PARIS – Le six janvier dernier, des milliers de manifestants se sont rassemblés à Paris, demandant la levée du secret-défense qui empêche la justice de faire la lumière sur le dossier de trois militantes kurdes assassinées par un espion turc à Paris le 9 janvier 2013.
Lors du rassemblement, Hélène Bidard, membre de l’exécutif national du PCF et adjointe à la maire de Paris, est intervenue au nom du Parti communiste français. Elle a exhorté l’État français à laisser la justice faire son travail, en levant le secret défense qui entour l’affaire.
Voici le discours prononcé par Hélène Bidard sur la place de la République il y a près de 10 jours:
« Le 9 janvier 2013, trois militantes kurdes étaient assassinées à Paris : Sakine Cansiz, Fidan Dogan et Leyla Saylemez.
Ces femmes, ces trois militantes au parti des travailleurs du Kurdistan, représentant trois générations de révolutionnaires Kurdes, jouaient un rôle primordial dans le développement de la lutte de la libération des femmes en Turquie, mais aussi pour la libération du peuple Kurde.
Ces femmes, ont été victimes d’un attentat terroriste perpétré par les services de renseignement turcs en plein cœur de Paris. Depuis, la communauté Kurde n’a eu de cesse de réclamer justice, demandant sans relâche que toute la lumière soit faite sur ce triple crime, ce triple féminicide.
Parce que oui, il s’agit bien d’un triple féminicide, Ce sont bien des femmes qui ont été visées. Elles ont été assassinées parce que femmes, féministes, militantes pour l’émancipation universelle, et pour la paix.
Le 23 décembre 2022, à la veille des commémorations, trois autres militants Kurdes ont aussi été victimes d’un attentat en plein cœur de Paris : Mir Perwer et Abdurrahaman Kizil,et Evin Goyi, membres du Conseil démocratique Kurde de France.
Evin Goyi, était présidente du Mouvement des femmes Kurdes en France, et une véritable figure pour l’émancipation des Kurdes contre l’organisation djiadiste Daesh au Kurdistan syrien. Elle a joué un rôle central dans la participation des femmes à la révolution du Rojava. Elle a consacré sa vie à la lutte. Comme pour ses camarades 10 ans plus tôt, il s’agit là aussi d’un féminicide politique.
Depuis 2013, six militantes et militants kurdes ont donc été victimes d’actes terroristes, sur le territoire national.
Notre douleur reste vive. Nous ne les oublions pas. Nous saluons aujourd’hui leur mémoire et leur combat.
Notre colère et indignation demeurent intactes. Notre détermination à faire éclater la vérité en mémoire et en solidarité avec le peuple Kurde l’est tout autant.
Pour l’assassinat de 2013, depuis 11 longues années, l’instruction est entravée par le « secret défense ». Le PCF demande avec force sa levée pour que puisse, enfin, progresser l’enquête.
Paris en réaction à l’inaction de l’État Français, a apposé une plaque dans le 10ème arrondissement en 2017 en mémoire des trois militantes Kurdes, mais aussi en mémoire de leur lutte, au sein même de la capitale.
Pour l’assassinat de 2022, le caractère terroriste n’a pas été retenu jusqu’à présent, alors que le CDKF était délibérément visé. Le parquet anti-terroriste doit se saisir de l’affaire.
En préférant conserver ses relations diplomatiques avec Recep Tayyip Erdogan, plutôt que de mener bataille pour la justice et le droit, la France commet un déni de justice et entretient, l’impunité d’un crime politique, terroriste, et d’un quadruple féminicide.
Notre pays doit prendre ses responsabilités et mettre fin à cette impunité. Le PCF porte aujourd’hui, haut et fort cette exigence. La bataille pour la justice, pour le droit, implique que toute la lumière soit faite sur ces attentats, sur leurs instigateurs, et sur leurs ramifications internationales.
La dictature d’Erdogan mène une politique de répression et d’arrestations à l’encontre des droits du peuple turc, du peuple kurde et des peuples de Turquie, ainsi que des dirigeants progressistes politiques et syndicaux turcs et kurdes. Solidarité avec les forces progressistes et démocratiques Kurdes et Turques qui mènent un combat courageux contre le régime d’Erdogan, et qui subissent de plein fouet les arrestations massives et les assassinats commandités par la dictature d’Erdogan.
La France doit exiger la libération des prisonniers politiques Kurdes et Turcs détenus dans les prisons d’Erdogan. Nous appelons à la levée de l’isolement carcéral et à la libération d’Abdullah Ocalan et de ses co-détenus, dont ni leurs proches, ni leurs avocats n’ont de nouvelle depuis trois ans. Leur libération serait étape importante vers une résolution politique de la question Kurde.
Nous dénonçons la passivité de l’Union Européenne et à sa politique du deux poids, deux mesures. Nous appelons à une action du Conseil de l’Europe pour que les droits démocratiques et les droits humains soient appliqués en Turquie.
La politique d’Erdogan est une menace pour la sécurité régionale. Son armée, la 2e de l’OTAN, mène une guerre sale et sans merci au Kurdistan, faisant fi de toutes les lois internationales. Elle encourage la politique des dirigeants de l’Azerbaidjan qui menace le peuple arménien dans son existence. Elle provoque une dégradation de la situation à Chypre, dont l’armée turque occupe depuis un demi-siècle la moitié nord. L’Union Européenne s’illustre par son inaction et se déshonore.
Le peuple Kurde mène depuis un siècle un combat pour la reconnaissance de ses droits nationaux bafoués par les grandes puissances. La France doit protéger les Kurdes de France qui subissent des menaces en raison de leur engagement pour les droits humains et l’émancipation.
Aujourd’hui, comme hier, le PCF assure aux Kurdes tout son soutien dans sa lutte. Les communistes seront présents, tant qu’il le faudra, à vos côtés, dans vos revendications, dans votre combat pour la justice, la paix, et la liberté, contre l’obscurantisme, pour la réalisation des droits nationaux et culturels du peuple Kurde et que pour la France agisse en conséquence.
Nous exigeons en ce sens la liberté et la justice pour le peuple Kurde. Nous exigeons la vérité et la justice pour les femmes Kurdes assassinées. « Jin Jiyan Azadî ». Femme, vie, liberté. »