Un énième ouvrage rappelant que les efforts de la Turquie voulant assimiler les Kurdes sont voués à l’échec, à cause notamment de l’attachement très fort des Kurdes à leurs racines ethniques.
« La récurrence des soulèvements, des révoltes et des mobilisations nationalistes dans les régions kurdes de Turquie depuis la proclamation de la République de Turquie peut donner à penser que c’est l’entêtement des leaders nationalistes kurdes qui empêche une intégration plus poussée des provinces et des populations kurdes au reste du pays. Il n’en est rien. La marginalité politique, économique et culturelle dans laquelle sont maintenus les Kurdes résulte bien davantage de l’échec des politiques d’assimilation mises en œuvre par les gouvernements successifs. Les dynamiques identitaires, économiques et politiques dans lesquelles sont prises les populations et les provinces kurdes donnent en outre à voir à quel point les politiques étatiques ont nourri le nationalisme kurde.
Le sort des populations kurdes de Turquie, ainsi que les dynamiques conflictuelles observables entre l’État et les groupes armés kurdistes résultent d’abord d’un échec du projet assimilationniste de la République de Turquie. Alors qu’une autonomie avait été promise aux tribus kurdes acceptant de prendre part à la guerre d’indépendance (1918-1922) aux côtés des nationalistes turcs, aucune mention n’en fut faite dans la constitution de 1924. Bien au contraire, dès la proclamation de la constitution, les kémalistes intensifient la politique de turquisation du pays, qui vise à faire disparaître toutes les identités susceptibles de faire concurrence au projet national porté par Kemal Ataturk. »
Par Benjamin Gourisse