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Manifestation alévie à Strasbourg contre les imams dans les écoles turques

STRASBOURG – Le lundi 11 septembre, des associations alévies kurdes et turques d’Europe ont organisé une manifestation devant le Parlement européen contre l’islamisation des écoles turques. Comme le disent les locuteurs alévis, le projet ÇEDES introduit des imams dans les écoles sous couvert d’une « éducation aux valeurs », transformant ainsi les écoles en mosquées. Sarah Glynn examine les implications de l’agenda islamiste croissant dans l’éducation dans un pays qui prétend être sectaire, mais refuse pourtant de reconnaître la religion alévie, la deuxième plus grande religion de Turquie après l’islam sunnite.

Des représentants alévis de toute la diaspora européenne se sont rassemblés lundi devant le Parlement européen pour souligner leur campagne contre l’islamisation des écoles turques. Neuf pays de la Confédération européenne des associations alévies étaient représentés et les intervenants ont lu des déclarations en anglais, français, allemand et turc protestant contre la manière dont la Turquie « établit une hégémonie religieuse sectaire afin d’élever des générations islamistes ».

L’influence formatrice des années d’enfance est reconnue depuis longtemps. (…) Toute scolarité vise à façonner les jeunes esprits, et lorsque les écoles sont contrôlées par un gouvernement autoritaire et sectaire, les enfants se voient inculquer des préjugés sectaires. (…), le gouvernement turc veut utiliser ses écoles pour créer une génération gouvernée par son propre système de croyance religieuse. Dans le cas de la Turquie, il s’agit de l’islam sunnite, et le gouvernement utilise ses pouvoirs autoritaires pour imposer sa religion à chaque enfant, quelles que soient ses origines familiales ou ses convictions personnelles.

Un véhicule important pour y parvenir est le projet ÇEDES (Çevreme Duyarlıyım Değerlerime Sahip Çıkıyorum), qui signifie « Je suis sensible à mon environnement, je protège mes valeurs » – un nom qui dit le contraire de ce que fait réellement le projet. Parmi les dirigeants des manifestations contre ÇEDES figurent les communautés alévies de Turquie et la diaspora. Les Alévis ne veulent pas voir leurs enfants saturés d’islam sunnite et se retourner contre leur forme de culte traditionnelle alévie. Ils plaident pour que la Turquie respecte ses propres lois et la Charte européenne des droits de l’homme et cesse de violer les règles sur l’égalité et la liberté de religion.

Comme le disent les locuteurs alévis, ÇEDES introduit des imams dans les écoles sous couvert d’« éducation aux valeurs » et transforme les écoles en mosquées. L’éducation sociale et morale des enfants est effectivement confiée aux autorités religieuses et à des personnes qui n’ont pas reçu de formation d’éducateurs. Leur influence s’étend également aux centres de jeunesse. ÇEDES a d’abord été déployé à Izmir – probablement un défi délibéré au Parti républicain du peuple (CHP), l’opposition laïque, qui domine dans la ville – et sera étendu à toute la Turquie. Au début, en 2021, ce programme était réservé aux enfants plus âgés, mais cette année, il a été étendu aux enfants du primaire (…).

Après la lecture des déclarations, j’ai parlé avec Gülay Dalkiliç, secrétaire général de la Fédération alévie britannique, qui était venue à Strasbourg avec huit autres membres du groupe britannique, et je lui ai demandé qui étaient concernés par les règles et quels autres groupes protestaient. Elle a expliqué que ÇEDES a eu un impact sur tous les enfants des écoles publiques et qu’il n’y a aucune possibilité de s’en retirer. Certains enfants chrétiens et juifs fréquentent leurs propres écoles confessionnelles, ce qui n’est autorisé que parce qu’en Turquie, les membres d’autres religions sont reconnus comme des minorités bénéficiant de droits minoritaires. Cependant, la Turquie refuse de reconnaître l’alévisme comme religion. Elle m’a dit que leurs manifestations, qui appellent à maintenir la religion hors des écoles, attirent également des laïcs et des athées de différents horizons. Bien que le CHP ait ses propres relations difficiles avec les Alévis, ces derniers sont actifs dans la revendication du maintien de la laïcité

Alors que les manifestants faisaient leurs déclarations, les députés européens et leurs assistants arrivaient pour la session du Parlement européen de cette semaine. Ce serait bien de pouvoir dire que les idées débattues à l’extérieur ont été introduites dans le bâtiment du Parlement, mais ce type d’engagement est toujours difficile, et lundi n’a pas fait exception. Le rapport de la Commission européenne sur la Turquie, qui sera débattu mardi, indique cependant que le Parlement européen « est préoccupé par le poids croissant de l’agenda islamiste dans le processus législatif et dans de nombreuses sphères de l’administration publique, notamment par l’extension de l’influence de la Direction des affaires religieuses (Diyanet) dans le système éducatif ».

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Medya News