AccueilDroits de l'HommeLa France accusée de vouloir livrer à la Turquie une militante socialiste 

La France accusée de vouloir livrer à la Turquie une militante socialiste 

PARIS – Le Comite « Liberté Pour Zehra Kurtay » constitué de militant.e.s de gauche et antifascistes kurdes et turcs accuse la France de vouloir livrer à la Turquie Zehra Kurtay, ancienne rédactrice en chef du média de gauche Kurtulus ayant passé 9 ans dans les geôles turques pour ses idées socialistes. En la livrant à la Turquie, la France violerait la Convention de Genève de 1951, l’article 3 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, la Convention des Nations Unies contre la torture, ainsi que la jurisprudence établie de la Cour Européenne des Droits de l’Homme qui interdisent strictement l’expulsion d’une personne vers un pays où elle risque d’être soumise à la torture ou à des traitements inhumains ou dégradants.
 
 
Le Comite « Liberté Pour Zehra Kurtay » vient de publier le communiqué de presse suivant.
 
La trahison silencieuse de la France : la réfugiée politique Zehra Kurtay visée par une révocation secrète de sa protection
 
Dans une affaire glaçante qui révèle l’érosion des droits fondamentaux en Europe, Zehra Kurtay, journaliste turque persécutée de longue date, survivante de la torture et réfugiée politique, est de nouveau prise pour cible — non pas par le régime fasciste qu’elle a fui, mais par l’État français lui-même.
 
Sans aucune demande officielle d’extradition de la part de la Turquie, et sans en informer ni elle ni ses avocats, les autorités françaises ont secrètement révoqué son statut de protection en tant que réfugiée, la rendant vulnérable à la détention, à l’expulsion et à la persécution politique.
 
Ce n’est pas une simple décision administrative. C’est un acte de répression politique calculé — qui fait écho aux tactiques du régime même que Zehra a risqué sa vie pour fuir.
 
D’une survivante de la torture à une cible apatride
 
Zehra Kurtay n’est pas une inconnue. Elle a survécu aux massacres dans les prisons turques de décembre 2000, où les forces de l’État ont tué 28 prisonniers politiques et blessé des centaines d’autres. Lors d’une grève de la faim prolongée, elle a été alimentée de force — une méthode de torture d’État — et a développé le syndrome de Wernicke-Korsakoff, entraînant des lésions neurologiques permanentes et un handicap à 50 %.
 
Elle avait déjà vu sa demande d’asile politique révoquée des années plus tôt par la France, en raison de son activisme antifasciste continu — un acte profondément cynique qui la punissait pour la résistance politique même qui avait conduit à sa persécution initiale. Malgré cela, elle était restée sous statut de protection jusqu’en mai 2025, moment où cette protection a été discrètement levée.
 
Il n’y a eu aucun avis juridique. Aucune possibilité de recours. Aucune audience. Juste un silence administratif — suivi d’une arrestation et d’une détention à la demande de la préfecture du Val-de-Marne, le 26 mai 2025. Cet acte de guet-apens juridique viole les principes les plus fondamentaux du droit d’asile et du droit à une procédure équitable.
 
La France préparait son expulsion avant tout procès
 
L’un des aspects les plus troublants de cette affaire est que, bien avant que Zehra ne soit présentée devant un juge, les autorités françaises avaient déjà obtenu un laissez-passer du consulat turc — un document destiné à faciliter son renvoi forcé vers la Turquie.
 
Cela s’est produit avant que quelque tribunal que ce soit ne statue sur sa détention ou son éventuelle expulsion, avant toute audience pouvant évaluer les risques qu’elle encourt, et en pleine connaissance de son passé de torture et de handicap.
 
Cet acte, à lui seul, révèle la véritable intention de l’État français : non pas évaluer la légalité de son dossier, mais l’expulser aussi rapidement et discrètement que possible, sans considération pour le droit ou les obligations en matière de droits humains. Cela démontre un plan prémédité de collaboration avec le régime turc pour livrer une dissidente politique entre les mains de ses bourreaux.
 
Répression politique par procuration
 
Zehra figure sur une « liste de personnes recherchées » controversée en Turquie — non pas pour des actes criminels, mais pour son activité politique ouverte en exil, son travail journalistique et son implication dans l’organisation antifasciste. Dans un schéma inquiétant de répression transnationale, les services de renseignement turcs ont à plusieurs reprises harcelé sa famille, la pressant de la convaincre de retourner en Turquie, où elle serait utilisée comme informatrice en échange d’une « impunité ».
 
C’est le type de chantage auquel font face de nombreux dissidents en exil — et aujourd’hui, au lieu de la protéger, la France participe à cette répression.
 
Soyons clairs : la France ne protège pas ses frontières contre une menace — elle protège le régime turc contre ses critiques. L’État français n’agit pas par obligation juridique, mais par complicité politique.
 
Pas de demande d’extradition — juste une élimination administrative
 
L’aspect le plus alarmant de cette affaire est qu’aucune demande formelle d’extradition n’a été formulée par la Turquie. Le gouvernement français n’en avait pas besoin. Il a agi de manière préventive, révoquant les protections de Zehra, la traitant comme une menace, et tentant de la remettre à un régime maintes fois condamné par la Cour européenne des droits de l’homme, les Nations Unies et des ONG internationales pour son recours à la torture, aux disparitions forcées et à l’emprisonnement politique.
 
Cette stratégie contourne les garanties juridiques et repose sur une violence bureaucratique silencieuse — révoquant des droits par des procédures opaques et supprimant un statut légal sans défense possible.
 
Ce que fait la France est dangereux — et illégal
 
La France viole à la fois ses propres principes constitutionnels et les accords internationaux contraignants, notamment :
      •     La Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, qui interdit le refoulement — le retour d’individus vers un pays où ils risquent leur vie ou leur liberté ;
      •     L’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui interdit les traitements inhumains et dégradants ;
      •     Les droits procéduraux fondamentaux du droit administratif et constitutionnel français, qui garantissent le droit à une audience équitable et à une défense légale.
 
En visant Zehra Kurtay par des moyens administratifs, et en obtenant ses documents de voyage d’un régime connu pour la torture, la France offre une couverture à l’autoritarisme, envoyant un message clair : les réfugiés politiques qui continuent à s’exprimer ne seront pas protégés — ils seront punis.
 
Un dangereux précédent pour tous les réfugiés politiques
 
Ce qui est fait aujourd’hui à Zehra peut être fait demain à d’innombrables autres. Les dissidents venus de Turquie, d’Iran, de Russie, d’Égypte et d’ailleurs qui cherchent refuge en Europe suivent cette affaire de près. La France — longtemps perçue comme un sanctuaire pour les exilés politiques — utilise désormais son système migratoire comme une arme pour appliquer la volonté de régimes répressifs.
 
Ce n’est pas seulement une attaque contre une femme. C’est une attaque contre le concept même d’asile politique. Contre la résistance démocratique. Contre le droit de survivre à la violence d’État.
 
La France ne peut pas prétendre défendre les droits humains à l’étranger tout en les détruisant chez elle par une complicité silencieuse avec des dictatures. L’affaire Zehra Kurtay révèle une trahison plus large, systémique — une trahison qui doit être dénoncée maintenant, avant que cette guerre silencieuse contre les réfugiés ne devienne une politique permanente.
 
Il ne s’agit pas seulement de Zehra. Il s’agit du type de pays que la France choisit d’être.
 
Plus de silence. Plus d’expulsions secrètes.
 
Défendez Zehra Kurtay. Défendez le droit de résister. Défendez l’asile politique.