TURQUIE / KURDISTAN – Les actes hostiles aux Kurdes du président turc Erdogan contredisent les pourparlers de paix qu’il a engagé avec le mouvement de libération kurde. En plus des attaques sanglantes qu’il mène contre le Rojava, il fait arrêter élus, journalistes ou avocats kurdes, sans vergogne. Hier, après que ses drones aient tué et blessé plus de 30 civils dans le canton de Kobanê, au Rojava, d’autres au Kurdistan irakien, il a fait condamner à la prison la maire kurde de Siirt, au Kurdistan « turc », et mis sous tutelle la municipalité. Ainsi, on peut dire qu’Erdogan appelle les Kurdes à faire la « paix » mais leur fait la guerre sur tous les fronts.
Erdogan confisque une autre municipalité kurde
La co-maire de la municipalité de Siirt, Sofia Alağaş, a été condamnée mardi à 6 ,3 ans de prison par une Cour pénale de Diyarbakır. Suite à cette condamnation, le ministère de l’Intérieur a nommé un administrateur (kayyum) à la tête de la municipalité kurde de Siirt.
La police turque, qui a encerclé le bâtiment municipal, a informé les co-maires qu’un syndic avait été nommé. Alors que le drapeau turc était accroché sur le bâtiment municipal, les citoyens ont continué leur résistance devant le bâtiment.
Sabahat Erdoğan Sarıtaş, députée du DEM Parti pour Siirt, est arrivée devant le bâtiment municipal. Elle a protesté contre le coup d’État des administrateurs (Kayyim ou kayyum), déclarant qu’ils n’accepteraient pas l’attaque contre la volonté du peuple et qu’ils résisteraient à la décision.
Eşref Tekin, coprésident de l’organisation provinciale de Siirt du parti DEM, a déclaré : « Malgré les fraudes électorales et les irrégularités, le gouvernement n’a pas pu prendre la municipalité. Maintenant, il s’en empare. Ces gens sont allés aux urnes et ont élu leurs co-maires. Ces actions sont un coup politique. »
La police turque a tenté d’évacuer les citoyens et les membres du parti qui s’étaient rassemblés devant la municipalité. Lorsque les citoyens et les membres du parti ont protesté, ils ont été attaqués par la police. Au cours de l’attaque, Şernas Çelepkolu, coprésident du district central de Siirt du parti DEM, Muhammed Polat, administrateur de l’organisation provinciale de Siirt du Parti des régions démocratiques (DBP), et l’employé municipal Ferhat Toprak, ont été placés en garde à vue.
Après l’attaque, des manifestants ont organisé un sit-in dans la rue Doğan, devant la mairie. La foule a scandé des slogans tels que « Les administrateurs sont un coup d’État politique » et « Les administrateurs partiront, le peuple restera ».
Depuis les élections du 31 mars, les municipalités de Hakkari, Mardin, Batman, Dersim, Halfeti, Akdeniz, Muş et Siirt, toutes gouvernées par le parti DEM, ont été saisies.
Nous n’acceptons pas le coup d’État des administrateurs
Tuncer Bakırhan et Tülay Hatimoğulları, les coprésidents du Parti de l’égalité et de la démocratie des peuples (DEM), ont protesté contre le coup d’État en publiant des messages sur leurs comptes de réseaux sociaux.
Tuncer Bakırhan a déclaré : « Nous rejetons la nomination d’un administrateur à notre municipalité de Siirt. La volonté du peuple vaincra cette mentalité d’usurpation. Ouvrir des enquêtes et imposer des peines à nos co-maires sur la base de raisons inventées pour ouvrir la voie à l’illégalité des administrateurs est une fraude politique. La fraude politique ne peut pas coexister avec la paix et la démocratie. Ceux qui ne respectent pas la volonté du peuple font le plus grand mal à ce pays. Nommer des administrateurs aux municipalités et ignorer la volonté du peuple kurde est une habitude coloniale.
Essayer de gouverner le peuple kurde avec des méthodes coloniales au 21e siècle est un effort futile. Nous rejetons fermement cette mentalité qui s’empare des institutions du peuple par le biais du système judiciaire et de l’administration, car elle ne peut pas gagner aux urnes. La volonté du peuple de Siirt est suffisamment forte pour enterrer toutes les fraudes politiques, les complots et les saisies de l’histoire. Une fois de plus, nous invitons tout le monde à se ranger du côté de la démocratie. »
Tülay Hatimoğulları a déclaré : « Une fois de plus, le pouvoir judiciaire, sous le contrôle du gouvernement, a mené un coup d’État contre la volonté du peuple ! Suite à la condamnation de notre co-maire de Siirt, Sofia Alağaş, un administrateur a été nommé à notre municipalité de Siirt. Nous le disons une fois de plus ! La paix ne peut pas être obtenue par l’insistance sur les administrateurs mais par la démocratie, les droits et la justice. Nous n’acceptons pas cette saisie de la volonté, qui s’est produite pendant ces jours où nous essayions de nourrir l’espoir de la paix.
Nous n’avons pas fait marche arrière dans notre résistance au coup d’État et dans notre lutte pour une paix honorable, et nous ne le ferons pas. Nous appelons tous ceux dont le cœur bat pour la démocratie à s’opposer à la confiscation de la volonté et à défendre la volonté du peuple. » (ANF)