PARIS – Plus de 60 personnalités du monde politique, artistique, de la société civile, du droit et du monde universitaire en France ont écrit au Comité pour la prévention de la torture pour qu’elle envoie une délégation sur l’île prison d’Imrali, en Turquie, où est tenu en isolement total le chef historique de la guérilla kurde.
Une lettre a été envoyée au CPT avec les signatures de 61 personnalités, parmi lesquelles on trouve des sénateurs, des parlementaires, des universitaires, des avocats, des syndicalistes, des écrivains, des journalistes et des dirigeants de partis politiques.
Voici la lettre envoyée au CPT:
« Nous, personnalités politiques, syndicales, associatives et universitaires, désirons attirer votre attention sur et appelons le Comité Européen pour la Prévention de la Torture et des Peines ou Traitements Inhumains ou Dégradants (CPT) à agir immédiatement.
Depuis 36 mois, Abdullah Öcalan, reconnu par des millions de Kurdes comme leur représentant politique légitime, est détenu dans des conditions d’isolement extrême sur l’île prison d’Imrali par l’État turc. Ce confinement inhumain et illégal se traduit par une disparition de fait, M. Öcalan étant privé de tout contact avec le monde extérieur, y compris ses avocats et sa famille proche. Cette situation représente une forme évidente de torture.
M. Öcalan, âgé de 75 ans, est soumis à une torture psychologique continue par l’isolement depuis 25 ans. Cependant, depuis trois ans, aucune information concernant sa santé n’a été communiquée, provoquant une inquiétude légitime. À ce jour, nous ne pouvons même pas confirmer son lieu de détention, ce qui soulève des préoccupations graves concernant son état physique, un sujet hautement sensible pour les Kurdes qui le considèrent comme la voix de leur nation.
Pour ces raisons impérieuses, nous demandons au CPT de prendre des mesures immédiates. En tant que Comité, vous avez le droit légal de visiter tous les lieux de détention des États parties à la Convention, y compris la Turquie. Cela vous confère les pouvoirs et la capacité d’envoyer une équipe d’experts à Imrali, où le gouvernement turc est obligé de vous accorder un accès sans restriction pour visiter M. Öcalan et l’interviewer en privé, afin qu’il puisse communiquer avec vous en toute confiance et sans contrainte.
Nous souhaitons que le CPT agisse conformément à l’article 3 du Statut du Conseil de l’Europe, qui stipule que : « Tout membre du Conseil de l’Europe doit accepter les principes de la prééminence du droit et le principe selon lequel toute personne placée sous sa juridiction doit jouir des droits de l’homme et des libertés fondamentales. »
M. Öcalan, citoyen d’un État membre du Conseil de l’Europe, est privé de ses droits humains depuis deux décennies et demie, et depuis trois ans, de ses droits légaux fondamentaux de rencontrer ses avocats et de parler avec sa famille.
Tout ce que nous demandons, avec une sincérité totale, c’est que vous accomplissiez vos responsabilités en envoyant immédiatement une délégation à Imrali pour rencontrer M. Öcalan et vérifier son bien-être. Par la suite, nous apprécierions grandement si vous pouviez encourager la Turquie à permettre une visite de sa famille et de ses avocats, afin de se conformer pleinement aux obligations du Conseil de l’Europe et du CPT.
Cela contribuerait à résoudre une urgence en matière de droits humains et répondrait à l’inquiétude de millions de Kurdes, tout en renouvelant l’esprit de réconciliation nécessaire pour trouver une solution pacifique à la question kurde en Turquie.
Avec gratitude pour votre temps et dans l’espoir que vous compreniez cet appel comme un plaidoyer sincère et urgent. »