IRAN – Elaheh Hoseinnezhad, une jeune femme de 24 ans soutenant le mouvement « Jin, Jiyan, Azadi » déclenché par le meurtre de Jina Mahsa Amini, a été assassinée dans des circonstances étranges, provoquant le tollé général, rapporte l’ONG kurde, Hengaw.
Le meurtre d’Elaheh Hoseinnezhad, 24 ans, originaire d’Eslamshahr, dont le corps a été découvert dans le désert près de Téhéran après onze jours de disparition, a suscité une vive inquiétude quant à la sécurité des femmes et à la situation des droits humains en Iran. Son assassinat, accompagné de récits officiels contradictoires et de son soutien visible au mouvement « Jin, Jiyan, Azadi » (Femme, Vie, Liberté), a suscité une vive indignation publique et des demandes de justice.
Son corps a été inhumé le vendredi 6 juin 2025 au soir au cimetière Dar al-Salaam d’Eslamshahr. Selon certaines sources, les services de sécurité ont exercé des pressions sur la famille pour qu’elle s’abstienne de parler aux médias, que l’enterrement soit discret et qu’elle ne divulgue pas d’informations sur l’heure de remise du corps et les modalités des obsèques.
Disparition et découverte
Elaheh Hoseinnezhad, employée dans un salon de beauté du quartier de Saadat Abad à Téhéran, a disparu le 25 mai 2025 après avoir quitté son travail pour rentrer chez elle à Eslamshahr. Face à l’inquiétude croissante du public et au silence des autorités, l’agence de presse Mizan, affiliée au pouvoir judiciaire, a rapporté le 5 juin l’arrestation d’un suspect et la découverte de son corps.
Selon les sources officielles, Elaheh a été poignardée lors d’une tentative de vol après avoir résisté à l’agresseur qui cherchait à lui voler son téléphone portable. Son corps a été retrouvé abandonné près de l’aéroport de Téhéran.
Récits contradictoires et ambiguïtés juridiques
Alors que la police et les agences gouvernementales ont initialement cité le vol de téléphone comme motif, le média pro-gouvernemental Rokna a rapporté que le meurtrier avait tenté de la violer après l’avoir emmenée en voiture et l’avait poignardée à la poitrine lors d’une bagarre en route vers le canton de Qaemieh, entraînant sa mort.
Pour compliquer encore davantage l’affaire, les responsables judiciaires ont évoqué des accusations allant au-delà du vol, notamment « enlèvement » et « corruption sur terre », suggérant que l’affaire pourrait impliquer des circonstances plus graves et plus complexes.
Contexte du suspect
L’accusé, Bahman Farzaneh, avait publiquement exprimé son soutien à la République islamique d’Iran. En janvier 2020, il a publié une photo du Guide suprême Ali Khamenei sur Instagram avec la légende suivante : « L’amour, c’est mon chef. » Son ex-femme a depuis révélé un passé de violences, notamment de multiples coups et des incidents presque mortels, témoignant d’un comportement agressif récurrent.
Le rôle d’Elaheh Hoseinnezhad dans le mouvement « Femme, Vie, Liberté »
Elaheh Hoseinnezhad était active sur les réseaux sociaux et soutenait avec ferveur le mouvement « Jin, Jiyan, Azadi » (slogan kurde signifiant « Femme, Vie, Liberté ») déclenché par le meurtre de Jina Mahsa Amini. Son compte Instagram publiait des publications soutenant des artistes et des militants liés aux manifestations, tels que Toomaj Salehi et Mehdi Yarrahi. Elle avait également rendu hommage à Mohammad Hosseini, l’un des manifestants exécutés au lendemain du soulèvement de 2022, affichant ainsi sa solidarité avec le mouvement plus large pour la liberté et la justice en Iran.
Réponse du public
La disparition et le meurtre d’Elaheh ont déclenché une vague d’indignation sur les réseaux sociaux. Célébrités, militants de la société civile et simples citoyens ont condamné les violences et réclamé justice et transparence.
La footballeuse Voria Ghafouri, née à Sanandaj, a écrit : « Le meurtre d’Elaheh Hoseinnezhad n’est pas seulement un crime individuel, mais un symptôme de problèmes structurels profonds et de traumatisme psychologique dans la société iranienne. »
L’ancien prisonnier politique Hossein Ronaghi a commenté sur X (anciennement Twitter) : « La République islamique est responsable. Elle déploie des milliers d’agents et de caméras de surveillance pour surveiller la tenue vestimentaire des femmes, mais ne peut – ou ne veut – pas protéger leur vie. »
L’ONG Hengaw considère le meurtre d’Elaheh Hoseinnezhad comme emblématique de la violence structurelle et institutionnelle à laquelle sont confrontées les femmes en Iran. Loin d’être un incident isolé, son assassinat met en lumière un contexte plus large de négligence juridique, d’intimidation systématique et de violences sexistes encouragées par l’État. Hengaw appelle à une enquête indépendante et transparente sur les circonstances de sa mort et sur les incohérences des déclarations officielles.