« Personne ne doit qualifier ce que nous vivons de « séisme ». Il s’agit du plus grand ‘meurtre de masse’ de l’histoire récente » écrit Mustafa Mamay, journaliste kurde réfugié en Suisse, au sujet du tremblement de terre du 6 février qui a frappé le nord de la Syrie et le sud-est de la Turquie (région à majorité kurde), tuant plusieurs dizaines de milliers de personnes et détruisant des régions entières.
Depuis le premier jour du séisme, c’est le chaos qui règne dans les zones sinistrées de Turquie où les populations sont délaissées par l’État où chaque communauté (turque, kurde, arabe…) s’organise et tentent de panser ses plaies grâce à la mobilisation communautaire. Par exemple, les Kurdes/alévis discriminés depuis des siècles sont mobilisés dans tout le Kurdistan mais aussi en diaspora pour récolter des dons pour les rescapés et se sont rendus en masse auprès des rescapés pour les secourir, organiser l’aide, redistribuer les dons récoltés…
Dans la ville d’Hatay, ancienne province syrienne annexée à la Turquie au cours du XIXe siècle, détruite par le séisme, la population arabe-alévie quitte en masse la ville, déclarant que l’État n’a jamais été présent à leur chevet, ni hier, ni aujourd’hui. Le même sort guète également les régions kurdes, déjà saignées à blanc par des décennies de massacres et de déportations.
Des gens affamés qui se servent des commerces sont capturés, tabassés et filmés par des gangs ou des policiers turcs qui diffusent les images sur les réseaux sociaux où des nombreuses personnes écrivent des commentaires haineux, appelant parfois au meurtre des coupables souvent accusés d’être des réfugiés syriens très nombreux à Hatay et ses environs. En parallèle à ces lynchages de civils, des gangs armés attaquent et pillent les convois d’aide destinés au sinistrés alors qu’Erdogan a décrété l’état d’urgence dans la région. Tout cela ressemble à des prémisses d’une guerre civile que beaucoup craignent depuis des années en Turquie où Erdogan a formé des milices armées.
A Idlib et Afrin, dans le nord de la Syrie, la situation est encore plus dramatique car la région est sous l’occupation turco-jihadiste et coupée du monde. Les gangs islamistes pro-Turquie ne se préoccupent que des colons arabes, laissent mourir les rescapés kurdes d’Afrin, Jinderes et bloquent l’aide humanitaire envoyée par l’administration du Rojava et taxent l’aide envoyée par le Kurdistan irakien aux rescapés d’Afrin. Le régime syrien bloque également l’aide envoyé par le Rojava aux sinistrés de la région d’Alep.
Ni la Turquie, ni la Syrie ne pourront sortir indemnes de cette tragédie et ce sont les peuples innocents qui payeront le prix le plus élevé.