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RENNES. Soirée de solidarité avec les femmes kurdes

RENNES – Le samedi 15 mars, l’Association Amitiés Kurdes de Bretagne organisait une rencontre / débat sur les femmes prisonnières kurdes en Turquie avec Mizgin Çiçek et Sara Aktaş, anciennes prisonnières kurdes réfugiées en Europe.

 

Lors de l’événement intitulé « L’impact de la prison sur les détenues politiques kurdes en Turquie », Mizgin Çiçek et Sara Aktaş ont informé le public des conditions de détention inhumaines des femmes kurdes en Turquie où la torture est monnaie courante et de son impact sur leur réinsertion une fois sorties de la prison.

Amitiés Kurdes de Bretagne a publié un compte-rendu de l’événement que nous partageons avec vous ici:

Dans le cadre des évènements consacrés aux droits des jeunes filles et des femmes, une rencontre, réunissant une cinquantaine de personnes, s’est tenue à la Maison internationale de Rennes, ce samedi 15 mars, pour écouter deux femmes, Sara Atkas et Mizgin Cicek venues témoigner  sur les  des conditions de détention des femmes kurdes dans les prisons turques et de l’impact sur leur réinsertion. Toutes deux connurent la prison pour avoir soutenu le droit de leur peuple à exister. Toutes deux connurent la torture.

 

Sara Atkas et Mizgin Cicek

 

Sara Atkas, cofondatrice du Parti de la Société Démocratique dans les années 2000 et très active dans les mouvements féministes kurdes, a vécu plusieurs emprisonnements, le premier en 1994, d’une durée de 11 ans, le second en 2009, durée de 6 ans et le dernier en 2016 durée 2 ans.

 

Mizgin, plus jeune, a été incarcérée en 2017 à l’âge de 22 ans pour une peine de 6 ans et 3 mois.

 

Les points communs sont très nombreux. Le motif est toujours lié à leur engagement pour les droits du  peuple kurde. la condamnation est  toujours arbitraire. Seule est mise en avant à chaque fois l’appartenance supposée à une organisation terroriste. Mizgin a seulement soutenu le film Bakour sur les réseaux sociaux ou brandi un drapeau soutenant les YPJ (Unités combattantes de Protection des Femmes  qui, notamment,  défendront Kobané en 2014 contre Daesh), mais sa famille est très active dans la lutte, un de ses frères est en prison à Izmir pour 30 ans , un autre a été tué au combat. Quant à Sara, elle est une cible à abattre depuis toujours, depuis le début de son engagement dans la lutte , vu l’importance de son rôle et sa détermination au combat qui ne faiblira jamais. Elle a fui la Turquie où elle est encore sous le coup de deux condamnations (une de 10 ans et une de 17 ans).

 

Les conditions de détention

 

Les conditions de détention : toutes les deux évoquent les souffrances psychologiques d’une incarcération où on est sans cesse épié, soumis à des pressions quotidiennes pour devenir plus dociles. Comme les fouilles à nu qui constituent de véritables humiliations. Pourtant, elles évoquent aussi la solidarité, dans certains espaces dédiés aux femmes politiques emprisonnées, ces compagnes qui vous aident à tenir, à vous dépasser. Toutes les deux évoquent aussi une véritable éducation politique dans les prisons où on trouve les moyens de lire et d’échanger. Mais cet accès à la culture n’est pas avéré dans toutes les prisons. Pour Sara, il était essentiel qu’elle rappelle dans le débat l’historique de la résistance des femmes dans les prisons. Elle est revenue sur la situation dans les années 1990 et en particulier sur la prison de Diyarbakir où elle a été emprisonnée. A cette époque, les tortures physiques étaient très fréquentes, Sara dit les avoir toutes subies. Outre le viol, l’électricité, les femmes subissaient des tortures physiques visant à détruire leurs organes génitaux afin qu’elles ne puissent plus avoir d’enfants. Malgré ces traitements innommables, les femmes ne cédaient pas. Sara tient à leur rendre hommage ce soir.

 

La réinsertion à la sortie de prison

 

Quel est l’impact de la prison  ? On n’ose à peine poser la question ! La réponse est là devant nous à travers leur présence malgré toutes ces souffrances et ces blessures. Sara est une femme dont le corps a été martyrisé.  Lors de son second enfermement, elle a subi une opération du cœur, menottée ! Elle doit vivre aujourd’hui avec des séquelles neurologiques graves. Mais c’est une femme puissante qui réalise des conférences, qui écrit des livres et qui continue la lutte en France. Mizgin est aussi en France, elle apprend la langue, pour pouvoir s’inscrire à l’université et étudier la psychologie. Parce qu’elle veut comprendre l’âme humaine, et pouvoir s’engager au service des femmes qui ont vécu ces expériences tragiques. Elle dit qu’elle ne dort que d’une oreille, son sommeil n’est jamais serein : dans la prison, le dortoir était fermé de l’intérieur mais les gardiennes pouvaient surgir à tout moment y compris la nuit. Toutes deux souhaitent obtenir le statut de réfugiées.  Ces femmes, de générations différentes, ont été confrontées à la violence des hommes alors qu’elles étaient encore des jeunes filles, à cause de leurs convictions, elles sont des guerrières et ont impressionné fortement l’auditoire ! Elles ont été très applaudies !

Par Marie Brigitte Duigou