région de Zap, au Kurdistan du Sud, le 20 mars 2025. Les Forces de défense du peuple (HPG) l’ont annoncé dimanche. Une maison de deuil a été ouverte dans sa ville natale de Şirnex. De nombreux proches, des représentants de partis politiques et d’organisations de la société civile, ainsi que des habitants, se sont réunis lundi midi pour présenter leurs condoléances.

Le deuil collectif est interdit
La police a bloqué l’accès au funérarium. Des agents ont érigé une barrière à quelques dizaines de mètres du bâtiment, sont arrivés en véhicules et ont annoncé qu’ils arrêteraient toute personne présente si le rassemblement ne se dispersait pas. Le commandant a interdit les visites de groupe, invoquant une prétendue interdiction des « rassemblements de deuil collectifs », et n’a autorisé l’entrée que par groupes de cinq – une condition qui a suscité une vive opposition. Les participants ont alors entamé un sit-in.
Une rencontre avec le gouverneur de la province, Birol Ekici, n’a abouti à aucune solution. Au contraire, ce dernier a menacé d’interdire l’ouverture de lieux de recueillement à l’avenir si de tels rassemblements venaient à se reproduire. Ironie du sort, selon la famille du combattant tombé au combat, la cérémonie commémorative avait été autorisée par le ministère de l’Intérieur. Pourtant, l’administration provinciale a agi unilatéralement et a empêché sa tenue. Dans une note adressée au ministère, le gouverneur aurait notamment qualifié le rassemblement de « foule incontrôlable ».
La situation reste tendue.
Lorsqu’un groupe a tenté de forcer le cordon de police en scandant « Şehîd namirin » (« Les martyrs sont immortels »), la police est intervenue. Plusieurs personnes, dont des femmes âgées, ont été agressées physiquement. Un participant, Sadık Külter, a été arrêté. Un petit groupe a néanmoins réussi à atteindre le funérarium. Par solidarité, certains endeuillés ont ensuite quitté le bâtiment pour rejoindre la manifestation qui se poursuivait devant le cordon de police. La situation sur place reste tendue et le secteur demeure bouclé.
MEBYA-DER : Violation des droits fondamentaux
Du point de vue des organisations kurdes, les actions des autorités turques s’inscrivent dans une série de mesures répressives contre la société civile kurde. Des observateurs sur place affirment que les hommages publics rendus aux combattants tombés au combat sont systématiquement empêchés. L’association MEBYA-DER, qui soutient les personnes ayant perdu des proches dans la lutte de libération kurde et qui a organisé l’événement, dénonce une violation délibérée des droits culturels et familiaux fondamentaux. (ANF)